par Situé Li, publié dans Pékin Information, le 10 janvier 1972
Dans le n°27, 1971, de « P.I. » figure un article des Rédactions du « Renmin Ribao », du « Hongqi » et du « Jiefangjun Bao », intitulé : « Célébrons le cinquantième anniversaire du Parti communiste chinois », dans lequel un appel était lancé aux membres et aux cadres du Parti pour qu’ils examinent les problèmes selon « la théorie des deux points et non celle d’un seul ».
Certains lecteurs nous ayant demandé des éclaircissements, nous publions à leur intention l’article ci-dessous.
Qu’est-ce que la théorie des deux points ?
C’est ce que nous appelons habituellement la dialectique matérialiste, ou encore la théorie marxiste-léniniste de la loi fondamentale de l’univers.
Le président Mao a d’ailleurs fait à ce sujet un exposé complet et approfondi dans son ouvrage De la contradiction. Nous nous bornerons donc à exposer brièvement notre compréhension de ce problème.
Quelle est la loi du mouvement et du développement de l’univers ?
Ce n’est qu’avec l’apparition de la théorie de la philosophie marxiste qu’une réponse scientifique a pu être apportée à cette question.
Dans le Capital, traitant de la loi qui porte à produire une baisse tendancielle du taux de profit général, K. Marx écrit : Cette loi, c’est
« cette connexion interne et nécessaire entre deux choses qui se contredisent en apparence ».
Le marxisme estime que toute chose et tout phénomène objectifs comportent deux tendances opposées − l’interdépendance et la lutte réciproque − qui déterminent l’existence de toutes les choses et de tous les phénomènes et les poussent dans leur développement.
V.I. Lénine disait :
« On peut brièvement définir la dialectique comme la théorie de l’unité des contraires. »
Et d’ajouter que c’est là
« le noyau de la dialectique ».
Le président Mao a dit pour sa part :
« La philosophie marxiste considère que la loi de l’unité des contraires est la loi fondamentale de l’univers.
Cette loi agit universellement aussi bien dans la nature que dans la société humaine et dans la pensée des hommes. Entre les aspects opposés de la contradiction, il y a à la fois unité et lutte, c’est cela même qui pousse les choses et les phénomènes à se mouvoir et à changer. »
La loi de l’unité des contraires, c’est la conception marxiste du monde, la méthodologie marxiste. Avoir une conception marxiste du monde, c’est considérer toute chose et tout phénomène comme une unité des contraires, conformément à la loi de leur mouvement et de leur développement.
Quant à la méthodologie marxiste, elle est l’utilisation de cette loi pour connaître et transformer le monde. La méthodologie s’appelle, dans notre langage courant, la méthode dialectique de l’analyse. Elle a été qualifiée par Lénine de « dédoublement de ce qui est un » et par le président Mao de « un se divise en deux ».
Dans la pratique révolutionnaire, l’application correcte de la conception marxiste du monde et de la méthodologie marxiste revêt une importance capitale. Si l’on n’arrive pas à posséder la méthode dialectique de J’analyse, qui est une méthode scientifique, on ne pourra connaître le monde tel qu’il est et encore moins le transformer.
C’est pourquoi Je président Mao a maintes fois recommandé aux cadres du Parti de savoir utiliser la méthode scientifique de l’analyse.
Pour en faciliter la compréhension, il s’est toujours servi pour traiter de différents choses et phénomènes d’un langage populaire, vivant et facile à comprendre, et les expressions les plus couramment employées sont la théorie des deux points, la méthode de partage en deux et la double nature. Bien que ces expressions soient différentes, elles traduisent toutes la loi de l’unité des contraires.
En envisageant toute question, qu’il s’agisse de l’évaluation d’un travail, de l’étude des problèmes de la production, de l’analyse de la situation mondiale ou de la direction d’une guerre révolutionnaire etc., il faut adhérer sans exception à la théorie des deux points et appliquer la méthode dialectique de l’analyse.
