Déclaration de la délégation, 26 juin 1960
Le Comité central du Parti communiste chinois estime que, durant cette Rencontre, le camarade Khrouchtchev de la délégation du Comité central du Parti communiste de l’Union soviétique a complètement violé le principe du règlement des problèmes communs par voie de consultations entre partis frères, principe observé de tout temps dans le mouvement communiste international, et a totalement violé l’accord réalisé avant la Rencontre, selon lequel il était convenu de limiter celle-ci à un échange de vues et de n’y prendre aucune décision, et cela en présentant, par une attaque-surprise, un projet de communiqué de la Rencontre, sans avoir consulté au préalable les partis frères sur le contenu de ce communiqué ni même permettre comme il se devait, d’engager d’amples discussions au cours de la Rencontre.
I.
C’est là un abus du crédit acquis par le P.C.U.S. au sein du mouvement communiste international pendant une longue période depuis le vivant de Lénine, un acte d’une extrême brutalité, visant à imposer sa propre volonté aux autres.
Un tel comportement n’a rien de commun avec le style de Lénine. Une telle façon d’agir a créé, au sein du mouvement communiste international, un précédent des plus indignes. Le Comité central du P.C.C. est d’avis que cette attitude et cette façon d’agir du camarade Khrouchtchev entraîneront des conséquences d’une extrême gravité au sein du mouvement communiste international.
II.
Le P.C.C. est toujours resté fidèle au marxisme-léninisme et a toujours maintenu les positions théoriques du marxisme léninisme; depuis plus de deux ans, il fait preuve d’une fidélité absolue à l’égard de la Déclaration de Moscou de 1957, et s’en tient fermement à toutes les thèses marxistes-léninistes contenues dans la Déclaration. Il existe entre le camarade Khrouchtchev et nous des divergences sur une série de principes fondamentaux du marxisme-léninisme.
Ces divergences concernent les intérêts de l’ensemble du camp socialiste aussi bien que les intérêts du prolétariat et des peuples travailleurs du monde entier, elles ont trait à la question de savoir si les peuples du monde pourront sauvegarder la paix mondiale et conjurer une guerre impérialiste, elles ont rapport à la question de savoir si le socialisme pourra continuer à triompher dans le monde capitaliste qui représente les deux tiers de la population de l’humanité et les trois quarts de la superficie du globe.
Face à ces divergences, tous les marxistes-léninistes doivent adopter une attitude sérieuse, faire de sérieuses réflexions et mener des discussions entre camarades, afin d’aboutir à une conclusion unanime. Cependant, l’attitude prise par le camarade Khrouchtchev est une attitude toute patriarcale, arbitraire et despotique.
En réalité, il ne considère pas les relations existant entre le grand P.C.U.S. et notre parti comme des relations de partis frères, mais comme des rapports entre père et fils. Au cours de cette Rencontre, il a tenté d’exercer une pression pour que notre parti s’incline devant ses points de vue étrangers au marxisme-léninisme.
Nous déclarons ici solennellement que notre parti croit et obéit seulement à la vérité du marxisme-léninisme, et ne s’inclinera jamais devant les points de vue erronés, contraires au marxisme-léninisme. Nous estimons que dans le discours prononcé par le camarade Khrouchtchev au IIIe Congrès du Parti ouvrier roumain, certains points de vue sont erronés et contraires à la Déclaration de Moscou.
Son discours est de nature à se faire applaudir par les impérialistes et la clique Tito et ceux-ci l’ont effectivement applaudi. Nous sommes disposés, désormais, à poursuivre, lorsque l’occasion se présentera, des discussions sérieuses avec le P.C.U.S. et d’autres partis frères sur les divergences de vues existant entre le camarade Khrouchtchev et nous.
En ce qui concerne « la Lettre d’Information du P.C.U.S. au P.C.C. » distribuée par le camarade Khrouchtchev à Bucarest lors de la Rencontre, le Comité central du P.C.C. y répondra en détail quand il l’aura étudiée avec soin pour expliquer les divergences de principe entre les deux Partis et faire éclater la vérité au grand jour, et il entamera en toute camaraderie des discussions sérieuses et consciencieuses avec les partis frères des différents pays.
