Les rapports sino-soviétiques se distendent après 1956

Le mois de novembre 1957 fut celui du 40e anniversaire de la révolution russe, célébré notamment par l’envoi du satellite Spoutnik dans l’espace et une conférence internationale des Partis Communistes et Ouvriers. Mao Zedong vint en personne à la tête de la délégation.

Cependant, il y formula deux thèses reflétant la démarche anti-révisionniste au sein du Parti Communiste de Chine depuis le 20e congrès du Parti Communiste d’Union Soviétique de 1956, durant laquelle il y eut la dénonciation agressive de Staline par Khrouchtchev qui prenait la tête du Parti et du pays.

Mao Zedong expliqua en effet que l’arme nucléaire ne pourrait pas décider du sort du monde et que même si une guerre se produisait avec l’utilisation de ces armes, le monde deviendrait socialiste. Cela s’opposait à toute la perspective mise en place par Khrouchtchev d’une compétition pacifique de l’URSS avec les États-Unis.

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Il affirma également que le « vent d’Est l’emporte sur le vent d’Ouest », c’est-à-dire que la tendance principale était à la révolution. C’était là poser qu’il fallait aller de l’avant, ce qui était le contraire de la démarche soviétique.

Cette démarche s’accompagnait d’une autre rupture en Chine populaire même.

Mao Zedong mit en place une stratégie de développement économique ne reposant plus sur une orientation venant de l’extérieur et consistant en une reproduction servile des formes soviétiques, dans un esprit passif. C’était la période des « trois drapeaux rouges » : le grand bond en avant, les communes populaires et la ligne générale pour la construction socialiste.

Ce moment allait devenir la clef de l’affrontement sino-soviétique, même si en apparence, rien ne sembla encore changer. En avril 1958 fut signé un accord commercial sino-soviétique d’importance, devant faciliter les échanges. C’était là un prolongement direct de l’étroit rapport entre l’URSS et la Chine populaire depuis la fondation de celle-ci.

Nikita Khrouchtchev se rendit toutefois de manière inattendue à Pékin du 31 juillet au 3 août 1958, avec le ministre de la Défense Malinovski. Il était venu en personne afin de proposer la mise en place d’une flotte militaire commune sino-soviétique.

C’était évidemment une tentative d’inféoder la Chine populaire tout en cherchant des relais pour chasser Mao Zedong de la direction du Parti chinois.

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En apparence, le processus continua ainsi de manière ininterrompue. Il en ressortit une déclaration commune d’unité et le 8 août fut signé un accord pour une aide technique soviétique pour la construction de 47 entreprises industrielles et stations électriques.

Un nouvel accord commercial fut signé à la fin de l’année et Zhou Enlai se rendit en janvier 1959 au 21e congrès du Parti Communiste d’Union Soviétique. Le 7 février 1959 fut signé un nouvel accord, pour 78 grands projets concernant l’acier, la chimie, le charbon, le pétrole, les matériaux de construction, etc.

Mais en août, il fut procédé à une tentative de renverser Mao Zedong, dans le cadre d’un coup d’État pro-soviétique.

En avril, au lieu de participer au Congrès populaire national, le ministre de la Défense Peng Dehuai avait été en avril à une réunion des ministres du Pacte de Varsovie, faisant dans ce cadre de multiples visites en URSS et dans les démocraties populaires est-européennes, rencontrant Nikita Khrouchtchev à Tirana en Albanie.

Pendant ce temps-là, Nikita Khrouchtchev avait envoyé au Bureau Politique du Parti chinois ce qui était une sorte d’ultimatum : une unité d’action et militaire sino-soviétique, avec des armes nucléaires en Chine sous supervision des conseillers soviétiques, ainsi que des économies liées, avec un premier plan sur quinze ans.

Le Bureau Politique refusa la proposition et l’URSS annula toute aide pour l’arme atomique. Le ministre de la Défense Peng Dehuai fit alors une vaste tournée de la Chine populaire pour faire circuler, à partir du 14 juillet, une lettre dénonçant le grand bond en avant et les communes populaires. Nikita Khrouchtchev fit exactement de même le 18 juillet, avec la même dénonciation de « l’aventurisme petit-bourgeois ».

Le 1er août, jour anniversaire de l’Armée Populaire de Libération chinoise, la presse soviétique fit l’éloge du ministre de la Défense chinoise. Le ministre de la Défense Peng Dehuai mena alors l’offensive durant le huitième plénum du huitième Comité Central, qui se déroula du 2 juillet au 16 août. Il y fut défait.

Khrouchtchev et le ministre des Affaires étrangères Gromyko vinrent ensuite à Pékin en septembre 1959 à l’occasion des dix ans de la victoire de la révolution chinoise. Le conflit d’opinions fut ouvert, Khrouchtchev prônant la coexistence pacifique et dénonçant l’aventurisme chinois, refusant de serrer la main du ministre des Affaires étrangères Chen Yi, qualifié de « militariste ».

Il n’y eut aucune déclaration commune et le Parti chinois critiqua que certains camarades aient perdu la tête et attaquent publiquement la construction socialiste chinoise et ses positions intérieures et extérieures.

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