Mikhaïl Gorbatchev a reçu le prix Nobel de la paix en 1990, une preuve de son excellente image dans les pays occidentaux. Il est par contre du point de vue de l’URSS l’accompagnateur de l’effondrement.
Cependant, il ne faut pas considérer que Mikhaïl Gorbatchev est arrivé au pouvoir en 1985 et a constaté une situation qui l’a dépassé, notamment avec la catastrophe de Tchernobyl. Sa nomination même est le fruit de la fin de la génération de Léonid Brejnev.
La preuve de cela, c’est que sa démarche a été présentée dès 1984, lors d’un voyage à Londres. Mikhaïl Gorbatchev y est allé en tant que président de la Commission des Affaires étrangères, à la tête d’une délégation, mais c’était Margaret Thatcher, à la tête du gouvernement britannique, qui avait tout fait pour le faire venir spécifiquement.
Margaret Thatcher cherchait un jeune responsable soviétique, et Mikhaïl Gorbatchev, né en 1931, était présenté du côté de certains « soviétologues » comme le principal chef de file de la nouvelle génération.
Mikhaïl Gorbatchev fut accueilli comme un vrai chef d’État, et la rencontre entre Margaret Thatcher fut à la fois pleine de confrontation et de recherche de convergence. Cela se déroula à Chequers, la résidence de villégiature du Premier ministre du Royaume-Uni non loin de Londres.
Du côté britannique, outre Margaret Thatcher, il y avait notamment le ministre de l’Intérieur William Whitelaw, le ministre des Affaires étrangères Geoffrey Howe, le secrétaire à la Défense Michael Heseltine.
Du côté soviétique, Mikhaïl Gorbatchev était venu avec toute une série de hauts responsables divers, mais surtout le théoricien militaire membre de l’état-major Nikolaï Chervov, tourné vers la réduction des armements, et de Léonid Zamyatin, secrétaire de la Commission des affaires étrangères du Conseil des nationalités, chef du département du Comité central du PCUS, futur ambassadeur à Londres.
Mikhaïl Gorbatchev eut un succès extraordinaire auprès de Margaret Thatcher, qui s’empressa de le mettre en avant auprès de Ronald Reagan. Trois mois plus tard, ce dernier prenait la tête du Parti Communiste d’Union Soviétique, et il est évident que le jeu d’ouverture à l’occident qui avait ici réussi avait grandement contribué à sa nomination.
De manière très notable, cet épisode est totalement passé sous silence du côté occidental. Il montre pourtant, historiquement, que le social-impérialisme soviétique a capitulé en décembre 1984, ce qui a été avalisé par la nomination de Mikhaïl Gorbatchev.
Celui-ci, dès la visite à Londres, mit en avant une « nouvelle pensée politique », dont les idées principales sont les suivantes.
Il faut rendre transparent les niveaux de décisions et cesser les interventions intempestives dans la société, les sciences, les arts, l’enseignement, etc. Il faut aller plus loin dans l’autonomisation des entreprises en leur accordant de suivre une « comptabilité analytique » consistant à s’aligner sur la loi du marché.
C’est la glasnost (transparence) et la restructuration (perestroïka).
Il faut s’ouvrir résolument aux pays occidentaux, cesser totalement toute ligne d’opposition idéologique, promouvoir une ligne d’accord mondial pour les différents problèmes.
C’est parce qu’il représentait cette ligne que Mikhaïl Gorbatchev a été nommé à la tête du Parti Communiste d’Union Soviétique.
C’était une expression de capitulation : l’URSS social-impérialiste cessait toute ambition à l’hégémonie mondiale, mais demandait le maintien de son existence.
Mikhaïl Gorbatchev formula ces principes dans un ouvrage publié en 1987, La perestroïka et la nouvelle pensée politique, et tint un discours à l’ONU en 1988 pour les réaffirmer.
Lors de ce discours, il annonça également le retrait pratiquement global des forces armées soviétiques des pays de l’Est européen. On est clairement dans une perspective d’accord avec les pays occidentaux : l’URSS recule, mais en échange elle demande une place.
« Aujourd’hui, je peux vous dire ceci : l’Union soviétique a décidé de réduire ses forces armées. Au cours des deux prochaines années, leur nombre diminuera de 500 000 personnes et le volume des armes classiques sera également considérablement réduit.
Ces réductions seront effectuées unilatéralement, sans lien avec les négociations au titre du mandat de la réunion de Vienne.
En accord avec nos alliés du Pacte de Varsovie, nous avons décidé de retirer d’ici 1991 six divisions blindées de RDA, de Tchécoslovaquie et de Hongrie et de les dissoudre.
Des groupes de troupes soviétiques situés dans ces pays, des unités d’assaut aérien et un certain nombre d’autres formations et unités, y compris des unités de transport aéroporté, dotées d’armes et d’équipements militaires seront également retirées.
Les troupes soviétiques dans ces pays seront réduites de 50 000 personnes et les armes de 5 000 chars.
Toutes les divisions soviétiques restant sur le territoire de nos alliés seront réorganisées. Ils reçoivent une structure différente de celle d’aujourd’hui qui, après un retrait important de chars, devient sans ambiguïté défensive.
Dans le même temps, nous réduirons le nombre de soldats et le nombre d’armes dans la partie européenne de l’URSS.
Au total, dans cette partie de notre pays et sur le territoire de nos alliés européens, les forces armées soviétiques seront réduites de 10 000 chars, 8 500 systèmes d’artillerie et 800 avions de combat.
Au cours de ces deux années, nous réduirons également considérablement la taille des forces armées dans la partie asiatique du pays. En accord avec le gouvernement de la République populaire mongole, une partie importante des troupes soviétiques temporairement stationnées là-bas retourneront dans leur pays d’origine. »
Cette capitulation du social-impérialisme soviétique était assumée et il n’y a pas eu d’opposition. La figure principale aux côtés de Mikhaïl Gorbatchev fut Alexandre Iakovlev, qui comptait aller le plus rapidement possible dans les réformes.
C’est que le régime est alors à bout de souffle, et pour les gens comme Alexandre Iakovlev, le réformer est pratiquement impossible : il faut s’en sortir d’une manière ou d’une autre.
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