Nous sommes convaincus que, malgré tout, la vérité du marxisme-léninisme finira par triompher. La vérité ne craint pas la discussion. En fin de compte, la vérité ne pourra être prise pour l’erreur, l’erreur ne pourra être prise pour la vérité. L’avenir du mouvement communiste international dépend des exigences et de la lutte des peuples de même que de la direction assumée par le marxisme-léninisme, il ne dépendra jamais de la baguette de qui que ce soit.
III.
Nous, le P.C.C., nous avons toujours lutté pour sauvegarder l’unité entre les partis communistes de différents pays et celle entre les pays socialistes.
En vue de l’unité réelle des rangs du communisme international, et dans l’intérêt de la lutte commune contre l’impérialisme et les forces réactionnaires, nous sommes d’avis qu’il est nécessaire d’engager des discussions normales sur les problèmes qui nous divisent, qu’il ne faut pas recourir à des moyens anormaux, ni à un simple vote pour régler à la hâte les sérieux problèmes de principe, et qu’on ne doit pas contraindre les autres à accepter ses points de vue arbitraires qui n’ont pas été mis à l’épreuve ou dont la fausseté a été prouvée par des faits.
La manière dont le camarade Khrouchtchev a procédé au cours de cette Rencontre est absolument préjudiciable à l’unité du communisme international. Néanmoins, quelle que soit la façon d’agir du camarade Khrouchtchev, l’unité entre les partis chinois et soviétique de même que l’unité entre les partis communistes et ouvriers des différents pays ne manqueront pas de continuer à se consolider et à se développer. Nous sommes profondément convaincus qu’avec le développement du mouvement communiste international et du marxisme-léninisme, l’unité de nos rangs se consolidera et se développera sans cesse.
IV.
Du point de vue des relations entre nos deux partis prises dans leur ensemble, les divergences de vues qui existent entre le camarade Khrouchtchev et nous, et dont il est question plus haut, ne revêtent qu’un caractère partiel.
Nous estimons que la lutte commune et l’unité de nos deux partis pour la cause commune restent le point capital, nos deux pays étant des pays socialistes, nos deux partis étant des partis fondés selon les principes du marxisme-léninisme, des partis qui luttent pour faire progresser la cause de tout le camp socialiste, pour s’opposer à l’agression impérialiste et pour gagner la paix mondiale.
Nous sommes persuadés que nous pourrons, de concert avec le camarade Khrouchtchev et le Comité central du P.C.U.S., trouver l’occasion de nous entretenir dans le calme et en toute camaraderie, pour éliminer les divergences d’opinions existant entre nous, resserrer et consolider encore davantage les relations entre les partis chinois et soviétique. Si nous agissons ensemble de la sorte, ce sera extrêmement profitable à la cause de la lutte du camp socialiste et des peuples du monde entier contre l’agression impérialiste et pour la paix mondiale.
V.
Nous sommes très heureux de constater que « le projet du communiqué de la Rencontre » présenté lors de cette Rencontre a confirmé la justesse de la Déclaration de Moscou.
Cependant, l’explication que donne ce projet des diverses thèses marxistes-léninistes contenues dans la Déclaration de Moscou est inexacte et unilatérale. Par ailleurs, ce projet n’a pas pris position sur les problèmes importants de la situation internationale actuelle et n’a soufflé mot du révisionnisme moderne — principal danger au sein du mouvement ouvrier international; c’est là une erreur.
Par conséquent, nous ne pouvons pas accepter ce projet. En vue de s’unir étroitement et de mener en commun la lutte contre l’ennemi, nous présentons un projet revisé et proposons d’en discuter. Si on ne peut pas aboutir à un accord cette fois-ci, nous proposons d’établir une commission spéciale de rédaction, qui sera chargée d’élaborer, après de suffisantes discussions, un document acceptable pour tous.
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