Pour Aristote, la science porte sur la réalité, mais sa propre existence est comme indépendante de la réalité. Il faut exister pour réaliser la science et ce qui est étudié n’a pas besoin de la science pour exister… Mais Aristote ne voit pas le rapport dialectique entre l’humanité portant la science et la réalité.
Il en reste à niveau immédiatiste :
« Le sensible est antérieur, semble-t-il, à la sensation. Car la suppression du sensible entraîne avec elle la suppression de la sensation, tandis que celle de la sensation n’entraîne pas la suppression du sensible.
En effet, les sensations mettent en jeu le corps et elles y résident. Or, le sensible une fois supprimé, le corps l’est aussi, car le corps fait également partie des sensibles ; et, sans le corps, la sensation aussi est supprimée.
Par conséquent, la suppression du sensible entraîne celle de la sensation. »
C’est là un point de vue tout à fait matérialiste, mais qui en reste au niveau de l’empirisme. Il ne parvient pas à la conception d’une humanité appliquant la science, car elle se retrouve dans une situation où elle peut le faire, car elle est issue de la transformation de la réalité et a un rôle elle-même transformatrice qui lui est attribuée.
Aristote ne dépasse pas, malheureusement, le stade de la contemplation propre au matérialisme de l’époque du mode de production esclavagiste.
Pour cette raison, sa définition de la qualité pose souci. Pour lui, elles sont de trois types.
Il y a les qualités qui constituent soit un état, soit une disposition. L’état est quelque chose de prolongé, la disposition est plus prompte à être modifiée. Les états sont par ailleurs également des dispositions, mais l’inverse n’est pas vraie.
Il y a ensuite les qualités consistant en des aptitudes naturelles. Il y a ensuite les qualités affectives, c’est-à-dire produisant des affections, telle la chaleur pour le toucher, la douceur pour le goût, etc.
Aristote présente un quatrième genre de qualité, particulièrement différent des autres celui-là, puisqu’il s’agit de la figure et de la forme de chaque chose, avec également la droiture et la courbure.
La qualité constitue donc uniquement en des attributs. Il n’y a pas de différence de fond entre quantité et qualité, seulement de forme : on n’est plus ou moins lourd, plus ou moins grand, plus ou moins doué à la natation, plus ou moins calme, plus ou moins fin de visage, etc.
Il n’y a pas la qualité comme saut, ce qui est inévitable de par l’approche d’Aristote, qui est celle d’un dynamisme reposant sur l’opposition mettre en mouvement / mis en mouvement.
Les opposés sont donc eux aussi réduits à une sorte de réciprocité. Soit il manque quelque chose par rapport à quelque chose d’autre, soit c’est relativement différent, soit l’état est différent, soit une chose affirme et l’autre nie, soit ce sont des contraires apparents.
Mais on n’a pas de mouvement dans les opposés. D’ailleurs, ce que vise Aristote, c’est le fait de présenter les choses de manière adéquate, pas de chercher le mouvement. Pour lui, le mouvement découle d’un état de fait, au sens chaque état de fait est issu d’un mouvement extérieur ayant impulsé un changement.
Les catégories servent par conséquent à dresser le panorama d’un système de causes et de conséquences.
Pour cette raison, Aristote est amené à concevoir cinq façons d’être de l’antériorité : plus ancienne, avant dans la ligne de la nécessité (1 avant 2), précédent dans l’ordre logique (comme dans une démonstration), par nature (selon les affinités, la préférence).
A cela s’ajoute l’antériorité suivant la réciprocité : si on parle de quelqu’un qui existe, alors celui-ci existe au préalable.
Cela implique qu’il n’y a pas de considération que le temps est l’expression du mouvement ; le temps se voit ici accorder une dignité comme lieu d’existence. Il n’est pas le fruit du mouvement dans l’espace.
Il en va de même pour le mouvement. Chez Aristote, il n’est pas interne, pas fondé sur la loi de la contradiction (ou plus précisément il n’est pas la loi de la contradiction).
Il en distingue six espèces : la génération, la corruption, l’augmentation, l’amoindrissement, l’altération, le changement de lieu. Tout cela montre qu’Aristote considère le mouvement selon la question de la qualité des choses, de leur existence en tant que forme.
Il y a d’un côté des substances inaltérables, de l’autre des formes connaissant des modifications et étant, qui plus est, différentes.