[Le document suivant consiste en de longs extraits de différents documents italiens d’octobre-novembre 1984, notamment de celui intitulé « Une bataille politique importante au sein de l’avant-garde révolutionnaire italienne ».
Tous appartiennent au courant de la « seconde position », regroupant une partie significative des Brigades Rouges pour la construction du Parti Communiste Combattant (br-pcc) : environ un tiers des militants, la majorité de la direction.
Les « militants de la seconde position » à l’origine de ces textes expriment leur opposition à la majorité (la « première » position) au sujet de l’interprétation de la nature des Brigades Rouges.
Une première tentative de « dépassement » avait déjà eu lieu dans un sens de la « guerre sociale totale », prônée par le Parti Guérilla du Prolétariat Métropolitain, théorisée notamment dans Gouttes de soleil dans la cité des spectres, de Renato Curcio et Alberto Franceschini. L’effondrement de ce courant fut extrêmement rapide.
La seconde position tente pareillement un « dépassement », mais dans un sens pragmatique-machiavélique, le parti clandestin fonctionnant selon des normes, des principes, des méthodes qui forment son identité, et étant résolument séparé des masses en raison de la différence du niveau de conscience.
C’est une réduction du Parti à une technique et la révolution à une méthode, et inversement.
Pour cette raison, la seconde position considère comme erronée l’interprétation d’un Parti comme expression synthétique de l’antagonisme vivant dans le prolétariat, interprétation qu’elle lit comme une dégradation utilitariste du Parti.
Elle rejette par conséquent l’insistance mise sur le Parti comme fruit de la rupture subjective dans le cadre d’un système capitaliste asséchant autant que possible l’antagonisme.
Elle n’admet pas que cette subjectivité soit en mesure de s’élever jusqu’à un positionnement antagonique au cœur de de ce qui serait alors un système formant le processus révolutionnaire, comme mouvement anti-système.
La seconde position donnera naissance à l’UdCC, ainsi qu’à une petite structure dénommée Noyau pour la fondation du Parti Communiste Combattant rejetant l’UdCC comme aventuriste.
L’UdCC s’effondrera dans la seconde partie des années 1980, le Noyau cédant la place à la Cellule pour la constitution du Parti Communiste Combattant, qui aboutira à la formation d’un Parti Communiste Politico-Militaire au début des années 2000.]
Dans cette phase du rapport révolution / contre-révolution, le processus révolutionnaire ininterrompu en étapes signifie que le processus révolutionnaire s’ouvre avec les forces révolutionnaires ayant obtenu leur maturité dans les luttes, qui sont prêtes, à se confronter immédiatement avec l’État.
La lutte armée n’est plus la dernière forme de lutte, qui serait propre à la phase finale de la confrontation, mais une stratégie politico-militaire, qui conduit, dans cette époque historique, la révolution prolétarienne du début à la fin.
La forme de l’attaque « finale » contre l’État n’est en fait plus un problème actuel, à moins qu’on ne veuille l’inventer (…).
L’erreur principale de l’Organisation et son abandon du marxisme-léninisme peuvent être résumés dans la perte de substance des trois moments centraux qui distinguent les BR du « combattisme » des années 1970 :
1. La question de l’État, 2. la question du Parti et 3. la centralité de la classe ouvrière.
La conception du Parti en particulier, de se construire parallèlement et en même temps aux organismes révolutionnaires de masse, nie l’essence du principe léniniste du Parti comme unité de l’avant-garde et de la conscience, qui se situe à l’extérieur du prolétariat (…).
Il appartient au Parti de trouver et d’indiquer les objectifs vers lesquelles tendent la lutte et la lutte armée, et les étapes qui doivent être atteintes.
Plus précisément, il s’agit d’indiquer les points focaux politiques principaux où se concentrent momentanément le caractère antagonique entre la classe et l’État.
Le programme doit prévoir la modification des rapports de force, la désarticulation des projets dominants de la bourgeoisie, l’Organisation de l’avant-garde révolutionnaire pour la stratégie du Parti, la conquête de l’antagonisme pour le programme révolutionnaire, et par la pratique, qui s’évalue par rapport aux succès concrets, dans la mesure où il s’agit de la pratique de la direction de l’avant-garde et de la classe que d’utiliser politiquement et militairement les contradictions et les failles de l’ennemi.
En ce qui concerne la bourgeoisie, il est facile de comprendre que c’est son projet central que de faire avancer, avec le meilleur résultat possible d’une paix sociale atteignable, son projet (redéfinition pour le renforcement du pouvoir du gouvernement, redéfinition politique, économique et militaire du caractère du rapport classe / État, des relations avec les syndicats jusqu’aux réformes institutionnelles, afin de mettre en œuvre la « rénovation » et l’intégration réorganisée dans le champ impérialiste (…).
L’Italie est un pays impérialiste et les principales classes en quoi notre société se partage sont la bourgeoisie et le prolétariat ; la dictature de la classe bourgeoise sur le prolétariat a la forme d’une démocratie parlementaire, qui s’appuie sur des élections générales.
La nature de l’étape de notre révolution est par conséquent la révolution prolétarienne et la seule classe sociale intéressée à cela est exclusivement le prolétariat ; pour cette raison, le prolétariat et son parti révolutionnaire ne peut pas faire d’union avec d’autres classes ou d’autres fractions de classe, car ils doivent profiter de chaque occasion afin de former une hégémonie de la classe prolétarienne sur les fractions de classe ou groupes sociaux hésitants ou instables (…).
Les principaux points de référence pour la révolution prolétarienne restent comme auparavant la Commune de Paris et avant tout la révolution prolétarienne d’Octobre 1917 en Russie.
Les reculs momentanés de la révolution en URSS ne portent atteinte en rien la valeur des leçons provenant de cette expérience.
