Le matérialisme dialectique et le caractère national-universel de la révolution socialiste

Le matérialisme dialectique insiste sur la contradiction comme produit du passé et de l’avenir. Les contradictions ne sont pas le fruit d’une accumulation d’antagonismes en boule de neige dans le passé. Elles sont une réalité perpétuelle, avec de multiples couches en interaction.

Pour cette raison, connaître le présent ne se fait pas qu’en lisant le passé, mais également en saisissant l’avenir. Il y a des tendances historiques rendant des phénomènes inéluctables ; si on les comprend, on est capable de lire ce qui va se passer. Naturellement, les modalités ne peuvent pas être devinées précisément ; on a néanmoins le cadre général.

Il y a ici un aspect qui joue fondamentalement pour la question de la révolution socialiste. Initialement, avec le marxisme, il était pensé que toutes les révolutions seraient grosso modo de même nature. Avec le léninisme, le cadre national a été reconnu dans ses spécificités. Le maoïsme a approfondi la compréhension de ses spécificités.

Désormais, on est capable d’avoir une vue d’ensemble ; le matérialisme dialectique permet de lire la dialectique de l’Histoire, du passé et de l’avenir.

Lorsqu’il se produit une révolution socialiste, c’est l’expression de la contradiction entre la bourgeoisie et le prolétariat. Cependant, le prolétariat est une classe qui veut abolir les classes. En ce sens, le socialisme, où le capitalisme est dépassé, est déjà en rapport avec le communisme, société où le socialisme a triomphé et s’est généralisé à tous les domaines.

Cela veut dire qu’une révolution socialiste n’a pas qu’un rapport avec le passé, mais également avec l’avenir. Le prolétariat fait la révolution pour prendre le pouvoir, et en même temps, lorsqu’il le fait, il porte sa disparition en tant que classe.

En ce sens, une révolution socialiste dans un pays donné relève du particulier, puisqu’il s’agit d’une révolution dans un pays particulier. Mais ce particulier est en rapport avec l’universel, vu qu’il porte l’universel.

Cela veut dire que le cadre national dont on parle pour une révolution socialiste n’est pas un cadre national en tant qu’accumulation de phénomènes, d’expériences, etc. qu’il faudrait prendre en compte pour saisir les mentalités et s’y adapter pour être crédible.

Le cadre national dont on parle pour une révolution socialiste relève au contraire de l’universel, dans la mesure où il est particulier.

Dit différemment : lorsque toutes les révolutions socialistes ont eu lieu, tous les pays s’unissent dans une seule nation, qui alors n’est plus une nation, les particuliers devenant l’universel. S’il y a fusion, c’est que la fusion est possible et nécessaire, donc que ce qui fusionne, bien que particulier, porte en soi l’universel.

Donc: chaque peuple va apporter dans la grande fusion des choses qui lui sont propres, mais qui présentent un aspect humain universel. L’humanité, dans le communisme, retrouve par là sa complexité perdue en sortant de la Nature, mais avec un saut qualitatif. C’est cela qui lui permet également de revenir à la Nature, en tant qu’être social.

Et comme chaque peuple va apporter ce qu’il porte en particulier et qui sera universel, chaque révolution socialiste s’appuiera fondamentalement sur ce particulier, puisque la tendance est à l’universel.

Le cadre national n’est ici plus un arrière-plan, si on regarde simplement le passé. En regardant le futur, on voit que l’apport du cadre national va se maintenir, et que donc c’est un aspect du futur qui va se maintenir depuis le présent, et qui joue par conséquent un rôle essentiel.

Il ne s’agit donc pas que de prendre en compte le cours du passé : il faut avoir comme fil conducteur ce qui va se maintenir dans l’universel. On parle ici de ce que chaque peuple va apporter à l’humanité en fusion.

L’être humain nouveau, revenu à lui-même après son parcours comme animal dénaturé, va récupérer toutes les facettes de son existence réelle : c’est le sens des multiples parcours, des multiples sensibilités nationales.

Chaque nation a en fait développé une nuance, une différence de sensibilité relevant de l’être humain universel.

La révolution socialiste dans chaque pays porte donc un aspect national – mais ce qui joue, c’est ce qui se relie à l’universel. La révolution socialiste française ne sera française que dans la mesure où elle porte en elle la disparition de la France comme nation.

L’apport de la France, ce sera bien entendu l’esprit sceptique-critique, tout comme l’Angleterre apportera le flegme, la Russie la profondeur électrisée, l’Ukraine la profondeur brumeuse, la Pologne l’élan brumeux, la Tchéquie la bonhommie intelligente, la Suède l’introversion ouverte, la Finlande la détermination stoïque, la Corée le jeu de l’esprit, l’Inde la psychologie coordonnée, le Mexique la mise en scène, le Pérou le statique volontaire, la Turquie l’introspection engagée, l’Iran l’introspection cultivée, etc.

En fait, tout comme les débuts du capitalisme donnent naissance à la nation, la fin du socialisme y met un terme. Et les parcours nationaux ont été un gigantesque détour pour récupérer de manière approfondie la richesse humaine perdue lorsque l’être humain a cessé d’être naturel.

L’humanité unifiée ne formera plus une seule nation : le principe même de nation aura été dépassé. Les nuances et les différences trouveront alors une voie différente pour se produire et faire vivre la contradiction sur le plan culturel.

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