Le matérialisme dialectique, aboutissement du long cheminement de l’Humanité depuis la sortie de la Nature

Le matérialisme dialectique n’a pas été compris et arboré de manière approfondie, maîtrisée et prolongée en France.

Cela tient au fait fondamental que le marxisme n’a pas été compris en tant que tel, en raison de la puissance culturelle de la bourgeoisie en France et de l’incapacité de la gauche à assimiler le concept de mode de production, et en conséquence, de lutte des classes.

La lutte des classes et la notion de capitalisme elle-même ont a toujours été compris depuis un point de vue non antagoniste à la bourgeoisie. La notion de Révolution n’était en fait saisie que par le biais de la grande Révolution bourgeoise de 1789.

Le matérialisme en France est, en fait, à l’origine même un matérialisme bourgeois, c’est-à-dire un matérialisme incomplet, jamais pleinement saisi, systématiquement relativisé et fatalement dérivé, frelaté, finalement dénaturé.

Ce n’est pas faire injure ici à Diderot, La Mettrie, d’Alembert, Voltaire, d’Holbach, Monstesquieu, Helvétius, Rousseau, Condorcet… que de dire cela.

Posons de manière ramassée et encadrée trois points qui, selon notre analyse forgée par la pratique révolutionnaire active et l’intense réflexion théorique sur la société française, entrave la juste compréhension du matérialisme dialectique, afin d’armer idéologiquement les agents de la rupture en France pour qu’ils puissent jeter sur le feu de la décadence de la France bourgeoise l’implacable huile de la Révolution et sa perspective culturelle totale, se dressant face à la bourgeoisie sur tous les fronts.

Idéologie, Religion, Cosmologie :
le sentier lumineux de la vision du monde totale

Radicalement, on veut la Révolution, car on rejette le monde actuel. On veut en modifier les fondements. Cela implique d’analyser, de comprendre le monde dans lequel on vit, non pas de manière unilatérale ou binaire, mais dialectique.

Le monde n’est pas « pur » ou « impur », pas plus qu’il n’est immobile, ou en « transition ». Il n’existe pas non plus de zones « anticapitalistes » ou non-capitalistes ; il n’y a aucun refuge contre le réel, il n’existe pas de petit coin de paradis en enfer.

Il existe une période historique, qui définit l’ensemble des faits, leur attribuant des caractéristique. Cela rentre dans un cadre beaucoup plus général, beaucoup plus vaste : l’univers lui-même est en transformation de manière différenciée. Il y a des contrastes, des différences, des luttes, entraînant le développement de certains aspects contre d’autres avec, au bout du compte, la transformation générale.

Tout n’avance pas bien sûr au même rythme, toutefois il y a un ensemble, formant une réalité, et tout ce qui se joue dans cet ensemble participe de la transformation. Rien ne peut émerger sans se rattacher à la réalité en étant en même temps issue d’elle.

Par exemple, une personne qui va s’engager politiquement à Droite de l’échiquier politique parce qu’elle refuse la violence sociale, les trafics, les agressions dans la rue, a tort politiquement, mais son engagement relève d’une certaine dignité : une dignité égarée, mais réelle. On ne peut pas dire à cette personne une chose comme : « tu as tort de t’engager à Droite car il n’existe pas de violence sociale ou de trafics, etc. »

C’est ce que nous appelons : la dignité du réel. De la même manière, pourquoi certains travailleurs sont-ils égoïstes, et se comportent en capitalistes s’ils le peuvent ? C’est qu’ils ont compris qu’il fallait l’abondance matérielle, mais ils choisissent de s’extraire de la classe et de viser une abondance égoïste.

Le capitalistes eux-mêmes sont, pour caricaturer, des « communistes » égoïstes, qui veulent vivre leur propre « communisme », bien entendu défiguré, fondé sur l’appât du gain, avec l’argent comme fétiche d’une possibilité pratique d’abondance.

Autrement dit, rien n’existe sans origine historique, sans relever du réel, car toutes les activités et les pensées de l’Humanité ne sont que le reflet du réel, comme ensemble en transformation.

Cet ensemble en transformation est, à le prendre de la manière la plus complète possible, le Cosmos, éternel et infini, dont notre planète comme biosphère est un élément particulier, tout comme l’Humanité forme dans la biosphère un élément particulier, en tant que matériel biologique participant à l’ensemble de manière symbiotique et toujours plus complexe.