Une attention particulière doit de plus être porté sur l’expérience de l’Internationale Communiste dans les pays impérialistes et en particulier en Allemagne de 1919 à 1933.
Dans les pays impérialistes et dans la situation historique présente, le vide en théorie politique qui existe essentiellement dans le mouvement communiste depuis la dissolution de l’Internationale Communiste, ne peut être dépassé que par un approfondissement théorique et pratique des leçons de la pensée révolutionnaire spécifiquement léniniste (…).
S’il est nécessaire de soumettre à la critique l’aspect négative de la théorie du soulèvement de l’Internationale Communiste, est également expressément à rejeter la théorie de la « guerre de classe de longue durée », qui avec différentes variantes est celle de toutes les expériences de la guérilla urbaine communiste.
Dans les pays impérialistes, pour une longue période, c’est la dimension des luttes de classe qui l’emportent et la tâche principale du Parti marxiste révolutionnaire est et reste d’amener à un niveau plus élevé la conscience et l’organisation révolutionnaire des masses (…).
Il doit être affirmé très clairement que la lutte armée n’est pas une stratégie, ce n’est qu’une méthode décisive de lutte dans les mains du Parti Communiste Combattant, depuis le début du processus révolutionnaire.
La raison pour laquelle le Parti promeut les initiatives combattantes est l’éducation des masses à l’idée de la nécessité de la confrontation violente avec la bourgeoisie, et en même temps de préparer les conditions militaires pour la victoire de la révolution.
Autrement dit, le Parti utilise parmi ses méthodes de lutte la lutte armée, afin de remanier au profit du prolétariat les lois de la politique suivant les lois de la guerre, dès que la situation révolutionnaire commence (…).
La lutte armée doit, pour cette raison, se rapporter aux grandes questions politiques et sociales au centre de la vie de notre pays et ne peut pas anticiper les périodes objectives de la révolution, même s’il en est un élément subjectif important de ces périodes.
La seule vraie stratégie dans les mains du prolétariat, c’est, une fois pour toutes, le marxisme-léninisme.
Il est pour cette raison nécessaire de repenser la vision que les Brigades Rouges avaient de la politique révolutionnaire (…).
Deux ans et demi après la défaite de 1982, un bilan autocritique de notre expérience n’est pas que nécessaire, mais aussi possible, afin de réaliser une théorie et une pratique révolutionnaires qui ont connu leur maturité au milieu de la confrontation, y compris avec les erreurs commises (…).
Les Brigades Rouges sont apparues en Italie après vingt années de paix sociale relative, caractérisée par le cycle de diffusion du capital après la seconde guerre mondiale et par l’administration révisionniste de l’antagonisme prolétarien, qui vise à continuer une situation de réconciliation entre les intérêts de classe, qui lui permet une légitimation de sa position comme force politique « démocratique », qui puisse progressivement se placer dans les rangs des forces gouvernementales (…).
La diffusion, la maturité, la durée et le caractère prolétarien fortement marqué, qui se sont exprimés dans notre pays dans ce cycle de lutte, forment la condition pour la formation d’un mouvement révolutionnaire large (…).
Dans cette situation, les Brigades Rouges ont réalisé la rupture historique concrète tant avec le pacifisme qu’avec le vélléitarisme de groupes et les postures ML impotentes, et ont placé en pratique sur un plan marxiste-léniniste la substance de l’alternative prolétarienne révolutionnaire contre le système bourgeois des partis – malgré des limites évidentes d’une expérience venant de se former.
Et elles firent cela avec la proposition stratégique de lutte armée pour le communisme, comme condition imprescriptible dans cette époque historique, pour mener la politique révolutionnaire, pour fournir aux luttes de masses une perspective et une percée qui ait du succès (…).
L’état de pacification que la bourgeoisie a assuré dans les pays les plus forts de la chaîne [impérialiste] est la preuve la plus claire de comment la résolution des vagues et des cycles de lutte antagoniques, y compris violentes, est possible sur une base économique à l’intérieur d’un cadre d’union avec les besoins capitalistes et les besoins bourgeois.
Et cela, malgré que les faits concrets prouvent bien quel futur l’impérialisme a à proposer au prolétariat international : une nouvelle guerre mondiale.
Dans ce cadre, la lutte armée pour le communisme n’est pas un moyen de propagande, afin de pouvoir être mené ensuite, ce n’est pas la dernière forme de lutte, qui est propre à la phase finale de la confrontation, mais c’est la stratégie qui du début à la fin conduit la confrontation nécessairement prolongée avec l’appareil d’État bourgeois (…).
Une grande clarté est nécessaire : ce n’est pas la lutte armée pour le communisme qui a été vaincu en Italie, mais ses concepts idéalistes et ses conceptions « immédiatistes », qui l’ont emporté dans le mouvement révolutionnaire et même à l’intérieur des Brigades Rouges (…).
L’adéquation d’une structure stratégique et de la construction de cadres du parti ne peut pas être évaluée selon sa pureté théorique abstraite, mais vérifiée par l’ancrage des principes marxistes-léninistes vérifiés et vérifiables dans la pratique concrète du processus révolutionnaire, dans la compréhension et dans la capacité d’utilisation du critère prolétarien et révolutionnaire de critique – autocritique – transformation (…).
La formation d’un mouvement révolutionnaire ne va pas de paire avec la conquête de l’ensemble du prolétariat pour les objectifs de la guerre de classe.
Si c’est le cas, c’est le but de la phase de la dictature du prolétariat et du renforcement de l’État prolétarien, lorsque les masses, l’ensemble du prolétariat, sont impliqués dans la continuation de la lutte de classe.
