Quelle est la ligne des Francs-tireurs et partisans, organisation désormais parallèle au Front national ? Elle se retrouve bien dans les mots d’ordre « Unissez-vous, refusez de servir le fascisme », « A chacun son boche », « S’unir, s’armer, combattre ».
En ce sens, les Francs-tireurs et partisans ne sont pas sur la ligne de de Gaulle, qui le 23 octobre 1941 affirme encore par exemple que :
« La guerre des Français doit être conduite par ceux qui en ont la charge… Actuellement, la consigne que je donne pour le territoire occupé, c’est de ne pas y tuer d’Allemands. »
Quant aux groupes trotskistes, ils réfutent la résistance armée face aux nazis. Le Parti Communiste Français est seul en première ligne.

On chercherait malheureusement en vain une stratégie de révolution démocratique : le poids de la ligne opportuniste de droite est immense. Façonné dans le syndicalisme révolutionnaire, adapté sur le mode du Parti syndicaliste avec Maurice Thorez, le Parti Communiste Français se veut le « meilleur élève », et ce en permanence.

Il faut donc chercher agressivement les affrontements : « Il faut tenir tête à la police, reconquérir la rue », comme le formule L’Humanité du 1er mai 1942. Pour ce faire, chaque instance du Parti Communiste Français doit fournir 10 % de ses membres aux FTP ; c’est très peu, mais suffisamment justement pour disposer d’un levier qu’on peut qualifier de propagandiste armé.
On lit dans la revue des FTP, France d’abord, qui a comme exergue Chasser l’envahisseur ! :
« Que chaque cri se fasse balle. La lutte armée doit devenir le devoir de toute la Résistance.
Chaque ennemi sera ainsi visé. Car combien sont-ils donc, et combien sommes-nous, si nous sommes un peuple allié de ses alliés ?
La victoire ne sera obtenue que par la destruction de l’armée hitlérienne dont la puissance initiale a été forgée, avant la guerre, à l’abri des divers ‘attentismes’ de la non-intervention et de Munich.
De ces données découle une stratégie commune à tous les peuples unis dans la volonté d’en finir le plus tôt possible avec l’hitlérisme.
Cependant, si les Russes restent seuls à détruire la puissante armée nazie, les Français devront supporter un autre hiver de guerre, au cours duquel Hitler pourra réaliser au moins ce qui fut le premier article de son programme insensé de domination du monde : détruire la France, berceau de la liberté.
Donc, aucun Français de France n’a intérêt à laisser durer une guerre atroce, alors qu’il est possible de l’abréger.
Hitler a en France 250.000 hommes pour faire face au second front.
Les forces d’occupation sont si réduites que Hitler les double de policiers, gendarmes, légionnaires et autres mercenaires que Pétain et Laval transforment en soldats boches pour aider à occuper, piller, à saigner la France.
Mais les Français en état de se battre sont dix fois plus nombreux que l’ennemi.
Un boche isolé est un prisonnier. L’ennemi n’occupe militairement le terrain que là où ses unités peuvent agir en tant qu’unités. Et tous les transports, voies de communication, transports publics, ne sont assurés que par des mains de Français.
En dehors d’une force d’occupation réduite, il ne reste qu’une occupation politique exercée par des traîtres.
Dans ce rapport des forces, la terreur nazie n’est opérante que pour ceux qui l’acceptent ou bien l’encouragent en exagérant sa puissance pour mieux masquer leur lâcheté.
Attendre, faire la guerre avec la peau des Russes, partir en Allemagne pour travailler pour l’ennemi, laisser guillotiner les Français pour crime de patriotisme, c’est reculer l’heure du second front en désertant le front de France !
Le front de France ? Il est partout où il y a un boche, une de ses armes ou un wagon, un camion, de l’essence ou du blé destiné aux boches, un terrain d’aviation, un dépôt d’armes, un chien de Laval.
Nos armes ? Elles sont partout où un peu de courage donne le loisir d’en prendre.
Chaque ennemi désarmé doit servir à armer un chef de groupe, autour duquel s’armeront d’autres patriotes d’armes improvisées.
Pour la forme de guerre qui nous incombe, contre les forces d’occupation, le nombre doit suppléer à la qualité du matériel. Et nous sommes dix contre un…
Comme vous le recommande le Front National, dans vos usines, vos quartiers, groupez-vous en Comités populaires de la France combattante pour coordonner toutes les formes d’action politique et économique contre l’ennemi ; arrêtez toute production pour les boches et empêchez tout départ pour l’Allemagne. En même temps, organisez et menez l’action armée.
« La Libération nationale, a dit le général de Gaulle, ne peut se séparer de l’insurrection nationale… ».
L’insurrection nationale ne saurait être le produit d’un miracle, une génération spontanée à l’heure H.
Il n’existe pas d’autres moyens d’organiser une armée de patriotes pour la Libération que le combat quotidien, qui forge la discipline et les chefs, procure les armes et permet d’organiser en agissant, d’agir en organisant.
Laisser croire le contraire serait préparer à notre peuple des désillusions que nous voulons épargner. Chacun à son poste, chacun à son arme.
Que sans attendre, tout ce qui appartient à l’armée d’occupation soit cerné de haine, attaqué, frappé, exterminé.
Et que, sur le Front National de la Libération, retentisse le cri de guerre contre tous ceux qui veulent détruire notre patrie : TOUS DEBOUT ET CHACUN SON BOCHE. »
Le sous-titre de France d’abord va refléter l’échec du projet initial et le passage du Parti Communiste Français dans le giron gaulliste.
On passe ainsi d’abord de « organe d’information sur le mouvement des patriotes français pour la libération du territoire » au sous-titre « organe d’information, de liaison et de combat des détachements de FTP qui forment sur le sol de la patrie l’avant-garde armée de la France combattante ».