Fondamentalement, c’est là le coeur du matérialisme dialectique.

Ajoutons que l’Humanité s’est développée et affirmée dans sa particularité comme matière pensante, la pensée étant une activité produite par le mouvement naturel de la matière vers la vie toujours plus complexe.

C’est cette particularité qui a fait que l’Humanité a travaillé et s’est organisée de manière consciente, produisant des sociétés toujours plus complexes et différenciées, produisant des contradictions entre les sociétés et la Nature, mais aussi entre les sociétés elle-même.

Ce mouvement relativement propre aux sociétés humaines, c’est l’Histoire, qui s’est traduite par une transformation de l’Humanité comme espèce sociale, entraînant une rupture relative, mais impossible dans l’absolu, entre l’Humanité et la Nature.

La conscience de ce mouvement historique a mis des millénaires à émerger dans la pensée humaine, jusqu’à la compréhension que l’Histoire n’était qu’une contingence relative et particulière à l’Humanité, finalement englobée dans l’ensemble de la réalité matérielle en mouvement.

En somme, ce qu’on appelle le matérialisme historique, qui traite de l’histoire plus directement, est un élément du matérialisme dialectique, et le premier est appelé à se fondre dans le second, dont il est issu.

On peut considérer que l’Histoire de l’humanité aura une fin, mais pas le mouvement dialectique de la matière, car l’Humanité va « revenir » dans la Nature, transformée par l’Histoire, avant d’entrer dans l’ère consciente de la symbiose toujours plus complète et complexe avec le Cosmos éternel et infini.

C’est ce que Karl Marx appelait un « Humanisme de la Nature et une Naturalisation de l’Humanité ».

C’est ce qui a été précisée dans la Chine révolutionnaire à l’époque de Mao Zedong (extrait de la revue Dialectique de la Nature, n°1, 1973) :

« Toutes les choses produites sont vouées à disparaître. Les particules « élémentaires » sont vouées à se transformer, les humains sont voués à mourir, la Voie Lactée, le Soleil et la Terre sont vouées à se décomposer et à être détruites.

Même quelque chose qui dure aussi longtemps que « le Ciel et la Terre » [issu dans le taoïsme de l’oeuf cosmique se brisant] finira par disparaître.

Même l’espèce humaine elle-même va changer et s’éteindre.

Mais la fin du Soleil, de la Terre et de l’espèce humaine n’est pas un « jour du jugement dernier de l’univers ».

Lorsque la Terre s’éteindra, il y aura des niveaux encore plus élevés de corps célestes pour la remplacer.

À ce moment-là, les gens célébreront la victoire de la dialectique, accueillant la naissance de nouvelles étoiles.

Lorsque l’espèce humaine disparaîtra, des espèces encore plus élevées apparaîtront.

De ce point de vue, les activités humaines créent les conditions pour l’apparition d’espèces encore plus élevées.

Si l’ancien ne disparaissait pas, le nouveau ne viendrait pas. La mort de l’ancien est précisément la condition nécessaire à la naissance du nouveau.

« Il en est toujours ainsi dans le monde, le nouveau remplaçant l’ancien, l’ancien étant remplacé par le nouveau, l’ancien étant éliminé pour faire place au nouveau, et le nouveau émergeant de l’ancien. » [Mao Zedong, De la contradiction]

Le fini se transforme en infini.

C’est précisément parce que toutes les choses de l’univers changent et se développent continuellement qu’elles constituent le développement sans fin de l’univers tout entier.

C’est précisément parce que tout a sa naissance et sa mort, son commencement et sa fin que l’univers dans son ensemble peut être sans naissance ni mort, sans commencement ni fin.

Toutes les choses sont comme des milliers et des millions de ruisseaux qui se rejoignent et forment un long fleuve inépuisable de l’univers.

En ce qui concerne les choses concrètes, leur développement est fini, le temps est fini.

Mais infinies sont les transitions d’une espèce de chose à une autre, d’une forme de matière à une autre, c’est-à-dire d’un temps concret à un autre temps concret.