Cela, parce que le mouvement prolétarien ne se conçoit pas comme unité, mais comme résultat de différents niveaux de conscience, qui ne se recoupent pas et ne doivent ainsi pas être aplanis et être remplaçables les uns par les autres.
Le critère général est qu’un Parti doit avoir une influence profonde sur les dynamiques de la lutte des classes, à l’intérieur de l’ensemble du prolétariat par conséquent, mais comme il représente son élément conscient et organisé, il ne peut pas aplanir ses propositions au niveau moyen atteint par les « masses combattantes », mais fixe le niveau le plus mature comme base réelle, sur laquelle le développement du processus révolutionnaire de la classe est possible et nécessaire (…).
Les étapes avec lesquelles se divisent la guerre révolutionnaire dans la métropole dépendent par conséquent de l’ensemble des nécessités politiques, qui sont conditionnées par l’activité dynamique de l’avant-garde / la lutte des masses / l’État contre-révolutionnaire, et pas par la « capacité de feu » que les avant-gardes sont en mesure d’exercer, ni par la violence exercée par les masses.
Justement comme la lutte armée n’est pas un instrument, il est nécessaire d’en arriver aux buts généraux pour l’ensemble de la classe qui permettent de « calibrer » et de régler l’activité de la lutte.
Et cela est encore plus vrai dans les pays impérialistes, en raison des propriétés structurelles dans lesquelles se manifestent la confrontation de classe (…).
Une autre propriété fixée de la guerre de classe dans les pays impérialistes est qu’elle se déroule au cœur de la domination bourgeoise, c’est-à-dire qu’elle vit et se développe dans les métropoles.
Elle ne se sert pour cette raison pas de processus comme l’encerclement du pouvoir ennemi, comme l’attaque depuis une « base arrière » où elle se replie jusqu’à l’offensive finale.
C’est-à-dire que ne sont pas possibles, dans les métropoles, les « bases rouges », les zones libérées, où les forces révolutionnaires peuvent exercer un contre-pouvoir réel dans les conditions de rapports de force favorables.
La lutte armée dans les métropoles, qui vit toujours en « contact étroit » avec la contre-révolution, ne peut pas compter sur « ses territoires », car de par les forces ennemies de plus grand poids, elle serait anéanti en un éclair » (…).
« Avec sa re-proposition persévérante du Marxisme-Léninisme, les Brigades Rouges ont, par la mise en pratique de la conception de l’attaque au cœur de l’État, gagné une bataille importante contre le spontanéisme armé et accéléré le fait de démasquer le révisionnisme (…).
De la proposition « conquérir les masses pour la lutte armée » découle le principe idéaliste selon lequel « il n’y a pas de Parti sans organisation révolutionnaire de masse, il n’y a pas d’organisation révolutionnaire de masse sans le Parti ».
Avec ce principe, la formation du Parti se déforme dans la nécessité d’organiser les masses en même temps sur les terrains politiques, militaires et organisationnels, quelque chose qui est propre aux avant-gardes.
Ce principe amène à confondre l’organisation révolutionnaire des masses avec le noyau des avant-gardes qui étaient étroitement liées aux Brigades Rouges, se mobilisaient sur les mots d’ordre des Brigades Rouges et apparaissaient dans les domaines ouvriers et prolétariens comme représentation tragique des tâches des avant-gardes révolutionnaires et des masses organisées (…).
C’est sur les théories nébuleuses et « fascinantes » sur l’époque post-industrielle, sur la fin de la validité de la valeur-travail, sur les travailleurs sociaux, que se fonde l’idéologie entièrement subjectiviste du rejet de la fonction historique du prolétariat métropolitain, du fait de guider le processus révolutionnaire de destruction de l’État et du mode de production capitaliste, où les changements possibles ultra-révolutionnaires sont rêvés comme se produisant dans les rapports de production dominant, et leur validité s’appuyant sur les transgressions violentes de différentes composantes ou subjectivités.
Avec cette logique, le mode de production capitaliste disparaît tout simplement, et avec lui toute l’ordure des rapports sociaux qu’il a produit. Le rapport entre base et superstructure se renverse et avec cela, c’est la gradualité temporelle nécessaire du processus révolutionnaire qui disparaît (…).
La tendance à la guerre apparaît comme une nécessité objective, comme contre-tendance principale à la crise de superproduction ; ce n’est en effet que dans la destruction de capital, de force de travail, de marchandises et de forces productives en excès que les vainqueurs peuvent rendre possible un « nouveau développement en grand style », garantir des parts de marché, l’accès aux matières premières, finalement un repartage des marchés et du travail sur la base d’un nouvel ordre économique mondiale, plus favorable au capital le plus fort (…).
Pour son activité, le Parti révolutionnaire doit entreprendre le renversement du rapport de forces, la désarticulation des principaux projets de la bourgeoisie, l’organisation des avant-gardes révolutionnaires pour mener la stratégie du Parti, la conquête de l’antagonisme pour le programme révolutionnaire ; et cela avec une pratique, qui est évaluée par les succès concrets et qui vise à former des rapports de force favorables momentanés, permettant d’être victorieux et d’avancer sur des positions plus évolué (…).
Le concept de « social-impérialisme » employé par Mao Zedong pour montrer que l’attitude soviétique était « du socialisme dans les mots et l’impérialisme dans les faits », est inapproprié au sujet au moins de deux aspects :
1. Cette définition donne à comprendre que l’impérialisme serait une politique, une attitude. Ce n’est pas un hasard que la critique du modèle soviétique se transforme en une critique de la politique extérieure de l’URSS et de son agressivité.
2. De plus, la définition de Mao Zedong donne comme contradiction principale de la formation soviétique celle entre la structure économique capitaliste et la superstructure idéologique socialiste, ce qui donne une avance à la propagande révisionniste, selon laquelle le passage au communisme serait possible par une révolution technico-scientifique finale et un développement plus grand des forces productives.
