En mai 1941, le Parti Communiste Français tente de mettre en place un mouvement de libération nationale ; son appel-programme s’intitule Pour la formation d’un Front national de l’indépendance de la France.
Le texte est extrêmement mauvais pour deux raisons : la première, flagrante, est qu’il s’agit d’une longue réflexion, difficile à appréhender dans la lecture, en particulier en comparaison avec l’appel du général de Gaulle depuis Londres, en 1940.
Ensuite, il est dit que le Front national soutiendra « tout gouvernement français, toute organisation et tous hommes dont les efforts seront orientés dans le sens d’une lutte véritable contre l’oppression nationale subie par la France et contre les traîtres au service de l’envahisseur ».
Or, un véritable Front national est censé porter un tel gouvernement, unifiant toutes les forces de résistance.
C’était bien pourtant, en théorie, le but, puisque sont mis en place des structures nombreuses en ce sens : le Front National des avocats, le Front National des médecins, le Front National des commerçants, le Front National des paysans, les Fronts Nationaux d’usines, etc.
Mais on reconnaît ici dans l’appel l’opportunisme de la ligne de Maurice Thorez, avec sa perpétuelle quête de « légitimité ». Le résultat sera, comme on le sait, l’intégration très rapide du Parti Communiste Français dans le dispositif gaulliste, à la grande joie de Maurice Thorez.
« Pour la formation d’un Front national de lutte pour l’indépendance de la France
Le Parti communiste français s’adresse à tous ceux qui pensent français et veulent agir en Français
Français ! Françaises ! M. Darlan qui a récolté ses étoiles d’amiral dans les bureaux de la rue Royale, sous la protection des politiciens les plus pourris de la IIIe République, a été reçu par Hitler, le 11 mai dernier à Berchtesgaden.
Cet amiral félon que l’opinion publique désigne sous l’appellation de « Laval en uniforme » s’est bien gardé de mettre le peuple de France au courant des détails de ce qui fut maquignonné au cours de cette entrevue.
L’amiral politicien sait bien que les Français le suspectent et le méprisent, c’est pourquoi il a jugé utile de bredouiller au micro un discours hypocrite d’où il ressort que le Führer ne lui aurait pas demandé la marine française, mais ce que Darlan n’a pas dit c’est que les marins français et les aviateurs français ne seraient, en aucun cas, envoyés à la mort pour le compte du IIIe Reich.
Darlan, le profiteur de la défaite, est même allé jusqu’à louanger la « magnanimité » de l’envahisseur, osant dire sans honte que si Hitler l’avait voulu la France pouvait être rayée de la carte du monde, comme s’il était au pouvoir de tyrans de passage de faire disparaître des nations constituées au cours de longs siècles d’histoire.
Ainsi le vice-président du conseil vichyssois, ce militaire sans honneur pour qui le patriotisme n’a jamais comporté que des profits, se montre sous son véritable jour de naufrageur de la patrie.
Mais cet amiral traître n’agit pas seul, il est couvert par le maréchal Pétain qui est prêt lui aussi à faire couler le sang français pour Hitler, car c’est au nom du maréchal que l’espion de Brinon déclara le 9 mai : « La France a toujours une marine de guerre importante qui est prête à entrer en action. »
C’est ainsi qu’au lieu de laisser notre pays en dehors de la guerre de rapine que se livrent les impérialismes de l’axe et leurs rivaux anglo-saxons, les gouvernants de Vichy, obéissant aux ordres des impérialistes allemands, s’engagent à nouveau sur les chemins de la guerre sans songer un seul instant à ce que leur politique criminelle coûtera de ruines et de deuils au peuple de France.
Déjà les aérodromes de Syrie sont livrés par Pétain et Darlan à la Luftwaffe de Goering qui mène en Irak la guerre du pétrole contre l’Angleterre, et en mettant à la disposition du IIIe Reich les possessions africaines de la France ainsi que la marine de guerre française, l’équipe Pétain-Darlan fait prendre ouvertement à notre malheureux pays figure de nation belligérante, or on sait ce que cela va représenter pour nos populations.
