Le matérialisme dialectique et la question du pair et de l’impair

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L’observation du pair et de l’impair est historiquement un élément essentiel de la formation des mathématiques comme domaine théorique ; l’ouvrage majeur concernant ce thème a été écrit par Euclide, vers 300 avant notre ère : Éléments.

Les mathématiciens n’ont fait cependant que constater l’opposition du pair et de l’impair, sans en voir la signification, qui repose sur la nature dialectique de la matière elle-même. Pour saisir cela, il faut comprendre la substance du pair et de l’impair et leur rapport dialectique.

En mathématiques, on entend par pair un nombre qui est le multiple de deux, sinon le nombre est impair. Autrement dit, si on peut séparer un nombre en deux parts égales, il est pair.

Mais c’est une description insuffisante. Il en va en effet du pair et de l’impair comme du chaud et du froid : on ne peut pas définir l’un sans s’appuyer sur l’autre. Il y a une interrelation dialectique entre les deux, ce qui est une contradiction au sein de la notion même de quantité.

En quoi consiste cette interrelation ? Le principe est le suivant. Si l’on boit un jus de pomme un vendredi, on dira le lendemain qu’on a bu un jus de pomme. Si on boit un jus de pomme le vendredi suivant, le lendemain on dira encore qu’on a bu un jus de pomme : on ne dira pas qu’on a bu un second jus de pomme.

Cela repose sur le fait que compter de manière abstraite repose toujours sur un dénombrement effectué de manière concrète. Un tel dénombrement ne s’impose cependant pas nécessairement dès qu’il y a plusieurs choses.

Si l’on boit un jus de pomme dans un café et qu’on désire en boire un second, on dire qu’on veut un autre jus de pomme. On part du principe que le second jus de pomme est strictement équivalent au premier, en fait on part du principe qu’il s’agit du même jus de pomme, renouvelé.

Le café a lui besoin de savoir ce qu’il a vendu et il ne va pas considérer que le même jus de pomme a été vendu, mais que plusieurs jus de pomme ont été apportés : le dénombrement s’impose.

Or, le jus de pomme est pourtant bien le même : il y a identité entre les deux jus de pomme, même s’ils sont différents.

C’est vrai également si c’est un jus d’orange qu’on amène deux fois : on dira qu’il y a une chose et une autre chose, c’est-à-dire deux choses. Si on les compte en tant que choses, on part du principe que c’est équivalent ; on a deux choses : une chose plus une chose, et peu importe que telle chose soit en première place ou en seconde dans l’addition.

De la même manière, on dira qu’une personne a deux yeux, car un œil et un œil font deux yeux, et peu importe si l’on dit un œil droit + un œil gauche ou bien un œil gauche + un œil droit.

Dans la réalité, pourtant, cela joue de manière fondamentale, car on a en effet le principe de la différence qui s’expose ici. Un jus de pomme et un autre jus de pomme peuvent être identiques, ils n’en sont pas moins différents et s’ils sont différents tout en étant en rapport, alors il y a contradiction.

L’existence de cette contradiction s’exprime précisément par le pair et l’impair. C’est une preuve fondamentale de la réalité contradictoire de la matière, de tout phénomène, et donc également du dénombrement.

Si la réalité n’était pas dialectique, le dénombrement ne connaîtrait pas de rupture, il consisterait en des nombres uniquement entiers, tous remplaçables ou en tout cas strictement équivalents ; en fait, tous les nombres seraient de simples multiples de 1, avec ce 1 étant irrémédiablement le même, sans évolution, inébranlable, littéralement éternel et « pur ».

Autrement dit, l’existence du pair et de l’impair a comme origine le développement inégal de la matière dans son mouvement dialectique, avec un saut qualitatif provoquant, dans la réalité même des nombres, une contradiction.

Comment saisir cette réalité contradictoire ? On peut l’appréhender en portant son attention justement sur la différence entre les nombres pairs et les nombres impairs. Schématiquement, cela donne la chose suivante.

