[Crise numéro 9, février 2021]
Le tourisme « hivernal » fondé sur les loisirs du ski s’est développé à partir des années 1920-1930. Les congés payés ainsi que le développement de multiples voies ferrées dans les zones montagneuses ont favorisé le développement de ce tourisme. Auparavant utilisé comme un moyen rudimentaire de déplacement par la paysannerie, le ski s’est généralisé comme sport grâce à l’essor des forces productives des années 1960.
Le coup d’arrêt de mars 2020, ainsi que la perspective d’une « saison blanche » 2020-2021 viennent fermer tout un cycle social, économique, et culturel ouvert dans les montagnes françaises au sortir de la seconde guerre mondiale.
La massification du ski dans les années 1970
C’est au sortir de la seconde guerre mondiale que se pose la généralisation du secteur touristique. Il s’ensuit dès les années 1960 une vaste politique de développement de stations de ski, construites de manière ad hoc à moyenne et haute altitudes.
C’est le « plan neige » lancé par le gaullisme, s’étalant de 1964 à 1977, visant à contre-carrer la prolétarisation des couches paysannes, et donc l’exode rural. L’affaiblissement de l’économie paysanne, principalement des alpages, a été le résultat direct de la concentration de l’agriculture dans les mains de quelques gros capitalistes dominés par la grande distribution.
C’est la massification du tourisme hivernal liée à la bourgeoisie et aux couches supérieures de la petite-bourgeoisie. La démocratisation du ski est quant à elle plutôt liée au travail social-démocrate des municipalités dirigées par le P.C.F., avec l’organisation de séjours pour les foyers ouvriers dans le cadres de comités d’entreprises, notamment d’entreprises telles que la SNCF, EDF-GDF.
Massification bourgeoise et relative « démocratisation » peuvent se lire à partir de deux choses culturelles. C’est d’un côté le film populaire « Les bronzés font du ski », de l’autre sa mise en avant pour moderniser l’ancien style bourgeois-conservateur. Cela fait qu’il y a 5,6 millions de français pratiquant le ski alpin, dont plus de 50 % proviennent des villes de plus de 100 000 habitants.
Si le gaullisme a vu les stations de ski comme une manière d’acheter la paix sociale dans les territoires montagneux, l’aile libérale de la bourgeoisie en a fait une partie intégrante de son life style. Cet élan a commencé dans le cadre de la première crise générale, avec notamment la construction d’hôtels et de chalets de luxe à Megève par Noémie de Rothschild, avec la Société française des Hôtels de Montagne fondée en 1919.
On a ainsi les images diffusées à la télévision au milieu des années 1970 du président Valéry Giscard d’Estaing dévalant les pentes de plusieurs stations savoyardes, sans bonnet, avec un simple pull-over et des lunettes de soleil classiques.
Certaines parties des zones montagneuses françaises se sont donc en grande partie développeés sur la base du tourisme hivernal lié à la pratique du ski. Avec l’Autriche et les États-Unis, la France et ses 295 stations, dont 112 sont dans les deux Savoie, sont les trois principaux marchés touristiques du ski dans le monde, suivis ensuite par le Canada, la Suisse, l’Italie et la Slovénie.
Les années 1970-1980 ont été l’apogée de ce qui fut appelé, à raison, l’or blanc
Cet essor social et culturel se base évidemment sur toute une infrastructure logistique, allant de l’hôtellerie-restauration en passant par les commerces de location de ski, jusqu’aux écoles de ski alpin. Mais il y a aussi, toutes la production matérielle qui sous-tend cette activité : industrie du ski, des accessoires vestimentaires, des pylônes de remontées mécaniques, etc.
Les domaines skiables sont de plus en plus concentrés dans des monopoles, que ceux-ci soient de type familial ou de type économique classique.
On a donc soit la grande famille bourgeoise qui gère un domaine tout en s’accaparant et gérant l’ensemble des ressources d’un village sur le mode du notable rural, avec parfois une délégation de gestion à un groupe spécialisé en la matière comme Labellemontagne (onze stations gérées en France).
Soit un monopole tel que la gigantesque Compagnie des Alpes, qui a la Caisse des dépôts et consignations comme actionnaire principal.
