Comme nous l’avons vu, l’émergence du libéralisme
dans le domaine de la cosmologie a changé la situation pour le
révisionnisme chinois. En effet, l’émergence de scientifiques dans
ce cadre ouvert par le révisionnisme chinois a donné une
contribution importante à l’idéologie de contre-révolution
bourgeoise ouverte, au point que le régime révisionniste en a
lui-même été mis en difficulté.
Étudions plus précisément
ce processus.
Le rejet révisionniste de la cosmologie de Mao Zedong
Au début des années 1980, l’objectif du révisionnisme chinois était de détruire la conception maoïste de la matière comme inépuisable, intarissable parce que chaque niveau de la matière est divisible, le processus étant infini.
Les armes pour faire cela n’étaient pas originales : il s’agissait bien entendu, d’une part, de la mécanique quantique, qui théorisé le micro-monde comme étant observable et prévisible grâce aux probabilités : sont ici importants le « principe d’incertitude » de Heisenberg et l’école de Copenhague avec Niels Bohr.
Ensuite, l’autre arme était le Big Bang : il y aurait une origine de l’univers et la matière ne serait pas infinie, la matière étant limitée et pour ainsi dire étirée dans un univers en expansion.
Déjà en 1973, dans le premier numéro de la nouvelle série de la Revue d’études en philosophie, qui avait été arrêtée auparavant, un article écrit par Fang Lizhi et Yin Dengxiang attaqua les enseignements effectués dans la revue Journal de la dialectique de la nature, qui soutenait la cosmologie de Mao Zedong.
Il exprimait la nécessité de considérer que l’univers était « fini » selon la science naturelle et « infini » du point de vue de la philosophie. C’était une façon de promouvoir le relativisme et le libéralisme.
En fait, dans la science, les scientifiques bourgeois faisaient la promotion de la même chose que Deng Xiaoping en économie : tout serait trop compliqué, nécessitant une nouvelle formulation, avec la nécessité d’être « flexible », et non pas dogmatique, etc.
L’infinie divisibilité de la matière peut être vrai, mais pas de la manière que l’on pensait auparavant, tout doit être reconsidéré, etc.
L’influence du relativisme
Dès que les « débats » sur l’indivisibilité de la matière ont été ouverts, la dialectique de la nature pouvait être mise de côté, en particulier sous l’influence de Fang Lizhi, un droitier qui a aidé Deng Xiaoping et était l’un des activistes majeurs donnant naissance au mouvement de 1989 (il a été expulsé du Parti « communiste » en 1987 et a demandé l’asile à l’ambassade américaine à Pékin en 1989).
Néanmoins, et en parallèle avec la réforme de Deng Xiaoping, le rejet officiel de la divisibilité de la matière a pris du temps. Deng Xiaoping a progressivement transformé l’idéologie officielle, au nom de la modernisation, de la science et de la technologie qui serait « nouvelles » et devraient être adoptées.
De la même manière, Zha Ruqiang joua un rôle majeur dans le domaine de la science du révisionnisme chinois. Il a été le principal promoteur de la conception dengiste dans la science, produisant de nombreux documents, en essayant de produire une toute nouvelle conception de la science, libérale d’un côté, mais avec l’apparence du marxisme.
Au début des années 1980, la Chine a connu une grande offensive idéologique des conceptions réactionnaires traditionnelles occidentales : en psychologie cette offensive est venue par Freud, Jung, Adler, Rogers, en philosophie à travers Foucault, Heidegger, Lévi-Strauss, Derrida.
La tendance était de considérer que la science devait être « autonome » de la philosophie, que le libéralisme complet était nécessaire, avec une forte influence des conceptions réactionnaires de Karl Popper, Thomas Kuhn et Imre Lakatos.
Le rôle de Zha Ruqiang
Dans ce contexte, Zha Ruqiang a joué le rôle de défenseur de l’hégémonie du Parti « communiste » révisionniste.
D’un côté, selon Zha Ruqiang, c’était le temps de la « troisième révolution industrielle », avec la théorie quantique et la relativité, l’énergie nucléaire et la technologie spatiale, la technologie informatique, il y avait la nécessité d’une science « pratique ».
Ce fut directement utile pour la ligne de modernisation de Deng Xiaoping.
De l’autre côté, Zha Ruqiang défendait le « marxisme », et ainsi la théorie de l’indivisibilité de la matière, parce que c’était une thèse nécessaire pour justifier la nécessité scientifique du Parti « communiste » révisionniste.
Ainsi, il a exprimé son désaccord avec Lukacs, Marcuse, Sartre, Merleau-Ponty, Sidney Hook, ce qui signifiait qu’il refusait les courants idéologiques occidentaux « de gauche », et a essayé de forger une continuité idéologique avec le passé.
La tâche était pratiquement impossible : comment était-il possible de dire que la théorie de la divisibilité de la matière était correcte, quand Mao Zedong l’avait formulé durant la période de la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne, une période entièrement rejetée par Deng Xiaoping et le régime chinois?