4 est, par exemple, un nombre pair ; on peut le présenter (ou le représenter) de la manière suivante.


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De la même manière, on peut représenter les nombres pairs en les décomposant de telle manière à avoir deux blocs équivalents de part et d’autre. C’est le principe du nombre pair qui a comme caractéristique de pouvoir être divisé par deux ou, si l’on préfère, en deux.

On a ainsi, pour seize, deux blocs de huit éléments qui le composent, pour vingt on a deux blocs de dix éléments, etc.

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On a une symétrie entre les deux blocs. Or, un tel découpage n’est toutefois pas possible pour 5, qui est un nombre impair. Et si on le cherche à schématiser tout de même, on s’aperçoit que la représentation souligne une question essentielle : celle de l’élément intermédiaire, du nexus, de la clef du saut qualitatif.


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On voit bien ici qu’il existe un élément intermédiaire empêchant une séparation formelle entre deux blocs équivalents. Cet élément apparaît comme au cœur de la forme. On peut chercher à multiplier les formes comme on l’entend, on aura toujours cet élément irréductible, sorte de passage obligé.

Cela indique la différence entre le pair et l’impair. Ce qui prime dans la représentation du nombre pair, c’est la quantité, avec deux aspects quantitatifs équivalents se faisant face.

Dans la représentation du nombre impair, c’est la qualité qui est l’aspect principal, par l’intermédiaire de la différence, avec un élément intermédiaire support de celle-ci.

L’existence même de cette différence implique qu’une accumulation de choses saisie de manière abstraite s’appuie déjà le principe de la contradiction. Tout dénombrement est, par nature même, contradictoire et cela dans les nombres eux-mêmes. La réalité est absolument, à tous les niveaux, dialectique.

Comment parvenir ici à avancer dans la compréhension de cette nature dialectique ? On peut avancer en cherchant à éprouver la nature de cet élément intermédiaire. Quelle est sa substance, en quoi cela joue-t-il ?

Cela est malaisé, mais on peut procéder en inversant la proposition indiquant que le pair est marqué par la quantité et l’impair par la qualité. En effet, la quantité porte la qualité et inversement, au moins dans certaines modalités.

On se tourne donc vers les nombres pairs et on regarde où il y a une qualité.

Si on prend 4, on sait que cela correspond à 2 + 2. Cependant, 2 + 2 repose sur une identité, puisque 2 = 2. Si on refuse cette identité, parce qu’on cherche un déséquilibre, allant dans le sens de la qualité, et qu’on veut tout de même parvenir à 4, on a alors 1 + 3.

On a ainsi :

1 + 3 = 4 = 2² = 2 x 2

Peut-on trouver alors un élément intermédiaire, témoin de la qualité ?

On le peut, en constatant que 2, qu’on a présent dans la forme 2² donnant 4, est également présent dans 1 + 3. En fait, il est absent. Mais on sait qu’entre 1 et 3, on a 2 ; 2 succède en effet à 1 et précède 3 dans les nombres.

Ainsi, l’élément intermédiaire, 2, est bien là sans être là ; il est « masqué » entre le 1 et le 3 dans leur addition.

Prenons un autre exemple, avec 16 :

1 + 3 + 5 + 7 = 16 = 4² = 4 x 4

On a pareillement ici 4, également présent dans 4², qui est masqué, au centre de l’addition, entre 3 et 5.

On a bien un élément intermédiaire, visible ou invisible, présent ou absent, mais qu’on peut « lire ». Il faut très vraisemblablement considérer que celui qui est absent est un reflet de l’existence de l’élément intermédiaire visible dans l’autre forme… ou bien, inversement, que celui qui est visible est un écho de celui qui est visible sans être visible.

Seulement voilà, il y a des exigences pour que cela fonctionne. Cela montre qu’on a ici affaire à une réalité en mouvement, nullement à une abstraction intellectuelle portant sur quelque chose de statique. En fait, les mathématiques réelles n’existent que comme pratique.