Cela change ensuite de nouveau, pour devenir « organe d’information, de liaison et de combat des détachements de Francs-Tireurs et Partisans adhérant aux Forces Françaises de l’Intérieur (FFI), puis enfin organe d’information, de liaison et de combat des unités de Francs-Tireurs et Partisans, membres de l’Armée régulière des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) ».

Initialement, il s’agissait de représenter toutes les forces, puis les FTP comme meilleur élève, après cela comme élève reconnaissant, enfin comme élève reconnu.
Il est bien connu ici que ce sont les FTP-MOI de la région parisienne qui ont été les plus actifs en termes d’action de choc. L’affiche rouge de la propagande nazie dénonçant le « Groupe Manouchian-Boczov-Rayman » est très connue.

Voici leur composition, avec entre parenthèses le nombre d’actions armées pour les six premiers mois de 1943 :
– le « détachement roumain », avec une trentaine de roumains sous la direction d’Edmond Hirsch (mort en camp en 1943) qui est un ancien combattant des Brigades internationales (18) ;
– le « détachement juif », avec une quarantaine de juifs polonais sous la direction de Sevek Kirshenbaum (32) ;
– le « détachement italien » avec une quarantaine d’italiens, sous la direction de Marino Mazetti (31) ;
– le « détachement des dérailleurs », avec des activistes de plusieurs nationalités des pays de l’Est ainsi que d’Espagne, sous la direction de Joseph Boczov (fusillé au fort du Mont-Valérien en 1944) (11).
Les FTP ne devinrent cependant jamais un réel mouvement de masse, même s’il fut d’envergure ; on peut considérer qu’ils disposaient de 25 000 membres avant le tournant de 1944, ce qui est un chiffre extrêmement faible.
En décembre 1943, ils fusionnèrent avec l’Armée secrète (d’orientation gaulliste, regroupant les mouvements Combat, Libération-Sud, Franc-Tireur) et l’Organisation de résistance de l’armée (lié au général Henri Giraud, rival de De Gaulle). Cela donna les Forces françaises de l’intérieur (FFI).

Les effectifs de celles-ci furent pour l’année 1944 de 100 000 en janvier, de 200 000 en juin et de 400 000 en octobre.
La Résistance française n’acquit une réelle importance d’envergure que dans la foulée de l’instauration pour des centaines de milliers de Français du « Service du Travail Obligatoire » les envoyant en Allemagne, de la défaite nazie à Stalingrad et du débarquement.
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Le Parti Communiste Français
de la lutte armée à l’acceptation