Ce monopole gère en partie les fonds de la Compagnie du Mont-Blanc. Elle détient une dizaine de stations françaises comme Val-d’Isère, les Deux Alpes, Serre Chevalier, Flaine, le Grand Massif, Méribel, mais aussi des stations italiennes comme Courmayeur. Elle a également des parts dans La Rosière, Valmorel, Megève, Avoriaz, mais aussi dans les stations suisses de Verbier et Saas Fee. A cela s’ajoute la détention de plusieurs espaces de loisirs et culturels, comme le Futuroscope, le Musée Grévin ou le parc Astérix, des restaurants, plus de 200 magasins de sports.
Avec un bénéfice net de 47,7 millions d’euros (profits) enregistré en mai 2020, la Compagnie des Alpes a perdu un peu plus de 15 millions d’euros suite au premier confinement du printemps 2020 (62,2 Millions d’euros de bénéfices net en 2018-2019).
À la suite des premières annonces de non-ouverture des stations de ski en décembre, des tensions sont d’ailleurs apparues entre le monopole CDA et les stations de ski à gestion familliale-notabilière. Ces dernières ont fustigé la CDA pour soutenir une fermeture en décembre car ayant la trésorerie pour encaisser le coup.
L’hébergement est lui aussi tiré par trois principaux monopoles que sont le « Club Med » avec la possession de 11 villages, « Pierre & Vacances » et ses 6 200 appartements pour 32 500 lits, et « Odalys Vacances », gestionnaire de 128 000 lits et de 257 établissements en France (été/hiver).
Du côté du matériel, on a également un processus de concentration avec principalement deux monopoles que sont Rossignol et Salomon. Ces deux entreprises sont largement élancées dans les années 1950-1960 dans le sillage des « Plan-neige », raflant aujourd’hui respectivement 25 % et 15 % du marché du ski.
Du côté des infrastructures, le secteur est d’autant plus concentré qu’il demande des investissements colossaux en capital constant, pour un taux de rotation du capital assez lent.
On a ainsi pour les remontées mécaniques des monopoles directement lié à leur base nationale : Bartholet pour la Suisse, CCM et Leitner pour l’Italie, Poma et dans une moindre mesure GGM pour la France, Doppelmayr-Garaventa pour l’Autriche et Sky trac pour les États-Unis.
Au niveau des cabines des téléphériques, le secteur est encore plus concentré avec surtout trois entreprises, filiales des groupes précédents : CWA, filiale suisse de l’autrichien Doppelmayr, Gargloff, filiale de BMF, et Sigma Cabins, filiale de Poma.
Ces mastodontes entretiennent toute une activité sous-traitante, comme par exemple la demande en câbles électriques et d’acier, des filiales comme l’usine de Doppelmayr à Modane en Savoie, qui emploie une cinquantaine de personnes fixes, les usines Poma en Isère et en Savoie, etc.
Le tournant des années 1990
Les années 1990 ont été un moment charnière dans les sports d’hiver et l’industrie touristique.
Tout d’abord il y a eu l’essor du snowboard, et du ski freestyle, qui a du être absorbé-intégré par les secteurs capitalistes. L’essor du snowboard est en lien direct avec la critique du ski aseptisé par la bourgeoisie, avec son style « guindé ».
Il fallait pouvoir surfer la neige : c’est ce que propose Jake Burton dès 1979 et qui se généralise progressivement dans les années 1990. Les « snowboarders » ont été très mal vus au départ, avec l’image de punks des neiges, cultivant un entre-soi marginal, alternatif, puisant dans le vie de « saisonniers », souvent vivant en camions aménagés, etc.
Évidemment, les secteurs capitalistes sont parvenus, sans grande difficultés, à intégrer tout cela dans sa machinerie d’accumulation. Il a fallu investir dans de nouveaux moyens de production, former de nouveaux ingénieurs, etc.
Ce qui va apparaître comme un obstacle objectif, lié ici directement à la seconde crise générale, c’est bien évidemment le réchauffement climatique.
L’hiver 1963-1964 avait déjà rappelé la réalité à la bourgeoisie : l’économie du ski est conditionnée à un important aléa climatique. Mais ce sont les hivers « sans neige » de 1988-1989, 1992-1993 puis 2006-2007 qui vont faire basculer les mentalités.
Tout cela a engendré une baisse progressive des volumes de production à partir de la fin des années 1990. À cela s’est ajouté un tassement des marchés asiatiques, principalement celui du Japon, dans le cadre des crises économiques régionales de 1997-1998.
