Devrimci Halk Kurtulus Partisi / Cephesi (Parti / Front Révolutionnaire de Libération du Peuple)
Principes pour la lutte politique et la lutte armée contre l’impérialisme
Dans tout pays néo-colonial la lutte politique de masse, la lutte armée et la lutte anti-impérialiste doivent se conformer aux principes les plus importants que nous énumérons ci-dessous.
1. Le renversement de l’oligarchie dirigeante et l’établissement du pouvoir révolutionnaire du peuple sont une affaire de volonté.
Nous devons déterminer les objectifs et les revendications pour la prise du pouvoir et les fixer dans un programme.
Quels que soient les moyens dont ils disposent, une organisation de libération ou un parti qui n’ont pas toujours en vue la prise du pouvoir, n’atteindront pas cet objectif. Un tel parti est d’ores et déjà condamné à être soumis à des forces et des facteurs extérieurs, et à subir immanquablement les influences et les pressions de ce que l’on appelle les « alternatives » de l’impérialisme.
Aujourd’hui, la plupart des organisations de libération se trouvent menacées par un danger très important: celui de ne pas croire dans la réussite de la révolution.
Il est aussi dangereux pour elles de se retrouver séparées de leurs forces militaires et de leur base de masse, de perdre leur courage et leur foi révolutionnaires, de se retirer dans leur « coquille nationale » et d’abandonner un combat de longue durée en faveur de la libération nationale et de classe pour se rabattre sur des exigences plus limitées.
Toutes les défaites sont temporaires pour des peuples qui luttent pour leur libération.
Mais des défaites qui s’accompagnent du reniement des principes du socialisme, du renoncement aux objectifs de la libération armée ou de l’abandon de l’organisation, sont des échecs dont le prix est extrêmement élevé.
2. Armer le peuple, telle est la garantie principale de notre libération, de notre liberté et de notre avenir dans les pays en voie de développement.
Ce n’est pas uniquement parce que notre peuple doit résister aux attaques des forces fascistes, mais c’est surtout une nécessité stratégique primordiale si l’on veut que se matérialise la révolution.
Notre époque est toujours une époque de luttes de libération populaire.
Ce n’est pas la perte de prestige du socialisme qui y a changé quoi que ce soit, ni non plus les conquêtes temporaires de l’impérialisme qui en ont résulté.
Ce sont les conditions que nous rencontrons dans notre pays qui déterminent les phases spécifiques de notre guerre populaire.
Le développement de notre guerre ne sera pas celui d’une guerre du peuple classique, elle ne descendra pas des montagnes pour gagner les villes, mais elle se matérialisera simultanément dans les montagnes et dans les villes, dans la perspective d’une lutte révolutionnaire unie.
3. Il est nécessaire que le Parti soit nanti d’une direction
Des organisations de libérations non dirigées par un Parti sont peut-être capables de s’emparer du pouvoir, mais elles sont incapables de concrétiser les transformations d’une révolution sociale.
Un Parti qui assume ses tâches et remplit ses devoirs peut être le cerveau pour les organisations de libération.
Le Parti, c’est la direction idéologique du marxisme-léninisme.
C’est aussi, et en même temps, l’organe de commandement qui exprime l’unité de la direction politique et militaire…
Détesté à cause de leurs structures bureaucratiques et de leur lenteur, les partis communistes traditionnels ont acquis une mauvaise renommée. Le simple nom de « Parti », tout au long des années, a laissé des traces négatives dans l’esprit des masses laborieuses de nombreux pays.
Programmes, statuts, règles et règlements écrits, tout cela n’a aucune signification en soi.
Ce qui constitue l’essence d’un Parti, c’est avant tout une certaine tradition, les valeurs démontrés au combat, le courage politique, une audace de tous les instants et une fidélité inconditionnelle au marxisme-léninisme, sans oublier les équipes de cadres expérimentés.
« Nos corps peuvent être blessés, mais nous garderons la tête sur les épaules. »
Ce que cette phrase veut dire, c’est que notre Parti doit en toutes circonstances disposer des talents et de la résolution nécessaires à la conduite de la guerre de libération.
Notre époque est une époque où l’on attaque violemment les grands dirigeants révolutionnaires.
Depuis l’abandon du socialisme en URSS, la bourgeoisie les dénigre de plus belle.
Ces années sont celles où l’on tente de transformer le socialisme en démocratie bourgeoise, la révolution en réformisme, l’internationalisme en nationalisme.
Ces années sont également celles qui voient la naissance d’une pléthore d’organisations révolutionnaires de façade qui s’agitent autour d’exigences aussi abstraites que «la paix», au lieu de lutter les armes à la main pour les droits et la liberté des peuples.
4. Notre perspective, dans la lutte politique de masse, est d’inviter le peuple à rejoindre le front antifasciste et anti-impérialiste, à développer ce front dans l’ensemble du pays et à le consolider.
Ce front est la force qui combat et qui entraîne le peuple à combattre. Le Parti – Front Révolutionnaire de Libération du Peuple (DHKP/C, Devrimci Halk Kurtulus Partisi – Cephesi) ce sont les muscles et les poings qui frappent l’ennemi.