C’est précisément à cause de la finitude des choses concrètes dans le temps qu’elles constituent l’infinité de l’univers dans son ensemble dans le temps, et le développement de l’univers ne s’achèvera jamais, n’atteindra jamais son apogée.

De même que dans l’espace, l’univers dans le temps est à la fois fini et infini, et l’infini est composé uniquement de ce qui est fini et transformé à partir de ce qui est fini. »

Comprendre et assimiler cette perspective, c’est ce que nous appelons notre Cosmologie, notre vision du monde.

L’Humanité, depuis les débuts de l’Histoire, n’a eu de cesse dans son activité pensante, c’est-à-dire culturelle, d’élaborer, de produire, de discuter, d’affiner sa cosmologie.

Celle-ci à pris mille et une voies, mille et une formes, mais il s’agit d’un seul et même mouvement, différencié et contradictoire. C’est la raison pour laquelle nous affirmons que la la Culture est une, différenciée et contradictoire, et que notre démarche est celle de l’Encyclopédisme.

Le matérialisme dialectique porte en effet la Culture, il est le fruit prolongé de tout ce mouvement productif, de toute cette activité concernant et impliquant l’ensemble de l’Humanité, sur toute la planète, à toutes les époques.

Le caractère unifiée mais différencié de la Culture implique de comprendre qu’il y ait des étapes dans le processus historique. Les éléments structurant ces étapes, ce sont les modes de production.

À chaque étape, à chaque mode de production, correspond une certaine période de la Culture, reflétant la manière dont celle-ci, comme vision du monde allant à la symbiose, a pu être appréhendée par la pensée humaine.

Cela implique aussi de considérer que ces étapes laissent des empreintes, des traces dans la Culture, même lorsqu’une étape est passée. Cela, nous le désignons sous le terme de nexus ; c’est le moment dans un processus où se voient nettement la tendance à élever la conscience et la Culture et celle à s’effondrer dans le siphon de la réaction, sous une forme plus ou moins barbare.

Les grandes étapes historiques selon le matérialisme dialectique, ce sont les modes de production qui permettent de les distinguer : l’esclavagisme, le féodalisme, le capitalisme et le socialisme sont les principaux modes de production historique.

Mais de par la différenciation relative, des éléments du tribalisme primitif se sont maintenus relativement dans l’esclavagisme tardif, de même que des éléments du tribalisme et de l’esclavagisme se sont maintenus relativement dans le féodalisme, et que de même des éléments du tribalisme, de l’esclavagisme et du féodalisme se sont maintenus relativement dans le capitalisme, même à l’époque du capitalisme généralisé.

C’est là une tendance inévitable, car seule la « sortie » de l’Histoire qui se réalisera progressivement dans le Socialisme permettra de dépasser définitivement ces contradictions, jusqu’au Communisme, où le développement différencié s’exprimera sous une autre forme, une nouvelle forme qui ne sera plus celle héritée par les contradictions empilées de l’Histoire que nous connaissons.

Il ne peut y avoir qu’une seule vision du monde correcte : celle allant par la Culture et la Science matérialiste dialectique à la symbiose entre l’Humanité et le Cosmos.

Cette vision du monde a été porté historiquement par des titans comme Aristote par exemple à l’époque de l’esclavagisme, et plus relativement par des mouvements entiers, par exemple celui des Lumières à l’époque tardive du féodalisme.

Cela pose la question de l’idéologie. Dès lors que s’affirme nettement un mouvement dans la pensée allant jusqu’à la Culture, alors on parle d’idéologie.

La religion monothéiste est ainsi l’idéologie typique du féodalisme, le libéralisme est l’idéologie typique du capitalisme en croissance. En un sens, le matérialisme dialectique est l’idéologie typique du Socialisme, comme drapeau de la Révolution, avant qu’idéologie et vision du monde ne fusionnent définitivement dans le Communisme.

Le long cheminement historique transporte les restes du passé, jusqu’au dépassement final de l’Histoire

En raison du développement inégal, des variétés, des courants divers peuvent exister dans une idéologie.

Il existe par exemple toute une variété de religions monothéistes : le judaïsme, le christianisme, l’islam et cela sans même prendre en considération les religions poly-monothéistes comme le brahmanisme ou le bouddhisme.