Conséquence de la position théorique impossible du révisionnisme chinois
En effet, une fois que cette approche « pratique », c’est-à-dire « dengiste », avait commencé, Zha Ruqiang pouvait lui-même être rejeté pour avoir maintenu le concept de dialectique de la nature, même si « adapté ».
Le « nouveau » marxisme du révisionnisme chinois résumait le matérialisme dialectique à la méthode de considérer un phénomène à travers son développement et son changement.
C’est, de fait, exactement comment le Parti « Communiste » français a toujours limité les enseignements de Marx et Engels (ou Lénine et Staline) ; c’est le rejet révisionniste du « dogmatisme », de la « scolastique », du « stalinisme », etc.
Ainsi, en 1986, la position de Zha Ruqiang a été fortement attaquée par Fang Lizhi, Dong Guangbi, Ji Wulun, Han Zenglu ; l’objectif principal était la philosophie, qui pouvait être considérée comme un « outil utile », mais jamais comme un guide. Hegel a été considéré comme la source des erreurs, Kant et le positivisme ont été valorisés.
La tendance était à un rejet ouvert du matérialisme dialectique.
Le choix du régime par le social-fascisme
Il était clair que si la critique du matérialisme dialectique était généralisée, alors la science devait être libéralisée, et si c’était le cas, alors le Parti « communiste » ne pouvait prétendre à aucune légitimité idéologique.
Ce n’était pas la voie choisie par le Parti « communiste » révisionniste en Chine, qui fit un plénum en septembre 1986 et a décidé de rejeter la « libéralisation bourgeoise ».
Conséquence de cela, en novembre, des manifestations étudiantes commencèrent dans l’Anhui, où Fang Lizhi appelé à « lutter », puis à Shanghai et à Beijing.
Le Parti « communiste » révisionniste réprima ces manifestations, Fang Lizhi a été expulsé du « Parti communiste » et Hu Yaobang, qui était secrétaire général du parti de 1982 à 1987, a été mis de côté en raison de son « soutien » aux manifestations.
Lorsque Hu Yaobang est mort en 1989, le 15 Avril, ce fut prétexte à de nouvelles manifestations d’étudiants, soutenant ses options, et c’est devenu la célèbre protestations de la place Tian’anmen de 1989.
En effet, les Sept demandes faites à la mi-avril 1989 étaient les suivantes :
1. Affirmer que les conceptions de Hu Yaobang sur la démocratie et la liberté sont correctes ;
2. Admettre que les campagnes de lutte contre la pollution spirituelle et la libéralisation bourgeoise étaient erronées ;
3. Publier des informations sur les revenus des dirigeants de l’État et des membres de leur famille ;
4. Mettre fin à l’interdiction de journaux privés et arrêter la censure de la presse ;
5. Augmenter le financement pour l’éducation et augmenter la rémunération des intellectuels ;
6. Mettre un terme aux restrictions sur les manifestations à Beijing ;
7. Fournir une couverture objective sur les étudiants dans les médias officiels.
Cela signifiait, pour être précis, d’aller jusqu’au bout du processus de lutte contre la cosmologie de Mao Zedong, à savoir le matérialisme dialectique. Mais le régime social-fasciste n’était pas en mesure de perdre sa position politique, et il lui fallait le « socialisme » comme prétexte.
Par conséquent, la sixième plénum du Parti « communiste » de Chine (12e Comité central), en septembre 1986, fit une résolution sur la civilisation spirituelle, s’opposant le marxisme comme dogme (ce qui signifie: le véritable matérialisme dialectique), mais aussi à l’idée que le marxisme était dépassé .
Et pour cette raison, le mouvement de 1989 a été écrasé et la modernisation a pris un nouveau développement, que nous pouvons tous voir aujourd’hui.
Conclusion
Fang Lizhi a évité la participation directe dans le mouvement de 1989 alors que cela a dégénéré en mai, mais en juin un mandat d’arrêt a été fait contre lui, car il était considéré comme le principal organisateur des manifestations.
Il a ensuite cherché refuge à l’ambassade américaine ; après une année, il a été autorisé à quitter le pays. Il a joué ensuite un rôle aux États-Unis dans la mobilisation en faveur de la naissance d’une classe bureaucratique chinoise liée à ce pays.
Mais, historiquement, une autre direction a été prise en Chine, qui est maintenant pratiquement dans la même situation que la Russie tsariste : un pays réactionnaire, largement ouvert à l’impérialisme, mais en essayant de gérer une indépendance bourgeoise à travers les possibilités d’un pays riche, qui ne peut arrivé bien entendu que par le fascisme.
Et nous pouvons voir ici un exemple intéressant de la façon dont le révisionnisme n’a pas un seul visage, mais deux face ; il y avait deux possibilités pour révisionnisme chinois. Toute évaluation de la contre-révolution chinoise après la mort de Mao Zedong doit prendre cela en compte.