La France étant ainsi jetée à nouveau dans la guerre, nos villes, nos usines, nos campagnes vont être livrées aux bombardements de l’aviation et le peuple paiera, une fois de plus, de son sang et de ses larmes, la criminelle politique de gouvernants indignes et traîtres à la Nation.
Sans doute, les Bazaine [allusion au maréchale François Achille Bazaine qui tenta lors de la guerre franco-allemande de 1870 de jouer sur plusieurs tableaux et fut accusé d’avoir fait perdre la guerre à la France] 1941, les maîtres provisoires de la France, font-ils étalage du rapatriement projeté de 100.000 prisonniers de guerre (soit 1 sur 20) mais le peuple de France ne se contente pas deçà ; il veut qu’on lui rendre tousses prisonniers.
Sans doute aussi les gouvernants traîtres de Vichy font-ils grand bruit autour des prétendues mesures d’assouplissement de la ligne de démarcation, mais le peuple de France ne se contente pas de ça : ce qu’il veut, c’est la suppression de la ligne de démarcation.
Pétain et Darlan, militaires déconsidérés symbolisant à eux deux la faiblesse et la corruption, voudraient que les Français crient d’enthousiastes « merci » au Führer allemand, mais ils n’y parviendront point. Un peuple opprimé ne lèche jamais les bottes de l’oppresseur. Seuls les dirigeants corrompus peuvent se dégrader à ce point.
Les gouvernants de Vichy veulent lier le destin de notre pays au destin des maîtres du IIIe Reich, mais le peuple de France ne marche pas, car il n’oublie pas et il n’oubliera pas ce que ces messieurs ont fait.
Les impérialistes hitlériens qui tiennent l’Europe en esclavage et qui depuis un an font peser l’oppression la plus odieuse sur la terre de France savent bien que les capitulards et les traîtres de Vichy, dont ils se servent, ne représentent en rien la pensée et les sentiments de notre peuple.
Mais il ne suffit pas de maudire les trahisons des dirigeants d’aujourd’hui faisant suite aux trahisons d’hier ; il est indispensable que la Nation française se dresse frémissante face à ses oppresseurs pour dire ce qu’elle pense, pour dire ce qu’elle veut.
Depuis un an notre pays est occupé, humilié, pillé, soumis à une odieuse dictature et la population française qui étouffe sous le poids de l’oppression nationale aspire à sa libération.
Les matières premières dont disposait l’industrie française ont été prises par l’envahisseur qui s’en sert pour continuer sa guerre.
Les récoltes de notre terroir, le bétail de chez nous, toutes les richesses de notre sol et de notre sous-sol sont accaparés par l’envahisseur qui plonge notre pays dans la disette et sous la menace de la famine.
Les travailleurs français transformés en esclaves sont envoyés de force en Allemagne ou dans les régions bombardées du littoral pour être enrôlés dans la machine de guerre des nazis.
Deux millions de nos compatriotes sont prisonniers de guerre et odieusement exploités par les impérialistes allemands. Les hitlériens ont libéré le général fasciste Bridoux pour en faire le collaborateur du traître de Brinon ; ils ont libéré des journalistes vendus de « Je Suis Partout » et de la presse doriotiste ainsi que d’autres agents de la trahison.
Par contre, les Français honnêtes, les fils du peuple sont maintenus, loin des leurs, dans les camps de prisonniers et le gouvernement de la trahison ne veut pas qu’ils reviennent en bloc car il a peur d’eux.
Notre pays est dépecé ; la ligne de démarcation constitue, en pleine France, une véritable frontière, tandis que les départements du Nord et du Nord-Est situés dans la « zone interdite » sont coupés du reste du pays.
Le peuple de France sait combien sont dérisoires les fameuses décisions d’assouplissement de cette odieuse ligne de démarcation, expression maudite de l’oppression nationale subie par la France.
Depuis un an, notre pays, saigné à blanc, paie 400 millions par jour à l’envahisseur qui, avec ce scandaleux tribut de guerre, a vidé notre France des produits indispensables à nos populations, ce qui constitue la forme moderne du pillage.