Et d’ailleurs ces religions se divisent encore en confessions, sectes, écoles etc. De même le libéralisme se décline en néo-libéralisme, social-libéralisme, libertarianisme etc.

Cependant, plus la société humaine se complexifie, plus il devient possible de comprendre les modes de production obsolètes. En effet, si on considère le processus historique, le modes de production dominant est aussi en quelque sorte celui qui n’est plus avant lui (et même ceux encore avant), et il est celui qui n’est pas encore (et même au-delà puisque le besoin de Communisme s’exprime déjà sous de multiples aspects).

Tout cela est bien entendu très complexe, car l’éventail des phénomènes apparaît énorme plus on remonte dans le passé. Les sociétés du tribalisme ont été d’une variété gigantesque, de même que les sociétés esclavagistes ou féodales. Il y a moins de différence aujourd’hui dans le mode de vie entre un Australien et un Français qu’entre deux paysans français vivant au 12e siècle à cent kilomètres de distance.

Tel est le long cheminement historique vers l’unité de l’humanité. Et nous pouvons généraliser nos connaissances, si nous commençons à définir chaque mode de production de manière négative. Par exemple, le féodalisme est entre le système esclavagiste mature et le système capitaliste naissant, possédant une différence significative par rapport aux deux.

Le féodalisme n’est donc pas un type ossifié de relation de production, mais un processus qui remplit l’intervalle entre l’autre.

L’ensemble de ses définitions et caractéristiques est donc énorme, mais n’est pas illimité pour autant : comme il s’agit d’un processus historique relatif, on peut en cerner des limites dans les caractéristiques fondamentales distinctives de ces diverses formes passées.

Selon la loi matérialiste dialectique du « Un devient deux », il existe donc un féodalisme, sous des formes différenciées, mais avec un dénominateur commun sur le plan de la nature de l’idéologie dominante. L’enjeu est donc de saisir les caractéristiques générales, la substance du féodalisme comme phénomène unifié.

C’est ce qui implique d’affirmer que la religion est une idéologie. À proprement parler, il n’y a pas d’histoire des religions, il y a une histoire des modes de production et de leur idéologie.

Et cette histoire doit être abordée comme relevant d’une double tendance fondamentale. En raison du développement différencié, il existe fondamentalement une ligne rouge, celle élevant la société humaine vers la Culture et la symbiose finale, et une ligne noire ramenant la société en arrière, ou plutôt tentant de la ramener en arrière ou de la figer.

La lutte des deux lignes est pour l’Humanité une bataille culturelle ; c’est également une dynamique qui traverse éternellement le mouvement de la matière : c’est la bataille du nouveau contre l’ancien.

Le rôle des idéologies et la question française

Dans le cadre de l’Histoire, cette lutte s’exprime à travers les idéologies. Une seule idéologie est le reflet de la dynamique vers la Culture, alors que les autres, produits résiduels de l’Histoire, ne sont que des versions obsolètes plus ou moins décadentes.

Cependant, même une personne s’engageant dans une idéologie obsolète, dans une version du libéralisme par exemple, le fait avec une certaine dignité : toute l’Humanité ne peut que chercher la symbiose, même par la dérive. Même la pire lie de l’Humanité, qui la nie ouvertement, ne fait que refléter le négatif de la symbiose.

Ni la dérive, ni la négation ne sont donc acceptable, et elles n’ont de toute manière pas la puissance du mouvement qui porte la Culture. Leur antagonisme est d’autant plus faible en réalité qu’il n’est qu’une contingence historique : ce n’est fondamentalement que la dérive ou la négation du reflet d’un reflet.

Et il y a les « adaptations ». Les religions féodales n’existent plus comme telles, elles ont été transformées par le capitalisme et son idéologie libérale.

C’est pourquoi il doit être parlé de semi-féodalisme à propos des religions. Depuis l’émergence et l’hégémonie du libéralisme, les religions ne sont plus que des idéologies, fondamentalement réactionnaires, mais aussi un reflet de la dérive d’ une quête de la cosmologie allant à la Culture.

Il faut en effet considérer que le capitalisme et son idéologie imprègnent tout comme vision du monde, en fait comme vision du monde dépassée.

