L’écrasement de 1923 provoqua une véritable onde de choc dans l’esprit de Georgi Dimitrov, surtout que la situation en Bulgarie n’était pas marquée par une amélioration.
Par la suite, le Parti Communiste de Bulgarie (étroit) tenta en effet de prolonger le mouvement, en coopération avec les agrariens et des généraux de gauche.
L’apogée de cela consista, le 16 avril 1925, en la décision d’une partie de la direction de mener l’attaque à l’explosif de la cathédrale Sveta Nedelia devant accueillir la cour du roi lors des obsèques du général Konstantin Georgiev, exécuté par les communistes quelques jours auparavant pour son rôle dans la ligue militaire.
De nombreux généraux furent tués et il s’ensuivit une loi martiale, avec le meurtre de 450 personnes de manière para-légale par la ligue militaire, le gouvernement arrêtant pas moins de 10500 personnes rien que dans la ville de Varna, plus de 13000 à Plovdiv, etc.
Cette série d’échecs nécessitait une véritable réflexion sur ce qui avait échoué, sur l’erreur dans l’analyse des forces sociales en présence.
En 1925, dans La leçon bulgare, Georgi Dimitrov remarque ainsi :
« En même temps que la Chine et le Maroc, le petit pays qu’est la Bulgarie continue à être au centre de l’attention internationale. Et cela n’est évidemment pas un effet du hasard.
Le grand attentat de la cathédrale de Sofia et la terreur qui ensanglanta par la suite le pays eurent un double écho à l’étranger.
Tandis que les gouvernements réactionnaires européens, conservateurs britanniques en tête, utilisaient largement l’attentat perpétré à la cathédrale de Sofia pour renforcer leur campagne contre l’URSS et le soi-disant danger bolchevique, les ouvriers et les paysans révolutionnaires de tous les pays protestaient énergiquement contre le régime tyrannique des bourreaux de Sofia et prenaient la défense du peuple bulgare travailleur (…).
La particularité la plus caractéristique de la terreur bulgare consiste avant tout dans le massacre planifié et organisé de l’avant-garde de la classe ouvrière et des masses paysannes, de leur intelligentsia, de leurs éléments les plus conscients et les plus actifs.
Il ne s’agit plus ici de priver les masses populaires de leurs droits et libertés politiques élémentaires ; il ne s’agit pas de créer des difficultés et des obstacles au développement de l’activité et de la lutte des organisations ouvrières et paysannes.
Ici, nous avons déjà non pas de simples actes de violence et de répression contre le mouvement ouvrier et paysan dans le pays – ce qui ne serait pas encore si terrible.
Non, en Bulgarie, tout l’appareil d’État – police, gendarmerie, armée, justice, parlement et milice armée, constituée par des tueurs triés sur le volet – est mis en branle pour décapiter et saigner la classe ouvrière et les masses paysannes, afin de les rendre ainsi incapables, sinon définitivement du moins pour longtemps, de lutter pour le renversement de la dictature bourgeoise et l’établissement de leur propre pouvoir.
La bourgeoise bulgare armée mène une guerre organisée et méthodique (en utilisant à cette fin tous les moyens dont dispose l’État) contre le peuple travailleur privé d’armes.
Les forces de la contre-révolution se sont déchaînées alors qu’il n’y a pas encore dans le pays de vraie révolution ouvrière et paysanne.
Et dans cette guerre de la bourgeoisie contre le peuple, engagée depuis le coup d’État du 9 juin 1923, sont tombés jusqu’à ce jour plus de 20 000 ouvriers, paysans et intellectuels – l’élite du peuple bulgare.
L’immense majorité de ces victimes de la sanglante terreur blanche ne sont point tombées dans les combats ouverts de la guerre civile, mais furent sauvagement, lâchement assassinées dans les prisons, dans leurs propres maisons, dans la rue ou lors de soi-disant tentatives d’évasion, après leur attestation par le pouvoir « légal ».
C’est selon un plan soigneusement établi et détaillé que l’intelligentsia travailleuse du pays est anéantie – le meilleur, le plus pur et le plus désintéressé que le peuple est parvenu à élever, à éduquer et à rehausser aux premiers rangs durant les quarante années de son existence indépendante (…).
Lors des élections parlementaires du 22 avril 1923 (un mois et demi avant le coup d’État), les deux partis populaires de masse obtinrent 777 000 voix (l’union agrarienne – 577 000, et le Parti Communiste – 220 000), tandis que les partis bourgeois ensemble, y compris les sociaux-démocrates, n’obtenaient que 270 000 suffrages. »
C’était une terrible leçon : les communistes avaient été pris de court. Malgré un véritable succès dans les masses, la réaction avait su conserver l’initiative, procéder à la destruction des secteurs les plus avancés.
Il y avait ici à comprendre ce phénomène, mais Georgi Dimitrov se retrouva encore plus en première ligne avec l’affaire de l’incendie du Reichstag en Allemagne.