Prenons une contradiction. Elle s’établit au moyen de deux contraires, tels le haut et le bas, le chaud et le froid, le grand et le petit, le positif et le négatif, etc.
Si on voulait la représenter, on pourrait procéder en représentant les deux contraires, par exemple en plaçant un plus et moins côte à côte : + -.
Cependant, on pourrait considérer qu’il manque le rapport entre les deux contraires. Le fameux yin et le yang proposent de mettre une partie d’un contraire dans l’autre, mais cela ne peut pas nous satisfaire, car cela ramène au dualisme.
Le dualisme est une forme primitive de matérialisme dialectique. Il mêle les contraires dans un sens stabilisateur ou dans un sens antagonique seulement. Il ne perçoit pas que l’unité et la lutte sont eux-mêmes des contraires.
Ce qu’il nous faudrait, c’est éventuellement un symbole, tel ●.
Cela donnerait : + ● – ou bien – ● +.
On aurait ici le lien entre les contraires qui serait visible. Ce lien exprime dans sa substance à la fois l’unité et la lutte des contraires. Ce lien est lui-même contradictoire. C’est très important pour la suite, pour comprendre le 0.
Maintenant, à quoi cela fait-il penser ? Indéniablement aux mathématiques.
Le ● est un rapport et on pense tout de suite au rapport mathématique, avec l’addition, la soustraction, la multiplication, la division (qui sont eux-mêmes des contraires).
Cela ne va pas être pratique avec les symboles positif et négatif, alors prenons en deux autres, pour indiquer la croissance et la décroissance, ou le haut et le bas, etc : ▲ et ▼.
On a ainsi : ▲●▼, ▲+▼, ▲-▼, ▲x▼, ▲/▼, ainsi que ▼●▲, ▼+▲, ▼-▲, ▼x▲, ▼/▲.
On remarquera ici au passage les contraires encore, puisque l’addition et la multiplication reviennent au même à gauche et à droite, car il est indifférent d’être à gauche ou à droite du signe + ainsi que du signe x. Il y a à la fois unité et lutte dans le rapport de ▲ et ▼ dans leur rapport à leur propre rapport.
Ce qui compte cependant ici, c’est qu’on a compris la constitution des mathématiques dans son rapport à la contradiction. Les mathématiques sont le portrait d’un certain rapport.
Les mathématiques n’établissent pas de rapport, elles constatent un rapport.
Lorsqu’on dit que 1 + 1 = 2, on n’établit pas ni les 1 et le 2, ni le rapport. On le constate seulement. Le matérialisme dialectique dit que ce rapport est contradictoire. Mais il dit également que ce rapport est dialectique. C’est là où le 0 va intervenir.
Si un rapport est contradictoire, il implique l’unité et la lutte. Les mathématiques peuvent le constater. Seulement, l’unité et la lutte, c’est une différence. Et la différence produit le saut qualitatif. Or, cela, la représentation mathématique élémentaire ne le montre pas.
Lorsqu’on dit 1 + 1 = 2, on établit un rapport entre les deux 1, il y a une unité (comme il pourrait y avoir une lutte avec une soustraction, et la lutte est elle-même unité et l’unité elle-même lutte, puisque l’unité des deux 1 dans l’addition est une lutte contre eux-mêmes puisqu’ils s’effacent au profit du 2).
Il manque toutefois le caractère dialectique de ce rapport.
Qui peut, mathématiquement, représenter ce caractère dialectique ?
Le 0, car il est à la fois rien et l’infini. Pour le comprendre, il faut partir du principe selon lequel « toute détermination est négation » » ». Cela a été formulé par Spinoza et Karl Marx le reprend à son compte.
Quand on prend 1-1=0, il ne faut pas comprendre qu’il n’y a plus rien. Il faut comprendre que les éléments sont revenus dans l’infini. Là est la clef véritable des mathématiques.
Il faut imaginer les mathématiques comme un immense outil comptable. 1-1=0 c’est on prend une banane et on la mange, donc il n’y a plus de banane. Mais la banane a en réalité été transformée, donc le 0 représentant l’absence de banane équivaut à l’infini où la banane transformée (dans la digestion, dans les ordures) s’en est allée.
Cela veut dire que pour qu’une opération mathématique soit correcte, il faut toujours revenir au 0. Il faut en effet toujours revenir à l’infini.
Le 0 est le point de départ et le point d’arrivée des mathématiques, car on part de quelque chose (qu’on différencie du reste de l’infini) pour en revenir à quelque chose, mais transformé.
Sans cela, il y aurait bien un rapport… mais pas dialectique.
C’est pourquoi, quand on dit que 1 + 1 = 2, il faut bien comprendre que cela veut dire également :
2 = ajout du 1 et du 1, donc 2 = suppression du 1 et suppression du 1.
Ainsi : 2 = 1 + 1 = – (1+1) et comme on le sait cela donnerait -(1+1) = -2, ce qui n’est pas une suppression. Les mathématiques utilisent le 0 pour cela.
Ce qui donne par conséquent 2 = 1 + 1 = 0 (1+1), soit 2 = 1 + 1 = 0, soit 2 = 0.
Telle est la dialectique dans le rapport mathématique : toute détermination est une négation. Il ne peut pas en être autrement.
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