En France en particulier, la bourgeoisie a développé une hégémonie culturelle redoutable et de très grande ampleur. Il faut se souvenir que la France a été à la pointe de la vision du monde féodale dans sa version catholique, puis à la pointe dans la vision du monde libérale avec les Lumières, puis l’élan de la grande Révolution Bourgeoise de 1789.

En France, la bourgeoisie post-révolutionnaire a produit des figures remarquables, comme Lamennais, Saint-Simon, Cuvier, mais aussi Benjamin Constant, Mme de Staël ou Balzac.

Toutes ces figures ont contribué puissamment à affirmer un matérialisme bourgeois, portant la Science et la Culture, mais sans pouvoir aller au bout, avec l’idée, tout au contraire du matérialisme dialectique, de réconcilier les différences idéologiques relatives au lieu de les liquider.

L’idéologie libérale française est toute entière possédée de la notion de la Concorde, de la paix civile, de la convergence progressive dans l’unité, du « deux donne un ».

Le courant dit « radical » (en fait les « centristes ») et la tradition de la franc-maçonnerie, si puissante en France, notamment sous la IIIe République, relèvent de la logique bourgeoise française de « Concorde ».

Les forces féodales en France ont au fur et à mesure totalement capitulé devant la bourgeoisie, c’est ce que l’étude de figures comme Lammenais ou Chateaubriand permet de saisir : le libéralisme bourgeois est implacable, mais il lui faut ou bien une morale, c’est la doctrine sociale de l’Église que Lamennais posera le premier, ou bien il lui faut avancer lentement, avec l’escorte romantique d’un semi-féodalisme mu en réaction conservatrice devant organiser sa liquidation, par étape, raisonnable.

Toute la Droite française, nationale-catholique et réactionnaire sort de là : de la volonté de faire de l’idéologie religieuse une sorte de « guide » moral du capitalisme.

On comprend ainsi autant la fascination historique des islamistes pour l’idéologie de la Droite en France, tout autant que la fascination-rejet de la Droite en France de l’islam, exprimé dans un « orientalisme » chaotique, mais très sophistiqué.

Dans l’autre sens, les libéraux ont littéralement annexés la gauche, en construisant une idéologie mécaniste de leur vision du monde, autour notamment de la pensée de Saint-Simon, considérant que l’État bourgeois et son administration militarisée était une force « neutre » devant imposer la Raison bourgeoise sur le principe de l’ingénierie sociale.

Cette idéologie mécaniste s’est aussi renforcée du positivisme, affirmant la relativité du réel et sa convergence dans le « progrès », c’est-à-dire dans le Libéralisme.

Les religions en France n’existent en fait plus que sous cet aspect : comme élément positivement « attardé » du progrès, mais allant à la convergence avec le libéralisme. Toute la gauche du régime bourgeois est sur cette ligne concernant les religions.

Ainsi, l’islam ne serait qu’une sorte de « choix », s’expliquant de manière positiviste et relative, mais convergent au bout du compte dans la « Concorde » sociale et le progrès libéral.

Ce que la gauche bourgeoise demande aux musulmans, c’est cela : la capitulation de l’essence féodale de l’islam pour prendre les habits communs du libéralisme, comme l’ont fait historiquement les forces féodales en France.

Bien sûr, les gens qui voudraient prendre cependant au sérieux les religions se trouvent ici piégés : ou bien assumer de relativiser leur idéologie comme un simple masque du libéralisme hégémonique, et donc se borner à faire de la religion non plus une idéologie mais une « identité » relative et différentialiste et au final une simple marchandise, ou bien assumer l’essence féodale de leur idéologie et sombrer toujours plus loin dans la réaction.

Cela explique aussi que la gauche en France n’existe que comme un prolongement du Libéralisme, entretenant la lutte avec le conservatisme de repli de la Droite, et entretenant la mauvaise conscience du Libéralisme.

Une telle annexion a ouvert un espace « ultra » à la gauche, où tout et n’importe quoi a un espace pour se développer : l’anarchisme de Proudhon aussi bien que le syndicalisme révolutionnaire de la CGT historique, le « trotskisme », le « social-écologisme » ou le « populisme de gauche ».

Le tout devant converger dans la « grande maison commune » de la gauche qui ne cesse de multiplier ses divisions et d’en appeler néanmoins à la Concorde.