Sous la botte de l’envahisseur qui fait directement la loi en zone occupée et indirectement en zone « libre », la liberté d’opinion est supprimée ; seuls ont le droit d’écrire et de parler ceux qui chantent les louanges de l’oppresseur, et les prisons et les camps de concentration sont peuplés des meilleurs fils de France.
Pendant ce temps, le magnat du Comité des forges, de Wendel, vend à l’envahisseur, pour la somme de 63 milliards, ses intérêts dans les industries lorraines tandis que le banquier et industriel Lehideux fait des affaires avec les banquiers et industriels allemands et italiens. C’est ça, c’est cet odieux régime que les traîtres au service de l’envahisseur baptisent « ordre nouveau ».
Ces misérables qui insultent bassement le peuple français et se félicitent sans vergogne de la situation terrible imposée à la France se font ainsi les agents de la monstrueuse entreprise de domination impérialiste des maîtres du IIIe Reich.
La lutte contre l’oppression nationale. Ainsi l’impérialisme allemand fait subir à la France un régime d’oppression bien pire que le régime de Versailles imposé au peuple allemand au lendemain de la guerre de 1914-1918.
Le traité de Versailles plongea, en effet, le peuple allemand dans une misère atroce pour le plus grand profit de ploutocrates à la de Wendel qui sont aujourd’hui les bénéficiaires de la défaite française comme ils furent hier les bénéficiaires de la défaite de l’Allemagne.
Le Parti communiste français revendique l’honneur d’avoir lutté à la tête du peuple français contre l’oppression nationale imposée au peuple allemand.
A cette époque, Hitler s’en prenait dans son livre « Mein Kampf » non pas aux capitalistes français qu’il comble maintenant d’avantages ; non, il s’en prenait à la France, à son peuple qu’il insulte et contre qui il prononça des paroles de haine et de mépris gravées dans les mémoires.
Victime, aujourd’hui, d’une odieuse oppression allemande, le peuple de France ne prononcera pas des paroles de haine à l’égard de la Nation allemande qu’il ne confond pas avec ses maîtres du moment.
Et, de même que des Français se levèrent pour protester et agir contre le traité de Versailles imposé au peuple allemand, de même, nous en avons la certitude, se lèveront des Allemands pour protester et agir contre un nouveau Versailles imposé au peuple français par les dirigeants nazis et fascistes qui ont commencé par opprimer férocement leurs peuples pour pouvoir mieux opprimer les autres peuples. Mais l’envahisseur ne se contente pas de tout cela.
Il veut entraîner la France dans sa guerre ; il veut se servir de la marine de guerre française, des ports français, des colonies françaises ce qui attirerait sur nos cités la rage des bombardements anglais qui, déjà, ravagent les côtes de l’Atlantique et de la Manche parce qu’elles sont utilisées pour la guerre.
Les traîtres à la solde de l’envahisseur parlent de paix, mais leur « paix » ne signifie rien d’autre qu’une tentative criminelle de lancer à nouveau notre pays dans la guerre en le maintenant sous la domination des impérialistes allemands.
C’est pourquoi la lutte pour la paix ne peut se séparer de la lutte contre l’oppression nationale, pour l’indépendance de notre pays.
Le peuple de France ne veut pas la paix du cimetière et de la prison, la paix de la servitude et de l’oppression il veut la paix dans la liberté et l’indépendance du pays et le premier objectif que nous devons, nous Français, nous assigner dans cette lutte pour la paix est le suivant : Il ne faut pas permettre que le peuple de France, les ressources de notre pays et notre territoire soient utilisés dans la guerre entre l’Allemagne et l’Angleterre.
Non, il ne faut pas que nos ouvriers et nos usines soient utilisés pour la guerre, alors que nos populations manquent de tout.
Non, il ne faut pas que nos matières premières, nos ressources alimentaires et autres soient utilisées pour la guerre, par nos oppresseurs impérialistes.
Non, il ne faut pas que notre territoire serve de champ de bataille aux impérialistes dont la cause et les intérêts ne sont pas et ne peuvent pas être ceux du peuple français.