Le président Mao a dit que « notre attitude à l’égard de chaque personne et de chaque question doit être l’analyse et l’étude » et qu’ « il est nécessaire de tracer une ligne de démarcation entre ce qui est juste et ce qui est faux, entre ce qui est succès et ce qui est insuffisance ».
Quel que soit le travail qu’il accomplit, un vrai révolutionnaire apporte une contribution à la révolution dans la mesure où il œuvre dans l’intérêt du peuple et applique une ligne juste ; son travail doit alors être considéré comme essentiellement positif. Il faut soumettre celui-ci à une analyse concrète et éviter de tout admettre ou de tout rejeter, en bloc, sans voir les insuffisances et erreurs dans un cas et les succès dans l’autre.
De même, nous devons adopter une attitude analytique à l’égard des difficultés comme de l’avenir lumineux. En luttant contre l’impérialisme étranger et la réaction intérieure, les nations et peuples opprimés connaissent inévitablement des vicissitudes et ne peuvent faire un pas en avant sans surmonter de nombreux obstacles.
En l’occurrence, il leur faut avoir en vue aussi bien les difficultés que l’avenir lumineux ; il leur faut admettre l’existence des difficultés, les analyser et les combattre avec la conviction que leurs efforts les conduiront vers de brillantes perspectives.
Les succès et les insuffisances, les difficultés et l’avenir radieux, tels sont les deux aspects d’un seul et même processus, telle est l’unité des contraires. Si l’on ne tient compte que des succès et du côté lumineux sans être conscient des insuffisances et des difficultés, on agira à l’aveuglette et mènera à l’échec l’ensemble de l’œuvre.
Inversement, on versera dans la passivité et le pessimisme et finira par abandonner la lutte en perdant tout espoir en la victoire.
Quand il s’agit d’évaluer les forces réactionnaires, il faut également recourir à la théorie des deux points, autrement dit, tenir compte de leur nature double.
Ces forces s’acheminent vers une ruine inévitable parce qu’elles représentent les classes décadentes et qu’elles se font l’ennemie des peuples de leurs propres pays et du reste du monde.
C’est en se fondant sur ce principe que le président Mao a formulé sa célèbre thèse selon laquelle « l’impérialisme et tous les réactionnaires sont des tigres en papier ».
D’autre part, il faut se rendre compte du fait que l‘impérialisme et les réactionnaires ne sont que temporairement forts parce qu’ils tiennent encore entre leurs mains l’appareil d’État ou même des armes nucléaires.
Dans ce sens, ce sont de vrais tigres, des tigres mangeurs d’homme, auxquels nous devons faire face avec tout le sérieux voulu.
Partant de l’analyse de la double nature des forces réactionnaires, le président Mao a formulé le concept stratégique : « Du point de vue stratégique, nous devons mépriser tous les ennemis, et, du point de vue tactique, en tenir pleinement compte », concept qui permet au prolétariat de vaincre l’ennemi et de s’assurer la victoire.
Ce jugement du président Mao a été corroboré par l’histoire de la révolution chinoise de même que par la pratique révolutionnaire dans de nombreux pays.
Il faut encore recourir à la théorie des deux points dans l’analyse de la situation mondiale. Le 20 mai 1970, le président Mao, dans une déclaration solennelle intitulée : « Peuples du monde, unissez-vous, pour abattre les agresseurs américains et tous leurs laquais ! », a indiqué que « le danger d’une nouvelle guerre mondiale demeure et les peuples du monde doivent y être préparés. Mais aujourd’hui, dans le monde, la tendance principale, c’est la révolution. »
Le « danger d’une guerre mondiale » et la « révolution » sont les deux aspects de cette unité qu’est la situation mondiale. Et qu’en est-il de ces deux aspects ?
Le président Mao a souligné que « le danger d’une nouvelle guerre mondiale demeure » et que « la révolution est la tendance principale ».
C’est après avoir observé et analysé l’évolution de la situation mondiale de ces vingt et quelques dernières années et étudié les changements intervenus dans le rapport des forces entre les peuples révolutionnaires d’une part et l’impérialisme américain et ses laquais de l’autre que le président Mao a dégagé cette thèse perspicace portant sur les caractéristiques de la situation de la lutte de classes sur le plan international.