Mais ni le libéralisme et sa gauche de cinéma, et encore moins les religions, ne peuvent en fait assumer l’enjeu titanesque d’une vision du monde réelle et puissante.

Et ce que cherchent les gens qui s’engagent dans une idéologie, fondamentalement, c’est tout cela.

La vision du monde de notre époque, dans le prolongement de l’Histoire, c’est la recherche de l’Encyclopédisme universel, de la Fraternité et de la Paix. C’est là la pleine et unique eschatologie de la Culture, et seul le matérialisme dialectique de notre époque porte ce drapeau.

C’est pourquoi nous disons : l’idéologie doit être au poste de commande, car seule le matérialisme dialectique, comme antagonisme complet et d’avant-garde en termes de vision du monde, est en mesure de se confronter au Libéralisme comme ultime vision du monde obsolète, et de liquider toutes les idéologies obsolètes que le Libéralisme n’a pas été en mesure de dépasser et de fondre en lui, en raison de sa perspective essentiellement erronée du « deux donne un », laissant subsister les pires éléments des époques passées de nos ancêtres.

Le matérialisme dialectique est l’idéologie révolutionnaire de notre époque, qu’il faut arborer et développer pour en faire la vision du monde de l’Ordre nouveau à venir.

Prolétariat, esprit prolétarien : la subjectivité révolutionnaire et la promotion de nouvelles valeurs

L’Histoire est toute entière l’Histoire de la lutte des classes.

Si la cosmologie est unique par essence, mais « dévoilée » (pour ainsi dire) par étapes à mesure que se développent et se complexifient les sociétés humaines, les idéologies sont multiples, mais tendent toutes à l’effondrement réactionnaire, sauf celle qui prend la direction de la Culture, de la symbiose avec le Cosmos, celle qui devient la Cosmologie.

Mais l’affirmation d’une idéologie ne repose pas sur un « choix » personnel que feraient des individus « éclairés » par une sorte de « conversion ». Une idéologie est avant tout le produit de la lutte des classes. Elle n’existe que dans la réalité d’un rapport de classe au sein d’un mode de production historique.

Dès lors qu’elle existe, des individus s’alignent, d’autres s’éloignent ou se détournent. Les individus qui s’engagent dans une idéologie portent cette idéologie et la transforment aussi bien que celle-ci les porte et sont transformés par elle.

Tout alignement reste un processus dynamique, la transformation produit des lignes, ligne Rouge, ligne Noire, et la bataille du discernement ne cesse jamais, même au sein de l’avant-garde révolutionnaire et de son Parti.

C’est que précisément ce ne sont pas des « choix » qui déterminent les alignements et les engagements idéologiques, ce sont des « modèles sociaux ». Les mères dans le communisme primitif, les patriarches dans le tribalisme, les grands propriétaires aristocratiques dans l’esclavagisme, la noblesse seigneuriale dans le féodalisme, la bourgeoisie dans le capitalisme, le prolétariat dans le Socialisme.

Ces modèles sociaux forment plus précisément des classes, des régiments dans l’immense bataille que l’Humanité mène contre elle-même pour revenir à la Nature, enrichie des acquis de l’Histoire.

Un mode de production n’existe que parce qu’une classe sociale le dirige, se propose de modéliser totalement la société et l’existence sociale toute entière sous le rapport de sa direction.

La classe sociale dirigeante domine la culture, car elle dispose de tous les leviers structurels pour reproduire l’ordre social et le commander.

L’ordre social est composé de diverses catégories, mais seules celles en mesure de produire une idéologie allant à une vision du monde peuvent être appelées classes sociales.

Ainsi, la noblesse seigneuriale a été la seule à pouvoir porter le féodalisme. Sans cette classe sociale, il n’existe plus qu’un féodalisme amputé, un demi-féodalisme.

Le christianisme, sans la noblesse seigneuriale, ne peut plus exister en tant que tel, en tant que vision du monde, pas plus que l’islam d’ailleurs. Il ne peut être qu’une illusion petite-bourgeoise ou une annexe de la réaction, il ne peut plus être qu’une semi-idéologie allant au Libéralisme ou au néant.

La petite-bourgeoisie ainsi ne peut être une classe sociale à part entière, elle ne peut que frelater, trafiquer les idéologies obsolètes entre elles, ou avec le Libéralisme ou éventuellement des éléments du matérialisme dialectique, soit par sincérité et prolétarisation relative, soit comme cinquième colonne au service de la bourgeoisie.

