La Crise dans laquelle s’engage toujours plus le capitalisme de notre époque déboussole inévitablement les consciences dans des sociétés aussi décadentes et pourrissantes que celles de la France de notre époque, déformée par plusieurs décennies de la lessiveuse du 24h/24 de la société de consommation.
D’un côté, les gens ont vécu avec plus d’aisance matérielle, davantage d’accès à la culture, des possibilités plus grandes de développer leur existence. La vie est devenue plus facile. De l’autre, cela s’est fait aux dépens du tiers-monde, et par un travail toujours plus harassant sur le plan nerveux, à travers un asséchement de la sensibilité.
Le panorama est alors forcément accablant lorsque la machine s’enraye comme elle l’a fait à partir de 2020. Le masque du capitalisme à visage humain tombe. La violence se généralise dans les rapports sociaux, et la société civile vacille, l’irrationnel triomphe sous mille et une formes toujours recommencées, alimentant les ressentiments, les paranoïas, zombifiant des secteurs entiers des masses, qui dérivent d’une hystérie hallucinatoire à une autre ou s’enferment dans la fatalité.
Et encore cela n’est-il que le début. À mesure que l’économie de guerre qui est en train d’être mise en place imposera la dictature des monopoles et de l’État bourgeois, à mesure que se multiplieront les feux dans les pays de la zone de tempêtes qu’est le tiers-monde, la France sera polarisée par la superpuissance impérialiste américaine et jetée avec elle dans les flammes de sa grande confrontation historique avec l’expansionnisme de la Chine sociale-fasciste.
Alors, au fur et à mesure que les exigences insoutenables de la fuite en avant impérialiste imposeront la mobilisation croissante des masses dans un sens militaire, une nasse d’acier s’abattra sur la France. C’est inévitable, sauf si une rupture révolutionnaire brise cette fatalité.
Ce qui se joue à l’arrière-plan, c’est la question de la rupture et de la confrontation.
Quelle rupture, quelle confrontation ?
Rupture et confrontation avec l’État bourgeois en France, rupture et confrontation avec l’Union européenne et l’Otan, rupture et confrontation avec les agents de la superpuissance américaine, rupture et confrontation avec la lessiveuse du 24h/24 du capitalisme, avec son libéralisme-libertaire décadent et tous ses « discours » atomisant et aliénant les masses.
Rupture et confrontation avec l’économie de guerre et toutes les compromissions sociales-souverainistes ou syndicales pensant pouvoir geler ou ralentir significativement la fuite en avant du capitalisme français ou alors tirer son épingle du jeu en magouillant quelques accords en mettant à genoux les masses de notre pays et en mettant les mains de la classe ouvrière au service de la bourgeoisie impérialiste pour assouplir la laisse que cette dernière lui mettra au cou.
Rupture et confrontation totale donc. Et cela en commençant par rejeter le narratif que l’État bourgeois et ses agents dans les institutions tentent de construire.
Nous avons depuis le début eu raison sur la guerre en Ukraine, et depuis le début de l’année 2024, les choses s’accélèrent, s’empirent. Les milliards pleuvent pour la guerre, les dettes s’accumulent, le souffre, le nitrate de potassium et les matières fissibles remplissent des milliers et de milliers d’obus et de missiles, alors que des machines, ou bien toujours plus sophistiquées ou bien d’une simplicité perverse, sont mises au point.
Détournée, l’intelligence humaine est déroutée de sa fin naturelle, symbiotique et pacifique, pour servir les appétits d’un monde aliéné et inhumain, ayant perdu toute capacité de fraternité et d’harmonie.
Le début de l’année 2024 est ainsi bien un tournant historique, avec le gouvernement de l’État bourgeois en France qui a clairement et ouvertement choisi d’assumer la fuite en avant.
S’étant dressée contre la Turquie en Méditerranée et dans le Caucase, appuyant la puissance américaine dans le Golfe persique, au Moyen-Orient et dans l’Indo-Pacifique, la France s’est positionnée très vite dans le cadre du conflit en Ukraine en satellisant la Roumanie. Le retrait relatif de la puissance américaine sur le terrain opérationnel pousse maintenant en avant la France et le Royaume-Uni, décidés à mettre en coupe réglée l’Europe orientale et de s’y constituer une zone d’influence.
De fait, l’Ukraine est balkanisée et ne peut plus que se faire avaler par le syndicat des appétits impérialistes des États capitalistes d’Europe de l’Ouest qu’est l’Union européenne. Et au-delà même de l’Europe orientale satellisée et de l’Ukraine toujours plus avalée par les puissances occidentales, c’est la Russie que l’impérialisme occidental entend mettre en flamme et dépecer.
