La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne fut un mouvement qui mit en branle les masses par millions en Chine populaire. Initialement considérée comme une opération momentanée de rectification, la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne s’avéra rapidement être un moment prolongé d’affirmation idéologique ayant des ramifications dans tous les domaines.
Initialement, la Chine populaire était dans une position de retrait. Elle était particulièrement arriérée et elle profita grandement de l’accord réalisé avec l’URSS dans la foulée de la révolution de 1949. La ligne de Khrouchtchev, consistant à rejeter Staline, fut rejetée, mais initialement sous la forme d’un esprit de compromis entre plusieurs factions au sein du Parti Communiste de Chine.
En effet, toute une faction, ayant à sa tête la président de la République Populaire de Chine Liu Shaoqi, convergeait avec le développement en URSS. Cela correspondait à une lecture de la situation considérant, à l’instar de Deng Xiaoping, que la Chine populaire ne pouvait pas se développer sans appui extérieur.
Mao Zedong développa alors le Grand Bond en avant de 1958 à 1962 et la GRCP la prolonge directement, l’affrontement étant cependant désormais ouvert. Le ministre de la défense de la République Populaire de Chine, Peng Dehuai, s’était opposé dès le départ au Grand Bond en Avant et avait été démis en 1959.
La GRCP part de cet épisode de la lutte des classes.
En 1961 fut en effet jouée une pièce de théâtre écrite par le vice-maire de Pékin Wou Han. La Destitution de Hai Rui décrit comment un fonctionnaire, ayant le rôle d’inspecteur, est condamné par l’empereur pour avoir fait exécuter un fils de noble ayant tué un paysan et enlevé sa fille.
C’était en réalité une dénonciation camouflée de Mao Zedong et une défense de Peng Dehuai. Lorsque la pièce fut de nouveau jouée en 1965, alors que Peng Dehuai cherchait à revenir, elle obtint cette fois une réponse par Yao Wenyuan dans le quotidien de Shanghai Wenhui Bao le 10 novembre 1965.
Cependant, en janvier 1965 avait été fondé un « groupe de la révolution culturelle du Comité central du Parti Communiste de Chine ».
Or, ce groupe censura Yao Wenyuan ainsi que les autres partisans de Mao Zedong. Il finit par lâcher du lest, avec notamment la reparution de l’article de Yao Wenyuan dans le Quotidien du Peuple, ainsi qu’une autocritique de Wou Han (le 7 décembre 1965 et le 12 janvier 1966), mais tout en cherchant à gommer et à exiger de gommer toute dimension politique pour limiter cela à une question historique, une analyse culturelle, etc.
Yao Wenyuan publia un autre article : « À propos du village des Trois (le caractère réactionnaire des Propos du soir à Yenchan et de la Chronique du village des Trois) ». Il fut publié, encore une fois, par le quotidien de Shanghai Wenhui Bao, le 10 mai 1966, et cible très précisément ceux qu’il accuse former une « ligne noir ». On y lit que :
« Tous ceux qui s’opposent à la pensée de Mao Zedong, tous ceux qui entravent la marche en avant de la révolution socialiste seront sans exception dénoncés, critiqués et renversés, si célèbres et haut placés qu’ils soient, quel que soit celui qui les dirige et les soutient, et si nombreux que soient ceux qui les flattent. »
Cependant, il fut publié en même temps par le Quotidien de l’Armée Populaire de Libération. C’était là un signe politique extrêmement fort. De fait, l’éditorial du Quotidien de l’Armée Populaire de Libération du 18 avril 1966 annonçait déjà le combat, son titre étant « Levons haut le grand drapeau rouge de la pensée de Mao Zedong ; participons activement à la grande révolution culturelle socialiste ».
Il y est parlé de « lutte de classes aiguë » se livrant sur « le front culturel » ; quatre œuvres de Mao Zedong sont définis comme « le sommet le plus élevé de la conception marxiste-léniniste du monde et de la théorie marxiste-léniniste de la littérature et de l’art » : La démocratie nouvelle, Interventions aux causeries sur la littérature et l’art à Yenan, De la juste solution des contradictions au sein du peuple, ainsi que le Discours prononcé à la conférence nationale sur le travail de propagande du Parti communiste chinois.
On y trouve également, en conclusion, une mise en perspective :
« Nous devons lever encore plus haut le grand drapeau rouge de la pensée de Mao Zedong et, sous la direction du Comité central du Parti, du président Mao et de la Commission militaire du Comité central du Parti, participer activement à la révolution culturelle socialiste, la mener inflexiblement jusqu’au bout, nous efforcer de créer une nouvelle littérature et un nouvel art socialistes dignes de notre grand pays, de notre grand Parti, de notre grand peuple et de notre grande armée. »
Le conflit était posé et sa modalité était la « révolution culturelle socialiste ».
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