Quelles sont ces exigences ?

Tout d’abord, l’addition doit ici s’appuyer sur les nombres impairs. Le pendant de cela est qu’il faut que le nombre pair qu’on vise puisse être mis au carré avec un nombre entier.

Si on prend par exemple 6, on ne peut pas obtenir le nombre en additionnant des nombres impairs, tout comme il n’y a pas de nombre entier au carré donnant 6. Il en va de même pour 8, 10, 12, 14, etc.

Il y a donc un cadre bien précis où l’on a cet élément intermédiaire, un cadre exigeant un rapport particulier entre le pair et l’impair. Le carré du nombre pair implique la quantité, l’addition des nombres impairs implique la qualité (et inversement). Ce sont deux pôles d’une contradiction.

Redonnons des exemples :

1 + 3 + 5 + 7 + 9 + 11 = 36 = 6² = 6 x 6

1 + 3 + 5 + 7 + 9 + 11 + 13 + 15 = 64 = 8² = 8 x 8

Dans les deux cas, on retrouve l’élément intermédiaire : 6, entre 5 et pareillement 7 au centre de l’addition, 8, entre 7 et 9.

Regardons maintenant la nature du carré, afin d’en voir la liaison avec le pair et l’impair. On peut pour cela prendre les nombres les plus simples, en les mettant au carré.

On s’aperçoit alors que :

– le carré d’un nombre pair est toujours pair,

– et que le carré d’un nombre impair est toujours impair.

Cela signifie qu’il y a un maintien de l’identité.

2² = 4

3² = 9

4² = 16

5² = 25

etc.

Or, si on décompose le nombre, on note une forme symétrique autour d’un axe : l’élément intermédiaire, tel un nexus.

2² = 4 = 1 + 2 + 1

3² = 9 = 1 + 2 + 3 + 2 + 1

4² = 16 = 1 + 2 + 3 + 4 + 3 + 2 + 1

5² = 25 = 1 + 2 + 3 + 4 + 5 + 4 + 3 + 2 + 1

etc.

Il n’y a pas ici pas de différence entre le pair et l’impair dans la décomposition. On peut sans doute considérer que cela signifie que cette forme décomposée est antérieure à l’existence du pair et de l’impair. Le pair et l’impair seraient alors une expression dialectique, comme saut qualitatif, un prolongement de cet élément intermédiaire, de ce nexus.

Et ce saut qualitatif ne peut venir que de chaque nombre lui-même, en lui-même, par lui-même, comme le montre le carré avec l’élément intermédiaire présent. Le saut qualitatif s’appuie sur l’identité du nombre.

En fait, un carré, ce n’est alors pas deux fois le même nombre, mais le nombre mis en contradiction avec lui-même, ou plus exactement un nombre et son reflet.

Et l’affrontement du nombre avec son reflet provoque un choc passant par le développement inégal, l’élément intermédiaire étant cette expression inégale, puisqu’il est différent, séparant des deux blocs lui étant symétriques.

Il faut ici également noter la présence d’une contradiction : lorsqu’on a décomposé les carrés, on a pour un nombre pair, un nombre impair de nombre de part et d’autre de l’élément intermédiaire, et inversement, pour un nombre impair, on a un nombre pair de part et d’autre de l’élément intermédiaire. Rappelons ici deux exemples :

2² = 4 = 1 + 2 + 1

3² = 9 = 1 + 2 + 3 + 2 + 1

Lorsque le nombre est pair, l’élément intermédiaire a un nombre impair de nombres l’enserrant. Ici, 2 a un nombre de part et d’autre de lui. Lorsque le nombre est impair, il y a un nombre pair de nombres enserrant l’élément intermédiaire. Ici 3 est entouré de deux nombres de part et d’autre.