La masse, c’est le corps de notre combat. Le Front englobe la lutte de masse armée et la lutte politique de masse, non armée.
Il est impensable de faire le travail politique de masse et la propagande en séparant le front d’un côté, et la lutte armée de l’autre.
Un front doit disposer d’une aile non armée en plus de son aile armée, mais c’est l’aile armée qui doit constituer la base du front.
Outre certaines différences particulières, la logique de la lutte révolutionnaire légale ou illégale est la même.
La véritable opposition se situe entre la légitimité du peuple et des forces révolutionnaires, d’une part, et l’illégitimité du système, de l’autre.
En fait, c’est même là que réside la principale opposition.
Nous comptons épuiser toutes les ressources du domaine de la légalité.
Mais nous choisirons ce que nous, nous estimons légitime comme étalon, et nous ne nous enfermons pas dans la lutte démocratique légale.
Nous devrions nous fier bien davantage au pouvoir et à la créativité des masses.
La lutte légale consiste à opposer notre légitimité à l’ennemi; dans un même temps, c’est une lutte pour un territoire que nous avons conquis pied à pied, en rendant coup pour coup.
Toute organisation légale est le produit d’une lutte illégale.
Il faut impérativement que l’ennemi accepte notre légitimité.
En dépit du danger d’être tués ou sévèrement réprimés, nous mettons régulièrement en circulation des publications légales, nous conservons notre syndicat et nos organisations de masse, nous enterrons nos martyrs dans les montagnes et dans les villes entourés par des milliers de personnes massées derrière les drapeaux du Parti – Front, nous forçons les portes des commissariats et des centres de détention, nous envahissons les bidonvilles et nous obligeons les ministres et les chefs de la police à venir jusqu’au pied des barricades, et à satisfaire les exigences du peuple.
Et si nous nous retrouvons en prison, le fait d’être prisonniers ne nous empêche pas de garder notre identité d’individus libres, même si pour y arriver, il nous faut mourir.
Un autre grand danger qui menace une organisation révolutionnaire, ce n’est pas être en mesure d’enseigner la lutte de masse avec une âme révolutionnaire, de ne pas encourager suffisamment le mouvement révolutionnaire du peuple alors qu’il renferme tant d’énergie, et en fin de compte de le regarder courir à sa ruine…
Des exemples, ce sont la Palestine et le Kurdistan.
En réalité, l’Intifada et le Serhildanen ont été des phénomènes spontanés, ils se sont développés d’eux-mêmes et n’ont pas eu le soutien des mouvements nationalistes.
On les a seulement utilisés comme atouts contre l’ennemi, en sachant très bien que leurs jours étaient comptés. On s’est contenté d’assister à leur fin. Quoi de plus normal qu’avec une telle mentalité on ne soit pas capable d’établir des mouvements de masse militants durables! Aujourd’hui, dans le Moyen-Orient, le radicalisme et le militantisme de masse ont été récupérés par le radicalisme islamique.
5. Dans les pays néo-coloniaux, la crise est particulièrement grave. Le tout premier devoir des marxistes-léninistes est de prendre la direction d’un front démocratique qui unira toutes les forces contre l’impérialisme et ses collaborateurs.
De nos jours, la guerre dans notre pays n’est plus un combat d’avant-garde, mais elle se transforme en guerre populaire.
Chaque classe populaire est extrêmement mécontente du système.
Les contradictions au niveau des classes et au niveau national sont très différentes et elles s’entremêlent en Anatolie, une région qui vient tout entière d’être transformée en prison pour le peuple.
L’impérialisme et l’oligarchie ont lancé des politiques qui tiennent compte de ces contradictions.
Il faut dire qu’ils ont eu le temps d’acquérir une expérience contre-révolutionnaire considérable.
Ils appliquent une politique qui dressent les gens les uns contre les autres et qui sème la zizanie entre eux.
A cette fin, ils utilisent les religions et les différences nationales. S’ils n’y arrivent pas de cette façon, ils tentent de séparer les groupes et de les isoler.
Le fascisme a essayé d’exacerber le chauvinisme et l’hostilité des Turcs contre la prise de concience nationale croissante des Kurdes et contre le mouvement national kurde.
Il s’est aussi employé à accroître l’hostilité entre Sunnites et Alévites.
En agissant de la sorte, il a amené la question nationale kurde et le réveil alévite à s’éliminer mutuellement.
Le fascisme a donc effectivement tenté de décrocher ces mouvements de la lutte révolutionnaire et de les isoler.
D’autre part, d’importantes actions rassemblant des travailleurs, des fonctionnaires et des étudiants se déroulent régulièrement dans les quartiers populeux.
C’est notre Parti qui coordonne et dirige ces actions.
En mars 1995, des soulèvements se sont produits dans les immenses faubourgs d’Istanbul, à Gazi, Okmeydane, Nurtepe et Ümraniye. Toutes ces émeutes ont ébranlé le pays.
Des soulèvements similaires ont éclaté en Anatolie.
L’inconvénient majeur de ces mouvements de masse, c’est qu’ils apparaissent séparément, qu’ils ne se produisent pas en même temps et qu’il est donc difficile d’en faire des actions unifiées.