Voilà ce que pensent, ce que désirent des millions de Français, mais ils se demandent si cela peut sortir du domaine des aspirations pour entrer dans celui des réalités.
Oui, cela se peut, mais à deux conditions :
1° Il faut réaliser l’unité de toute la nation à l’exception des traîtres et des capitulards faisant la besogne ou le jeu de l’envahisseur ; il faut constituer un large front national de lutte pour l’indépendance de la France.
2° Ce Front national de l’indépendance, pour pouvoir remplir sa mission libératrice, doit être constitué avec, comme force fondamentale, la classe ouvrière de France, avec le Parti communiste à la tête.
Indiscutablement, la lutte pour la libération nationale de la France exige, afin d’être menée à bien, la formation d’un gouvernement du peuple qui avec une main de fer et s’appuyant sur les masses populaires serait capable d’épurer la France de tous les éléments traîtres et capitulards en même temps qu’il serait capable de créer les conditions indispensables au relèvement de la France dans la liberté et l’indépendance.
La France a besoin pour se sauver d’un gouvernement populaire. L’intérêt supérieur de la France exige la formation d’un tel gouvernement populaire qui serait vraiment l’expression de la Nation unie dans une même volonté de libération contre l’envahisseur et contre les traîtres qui sont à son service.
La lutte pour la libération nationale qui constitue la grande tâche du peuple de France, en ces heures sombres où notre pays est cruellement opprimé, ne peut point se séparer de la lutte pour la défense des intérêts immédiats des masses laborieuses de la ville et des campagnes.
C’est pourquoi l’union de la nation française peut et doit se faire sur un programme d’action correspondant aux besoins pressants de nos populations, à leur profond désir de justice et de liberté ainsi qu ’aux intérêts réels de la France.
L’unité de la Nation peut et doit se faire.
Le Front national de l’indépendance de la France peut et doit se faire en vue de mener la lutte qui permettra d’exiger avec force et d’obtenir :
1. Pour libérer la France et les Français.
a) La suppression de la ligne de démarcation et l’évacuation du territoire.
b) Le retour de tous nos prisonniers de guerre honteusement détenus, un an après la signature de l’armistice.
c) La suppression de l’indemnité de guerre de 400 millions de francs par jour payée par la France à l’envahisseur depuis un an.
2. Pour assurer la subsistance de la population.
a) La mise à la disposition du peuple de France de toutes les ressources du pays et la mise en activité des usines françaises pour des fabrications correspondant aux besoins de la population de notre pays.
b) L’organisation du ravitaillement sous le contrôle des comités populaires composés d’ouvriers, de paysans, de petits commerçants, de ménagères, afin de donner à chacun ce qui lui revient, afin de supprimer le favoritisme, afin de mettre un terme aux sinistres exploits d’intendants incapables et de hauts fonctionnaires prévaricateurs qui, de connivence avec les autorités d’occupation, organisent le « Marché Noir », affament le peuple et pillent le pays.
c) L’achat de blé à l’Union Soviétique.
3. Pour défendre les travailleurs contre leurs exploiteurs.
a) L’augmentation générale des salaires, traitements et pensions à un taux correspondant au coût de la vie.
Il faut mettre un terme à la politique antifrançaise des envahisseurs et de leurs valets qui imposent des salaires de famine, pour détruire, à force de privations, les populations ouvrières de France.
b) Le rétablissement des libertés syndicales pour tous les travailleurs de l’industrie, du commerce, de l’agriculture et pour les fonctionnaires. Liberté de presse, droit de réunion, élection des délégués-ouvriers, congés payés, application de la semaine de 40 heures, le nombre d’heures de travail ne pouvant être éventuellement augmenté dans telle ou telle branche de la production que s’il n’y a pas de chômeurs parmi les ouvriers de cette branche.
