La problématique du syllogisme chez Aristote

Aristote s’évertue à conceptualiser le principe du syllogisme. Il dit ainsi :

« J’appelle moyen le terme qui, étant lui-même renfermé dans un autre, renferme aussi un autre terme, et devient alors moyen par sa position même.

Les extrêmes sont, et le terme qui est contenu dans un autre terme, et le terme qui en contient aussi un autre. »

Ce n’est, comme d’habitude, absolument pas clair. Le principe est le suivant ; fondons-nous pour cela sur :

Tout punk a une crête
Or, Sid est un punk
Donc Sid a une crête

La crête est ici le terme dit majeur, Sid dit le terme mineur, punk le terme moyen. C’est par le moyen terme qu’on a une nouvelle combinaison.

Ce qu’on appelle terme mineur est en fait toujours le sujet du dernier énoncé, le terme majeur est le « prédicat » du dernier énoncé. Ce sont les extrêmes, qui sont, de fait de manière dialectique, en contradiction avec le moyen.

Seulement voilà, tout va dépendre de la nature des propositions employées. Le syllogisme qu’on a ici est formellement juste – formellement seulement, car en réalité tout punk n’a pas forcément une crête.

Mais prenons le suivant, qui est faux dans sa structure même :

Sid a une crête
Tous les punks ont des crêtes
Donc Sid est un punk

En effet, on peut très bien avoir une crête sans être punk. Cette question du rapport logique entre les énoncés dépend de beaucoup de facteurs, qu’Aristote va justement déterminer. Ce n’est pas pareil de faire une proposition à portée universelle et une à portée particulière, comme Les hommes sont mortels ou bien Socrate est mortel.

Pareillement, faire une proposition affirmative se distingue de la proposition négative. Dire Tous les chats sont gris n’est pas de même nature que Tous les chats ne sont pas gris – ou encore Aucun chat n’est gris.

De plus, il va de soi que si le terme moyen – on parle plutôt de moyen terme – est placé différemment, cela change autant le système.

Tout cela est pourtant essentiel, car Aristote veut contempler la réalité, et pour lui elle est déterminée au sens de fixe, étant donné que le mouvement est impulsé par l’extérieur. Parle-t-on également d’une chose nécessaire, ou simplement contingente ? Cette chose contingente est-elle possible au sens d’habituel, ou possible au sens d’inhabituel ? Aristote veut être capable de parler de tout, de manière adéquate.

Par le syllogisme, il entend alors maximiser l’affirmation au moyen de la contradiction de la quantité et de la qualité. C’est en effet en jouant sur la quantité et la qualité, en procédant à des conversions, des oppositions, qu’on découvre d’autres syllogismes, qu’on les vérifie, etc.

Aristote dresse pour cela le catalogue des possibilités, dans un langage très ardu, du type :

« Si l’universel attributif ou privatif est placé à l’extrême mineur, il n’y aura pas de syllogisme, que d’ailleurs la proposition indéterminée ou particulière soit affirmative ou négative (…).

Quand l’universel, soit attributif soit négatif, est placé au majeur, et que le particulier privatif est placé au mineur, il n’y aura pas non plus de syllogisme, soit qu’on fasse le privatif indéterminé soit qu’on le fasse particulier (…).

Il n’y aura pas davantage de syllogisme si les deux intervalles sont particuliers, affirmatifs ou négatifs, ou si l’un est affirmatif et l’autre négatif, ou bien si l’un est indéterminé et l’autre défini, ou enfin si tous deux sont indéterminés. »

Tous les premiers analytiques consistent en une analyse des différents types de syllogisme, de leur construction, de leur validité, c’est-à-dire des règles du syllogisme.

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