La productivité sociale du travail est un critère essentiel. Pour une même exploitation – pour un même nombre d’heures non payées – le taux de plus-value peut être très différent.
Tout est une question de l’importance du capital investi, ainsi que sa forme. Prenons deux exemples bien différents :
a) Le premier est connu : un ouvrier du textile au Bangladesh est plus rentable qu’un ouvrier du textile en France, car le capital à investir pour la même production est plus grand en France, de par les conditions de travail, de sécurité, etc., sans parler du salaire.
Même si les deux ouvriers avaient le même salaire, le coût des machines, ateliers, etc. ferait que l’ouvrier en France serait moins rentable. La part du travail humain doit être la plus grande possible, comme on le voit.
b) Prenons un autre exemple. Un ouvrier de l’aéronautique en France est plus rentable qu’un ouvrier équivalent en Inde, car il est plus éduqué et peut faire fonctionner des machines plus puissantes et perfectionnées, amenant une production plus importante.
Les deux exemples donnés sont contradictoires : d’un côté, les capitalistes ont intérêt à exporter leur capital, de l’autre ils ont intérêt à ne pas le faire. Il y a à la fois toujours plus de hausse de productivité et, en même temps, toujours plus d’ouvriers.
C’est une contradiction – précisément au cœur du capitalisme, pour des raisons bien précises. Cela la bourgeoisie ne le voit pas et dit que les ouvriers sont de moins en moins.
Pourquoi cela ? Parce que les capitalistes sont prisonniers, dans leur conscience, d’un seul aspect du capitalisme.
Il se passe la chose suivante : la bataille pour les parts de marché fait qu’il y a bataille pour abaisser les coûts de production et à cela s’ajoute la nécessité pour le capital de toujours plus étendre ses profits.
Or, les capitalistes regardent donc sur quelles variables ils peuvent jouer. Ils voient ainsi qu’ils peuvent procéder à l’abaissement de la part de main d’oeuvre employée : ils veulent un nombre moindre de salaires à payer, pour obtenir cependant la même production ou une plus grande production.
La hausse de la productivité permet cela, et ils se disent qu’ils y gagnent… alors qu’en réalité ils perdent tout.
C’est ici que le problème est fatal pour le mode de production capitaliste. Car les profits ne trouvent pas leur source réelle dans le commerce des marchandises, mais dans l’exploitation du prolétariat. Cela les capitalistes ne le voient pas : ils s’imaginent que la production de marchandises et surtout leur vente suffit en soi à leur fournir les profits.
Cependant, employer moins de prolétariat en produisant autant, ce n’est pas se débarrasser de salaires, mais abaisser les profits. Voilà ce que les capitalistes ne voient pas.
Plus la partie du travail humain est faible dans la production, plus le travail qui est extorqué aux prolétaires est faible, et donc moins il y a de profits réels, car les véritables profits du capitaliste reposent sur l’extorsion de travail aux prolétaires, sur la plus-value.
Karl Marx dit ainsi :
« La loi de la baisse du taux de profit qui traduit un maintien du taux de plus-value ou même une hausse de ce dernier signifie en d’autres termes : étant donné une certaine quantité de capital social moyen, un capital de 100 par exemple, la fraction de celui-ci qui représente des moyens de travail ne cesse de croître et celle qui représente du travail vivant ne cesse de diminuer.
Mais, comme la masse totale du travail vivant ajouté aux moyens de production baisse par rapport à leur valeur, le travail non payé et la portion de valeur qui le représente baissent aussi par rapport à la valeur du capital total avancé.
Ou encore: une partie aliquote de plus en plus petite du capital total investi se convertit en travail vivant et ce capital total absorbe donc, proportionnellement à sa grandeur, toujours moins de surtravail, même si, ce qui est possible, dans le travail employé le rapport du travail non payé au travail payé vient à croître en même temps. »