En réalité, les choses sont plus complexes. Le développement capitaliste en URSS devait tenir compte des structures économico-productives héritées de la période révolutionnaire qui, étant donné qu’elles reposaient sur l’étatisation des moyens de production et l’économie planifiée, empêchaient que – tout comme dans les autres pays capitalistes et par conséquent du point de vue capitaliste – que soit atteint le niveau productif et technologique des pays occidentaux (…).
Nous ne pouvons ici nous confronter avec le problème théorique complexe et la spéculation marxiste-léniniste quant au passage échoué au communisme en URSS et comme en Chine (…).
Le monde est divisé en deux grands systèmes de rapports impérialistes, qui sont poussés à la confrontation directe par la crise. La tendance à la guerre inter-impérialiste est aujourd’hui la contradiction principale.
Et précisément l’existence de ces facteurs amène la possibilité de placer la révolution à l’ordre du jour, tout comme la convergence des raisons d’alliance entre le prolétariat international et les peuples en lutte contre la mise impérialiste en esclavage (…).
En ce sens, il doit être dit qu’en raison de l’acuité de ses contradictions et en raison de la crise de surproduction de la chaîne occidentale sous domination des Etats-Unis, cette chaîne est l’ennemi principal du prolétariat international et des peuples du tiers-monde, parce que les raisons pour sa course à l’armement et une politique agressive sont davantage « vitaux ».
Cela ne doit pas nous amener à sous-estimer la nature du concurrent et à penser de manière « maligne », quelle qu’elle soit, qu’on pourrait « l’utiliser » pour les objectifs de la révolution prolétarienne (…).
Nous proposons une conception pour le travail et la discussion, qui reposent sur :
I. Une mise en participation authentiquement internationaliste des organisations, qui se construit dans l’alliance et la solidarité militante avec tous les peuples et forces progressistes du monde qui luttent contre l’impérialisme.
II. Travailler à la construction de l’Internationale Communiste, sur le base de définitions précises :
a) sur la base idéologique et théorique du marxisme-léninisme,
b) par la reconnaissance du caractère stratégique de la lutte armée pour le communisme, dans l’acceptation de la différenciation de son utilisation selon les conditions sociales-politiques-idéologiques différentes,
c) avec une redéfinition – en raison des changements révolutionnaires – du champ des Partis Communistes révolutionnaires, qu’ils soient au pouvoir ou pas (…).
Au début des années 1980, en particulier en 1982, il y a une sévère césure dans la continuité du processus de construction qui s’était déroulé de manière essentiellement sans interruption pendant les dix premières années d’activité de notre organisation.
De ce difficile test, l’organisation s’en est sortie avec un nombre fortement réduit de membres, puissament affaiblie dans le domaine des moyens politiques et organisationnels à sa disposition, affaiblie en influence et en prestige dans les masses.
Il s’est avérée de plusieurs parts que la campagne de répression lancée tous azimuts par l’État contre le mouvement révolutionnaire n’a fait que révéler et développer des enchevêtrements et des symptômes d’une crise politique profonde, qui existait déjà avant les tortures, avant la trahison et avant les arrestations de masse.
Rien qu’un regard superficiel sur ce qui se passe dans les prisons et les tribunaux parmi les prisonniers politiques de notre pays le confirme : à part les véritables traîtres, la large majorité de ceux et celles qui ont été ces dernières années une partie du mouvement révolutionnaire rejettent ses propres choix et souhaitent le début de négociations avec l’État, afin d’être libérés dans un proche avenir.
Il est désormais vraiment impossible de fermer les yeux sur cette pénitence à Canossa monumentale et en même temps ridicule – tragique d’anciens combattants, qui se courbent devant les pires valeurs de la société bourgeoise, livrent aux masses prolétariennes de notre pays un spectacle déshonorant, dont nous allons payer le prix encore longtemps (…).
Immédiatement après la libération du général américain Dozier, notre Organisation a considéré comme nécessaire de dresser un bilan profond de tout l’arc de notre expérience et a proposé pour cette raison à l’ensemble du mouvement révolutionnaire la « retraite stratégique », c’est-à-dire la nécessité d’un laps de temps pour, après les coups encaissés, en arriver à une redéfinition générale des avant-gardes révolutionnaires.
Une fois de plus, l’histoire a pris sur elle de confirmer la validité du principe léniniste, selon lequel on doit évaluer le sérieux d’un parti politique avec sa capacité de se confronter à ses erreurs : nos critiques d’alors de « gauche », en particulier ce pouilleux « Parti-Guérilla du prolétariat métropolitain », qui a prôné et mené des actions militaires éhontées dans toute l’Italie, qui nous accusait de trahir la lutte des classes, a désormais disparu comme force organisée et a découvert dans les prisons, avec retard, l’individualisme, la beauté de la vie sociale et même, comme perle des perles, la religion (…).
Cette période de réflexion critique générale qui dure depuis 1982 et qui n’a également pas empêche aux Brigades Rouges de lutter à un niveau qui est politiquement et militairement le plus haut de son histoire, en est désormais arrivée à son point décisif.
Deux positions, qui concernent les problèmes théoriques et politiques importants de l’ordre du jour de nos discussions internes, se confrontent ; on se sépare au sujet des questions de stratégie et de tactique, sur l’évaluation du passé, tout comme sur l’art et la manière de l’activité future.
Mais pourquoi, pourrait-on se demander, est-ce qu’une organisation décimée par les arrestations et restées pratiquement toute seule dans la lutte avec les armes contre l’État, voudrait encore plus s’affaiblir par une scission interne ?
De quoi s’agit-il avec ces différences de points de vue ?