Dans le même temps que nous livrons notre guerre dans les montagnes et les villes.
Il est de notre devoir aujourd’hui de rassembler tous ces mouvements de masse et actions de résistance dans une même action populaire unie et de les incorporer au Front révolutionnaire.
C’est en fonction de cela que nous avons mis la création de comités et de réunions populaires dans les quartiers ouvriers, les assemblées et comités de travailleurs, les réunions de fonctionnaires à l’ordre du jour.
Aujourd’hui, ces projets sont discutés au sein des masses.
Aujourd’hui, on rencontre très fréquemment de tels exemples de comités populaires dans les régions ouvrières, et spécialement dans les zones où l’on a déclenché des luttes militantes populaires.
6. L’impérialisme et ses collaborateurs de l’oligarchie en place sont les principaux ennemis de notre révolution et de nos peuples. Considérer l’impérialisme et les gouvernements fascistes des pays néo-coloniaux comme des phénomènes séparés, c’est se mettre des oeillères.
Si l’on ne s’en tient pas à un anti-impérialisme constant et intransigeant, la révolution et la libération ne sont pas possibles.
L’impérialisme, c’est plus que l’exploitation et le pillage à l’échelle mondiale, et en termes généraux, c’est plus que la barbarie armée.
L’impérialisme, c’est aussi et avant tout le pouvoir qui maintient en place les structures économiques, politiques et sociales des pays néo-coloniaux.
Dans les pays en voie de développement, c’est encore et toujours l’impérialisme que l’on retrouve derrière l’exploitation, l’injustice et la barbarie fasciste.
Il est la principale source de tous ces maux. Afin d’éliminer toute dynamique tendant à quelque progrès sur un plan national, l’impérialisme prend soin de mettre en place des structures étatiques fascistes à tous les niveaux, tout en introduisant une économie capitaliste particulièrement néfaste et basée sur la dépendance.
La domination de l’impérialisme se développe davantage sur un plan interne que sur un plan externe.
Si l’on ne détruit pas la structure politique et sociale, constituée par une poignée de collaborateurs, si l’on ne renverse pas l’Etat fasciste, c’est-à-dire si l’on n’élimine pas les bases économiques et sociaux de l’impérialisme, l’indépendance et la libération ne seront jamais possibles.
7. Les lignes de conduite de l’impérialisme dans les pays en voie de développement, l’élimination des mouvements populaires de libération, le camouflage des contradictions, tout cela crée un statu quo en faveur de l’mpérialisme et lui permet de reprendre le contrôle de régions où les dynamiques révolutionnaires sont concentrées.
Nous traversons une phase au cours de laquelle la démagogie des mouvements en faveur de la « paix dans le monde » et celle qui cautionne les scélératesses de l’impérialisme finissent par se mélanger.
Les plus gros obstacles susceptibles d’empêcher les impérialistes d’atteindre les objectifs de leur Pax Americana et de forcer les peuples à renoncer à la lutte, ce sont les mouvements populaires de libération anti-impérialiste au Moyen-Orient, en Asie, en Amérique latine et en Afrique.
Cela n’a rien d’une coïncidence si le massacre de Cana (au Liban) a été déclenché dans la foulée immédiate du sommet sur le terrorisme qui s’est tenu en Egypte.
L’impérialisme, représenté par les scélérats sionistes, se livre à des attaques massives destinées à saper la résistance palestinienne et toutes les dynamiques anti-impérialistes dans la région.
Les agressions contre la Corée, le Liban, Cuba, les massacres qui ont lieu en Turquie et au Kurdistan, ne sont rien d’autre que la continuation de cette politique.
8. La politique récente de l’impérialisme à l’égard des mouvements de libération tend à détruire ces mouvements en recourant à l’intervention armée. Dans un même temps, elle vise à désarmer ces mouvements en tentant de les convaincre d’abandonner le socialisme, la révolution et leurs prétentions à l’indépendance.
Au cours de la dernière décennie, cette politique a été appliquée avec succès dans certaines régions, où les organisations révolutionnaires avaient peu de connexions avec le marxisme-léninisme, où l’on suivait une politique d’avantage temporaires, où sévissait la crainte de la défaite et de l’isolement, où les gens ne croyaient pas en leurs droits ou encore où régnait une trop grande confiance en la victoire finale.
Ce sont tout particulièrement les mouvements nationalistes et petits-bourgeois, qui font une fixation sur le pouvoir en place au point que cela influence leur ligne de conduite.
Presque immanquablement, de telles organisations finissent par fonder des partis légalistes, par accepter des compromis ou même par abandonner pour de bon la lutte armée.
Passer de la guérilla au marchandage de bazar, c’est un jeu dangereux.
Ceux qui s’essaient à ce genre de tactique n’ont pas la moindre chance de vaincre.
La paix et la liberté réelles ne seront possibles qu’après que nous aurons balayé toute trace d’exploitation, de dépendance et de dictature oligarchique. Seul le pouvoir révolutionnaire du peuple est en mesure d’atteindre cet objectif.
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