C’est le moment de la restructuration pour les équipementiers, exprimant en fait la baisse tendancielle du taux de profit dans le secteur. On est loin de l’artisan-menuisier, travaillant le bois pour fabriquer des skis, avec des nouvelles technologies, des nouvelles matières, plus d’automation, etc.
Salomon a ainsi été racheté par le groupe finlandais Amer Sports en 1997 à la suite de sa vente par Adidas. En 2008, son dernier site de production de ski à Rumilly en Haute-Savoie est fermé.
Rossignol a quant lui été racheté en 2005 par le groupe américain Quicksilver, avec une série de suppressions d’emplois, avant d’être revendu à fonds australien Macquarie & Jarden courant 2008. En 2013, c’est le fonds norvégien Altor qui rachète finalement le groupe Rossignol.
Depuis les dernières années, ces équipementiers ont cherché à diversifier leur production dans le domaine des loisirs estivaux (trails, randonnées, vtt, etc.), mais cela ne va pas suffire à faire face à l’ampleur de la dégringolade liée à la crise sanitaire de 2020-2021.
Du côté des stations de ski, il y a eu investissement massif dans les canons à neige. Auparavant limités à telle ou telle grand domaine, et à tel piste exposé à l’adret (plein soleil), les canons à neige ont envahi toutes les stations de ski pendant les années 2000.
Cela modifie grandement le cycle d’écoulement des eaux, avec des conséquences négatives sur la faune et la flore. Des conflits ont également lieu quant à l’usage des cours d’eau pour les réserves de canons à neige, rendus explosifs avec les sécheresses de plus en plus régulière.
A ce titre, notons que l’ajout de Pseudomonas syringae pour fabriquer de la neige artificielle malgré des températures positives élevées, porté notamment par la marque Snomax, est interdit dans deux régions autrichiennes ainsi qu’en France. Elle est par contre autorisée en Suisse et aux Etats-Unis.
Le Pseudomonas syringae est une bactérie qui lorsque la neige artificielle fond, s’attaque et tue certains végétaux de l’intérieur. Les tensions produites par la seconde crise générale du capitalisme, sur fond de réchauffement climatique, pourrait rabattre les cartes de cette question.
Il y a également une course à l’extension des domaines, pour proposer des vastes étendues, avec des pentes douces à destination d’une clientèle peu sportive. Cela implique des travaux estivaux de terrassement délétères au plan écologique.
C’est le basculement des stations de ski dans la décadence complète, de plus en plus portée par une clientèle huppée cosmopolite, bien loin de l’effort sportif et très proche de l’esprit loisir-festif avec tout l’impact écologique occasionné.
Si la critique écologique a émergé dans le milieu des années 1970, elle était réduite à l’aspect romantique anthropocentré des « paysages » et de la disparition des milieux paysans. Cette dimension va s’effacer dans les années 1990-2000, avec une insistance plus forte sur un réchauffement climatique qui se découvre à vue d’œil.
Dans les Alpes, la température moyenne a augmenté de + 2°c, avec une baisse de l’enneigement en-dessous de 1600 mètres. Les stations de Pyrénées sont les plus directement touchées.
Le coup d’arrêt brutal de 2020
Les effets sociaux et culturels de la crise sanitaire
On assiste depuis le mois de novembre 2020 à une sorte de fuite en avant des dirigeants du secteur, qui se sont félicités du semi-confinement d’octobre dans l’espoir d’une ouverture pour la fin décembre afin d’attirer la clientèle française.
En décembre, des élus du Parti socialiste sont même allés jusqu’à signer une tribune corporatiste pour légitimer la ré-ouverture des remontées mécaniques. Cela témoigne du renforcement du fascisme, comme reflet du raidissement des monopoles.
Dans une lettre ouverte au premier ministre Jean Castex, Henri Giscard d’Estaing, fils de l’ancien Président décédé du covid-19, et président du Club Med demandait la ré-ouverture pour février. Il constatait que qu’avec plus de « 50 % du PIB de la Savoie, et un peu moins en Haute-Savoie […] plus de 100 000 emplois saisonniers pourraient disparaître ».