Avec la plus grande ouverture il faut reconnaître qu’avec notre confrontation, il en va de deux conceptions totalement différentes aujourd’hui à l’intérieur des Brigades Rouges, quant au processus révolutionnaire et la tâche de l’avant-garde.
Une conception se fonde sur l’idée qu’elle croit possible – à partir de l’activité du parti révolutionnaire – de mener une « guerre de classe de longue durée » dans un pays impérialiste comme l’Italie, et c’est une thèse qui, grosso modo, était celle de notre organisation depuis sa fondation et qu’on peut également appeler « stratégie de la lutte armée ».
L’autre conception, partant d’une évaluation concrète des effets que cette thèse employée a produite dans la réalité italienne (bien entendu les effets positifs comme négatifs) et dans la prise en considération de certaines leçons fondamentales du marxisme et du léninisme, est d’avis que la forme que prend la guerre révolutionnaire dans notre pays est tendanciellement celle de l’insurrection, et que les tâches du Parti consistent à guider les masses, par son activité révolutionnaire, à cette réunion historique.
Que chaque politique révolutionnaire est essentiellement, mais pas exclusivement, alignée sur la lutte armée.
On pourrait poser le problème ainsi : considérée de manière essentielle, est-ce que les leçons de la révolution d’octobre dans un pays impérialiste sont encore valables, ou bien les choses se sont-elles développées jusqu’au point où ce serait un effort vain et même contre-productif que de se rapporter à cet événément fondamental ?
Bref, il en va de la chose suivante : est-ce que la conception que Lénine avait de la révolution doit être approfondie, ou bien au contraire faut-il la dépasser ? (…)
La thèse affirmée dans le travail suivant est qu’il faut approfondir le léninisme et non pas le dépasser.
De notre point de vue, la définition connue que Staline donne dans son œuvre « Sur les fondements du léninisme », comme quoi le léninisme est le marxisme de l’époque impérialiste et de la révolution prolétarienne, est totalement valable, également soixante ans après sa formulation.
L’idée d’une « guerre prolongée », qui est un point cardinal de base pour la révolution de nouvelle démocratie et pour la libération nationale des pays opprimés par l’impérialisme, doit être rejetée par conséquent dans les pays impérialistes, parce qu’elle alimente le subjectivisme et l’aventurisme petit-bourgeois (…).
En ce qui concerne, aucune activité révolutionnaire se comprenant comme marxiste-léniniste n’est pensable en dehors des Brigades Rouges, car il n’y a que notre Organisation qui est mesure de tirer le bilan scientifique et militant (c’est-à-dire capable de le transformer en pratique révolutionnaire) des contributions et des limites de l’expérience révolutionnaire qui a été faite au cours des années 1970.
Et qui est capable, avec précision, de savoir quels sont les éléments positifs qui ont été conquises ou sont encore à conquérir dans le patrimoine historique du mouvement communiste international, et de définir clairement les concepts d’une véritable stratégie et tactique révolutionnaires.
Ici, la leçon principale tirée de l’expérience des années 1970 est celle qui est la source de notre Organisation : que la lutte armée est la partie décisive dans la question de la politique révolutionnaire d’un parti marxiste, également dans une situation non révolutionnaire.
En second lieu doit être expliqué ce que nous comprenons par approfondissement de la conception léniniste de la révolution et pourquoi nous l’opposons à la ligne théorique et pratique de son dépassement.
L’application de la théorie de Mao Zedong d’une « guerre populaire prolongée » à la réalité sociale et historique dans les pays impérialistes amène selon nous inévitablement à une distorsion profonde du léninisme, jusqu’à atteindre son noyau dur.
Cela est de fait facile à montrer et notre historique l’a montré en toute clarté : même si l’on essaie le plus possible d’être de sincères marxistes-léninistes, autant qu’on veuille éviter les schématisations, si l’on veut appliquer cette théorie dans les pays du capitalisme moderne, on en arrive de manière forcée à une optique non-léniniste concernant le rapport conscience – spontanéité et la mise en pratique de la lutte politico-économique.
On en arrive à sous-estimer le rôle éducateur et politique du parti révolutionnaire et on le transforme, d’un sujet conscient de la lutte pour le pouvoir, en un simple organisateur d’une disponibilité révolutionnaire des masses considérée comme certaine.
Et finalement, comme on se place à l’extrême du contre-pôle, on renverse l’idée marxiste-léniniste de « l’exception » de la réunion des conditions objectives et subjectives pour les révolutions socialistes prolétariennes, et on assume une sorte de philosophie moderne de la pratique, finalement un héritage raffiné du marxisme « critique » (…).
En ce sens, la collision politique qui existe aujourd’hui dans notre Organisation se manifeste également comme collision de points de vue théoriques et finalement comme collision de deux méthodologies différentes (…).
La rupture avec le révisionnisme – et avec le révisionnisme le plus fort en Europe – a pris des caractéristiques de radicalité révolutionnaire et d’enracinement dans la société, qui sont inconnues dans les autres pays : l’Italie a fait l’expérience d’une lutte de classe aiguisée, qui ont modifié de manière profonde certains traits de notre société et ont mis dans les mains du prolétariat une accumulation d’un énorme patrimoine d’expériences, au sujet desquelles il en va de réfléchir et dont il est possible de tirer des leçons utiles (…).
Nous rejetons la position qui considère qu’il est possible de séparer notre histoire de l’histoire générale du mouvement communiste international, en raison d’une prétendue « originalité » (…).
S’il est juste que la lutte armée modifie le rapport de forces entre les classes, elle ne réalise cela que dans le sens communiste, parce qu’elle contribue à élever la conscience et l’organisation révolutionnaire.