Et, si l’on veut encore plus creuser, on peut noter un saut qualitatif également, dans l’exemple suivant :

3² = 9 = 1 + 2 + 3 + 2 + 1

En effet, on a 1 + 2 = 3, c’est-à-dire le nombre au carré donnant 9, avec 1 + 2 des deux côtés de l’élément intermédiaire

4² = 16 = 1 + 2 + 3 + 4 + 3 + 2 + 1

Ici, la situation est différente. On a 1 + 3 = 4 , soit les pôles des deux côtés de part et d’autre.

Et il reste un 2, au milieu de ces deux pôles. Or, on obtient 4 au moyen de 2, en ajoutant un autre 2, ce qui revient soit à ajouter un autre lui-même à ce 2, soit plus vraisemblablement à lui conférer une identité contradictoire.

5² = 25 = 1 + 2 + 3 + 4 + 5 + 4 + 3 + 2 + 1

On revient ici au schéma du premier exemple. On a 1 + 4 = 5 soit les pôles des deux côtés de part et d’autre.

Il reste alors 2 + 3 pour les éléments restant, qui donne 5 également. On a alors un retour au quantitatif de part et d’autre.

6² = 36 = 1 + 2 + 3 + 4 + 5 + 6 + 5 + 4 + 3 + 2 + 1

On en revient ici au second exemple. On 1 + 5 = 6, si l’on prend les pôles extrêmes des éléments de part et d’autre.

Il reste 2 + 3 + 4. Si on reprend les pôles extrêmes de cet élément, on a 2 + 4 = 6.

Il reste alors un 3 et on revient à l’identité contradictoire afin d’arriver au 6, avec 3 face à lui-même : 3 + 3 = 6.

Cela ne peut être ici bien entendu qu’une introduction à une problématique plus vaste, qui est le support matériel contradictoire portant les nombres.

On a toutefois d’autres éléments contribuant à approfondir la connaissance du processus menant au pair et l’impair.

On peut en effet constater dans leur rapport les choses suivantes :

Addition : nombre pair + nombre pair = nombre pair

Soustraction : nombre pair – nombre pair = nombre pair

Addition : nombre pair + nombre impair = nombre impair

Soustraction : nombre pair – nombre impair = nombre impair

Soustraction : nombre impair – nombre pair = nombre impair

On voit ici que placés face à eux-mêmes, le pair et l’impair conservent leur identité, mais confrontés l’un à l’autre, il y a inégalité dans le développement et l’impair domine.

C’est là naturellement quelque chose d’essentiel, de profondément dialectique, strictement équivalent à la dissymétrie moléculaire caractérisant la matière organique, vivante, par opposition à celle qui ne l’est pas.

Il est alors intéressant de se tourner vers la multiplication et la division. On a ici :

Multiplication : nombre pair x nombre pair = nombre pair

Division : nombre pair / nombre pair = nombre pair ou nombre impair

Multiplication : nombre pair x nombre impair = nombre pair

Multiplication : nombre impair x nombre impair = nombre impair

Division : nombre pair / nombre impair = nombre pair

Division : nombre impair / nombre impair = nombre impair

Et, surtout, de manière significative, si on divise un nombre impair par un nombre pair, on n’a alors plus un nombre entier. On a par exemple 7 / 2 = 3,5. On sort du cadre du rapport pair et impair.

Le problème est cependant qu’il faut toujours envisager cette question de manière concrète, c’est-à-dire relier la question du pair et de l’impair au processus dont ils sont les éléments. Il n’est jamais possible de traiter du pair et de l’impair de manière abstraite ou conceptuelle, car étant donné qu’il s’agit d’une contradiction, il faut savoir dans quelle mesure celle-ci est une composante d’un phénomène et quels sont ses rapports avec les autres contradictions.

Ce que l’on peut dire, c’est que l’existence même du pair et de l’impair témoigne de la nature dialectique du dénombrement et qu’il n’est pas possible de saisir celui-ci de manière formelle, en suivant une lecture unilatérale.

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