Une fois qu’il a établi les principes généraux de son approche dans La physique, Aristote cherche à montrer que cela permet un regard scientifique sur la réalité. Il pose pour cette raison une série de questions sur les notions d’infini et de lieu, afin de présenter le cadre de l’activité scientifique.
De quoi parle la science ? Selon Aristote, la définition est la suivante :
« La science de la nature porte sur les grandeurs, le mouvement et le temps. »
C’est la raison pour laquelle Aristote est obligé de nier l’infini au sens strict et de reconnaître l’existence du lieu. Le matérialisme dialectique reconnaît la nature infinie de la réalité et rejette le principe de lieu, car il n’y a que la matière, et donc pas de « lieu » où se trouverait la matière.
Aristote a une grande peur de se perdre dans l’infini et réaffirme les mêmes thèses que dans l’œuvre qui fut appelée La métaphysique après sa mort. Il est vrai qu’il anticipe ici l’erreur de Hegel, qui lui reconnaît l’existence d’un « infini » comme sorte d’entité absolue.
C’est pour cela qu’Aristote dit en quelque sorte qu’il existe une infinité au sens d’une infinité d’actions, d’une infinité dans la transformation des formes, mais qu’il n’y a pas d’infini présent dans la nature des choses elles-mêmes.
Il y a ainsi une infinité de mouvements et c’est cela qui l’amène en définitive à faire de la réalité une infinité de mouvements impulsée à l’origine par un premier mouvement fourni évidemment par quelque chose de non mu, sinon il n’y aurait pas de « source » et on se perdrait pour Aristote dans l’infini.
Spinoza, avec le développement historique, comprendra qu’il y a là une souci quant à la nature de la matière elle-même et va déplacer l’analyse. Le moteur va devenir l’ensemble infini des mouvements lui-même, des mouvements d’une matière infinie. Ces mouvements relèvent tous de l’ensemble, qui est unifié (« Dieu ou la Nature »). L’infinité de la matière consiste ainsi en une infinité de modes d’un système unifié, celui de la réalité formant une seule unité.
Aristote ne pouvait pas historiquement aller jusque-là. Voilà pourquoi il place la science dans un cadre sans infini, avec les grandeurs, le mouvement et le temps. Spinoza la place lui dans un cadre infini, avec les grandeurs, le mouvement et l’espace. Le matérialisme dialectique place lui la science dans l’infini qui est la matière elle-même, qui est espace et dont la transformation par le mouvement est la base du temps.
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