4. Pour la défense des paysans de France.
a) La fixation des prix des produits agricoles à la production pour assurer au paysan une juste rémunération de son travail. Le rétablissement de la liberté de vente directe des produits agricoles pour les paysans. Le paiement des dommages de guerre et des sommes encore dues au titre des réquisitions. La création d’une caisse nationale d’assurances contre les calamités agricoles et la mortalité du bétail. La distribution aux paysans sinistrés et victimes des réquisitions de bétail, de machines agricoles, de carburant et d’engrais. Le bénéfice pour tous les paysans des allocations familiales et de la prime de la mère au foyer.
b) L’annulation des dettes contractées par les paysans, fermiers, métayers et ouvriers agricoles à l’égard des gros propriétaires fonciers, banquiers et usuriers. L’application des lois sociales à la campagne (repos hebdomadaire, limitation du temps de travail, droit à l’allocation de chômage, conventions collectives, etc.). L’augmentation des salaires des ouvriers agricoles.
5. Pour assurer un foyer à toutes les familles et du pain aux vieux.
a) La réquisition des hôtels particuliers et des grands immeubles en vue d’y loger les familles privées d’un logement convenable. Construction de logements sains, aérés, spacieux dans les villes et les villages. Destruction des taudis, foyers de tuberculose et de cancer.
b) Le paiement d’une retraite suffisante à tous les vieux (ouvriers, paysans, artisans, commerçants, professions libérales) à partir de 60 ans.
6. Pour la jeunesse de France.
a) La suppression des camps et « chantiers » de la Jeunesse établis en France sous l’inspiration de l’envahisseur et dont le but tend à plonger notre Jeunesse dans l’ignorance et dans la soumission à un esclavage dégradant.
b) La création d’un vaste réseau d’écoles d’apprentissage pour jeunes gens et jeunes filles. La construction de stades, terrains de sport, piscines, crèches, colonies enfantines, etc.
7. Pour les victimes et sinistrés de la guerre.
a) L’octroi aux mutilés, malades, veuves, ascendants et orphelins de la guerre 1939-1940 des droits à pension dont bénéficient les victimes de la guerre 1914-1918. Rajustement des pensions d’invalidité et des allocations de veuves, ascendants et orphelins au coût de la vie. Augmentation de l’allocation versée aux femmes de prisonniers de guerre.
b) Le paiement des dommages correspondant aux pertes subies aux petits et moyens propriétaires,sinistrés de guerre et aux locataires d’immeubles détruits ou endommagés par la guerre.
8. Pour dégrever les pauvres et faire payer les riches.
a) L’exonération des impôts pour les chômeurs, pour les familles disposant d’un faible revenu, pour les petits commerçants et annulation des dettes contractées à l’égard de banquiers et d’usuriers.
b) La confiscation des 100 milliards de bénéfices de guerre volés à la Nation. Confiscation des 63 milliards que de Wendel a reçu de l’envahisseur. Établissement d’un cadastre des fortunes en vue de procéder à un prélèvement sur les grosses fortunes. Nationalisation sans indemnité des banques, compagnies d’assurances, mines, chemins de fer et grandes sociétés capitalistes
9. Pour que la France soit la France et non une colonie nazie.
a) Le rétablissement des libertés démocratiques (droits du suffrage universel, liberté de réunion, d’association, de presse). L’amnistie générale pour les milliers d’hommes et de femmes du peuple jetés dans les prisons et les camps de concentration de France et d’Afrique par ordre de l’envahisseur et de ses valets. Le châtiment de tous les traîtres au service de l’envahisseur. Le rétablissement dans leurs fonctions des municipalités et destitution des délégations spéciales et municipalités nommées par le gouvernement de Vichy. L’abrogation de toutes les mesures racistes appliquées en France par ordre de l’envahisseur et des gouvernants à ses ordres.
b) Le rétablissement dans leurs fonctions des fonctionnaires révoqués, déplacés ou déclassés pour délit d’opinion. L’abrogation de toutes les mesures portant atteinte à la liberté de conscience, aux principes de la laïcité et aux droits du peuple.
Le Parti communiste, le seul Parti qui, face à l’envahisseur, a le courage de poursuivre son combat pour la libération de la France, pense que, sur ce programme de lutte pour l’indépendance de la patrie, l’unité de la Nation française peut et doit se réaliser. Nous tendons une main fraternelle à tous les Français de bonne volonté.
