Né vers 1370, Jan Hus est celui qui a synthétisé les prédications pragoises et formulé celles-ci politiquement sous la forme d’un averroïsme politique ouvert, mais cependant religieux, dans une perspective de morale individuelle.
Il n’y a en effet pas de classe matérialiste au 14e siècle, puisqu’il n’y a pas de classe ouvrière. Aussi, la bourgeoisie entend utiliser la religion elle-même, sans le clergé : elle exige de séparer le spirituel du temporel, tout en façonnant le temporel au moyen de l’idéologie religieuse.
Jan Hus est en fait très tôt influencé par les écrits de John Wyclif.
Aux yeux de Jan Hus, qui reprend la thèse de ce dernier :
« Lorsqu’un sujet considère un ordre contestable émanant de son supérieur, et s’il connaît que cet ordre tourne au détriment de la chrétienté et qu’il éloigne les hommes du culte de Dieu et du salut des âmes, il ne doit pas l’accepter. Résister dans ce cas c’est vraiment obéir, non pas seulement à Dieu qui juge nos actes en dernier ressort, mais au supérieur qui ne doit ordonner que le bien. »
Il dit pareillement :
« Si les lettres des papes ou des princes commandent quelque chose de contraire à la loi du Christ, sitôt qu’on l’a reconnu, on doit jusqu’à la mort y résister et en aucune manière y obéir. » (Contra octo doctores)
Après être devenu doyen, puis recteur de l’Université de Prague, Jan Hus se mit à partir du 14 mars 1402 à prêcher régulièrement à la chapelle de Bethléem, en langue tchèque, puisque cette chapelle était justement faite afin d’accueillir les prêches en cette langue.
Les prêches de Jan Hus étaient dirigés contre l’Église nantie ayant abandonné les enseignements du Christ.
Jan Hus expliquait :
« Les étables d’un domaine ecclésiastique sont plus somptueuses que les châteaux forts seigneuriaux ou les églises. La pluie ne risque pas de mouiller les prélats, la fange ne les saurait atteindre dans leurs monastères, l’opulence a chassé loin d’eux la faim et la fois. L’Église reçoit des dons, l’Église achète des biens, cependant que partout le pauvre croupit dans sa misère ! »
Il constatait également :
« On paye la confession, la messe, les sacrements, les indulgences, les relevailles, la bénédiction, l’enterrement, l’absoute, les prières. Le dernier heller même que la grand-mère a noué dans un coin de foulard de peur du voleur ou du brigand ne saurait lui rester : c’est ce filou de curé qui s’en empare. »
Le pape comprit la menace et excommunia Jan Hus en 1411.
Et lorsqu’en 1412, des légats du pape Jean XXIII vinrent à Prague pour financer la croisade contre Ladislas de Naples en vendant des « indulgences » permettant de « racheter » ses péchés contre monnaie sonnante et trébuchante, Jan Hus les condamna et exigea leur départ.
Prague devint alors le lieu d’une révolte anti-papale, où furent brûlées des bulles d’indulgence. La répression triompha tout d’abord faisant trois martyrs, trois jeunes qui furent arrêtés et exécutés. Ils furent inhumés dans la chapelle Bethléem, qui fut également durant cette période attaquée (sans succès) par les forces allemandes de Prague.
Jan Hus dut quitter Prague en raison de la répression, alors que la révolte grondait. Il put néanmoins ainsi diffuser ses opinions dans les campagnes.
De plus, Jan Hus avait également publié une lettre ouverte, en décembre 1412, à l’ensemble des seigneurs siégeant à la Diète, appelant au droit à la « libre prédication ».
Réfugié auprès d’eux, Jan Hus leur attribua le titre de « dědic Království » (« héritier du royaume »), appelant directement à leur intervention :
« C’est pourquoi, bien-aimés seigneurs et héritiers du royaume tchèque, faites en sorte que de tels abus cessent et que la Parole de Dieu soit libre parmi le peuple de Dieu. »
Dans ce contexte, et alors qu’il y avait alors pas moins de trois papes en guerre les uns contre les autres, Jan Hus fit l’erreur d’accepter de prendre part au concile ecclésiastique de Constance, en Suisse.
Il ne représentait que des intérêts réformistes, dans le cadre d’un rapport de forces ; sa conception n’était subjectivement pas révolutionnaire, même si objectivement elle l’était largement de par ses conséquences.
Sûr de lui, avant de partir pour Constance, Jan Hus fit même afficher dans les rues de Prague des placards en trois langues, invitant à une joute oratoire quiconque voudrait le convaincre d’hérésie.
Mais malgré les promesses et un sauf conduit, Jan Hus fut immédiatement arrêté à son arrivée à Constance, enchaîné aux mains et aux pieds dans une tour ouverte aux vents, puis brûlé vif le 6 juillet 1415.
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