Guy Bloch, tout à la fois maire de la station des Plagnes en Savoie, président de l’Association nationale des maires de stations de montagne (ANMSM) et du « syndicat » France montagne, annonce la disparition de dizaines de milliers de commerces, tout en ajoutant dans un article du Figaro :
« Si nous ne sommes pas ouverts pour le 6 février ça va être dramatique car les aides seront insuffisantes pour permettre la survie de l’écosystème.
Ce qui est gagné en hiver est réinvesti le reste de l’année sur tout le territoire donc si le modèle économique disparaît ce sont des dizaines de milliers d’emplois qui seront supprimés et des dizaines de milliers de familles qui quitteront la montagne pour partir en milieu urbain »
Il y a bien là tout un cycle entamé à partir des années 1950, et maintenu coûte que coûte en vie depuis les années 1990. La seconde crise générale du capitalisme marque ainsi une gigantesque rupture, avec bien évidemment un inégale répartition. Ce sont les stations dite de seconde et troisième générations qui sont le plus touchées.
Alors que les premières stations sont celles de basse altitude développées autour d’un village pré-existant (Chamonix, Megève, Grand Bornand, etc.), les stations de seconde génération ont été créées au-delà du village d’origine. L’ensemble de l’espace foncier et commercial du village a été consommé pour les « besoins » du tourisme hivernal, comme Courchevel ou l’Alpe d’Huez.
Quant à la station de troisième génération, elle correspond plus directement au « Plan-neige » des années 1960-1970 : construite à plus haute altitude, elle a comme particularité d’être « intégrée » avec parkings, buildings de plusieurs étages et routes permettant d’accéder aux pistes « ski en main ». C’est le cas de Flaine et d’Avoriaz en Haute-Savoie, Tignes et Isola 2000 en Savoie.
Alors que les stations de moyenne altitude (première et seconde génération) enregistrent un recul de 35 % à 60 % de leur réservation, les grands domaines de type troisième génération ont connu un recul de près de 90 % de leur activité normale. Le village-station a pu limiter la casse en proposant d’autres activités.
Par exemple, à Val Thorens, le mois de décembre n’a enregistré que 2 000 touristes contre 25 000 d’ordinaires. De manière générale, la perte moyenne des stations de ski toutes confondues était estimé mi-janvier à 70 %.
L’apparition des variants britanniques, sud-africain et brésilien à la fin décembre 2020, notamment dans la station de ski suisse de Saint Moritz, a clôt toute perspective d’ouverture pour les vacances de février des stations françaises.
A l’inverse, les stations de ski en Autriche et en Suisse sont restées ouvertes, alors que celles en Italie sont également fermées. Ces inégalités provoquent forcément un aiguisement de la concurrence.
La saison blanche va donc être une véritable onde de choc, avec notamment le bouleversement en profondeur du mode de vie saisonnier. Un mode de vie qui, s’il cherche à s’échapper de manière justifiée de la monotonie prolétaire, est culturellement au service du capitalisme. A ce titre, il va bien leur falloir chercher une solution puisque la réforme de l’assurance-chômage prévue au printemps 2020 n’a fait qu’être repoussé du fait de la crise sanitaire.
Cette impossibilité d’avoir une activité a entraîné toute une contestation portée par une alliance de notables bourgeois des stations, de petits commerçants et d’une partie des travailleurs saisonniers. A l’inverse, une partie de la population montagnarde a vu dans cet arrêt un moment de répit pour les animaux sauvages.
C’est l’expression ici d’une opposition de classe, déjà présente mais que les effets de la crise sanitaire rendent de plus en plus antagoniste, ouvrant un nœud de contradictions révolutionnaires.
Une fuite en avant sous la domination unilatérale des monopoles
Forcées de fermer de manière prématurée en mars 2020, les stations de ski ont enregistré une perte d’environ 1,5 milliards d’euros. L’Agence Savoie Mont-Blanc annonce une perte de 5,8 milliards d’euros si la fermeture des stations est maintenue jusqu’à fin mars, et de plus de 4 milliards dans tous les cas.
Or, plus d’un tiers, voire plus, du PIB de ces départements provient des recettes touristiques. C’est un gigantesque crash. Le directeur générale du Tourisme en Savoie parle d’« une situation de crise totalement inédite » ; celui des Hautes-Alpes affirme que c’est « tout le territoire montagnard qui est mis en péril, par effet domino ».
Les prémices de la future secousse sont déjà là. Pour n’en citer que quelques exemples, l’autrichien Doppelmayr a annoncé le licenciement de 190 salariés.
