La section économique du comité central du Parti Communiste français publia en 1971, en deux tomes de 450 pages,un Traité marxiste d’économie politique – Le capitalisme monopoliste d’État.
Il s’agit en fait d’un condensé des conceptions déjà élaborées à travers de nombreux articles dans la revue Économie et politique. L’ouvrage est censé être collectif et on trouve en introduction une longue liste de rédacteurs, avec une insistance sur leur rôle au sein des institutions françaises.
On a ainsi plusieurs professeurs agrégés et universitaires en tous genres dans les domaines économiques, mathématique ou sociologique. Sont également mis en avant la formation ou le rôle de certains au CNRS, à l’ENA ou encore à Polytechnique. Un inspecteur général et un ancien ingénieur d’État sont également cités comme rédacteurs.
C’est un moyen pour les auteurs de se présenter comme légitimes à gérer l’État, puisque le connaissant de l’intérieur. Pour cette raison, Paul Boccara fut symboliquement mis de côté du comité de rédaction final, même si en réalité il relut et corrigea la version finale de l’ouvrage.
Celui-ci est, de fait, entièrement vargiste-boccariste. Le capitalisme y est présenté comme organisé, avec une production marquée par une forme de planification, sous la supervision de l’État. On lit ainsi, dans les premières pages :
« Il n’est pas question d’analyser ici, en détail, les divers aspects du capitalisme monopoliste d’État.
Nous n’en présenterons, dans ce premier chapitre, que les traits spécifiques, ceux qui marquent fondamentalement l’originalité du capitalisme monopoliste d’État comme phase particulière et ultime de l’impérialisme.
Si le financement public en est la caractéristique essentielle, l’existence d’un secteur public diversifié, d’une planification d’État, l’organisation même de la production, manifeste l’emprise du capitalisme monopoliste d’État sur toute la vie économique de la société. »
Le « traité » fournit, clef en main, les principes techniques de la théorie du capitalisme monopoliste d’État, visant très clairement les économistes et les techniciens des organismes économiques.
Son plan indique très bien l’idée qu’il y a derrière : montrer que pour le passage à une sorte de forme sociale pro-soviétique, il n’y aurait somme toute pas grand-chose à faire. Le découpage des parties et les chapitres font aboutir à cette vision des choses.
Le tome 1 regroupe cinq chapitres. Le premier est général et divisé en quatre parties :
I Les développements contradictoires du capitalisme
II Le financement public, caractéristique dominante du capitalisme monopoliste d’État
III Les principales manifestations du capitalisme monopoliste d’État
IV Le développement contemporain des antagonismes capitalistes
Le chapitre deux est consacré aux forces productives et aux rapports de production, divisé en quatre parties :
I Rapports de productions et développement des forces productives
II Le développement actuel de la science et de la technique
III Forces productives et rapports de production dans le mouvement historique
IV Perspectives. La démocratie avancée et le socialisme
Le chapitre trois est consacré aux classes sociales et se divisent là encore en quatre parties :
I Classes et conscience de classe
II Deux classes fondamentales : la classe ouvrière, la bourgeoisie
III Croissance des couches intermédiaires salariées
IV Polarisation des rapports sociaux
Le chapitre quatre est consacré à l’exploitation et se divise en six parties :
I Les formes de l’exploitation dans le capitalisme monopoliste d’État
II Marché de la force de travail et politique monopoliste de l’emploi
III La pression des monopoles d’État sur les salaires
IV Intensité et durée du travail
V L’insatisfaction grandissante des besoins sous le capitalisme monopoliste d’État
VI Contradictions de l’exploitation sous le capitalisme monopoliste d’État
Le cinquième est dernier chapitre est consacré à l’inflation et divisé en trois parties :
I Expérience quotidienne de l’inflation
II La monnaie et la production capitaliste
III L’inflation
Le tome 2 propose les six chapitres suivant, avec d’abord celui consacré aux monopoles et capital financier, divisé en quatre parties :
I Les monopoles industriels
II Le capital financier
III Les contradictions de l’accumulation monopolistes
Conclusion
Le chapitre sept est consacré aux traits actuels du système impérialiste et divisé en cinq parties :
I Le caractère transnational croissant de l’accumulation du capital
II l’internationalisme monopoliste de la production
III Néo-colonialisme et mouvement de libération nationale
IV L’intégration impérialiste
Conclusion
Le chapitre huit évoque l’État et le financement des monopoles, en six parties :
I Caractéristiques générales du financement public dans le capitalisme monopoliste d’État
II Drainage et affectation des fonds publics
III Le budget de l’État
IV La monnaie, le crédit et l’inflation
V les « intermédiaires financiers »
VI L’approfondissement par l’État des contradictions du mode de production capitaliste
Le chapitre neuf est intitulé La planification du capitalisme monopoliste d’État, et divisé en cinq parties :
I La planification dans le capitalisme monopoliste d’État
II Formes d’élaboration du plan et domaines de la politique économique
III Technique de planification
IV Evolution de la planification et de la politique du capital monopoliste en France
V Planification monopoliste d’État : résumé des analyses précédentes
Enfin, le chapitre dix est consacré aux nationalisations et se divise en parties :
I Nationalisations et capitalisme monopoliste d’État
II Les nationalisations démocratiques, élément décisif du progrès économique et social
III La gestion démocratique, facteur décisif du progrès économique et social
IV Nationalisations démocratiques et socialisme
Une dernière partie, sorte de post-face, est intitulé Démocratie et socialisme.
C’est une conclusion logique, car après avoir montré que l’État était déjà fortement présent dans l’économie et jouant soi-disant un rôle pratiquement directeur, il n’y avait plus qu’à indiquer qu’il suffirait de faire en sorte que l’État s’oriente dans une autre perspective, tout en restant lui-même.
C’est ni plus ni moins que le projet d’alliance de l’aristocratie ouvrière avec une partie de la bourgeoisie, pour contrebalancer les forces bourgeoises dominantes dans l’État.