Le Parti Communiste Français, qui paie de persécutions féroces sa clairvoyance et son courage politiques, ce Parti qui représente l’amitié de la France avec l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques de Lénine et Staline, avec le grand et puissant pays du Socialisme où règnent la liberté, l’égalité et la fraternité des peuples, entend tout mettre en œuvre pour Unir les Français dans la lutte commune pour la libération nationale de la France et contre les traîtres et les capitulards au service de l’envahisseur. Les Darlan, Déat, Laval, Deloncle, Doriot, Dumoulin, Scapini et consorts se sont classés en tête des traîtres qui livrent notre pays aux oppresseurs du IIIe Reich.
Ces hommes flétris et méprisés aujourd’hui, seront châtiés demain par tout un peuple jaloux de son indépendance, par tout un peuple digne et fier qui ne pardonnera jamais aux agents de la trahison, aux valets de l’oppresseur. La domination des tyrans s’effondre toujours devant la résistance des peuples.
C’est ce que nous enseigne l’histoire, et les impérialistes hitlériens qui étendent leur domination insolente et brutale sur la plupart des pays de l’Europe, apprendront demain, à leurs dépens, que la roche tarpéienne est près du Capitole, comme d’autres impérialistes apprendront aussi à leurs dépens ce qu’il en coûte de vouloir maintenir sous l’esclavage colonial des peuples qui aspirent à la liberté.
Le Parti communiste français convaincu que la France recouvrera demain son indépendance grâce à l’union de tout son peuple, lance un vibrant appel à tous ceux qui pensent français et veulent agir en Français ; il tend une main fraternelle à tous les Français quels qu’ils soient, qui ne voyant que les malheurs et l’intérêt du pays veulent s’unir pour mettre fin à l’oppression nationale qui rend irrespirable l’air de notre France que nous aimons.
Le Parti communiste est qualifié pour prendre la tête du rassemblement de tous les Français sous le drapeau de l’indépendance du pays et, ce faisant, il est fidèle à sa politique de toujours.
Avant la guerre, le Parti communiste a combattu la politique pro-hitlérienne suivie, par haine du peuple et de l’Union soviétique, par les capitalistes franco-britanniques qui se firent les complices de l’assassinat de la République espagnole et de la destruction de la Tchécoslovaquie.
Dès le début de la guerre, le Parti communiste combattit pour une paix honorable, juste, durable et exclusive de toute hégémonie ; cette paix que demandaient les députés communistes était possible et pouvait être réalisée avec la participation de l’U.R.S.S., ce qui aurait épargné bien des malheurs à la France.
Mais pour avoir fait preuve ainsi de courage et de clairvoyance politiques, les députés communistes ont été jetés dans les prisons et les camps de concentration.
Depuis la guerre, le Parti communiste a combattu les gouvernants comme Daladier et Reynaud qui concentrèrent leurs efforts, non pas contre Hitler, mais contre la classe ouvrière et contre l’U.R.S.S.
Aussitôt après l’armistice, le Parti communiste poursuivant sa lutte malgré les persécutions, a souligné devant le pays que la défaite était le résultat de la trahison des oligarchies capitalistes.
Et tandis que tout le monde se taisait devant l’envahisseur, tandis que les gouvernants de Vichy s’inclinaient soumis devant les maîtres du IIIe Reich qui annexaient l’Alsace-Lorraine sans la moindre consultation populaire, le Parti communiste revendiquait pour la France le droit à l’indépendance et pour le peuple alsacien-lorrain le droit à disposer librement de son sort.
Dans son programme qu’il a publié clandestinement sous le titre « Pour le salut du peuple de France », le Parti communiste en préconisant la formation d’un « gouvernement du peuple, expression de la volonté nationale » indique parmi les buts de politique extérieure à atteindre « la libération du territoire national et des prisonniers de guerre ».
« La conclusion d’un pacte d’amitié et d’un traité commercial avec l’URSS ». « La poursuite résolue d’une politique de paix destinée à tenir la France hors du conflit. »
L’indépendance et la paix, voilà ce que voulait hier et ce que veut aujourd’hui, pour la France, le Parti communiste français.