Autrement considéré, le problème n’aurait que deux autres solutions et les deux ne sont pas marxistes :
1. la lutte armée modifie le rapport de force, parce qu’il améliore les conditions de vie des masses : « interprétation réformiste » ;
2. la lutte armée modifie le rapport de force, parce qu’il renforce le pouvoir des masses : cette interprétation, dans un pays comme l’Italie, où avant la conquête du pouvoir politique le vrai seul pouvoir aux mains des masses consiste en leur conscience et leur organisation révolutionnaire, sous-tend de manière inévitable à la pensée d’un « pouvoir croissant, un contre-pouvoir », un « système de pouvoir », qui n’a ici aucune base concrète à part dans le paradis hospitalier des idéologies dont nous cherchons – péniblement – à nous sortir (…).
Si l’on se base là-dessus, alors on doit reconnaître, que ces enseignements [de Lénine], appliqués à la réalité italienne de notre époque, une réalité donc qui a évolué par rapport à la Russie de 1917, amènent à ce que la forme que prend la guerre révolutionnaire dans notre pays est tendanciellement celle d’une insurrection.
Une insurrection il est vrai, qui est celui correspondant à la présente situation, qui se confronte à un Etat qui est autrement et d’une manière supérieure politiquement et militairement que l’État tsariste d’avant 1917, mais c’est toujours une insurrection.
Et si la polémique entre les représentants de l’insurrection et ceux de la guerre prolongée dérange, alors il faut expliquer que derrière les mots se cache entièrement l’art et la manière avec lesquels est conçu l’activité politique du Parti Communiste Combattant à fonder.
Bref, cela cache deux manière antagoniques d’interpréter le rapport marxiste entre théorie et pratique (…).
Que l’on apprécie ou non, la théorie de la guerre prolongée, de la stratégie de la lutte armée, etc., n’est pas une application marxiste-léniniste à la réalité italienne, mais précisément le contraire : c’est la conséquence idéologique d’une pratique considérée comme juste tel un présupposé.
C’est le triomphe de l’éclectisme sur tout effort visant à aborder le problème de la révolution prolétarienne dans notre pays de manière sérieuse (…).
En ce sens, la signification historique de l’expérience des Brigades Rouges est d’avoir montré que la question de la lutte armée est une partie du problème de la politique révolutionnaire d’un parti marxiste moderne.
Que la lutte armée est la méthode de lutte fondamentale et décisive d parti révolutionnaire, qu’elle est également dans une situation non révolutionnaire un excellent moyen pour élever la conscience et l’organisation révolutionnaire des masses exploitées.
En ce sens et en ce sens seulement, on peut dire que notre expérience est une critique militante aux manques de la théorie de l’insurrection de l’Internationale Communiste : l’Internationale Communiste concevait le soulèvement comme le couronnement militant d’une longue phase d’activités politiques légales qui s’appuyait sur l’action parlementaire ; et du moment où le centre de gravité de l’activité politique s’est déplacée au parlement, le problème du soulèvement a été pratiquement perdu des yeux.
Autrement dit, les frontières qui séparent la phase politique de la confrontation sociale de la phase militaire, la frontière qui sépare la situation révolutionnaire de la situation non-révolutionnaire, a été considérée comme une séparation, alors que pour la dialectique une frontière n’existe qu’en ce qu’elle met en relation les deux réalités, qui laisse couler l’une dans l’autre et qui forme dans des situations historiques particulières une unité des contraires (…).
Cependant, le prix payé en tribut au révisionnisme, en ce qui concerne la solidarité théorique avec ce choix [ la lutte armée avec comme objectif la construction parti révolutionnaire moderne], a été haut.
Dans la tentative de se différencier des pratiques bureaucratiques ou conciliatrices du parti communiste révisionniste, de ce représentant officiel de « l’orthodoxie », beaucoup des arguments théoriques de notre Organisation se sont développés en-dehors du marxisme-léninisme ; même la référence au socialisme scientifique était ambiguë, discontinue, indécise ; les dérapages théoriques étaient la conséquence inévitable de ces contradictions.
Il s’agit sans conteste de problèmes qu’ont en commun toutes les avant-gardes qui se sont formés dans les pays européens au cours des années 1970 (…).
La lutte contre l’éclectisme théorique, dont les implications s’étendent sur toute la durée de l’activité révolutionnaire [des Brigades Rouges] est la condition fondamentale pour pouvoir fonder le Parti Communiste Combattant (…).
La crise économique actuelle est une crise générale du mode de production capitaliste, qui accélère le développement des contradictions dans le monde entier et pressent les puissances impérialistes à l’intensification de la course à l’armement et aux préparatifs de guerre.
Ainsi se rapproche indubitablement le temps où se mettent violemment en branle les mouvements sociaux et qui est définie comme la grande occasion pour la révolution dans chaque pays.
Eu égard à cette situation, qui est difficile et compliquée, comme également plein de développement positif potentiel, le mouvement révolutionnaire et progressiste du monde marche séparément et sans aucune direction.
En particulier, le rôle des véritables communistes, des marxistes-léninistes cohérents, apparaît parfois comme faible et secondaire, et parfois il n’y a même pas une trace d’eux et la lutte des classes et du peuple repose principalement dans les mains des partis révisionnistes, nationalistes et même réactionnaires (…).
L’interruption du développement en URSS et sa transformation de pays socialiste en pays capitaliste amènent encore aujourd’hui de grands problèmes pour tout révolutionnaire conséquent, en ce qui concerne la compréhension théorique, tout comme de nombreuses difficultés sur le plan pratique (…).
Ce qui doit être avant tout clair, c’est que l’URSS est une puissance impérialiste. Une puissance impérialiste qui a il est vrai encore des traits de l’époque socialiste en soi, et qui justifie ses actions par une phraséologie marxiste, mais reste pourtant une puissance impérialiste (…).
