Le PCF bolchevisé, isolé, cible récurrente de la répression

Lorsque le Parti Communiste se fonde au Congrès socialiste de Tours de 1920, il a un mode d’organisation issu des principaux courants du mouvement ouvrier français : celui des socialistes, avec le droit de tendance, celui des syndicalistes révolutionnaires, avec une démarche activiste-substitutiste.

Si ainsi l’élan est là dans la première période des années 1920, l’approche générale est éclectique à la française et l’Internationale Communiste décide de faire le ménage avec la bolchevisation. Le Parti Communiste change alors de forme, de méthode, voire d’idéologie.

Le marxisme n’est plus un romantisme levier à un « élan », il implique une liaison étroite avec l’Internationale Communiste et des principes devant être présents politiquement à tous les niveaux.

Cela ne s’est pas fait sans traverser les difficultés et cela se voit au fait qu’il tenait un congrès chaque année de 1921 à 1926, mais qu’il faut attendre 1929 pour avoir le sixième congrès, à Paris.

Ce développement qualitatif a cependant impliqué un recul quantitatif. Le Parti Communiste en France, c’est pratiquement 180 000 membres à sa fondation en 1920, avec un passage à 118 000 dès 1921, pour se retrouver à 60 000 début 1925, 53 000 en 1927.

Ce reflux reflète le fait que la France capitaliste parvient, de par sa nature agraire, à éviter les premiers dégâts de la première crise générale du capitalisme. Le Parti Communiste, né dans une vague ayant surtout été immense dans l’Est de l’Europe, se retrouve alors en porte-à-faux avec la société française stabilisée.

Il apparaît comme le représentant d’une minorité sociale radicalisée, déconnectée. La répression s’abat de manière véritablement massive sur lui et les gouvernements ne se cachent pas de vouloir le liquider, comme le ministre de l’Intérieur Albert Sarrault l’exprime lors d’un discours prononcé à Constantine le 23 avril 1927 : « le communisme, voilà l’ennemi ».

Un mois plus tard en effet le gouvernement fait voter à l’Assemblée sept demandes de poursuites contre l’ensemble des députés communistes. Les condamnations pleuvent alors, ainsi que les perquisitions et en général la poursuite des activités communistes.

On a notamment en septembre 1927 la condamnation à de fortes amendes, pour provocation de militaires à la désobéissance dans un but de propagande anarchiste, de toute une série d’activistes.

Concrètement, toute la période de la fin des années 1920 et du début des années 1930 est marquée par des interventions régulières voire systématiques de la police et des gardes mobiles contre les meetings, les rassemblements, les manifestations, les fêtes du Parti Communiste et de la CGT Unitaire qui lui est liée.

Cela est vrai en fait de toute initiative ouvrière en général et les grèves font pareillement face à une société capitaliste hargneuse et brutale. Cependant, l’État français vise clairement à supprimer une menace politique et il a d’ailleurs ici l’appui ouvert de la SFIO qui aimerait bien se débarrasser de ce concurrent sur sa gauche.

Le Parti Communiste va ici se retrouver face à une contradiction qu’il va chercher à résoudre pendant toute cette période, sans y parvenir. Puisque en effet la répression touche tous les ouvriers, qui régulièrement protestent ou sont en grève dans le pays, alors le Parti Communiste considère qu’il doit maintenir une ligne de conflit ouvert, pour apparaître comme le pôle révolutionnaire.

C’est le principe du mot d’ordre « classe contre classe » qui devient la ligne à partir de 1928.

Cependant, en même temps, le Parti Communiste ne parvient à n’être qu’une fraction de la contestation ouvrière. Il n’est tout simplement pas capable d’autonomie, de développer lui-même les initiatives de masse : à chaque fois qu’il l’entreprend dans cette période, c’est l’échec.

Un exemple est ici très parlant : 100 000 personnes manifestèrent à Paris le 7 août 1927, en soutien aux anarchistes américains Sacco et Vanzetti menacés d’être condamnés à mort pour un hold up qu’ils n’avaient pas commis. Le Parti Communiste était alors présent et efficace, formant la fraction la plus organisée et la plus volontaire.

Mais lorsqu’il décide d’organiser dans la foulée une manifestation parisienne contre le défilé des vétérans américains de l’American Legion, c’est l’échec faute d’être en mesure de faire face à la répression effectuée par la police.

En même temps, la mairie de Clichy inaugura une place Sacco et Vanzetti. La conclusion tombe alors d’elle-même : ce qui peut fonctionner, c’est un repli territorial et une quête de symbolisme dans les bastions, un positionnement radical au sein d’un mouvement plus général.

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