L’histoire d’après-guerre qui s’étend sur une vingtaine d’années est une histoire qui a vu les peuples mener contre l’impérialisme américain et ses laquais des combats acharnés et toujours recommencés, une histoire au cours de laquelle ces derniers n’ont cessé de se livrer à des guerres d’agression et les peuples de divers pays n’ont cessé de recourir à la guerre révolutionnaire pour vaincre les agresseurs.
Animé de l’ambition de dominer le monde, l’impérialisme américain se livre partout à l’agression, à l’intervention et au sabotage, amenant ainsi les peuples de divers pays à discerner de plus en plus clairement sa nature agressive et sa faiblesse inhérente et à se jeter dans des luttes révolutionnaires contre l’agression et l’oppression.
Avec l’exacerbation des diverses contradictions fondamentales, la prise de conscience des peuples s’affirme et le mouvement révolutionnaire des peuples du monde s’amplifie. La lutte contre l’impérialisme américain connaît actuellement un nouvel et impétueux essor à l’échelle mondiale.
Les pays veulent l’indépendance, les nations veulent la libération et les peuples veulent la révolution, tel est le courant irrésistible de l’Histoire, la tendance principale du développement actuel de la situation internationale.
Le monde change et devient toujours plus favorable aux peuples. Nous avons là l’un des deux aspects qui est de plus l’aspect principal ; mais il ne faut pas perdre de vue l’autre aspect, à savoir que la nature agressive de l’impérialisme ne changera jamais.
L’impérialisme U.S. ne saurait se résigner à sa défaite ; il n’a pas relâché un seul instant sa course aux armements et ses préparatifs de guerre ni renoncé le moins du monde à ses ambitions agressives. V.I. Lénine disait :
« La guerre des temps modernes est engendrée par l’impérialisme. »
En effet, tant que celui-ci existe, le monde ne peut pas connaître de tranquillité et est menacé d’une nouvelle guerre mondiale.
Voilà l’autre aspect du développement du monde d’aujourd’hui. Il serait dangereux de ne voir que les flammes de la lutte révolutionnaire et non l’ennemi qui affile son épée, et de vouloir dormir sur ses deux oreilles puisque la situation est excellente.
Pour s’en tenir à la théorie des deux points, il est indispensable de s’opposer à celle d’un seul. Cette dernière est la méthodologie métaphysique de l’idéalisme qui fait envisager les choses de façon absolue et unilatérale. Tout comme l’a indiqué le président Mao :
« La métaphysique, ou l’évolutionnisme vulgaire, considère toutes les choses dans le monde comme isolées, en état de repos ; elle les considère unilatéralement. »
De ce de point de vue, on considérerait le monde objectif comme une entité figée et immuable où n’existent pas de liens réciproques, ou encore on prendrait un aspect pour le tout. Cette conception du monde et cette méthodologie de nature idéaliste sont contraires à la loi du développement des choses objectives. Les utiliser pour analyser la situation, régler une affaire ou commander une guerre ne peut que conduire à l’échec.
Pouvoir ou non s’en tenir à la théorie des deux points et rompre avec celle d’un seul n’est pas simplement une question de méthode mais une question de conception du monde.
La première est la conception prolétarienne du monde tandis que la seconde est la conception du monde de la bourgeoisie et de toutes les autres classes exploiteuses.
Dans la société de classes, il n’existe aucune pensée qui ne porte une empreinte de classe et ne soit déterminée par l’orientation politique d’une classe donnée.
Ceux qui ne sont pas issus des classes exploiteuses subissent néanmoins inévitablement l’influence de l’idéalisme et de la métaphysique qui est partout présente dans la société de classes.
C’est pourquoi, dans les rangs révolutionnaires, chacun doit veiller à éliminer de son esprit les vues idéalistes et métaphysiques et transformer sans cesse son monde subjectif au cours de la lutte pour transformer le monde objectif.
Ainsi seulement parviendra-t-on à s’en tenir à la théorie des deux points et à s’opposer à celle d’un seul.
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