La bataille révolutionnaire contre l’impérialisme soviétique et contre les « voies pacifiques nationales au socialisme » des Tito, Togliatti, Thorez, etc. a commencé de manière ouverte et cohérente par Mao Zedong dans les années 1960.
Au cours de cette bataille, Mao Zedong a fourni une première interprétation valable sur les événements en URSS et est entre autre parvenu à la définition de la théorie de la continuation de la révolution dans le cadre de la dictature du prolétariat, et à une analyse profonde et scientifique du rôle de la contradiction dans la période séparant le capitalisme du communisme.
La vision des problèmes du socialisme, en plus d’être un critère irremplaçable pour la formation d’un jugement dans l’évaluation de l’expérience soviétique, a été mis en pratique et vérifiée par Mao Zedong et les éléments révolutionnaires à l’intérieur du Parti Communiste de Chine durant la grande révolution culturelle (…).
Ce qui est clair dans notre esprit et doit être explicite, est que la contribution effectuée par Mao Zedong quant à la question révolutionnaire et la guerre populaire prolongée dans les pays opprimés par l’impérialisme, celle des écrits sur le matérialisme dialectique et celui déjà cité sur la continuation de la lutte des classes dans le socialisme, restent un approfondissement fondamental du marxisme-léninisme et sont à ce titre à défendre et à utiliser dans la continuation du développement critique pour le mouvement communiste international (…).
De notre point de vue, il doit être expliqué que sont en dehors de ce processus [révolutionnaire], de manière catégorique et sans appel, tous les groupements « marxistes-léninistes » dont le dogmatisme est le meilleur alibi pour ne rien faire.
Tout comme une bataille politique intense doit être menée contre les forces – comme Action Directe et la RAF, etc. – qui, bien qu’elles combattent leur propre bourgeoisie de manière armée, ne reconnaissent pas la direction du marxisme-léninisme pour leur propre activité (…).
Etant donné qu’il est fixé que la révolution ne peut qu’être violente, il s’en conclut que la situation révolutionnaire tend à définir la guerre civile.
La guerre civile peut se caractériser comme guerre révolutionnaire, lorsque les idées ou thèses révolutionnaires existent et sont prises par les masses opprimées.
Par guerre révolutionnaire, nous entendons la situation sociale où l’élément militaire prédomine sur les autres dans la confrontation de classe ; naturellement, les événements restent également, dans la situation de la guerre révolutionnaire, défini par la situation existante entre la bourgeoisie et le prolétariat : notre société est divisée en classes, donc chaque phénomène a un caractère de classe précis.
Nous rejetons catégoriquement toute autre interprétation du concept de guerre révolutionnaire : la guerre révolutionnaire, pour être elle-même, doit se baser sur les masses, doit comprendre les masses sur le terrain de l’affrontement militaire (…).
Le but direct du parti marxiste révolutionnaire qui repose sur la théorie du socialisme scientifique est la conquête du pouvoir politique et la destruction violente de l’État bourgeois par les masses prolétariennes.
C’est pourquoi le but direct du parti marxiste révolutionnaire est concrètement l’insurrection armée des masses prolétariennes contre l’État bourgeois.
Les masses prolétariennes ne sont pas en mesure d’en arriver par leur mouvement spontané à la conscience du caractère inconciliable de l’antagonisme entre leurs intérêts et ceux de l’Établissement social et politique d’aujourd’hui : cette conscience ne peut provenir que de l’extérieur et seul le parti marxiste révolutionnaire peut remplir ce rôle.
Il doit être expliqué qu’à l’intérieur de la société capitaliste, il n’existe pas de réel pouvoir du prolétariat, et que le seul véritable pouvoir dont dispose le prolétariat, c’est sa conscience révolutionnaire (…).
L’expérience pratique de ces quinze dernières années dans notre pays nous enseigne que la méthode décisive de la lutte politique communiste du Parti du prolétariat est la lutte armée (…). Le Parti Communiste qui fait utilisation des armes ne peut être que combattant et par conséquent un parti clandestin.
Chaque militant doit, comme cadre du Parti Communiste Combattant, être prêt à la lutte et vérifié dans le cadre des besoins du Parti sur ce terrain (…).
L’initiative du combat (dans une situation non-révolutionnaire) n’est pas une « action de guerre », mais une action fondamentalement politique qui, dans la mesure où elle s’exprime par l’utilisation des armes, amène naturellement des conséquences particulières, que le Parti doit prendre en compte avec le plus grand sens des responsabilités, mais également avec une détermination absolue.
Bien que soit considéré le concept de « stratégie » dans d’une « perspective générale que le Parti a du processus révolutionnaire et de comment la conquête du pouvoir politique est à obtenir », la lutte armée n’est pas une stratégie : c’est une méthode de lutte décisive de la politique révolutionnaire du parti marxiste, également dans la situation non-révolutionnaire (…).
Les camarades de la « première » position disent essentiellement : le soulèvement armé ne se pose pas, pour trois raisons : entre autres, parce que le système démocratique bourgeois est en mesure d’absorber les initiatives antagonistes de la lutte de classe, des « institutionnaliser ».
Ensuite, parce qu’il y a la contre-révolution préventive. Troisièmement, parce qu’il y a une énorme dépendance mutuelle entre les bourgeoisie des différents pays, dont les forces militaires sont prêtes à se coaliser contre d’éventuelles poussées révolutionnaires.
C’est pourquoi, continuent les camarades, il est « possible et nécessaire » de commencer le processus de la guerre prolongée et d’ainsi engager la phase révolutionnaire et, par l’activité politico-militaire des avant-gardes, de viser à ce que soit atteint l’étape du « développement de la guerre de classe » dans une dynamique marquée par des « sauts et ruptures » continus (…).