Le capitalisme a accompli une gigantesque mise à jour, clarifiant comme jamais la réalité des rapports sociaux.

Dans son cadre, la bourgeoisie toute entière a imposé le Libéralisme, beaucoup plus puissamment qu’aucune idéologie, aucune vision du monde ne l’avait réussi. Mais le Libéralisme s’est épuisé sous son propre poids, incapable de porter le matérialisme jusqu’au bout, car la bourgeoisie n’est pas la classe sociale capable de mettre un terme à l’Histoire.

En édifiant le Capitalisme et en le faisant triompher totalement, partout sur l’espace terrestre comme tout le temps dans notre existence sociale, la bourgeoisie a fait grandir les forces collectives, a rassemblé les capacités, les intelligences, a accumulé les savoirs, les moyens et les pouvoirs.

Elle a forgé les bras d’une Humanité nouvelle qu’elle a façonné en partie, d’une Humanité agissant collectivement, expérimentant chaque jour sa capacité à produire, à analyser, à discuter, se heurtant chaque jour à mille et une frustrations, limites dans ses savoirs, dans ses moyens dans son pouvoir.

La bourgeoisie a forgé le prolétariat, tout comme jadis la noblesse seigneuriale en concentrant les forces de travail a forgé la bourgeoisie.

Le prolétariat est la classe sociale du collectivisme, le prolétariat est la classe sociale de la démocratie, c’est la classe sociale produite par les immenses capacités industrielles, scientifiques et entreprenantes que l’Humanité a commencé à assembler et à organiser depuis des milliers et des milliers d’années et qui aujourd’hui tient entre ses mains la clef de la connaissance de la matière, de l’infiniment petit, à l’infiniment grand.

Le prolétariat est la classe sociale qui annonce l’ère de l’Humanité infinie et éternelle, prête à se fondre dans le Cosmos

Tout comme la noblesse féodale a affirmé dans la Francie occidentale l’Homme nouveau purifié et chevalier du Christ au tournant du premier millénaire, comme la bourgeoisie a affirmé dans le mouvement des Lumières au XVIIIe siècle l’Homme nouveau, social, rationnel et libre par Nature et a posé son droit à entreprendre selon ses talents ce que son travail peut produire de propre à s’affirmer comme personne, ainsi qu’à affirmer son État comme Puissance et à affirmer l’Humanité comme horizon (au lieu des divisions féodales, mais à travers ses séparations nationales), le prolétariat est un nouvel être humain, celui d’un Ordre Nouveau annonçant le Socialisme.

Ce n’est pas parce que le prolétariat serait majoritaire qu’il faut qu’il prenne le pouvoir, c’est parce qu’il porte une vision du monde. La noblesse seigneuriale, tout comme la bourgeoisie n’ont de même été que des minorités sociales, bien plus étroites d’ailleurs, mais elles portaient une vision du monde. L’horizon social était modelé par la noblesse sous le féodalisme comme il est modelé par la bourgeoisie sous le capitalisme, comme il sera modelé par le prolétariat sous le Socialisme.

Le prolétariat n’attend pas une quelconque « justice sociale », telle une meilleure répartition des richesses. Une telle interprétation relève de la compréhension « concordataire » de la gauche bourgeoise, qui cherche encore à sauver l’ordre capitaliste.

Il exige l’anéantissement de la bourgeoisie en tant que classe.

Et ce qui est nécessairement un crime pour la bourgeoisie sera une libération totale pour l’Humanité, car en liquidant la bourgeoisie, l’Ordre Nouveau, socialiste, mettra fin à l’épuisante guerre que se livre l’Humanité depuis la perte de son Eden, depuis son entrée dans l’Histoire avec la sortie de la Nature.

Se ranger derrière le prolétariat et sa lutte, c’est assumer cette lutte à mort, totale et implacable. Les chaînes que briseront le prolétariat libéreront l’Humanité entière, rassemblant les masses derrière le modèle d’Humanité que l’Histoire a forgé patiemment dans le sang et le labeur des masses innombrables de nos ancêtres, un être humain démocratique, scientifique, producteur, bienveillant et pacifique, une humanité dont les femmes seront à l’avant-garde de l’affirmation, elles qui furent le dernier rempart de la Nature étant tombé devant l’inévitable entrée dans l’Histoire et qui seront les pionnières de la fusion dans l’Ordre Nouveau de l’Homme social et du Cosmos.