Et maintenant que notre pays se trouve placé devant le double danger de devenir une sorte de colonie nazie et d’être entraîné à nouveau dans la guerre impérialiste, les communistes, les plus courageux et les meilleurs fils de France, qui, par dizaines de milliers, ont payé de leur liberté leur défense des intérêts supérieurs de la Nation, appellent tous les Français de bonne volonté à l’union, à la lutte commune.
Le Parti communiste ne veut écarter personne, si ce n’est les capitulards et les traîtres, de l’unité de la nation, du Front national de l’indépendance de la France ; il lance un pressant appel aux hommes et aux femmes qui quelles que soient leurs convictions ou leurs croyances, veulent, selon leurs possibilités, prendre part à la lutte pour la libération de la France.
C’est dans la masse du peuple que résident les forces de libération nationale du pays et plus le Front national de lutte pour l’indépendance de la France sera vaste, puissant, plus il soulèvera de sympathies agissantes parmi les peuples de tous les pays, y compris dans les rangs du peuple allemand.
A ce peuple, nous devons faire comprendre qu’un peuple qui en opprime un autre ne peut pas être libre ; nous devons lui faire comprendre que nous, Français, qui n’avons pas oublié le mot d’ordre de la Grande Révolution : « Guerre aux tyrans et paix aux peuples », nous ne voulons pas être les esclaves du « nouvel ordre européen », cette formule ne servant qu’à recouvrir le monstrueux plan d’asservissement de l’Europe poursuivi par les chefs nazis.
Certains Français et certaines Françaises qui souffrent de voir notre pays opprimé par l’envahisseur placent à tort leurs espérances dans le mouvement de Gaulle.
A ces compatriotes, nous disons que ce n’est pas derrière un tel mouvement d’inspiration réactionnaire et colonialiste, à l’image de l’impérialisme britannique, que peut se réaliser l’unité de la Nation française pour la libération nationale.
Français et Françaises doivent s’unir entre eux, en toute indépendance, et constituer, face à l’envahisseur, face aux traîtres à sa solde, le front national de lutte contre l’oppression nationale.
Ainsi le peuple de France peut et doit donner à tous les peuples opprimés l’exemple de la lutte pour l’indépendance, ce qui affaiblira d’autant les forces d’oppression qui pèsent sur nous.
Voilà ce que propose le Parti communiste à tous les Français, à toutes les Françaises de bonne volonté sans écarter aucun concours, sans jeter la moindre exclusive, étant bien entendu que les traîtres au service de l’envahisseur s’excluent d’eux-mêmes de la collectivité nationale.
Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est, avant tout, éviter que la France demeure écrasée, humiliée, mutilée, soumise à l’impérialisme oppresseur et, pour cela, tous les Français dignes de ce nom doivent être rassemblés pour lutter en commun contre l’oppression nationale.
Guidé par le souci exclusif de réaliser l’unité de la Nation pour la cause, sacrée entre toutes, de l’indépendance nationale, le Parti communiste mettant au-dessus de tout l’intérêt du pays déclare solennellement qu’en vue d’aboutir à la création d’un large Front de libération nationale, il est prêt à soutenir tout gouvernement français, toute organisation et tous hommes dont les efforts seront orientés dans le sens d’une lutte véritable contre l’oppression nationale subie par la France et contre les traîtres au service de l’envahisseur.
Français, Françaises de toutes conditions, de toutes opinions, de toutes croyances, répondez « présent » à l’appel que vous lance le Parti Communiste Français !
Unissez-vous dans chaque ville et dans chaque village pour que la France reste la France, pour qu’elle puisse vivre libre et indépendante, délivrée du joug de l’oppression nationale qui pèse sur elle.
Vive le Front national de lutte pour l’indépendance de la France !
Vive la France libre et indépendante !
15 Mai 1941
Le Parti communiste français (S.F.l.C.) »
=> Retour au dossier
Le Parti Communiste Français
de la lutte armée à l’acceptation