L’entreprise de ski Rossignol a supprimé 92 postes dès la rentrée 2020, soit avant la saison blanche 2020-2021 et alors que près de 45 % des ventes de ski en France sont pris par les magasins de location en station. Dans la station des Carroz, seulement 80 saisonniers travaillent sur 450 embauchés (800 en temps normal).
Les secteurs les plus touchés vont être l’hôtellerie-restauration, les commerçants de location de matériel, puis les équipementiers de ski comme Rossignol et Salomon, entraînant une véritable effet en cascade sur les clients et fournisseurs qui leur sont liés. Avec 1,4 millions de lits à disposition, les pertes dans le secteur de l’hôtellerie vont être dantesques.
Pour les gestionnaires des remontées mécaniques elles-mêmes, le coût est d’autant plus rude que les charges fixes (loyers, entretien mécanique, damage, sécurisation des couloirs, etc.) sont très élevées. Des charges qui ont continué à être payé comme si la saison allait repartir.
Il y a eu une masse d’argent déboursée pour finalement zéro recettes, car le damage des pistes a continué, et les canons à neige ont continué de tourner. Rien que le damage d’un domaine d’une centaine de kilomètres de pistes coûte 15 à 20 000 euros par nuit.
Le remboursement des aides va être explosif, en plus du gonflement d’une dette faramineuse. La Compagnie des Alpes a contracté par exemple deux PGE (prêt garanti par l’État) avoisinant les 500 millions d’euros, alors même que ses bénéfices net en mai 2020 étaient de 47,7 million d’euros. Il y a un décalage énorme.
A noter d’ailleurs que Dominique Marcel, le Président-directeur général de la Compagnie des Alpes, a pris la présidence de l’Alliance France Tourisme, auparavant occupée par le directeur général du groupe hôtelier Accor.
Enfin dans une moindre mesure les producteurs des infrastructures vont aussi être touchées. Ce dernier secteur est intéressant à analyser, tant il exprime le renforcement des monopoles dans l’appareil d’État.
En effet, avec l’explosion des dettes publiques et privées, les monopoles des remontées mécaniques et des cabines vont également connaître un coup d’arrêt, avec des investissement en berne.
Alors que les monopoles du secteur cherchaient à ré-orienter progressivement leur activité vers le transport par câbles urbain du fait du réchauffement climatique, le coup d’arrêt brutal de 2020 met fin à cette transition « pacifique ». Si l’on regarde seulement ces entreprises, on constate en effet une course à la conquête de marchés extérieures des transports par câbles urbain.
Cela accentue les rivalités inter-impérialistes, comme le montre par exemple le décrochage par Poma de la construction du téléphérique à Oulan-Bator en Mongolie. L’État français a accordé un prêt à la Mongolie, conditionné à l’obtention par Poma de la construction d’un téléphérique à Oulan-Bator. C’est là une preuve de prise de contrôle de l’État par la fraction monopolistique du capital français.
Dans le même temps, au niveau des stations de ski elles-mêmes, il est déjà annoncé un partenariat entre la Banque des territoires (propriété de la Caisse des Dépôts) et le Crédit Agricole des Savoie pour développer, pour l’instant seulement à Aime-La Plagne et La Clusaz des projets, tels que des ascenseurs valléen (transport par câbles), de l’ « immobilier raisonnable », etc. Le prix de l’immobilier a dégringolé en quelques semaines, révélant la surproduction de marchandises.
L’impact de la seconde crise générale du capitalisme sur les stations de ski forme une onde de choc historique pour ces régions. C’est toute la dynamique qui est grippée, avec également une baisse des recettes fiscales pour les communes, les départements, bloquant les investissements publics.
À cela s’ajoutent des professions en dehors des aides de l’État, comme les cabinets de médecins, faisant courir le risque de déserts médicaux déjà prégnant dans ces zones.
Il est évident que les habitantes et les habitants des zones montagneuses voient s’ouvrir une nouvelle période historique, avec en toile de fond la problématique écologique qui se heurte à la bourgeoisie cosmopolite, principale clientèle tirant les stations de ski.
Il y a là une situation explosive pour les prochaines années, d’autant plus forte que ces départements ont été habitués à une richesse touristique débordante, impliquant la formation de subjectivités en rupture avec tout cela.