Une Humanité épanouie dans une biosphère toujours plus symbiotique, respectant pleinement la vie sous toute ses formes et vivant sa Culture dans une Nature étendue et fusionnelle, jusqu’au Communisme le plus total.

Se conformer à cette exigence, c’est cela chercher et affirmer l’esprit prolétarien. Ce n’est que sur cette base que peut s’affirmer le matérialisme dialectique comme idéologie révolutionnaire, annonçant la nouvelle Cosmologie, toujours plus complète.

L’État, l’armée, la conquête des institutions et le processus d’éducation socialiste de la Nouvelle Humanité

La Révolution consiste à changer la vie, du tout au tout. Et cela, seule les masses peuvent le faire. Sans les masses, les patriarches du tribalisme n’auraient pas triomphé.

Sans les masses, l’aristocratie des grands propriétaire esclavagistes n’auraient pas triomphé ; sans les masses, la noblesse seigneuriale n’aurait pas triomphé. Sans les masses, la bourgeoisie ne peut rien faire. Elle sera mis à bas par les masses, qui se soulèveront derrière le Prolétariat, lorsque leurs yeux brilleront de se conformer à l’idéologie de l’Ordre Nouveau que porte le Prolétariat devant les masses.

Sans le Prolétariat, les masses ne peuvent aller à la Révolution. Sans les masses, le Prolétariat ne peut rien changer. Ce seront les masses qui feront l’Histoire, comme elles l’ont toujours fait.

Renverser la bourgeoisie pour instaurer un Nouvel Ordre, suppose d’assumer l’Histoire. La bourgeoisie sera renversée par les forces qu’elle a accumulé et organisé. La lutte contre la bourgeoisie est une lutte de classe, elle suppose donc un antagonisme affirmé.

Face à l’armée bourgeoise, une armée populaire doit se former. Face aux institutions bourgeoises, de nouvelles institutions démocratiques et populaires doivent se former. Face à l’État bourgeois, un État prolétarien doit se former.

Armée, institutions, État. C’est le parcours de la Révolution qu’il s’agit de tracer.

L’objectif fondamental de la Révolution est un processus éducatif : il s’agit de former une Humanité nouvelle. La subjectivité révolutionnaire est donc une exigence totale. Un révolutionnaire doit transformer sa vie, personnellement et collectivement, entretenant son autocritique pour juguler la Ligne noire en lui-même comme autour de lui.

Le travail théorique sur l’idéologie et pratique sur l’éducation révolutionnaire autour de soi doit être entretenu en permanence et de manière toujours plus complète, complexe et étendu, de manière démocratique, bienveillante sur le fond, mais directive dans la forme.

La perspective étant dictatoriale au sens strict du terme : l’éducation socialiste consiste à dicter la conduite prolétarienne à tenir.

La subjectivité révolutionnaire de notre époque impose aussi un style : dans l’alimentation, dans la manière de se vêtir, de parler, de se comporter, dans les mille et un geste du quotidien mais aussi par les valeurs : la curiosité encyclopédique universaliste devant porter la Culture, la sensibilité pour les arts et le respect dû aux artistes selon les exigences révolutionnaires, la promotion d’un Droit total conforme à la Morale, la loyauté et la fraternité, l’engagement complet pour la Cause, le respect et l’enthousiasme pour la Nature en général et les êtres vivants en particulier.

Le processus révolutionnaire de notre époque a commencé, mais il est par définition nouveau. L’immense expérience accumulée doit être arborée et assimilée, et non pas regardée comme un fétiche. Tout se transforme, notre époque appelle donc des exigences aussi nouvelles, qu’il nous faut découvrir pas à pas.

Le Futur a commencé, soyons au rendez-vous avec le Parti de la science, le Parti du prolétariat, le Parti de la révolution.

Le Parti qui affirme la contradiction comme vision du monde, qui indique quel est le combat du Nouveau contre l’Ancien, qui affirme la Guerre Populaire jusqu’au Communisme !

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