Dans ce processus infernal, il faut identifier, dénoncer et s’opposer de toutes les forces et par tous les moyens possibles aux éléments suivants du narratif de la fuite en avant impérialiste dans laquelle la bourgeoisie dirigeant notre pays nous entraîne :
- L’européisme et la promotion d’une prétendue nécessité « géopolitique » de construire une « puissance européenne » et d’unifier les États bourgeois dans un syndicat commun pour les renforcer les uns avec les autres afin de faire bloc.
- La restructuration économique pour alimenter l’économie de guerre française et l’appareil militaro-industriel français.
- La promotion du militarisme sous toutes ses formes, notamment auprès de la jeunesse (SNU, uniforme, etc…), et de l’obéissance aux institutions de l’État bourgeois, internes ou externes.
- La promotion sous toutes ses formes des États-Unis d’Amérique comme puissance alliée/concurrente, y compris dans la culture, dans le style et les modes de vie.
- La promotion du complexe militaro-industriel français, dans toutes ses dimensions, et particulièrement dans ce qui relève de sa filière nucléaire. Il ne faut toutefois négliger aucun autre aspect, et ils sont nombreux (télécommunication, balistique, aéronavale, aérospatiale, marine, etc.), et bien prendre en compte qu’il n’y a pas de distinction civil/militaire tenable dans le ciblage des activités de ce complexe.
- La promotion de la souveraineté de la France comme moyen d’appuyer la légitimité de la défense de ses intérêts expansionnistes, que ce soit dans le cadre de l’Union européenne, ou de toute autre instance internationale émanant des États bourgeois, des zones internationales sous son contrôle (collectivités dites d’Outre-mer, ZEE, bases militaires).
À ce narratif de l’État bourgeois, il faut aussi prendre en compte la nécessité idéologique de se confronter aux discours des organes politiques de la bourgeoisie en France, diffusés notamment par ses médias et par ses partis politiques institutionnels.
Nous tenons ici à marquer les jalons établissant la Ligne Rouge que nous entendons tracer au service des masses de notre pays et de la perspective de la rupture salutaire que nous appelons :
- Sans rejeter la nécessité stratégique de constituer un Front Populaire rassemblant sous l’hégémonie effective du Parti révolutionnaire, les forces politiques, syndicales et civiles de la Gauche portée à la Démocratie Populaire, il y a lieu de dénoncer et de rejeter les discours des forces politiques générées au sein de la société française capitaliste sous l’hégémonie de la bourgeoisie.
- La Droite nationaliste ou souverainiste est bien sûr sous ce rapport un ennemi mortel dont la seule perspective doit être l’écrasement total et complet. Dès lors, ainsi que nous l’avons sans cesse martelé, toute posture, stratégie ou narratif populiste sont pour toute force de Gauche une dangereuse et funeste aventure relevant de la trahison pure et simple.
- De même, il ne peut être toléré aucun espace à tout narratif de la Gauche post-moderne, libérale-libertaire ou sociale-libertaire, américanisée dans son lexique et son idéologie, relativisant au besoin toutes les pires horreurs réactionnaires en se donnant des airs de « radicalité » ultra-démocratique, et épouvantable base de la Ligne Noire préparant par la compromission avec telle ou telle faction de la bourgeoisie, telle ou telle institution de l’État bourgeois le détour ou l’échec de la Révolution.
En ce premier mai 2024, alors que le capitalisme amène à nouveau le monde au bord de l’abîme, 110 ans après la Grande Guerre Impérialiste de 1914, nous affirmons donc la nécessité de relire l’avant-garde de cette époque, Lénine, Clara Zetkin, Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg, et de méditer cette leçon si juste de William Pieck, écrite en 1935 alors que la confrontation impérialiste allait reprendre son atroce bain de sang :
« Rien ne saurait être plus dangereux que l’illusion qu’on peut ajourner la lutte contre la guerre impérialiste jusqu’au moment où les impérialistes déclaraient leur guerre criminelle. »
Organisez-vous, entrez dans la rupture et dans l’Histoire.
Qu’apparaisse un printemps historique qui voit s’épanouir de nos racines solidement plantées dans l’héritage de la Gauche révolutionnaire, des centaines, des milliers de fleurs s’élançant à l’assaut du ciel dans les chants colorés d’une nouvelle Humanité qui s’annonce !