Si, cependant, la « contre-révolution préventive » (qui n’est rien d’autre que l’expression concrète de la conscience relative, que la bourgeoisie et sa force politique organisée, l’État, ont de la lutte des classes et de ses possibles développements) est conçue comme « constante structurelle fixe » de l’action de l’État, et même comme capacité de destruction « la légitimité même de la révolution prolétarienne », et si l »action communiste en soi ouvre la « phase révolutionnaire » et commence une « guerre », qui même s’il se veut particulier a en tout cas la « particularité » de n’exister que dans la volonté subjective des combattants, alors il faut reconnaître que les camarades de la « première » position interprètent le matérialisme d’une manière – comment dire – légère, et se présentent la lutte de classe comme lutte entre des sujets entièrement conscients et l’activité communiste comme étant en mesure de « décider » comme elle l’entend du déroulement de la révolution.
Un peu comme dans les « war games » !
Bref, la vision que nous propose la « première » position sur le processus révolutionnaire est volontariste dans ses motivations, aventurière dans ses conclusions politiques et idéaliste-subjectiviste sur le plan théorique.
C’est justement la critique du subjectivisme qui est le socle pour la vision d’ensemble que la « seconde position » propose quant à notre révolution (…).
En fin de compte, la signification sur le plan du contenu de la polémique « guerre prolongée – insurrection armée » est celle d’un choc entre idéalisme et matérialisme (…).
Il ne devrait pas être difficile de remarquer qu’entre les deux positions il y a constamment une polémique quant à la question absolument importante : la fonction des avant-gardes communistes aujourd’hui est-elle « d’éduquer » les masses, d’élever leur conscience et leur organisation, ou bien est-elle autre ?
Les camarades de la « première » position se débarrassent de la question dans la mesure où ils prétendent que « il n’en va pas du problème de la transmission de la conscience des communistes aux masses dans leur ensemble, mais de la nécessité et la possibilité de l’existence d’une politique révolutionnaire en soi ».
Et pendant qu’ils présentent leurs réflexions, ils résument souvent nos positions comme ridicules, les définissant comme « dépassées », « dogmatiques », « étrangères aux expériences des Brigades Rouges », etc. (…).
Nous avons déjà eu l’occasion de constater qu’avec cette manière de considérer les choses [propres à la première position], les communistes ne guident pas la révolution, mais la font, ou mieux : les communistes sont la révolution (…).
Selon nous, et nous prenons le risque d’apparaître impopulaires, l’un des grands mérites des Brigades Rouges est précisément de s’être « coupées » des masses, de s’être élevé plus haut que le niveau de conscience et d’organisation des masses, en tant que force marxiste révolutionnaire.
Ce n’est qu’en se « coupant » des masses que les Brigades Rouges ont pu apparaître en 1970 et ce n’est qu’en restant coupées des masses qu’elles ont pu imposer la lutte armée dans notre pays, qu’elles ont pu prendre Aldo Moro en otage et le juger, qu’elles ont pu concrètement conquérir la grosseur d’un Parti révolutionnaire (…).
[Les partisans de la première position disent:] « Le système démocratique bourgeois (…) a posé et pose de nouveaux problèmes en rapport avec la signification accrue que l’élément subjectif prend dans la dialectique / l’objectivité. »
C’est là « l’utilisation » la plus claire, la plus démasquée et finale qu’il est possible d’avoir du subjectivisme (…).
Ainsi apparaissent deux visions totalement différentes de l’histoire : la « première » position considère la lutte armée comme stratégie, la « seconde » position définit la lutte armée comme méthode décisive de la lutte politique du Parti Communiste (…).
Après la campagne du début de l’année 1978, les Brigades Rouges ont été ainsi obligées de réaliser ce saut qualitatif : passer du niveau de l’Organisation de la propagande armée à celui de Parti révolutionnaire qui fait de la politique par la lutte armée.
Il est connu que l’orientation prise par l’Organisation alors a été totalement autre : comme elle pensait se situer dans la phase de transition de la propagande armée à la guerre civile se développant, elle a vu dans la mise en participation progressive des masses dans le choc militaire les conditions pour parvenir à la prochaine phase.
En raison de cette considération s’est développée un débat intéressant et compliqué, qui s’est conclu par la formulation en septembre 1980 d’une ligne politique particulièrement « compacte », dont l’expression la plus complète est aujourd’hui encore dans le livre « L’abeille et le communiste » (…).
Ce que nous voulons souligner, c’est qu’alors que les Brigades Rouges croyaient en 1980 que le moment était venu d’organiser les masses sur le terrain de la lutte « en partant de leurs besoins », elles se sont tournées vers le principe directeur de la « stratégie » de la lutte armée : étendre autant que possible le choc militaire jusqu’à l’écrasement et la destruction de l’État bourgeois, ériger par étapes un pouvoir alternatif jusqu’au rassemblement des forces nécessaires pour tout écraser.
C’est exactement de cette décision que les Brigades Rouges ont perdu toujours plus leur caractérisation politique et ont oscillé de manière permanente entre spontanéisme et militarisme (…).
Et si quelqu’un grimace encore devant le mot « méthode de lutte », il ne fait que donner la meilleure preuve pour sa pauvreté politique et avant tout la substance subjective qu’il trimballe.
Il n’y a pas de « manière » d’« être » communiste, il n’y a pas à « montrer » le problème, comment on est vraiment révolutionnaire.
Il y a un Parti Communiste qui utilise des méthodes, des moyens, des formes de lutte et de travail définis, afin de mener sa politique révolutionnaire (…).
Pour quoi engageons-nous nos énergies ? Cela est rapidement dit avec trois mots d’ordre :
Réévaluer l’expérience des Brigades Rouges !
Continuer de manière décidée à mener la lutte armée !
Fonder le Parti Communiste Combattant !Les militants de la « seconde » position
Novembre 1984