Le XIXe congrès du PCUS(b) se plaçait dans une optique foncièrement économique. On se situe ici dans une perspective de reconstruction et de relance de la dynamique soviétique. Cela était déjà marqué par un grand succès et il s’agissait de le prolonger : entre 1940 et 1951, le revenu national soviétique avait augmenté de 83 %, en sachant que les 3/4 vont aux besoins matériels et culturels, 1/4 pour le prochain cycle productif.
Pratiquement chaque orateur fit ainsi subir aux participants au congrès une avalanche de données sur sa zone géographique. En fait, chaque république et beaucoup de zones ont un représentant présentant la situation locale, avec comme axe central la question de la construction économique, au moyen d’une foule de données et de chiffres sur le niveau de production, les constructions effectuées, les équipements mis en place, etc.
Il suffit de donc lire les discours tenus au congrès pour avoir un aperçu des plus exacts de l’économie soviétique. On sait absolument tout sur le nombre d’écoles, de conducteurs de locomotives, de centrales hydroélectriques, d’étudiants à l’université… la qualité de tel ou tel type de plâtre pour la construction, les chiffres de production des différents métaux, l’évolution de la production des machines agricoles, la progression de la technique du tissage, le niveau des précipitations…
Rien n’est omis ou caché, pas même la véritable pénurie de logements, tout à fait reconnue.
Tout cela est fort important, mais cela montre que le XIXe congrès a été, concrètement, une chambre d’enregistrements des constats et des prévisions, de la révision des statuts et du plan quinquennal qui plus est déjà en cours.
C’est là très mauvais sur le plan de la vie du Parti. Cela est d’autant plus grave que grâce à la construction du socialisme en URSS, les délégués au congrès représentent eux-mêmes une nouvelle génération éduquée.
Sur les 1 192 délégués présents au congrès, 709 ont fait des études supérieures, 84 ont fait des études supérieures incomplètes, 223 ont fait des études secondaires et 176 ont fait des études secondaires et primaires incomplètes.
Parmi les 709 ayant fait des études supérieures, on a 282 ingénieurs, 68 agronomes, spécialistes de l’élevage et autres spécialistes de l’agriculture, 98 enseignants, 18 économistes, 11 médecins, 7 avocats.
Cela signifie qu’1/6 des délégués a une approche d’ingénieur. Cela ne peut pas ne pas avoir de conséquence dans l’approche, dans le style, et le Parti n’a pas évalué cet aspect, qui pousse pourtant par définition à une lecture techniciste.
Or, comme qui plus est on dans l’approche comme quoi le socialisme est installé de manière parfaite, qu’il suffit de développer les forces productives, cette tendance ne peut que tendanciellement prendre le dessus.
Cela est d’autant plus vrai que de par le système de planification s’appuyant sur la base socialiste, les objectifs continuent d’être très hauts. Le plan quinquennal prévoit, en 1955 par rapport à 1950, une hausse de 70 % de la production industrielle brute.
La hausse prévue est de 43 % pour le charbon, 62 % pour l’acier, 80 % pour l’électricité, de 350 % pour les équipements pétroliers, de 88 % pour les engrais minéraux, de 220 % pour le ciment, de 46 % pour le papier, de 20 % pour les voitures, de 19 % pour les tracteurs, de 61 % pour le coton, de 78% pour le sucre, de 77 % pour les huiles végétales, de 75 % pour le thé vert, avec un cheptel devant pratiquement doubler, etc.
Le revenu national a une augmentation prévue de 60 %.
La question de l’aspect économique, dans sa dimension ici fortement réduite à la question de l’accroissement des forces productives, pose ici un véritable souci.