1925
Le Parti Communiste constate que la tuerie mondiale et les traités de violence qui l’ont suivie ont précipité le désordre, aggravé les maux de la société capitaliste et créé partout une situation intolérable aux travailleurs, exigeant sans délai une transformation complète du régime,
Nous assistons aux convulsions suprêmes d’un ordre social frappé à mort.
La monopolisation croissante des capitaux, de la production et dû l’échange par une oligarchie insatiable ; une crise économique et financière sans précédent; l’exploitation éhontée du travail des prolétaires !
La journée de huit heures en danger, les salaires réels avilis ; une spéculation effrénée sur les denrées et les logements qui, s’ajoutant à la baisse du franc, inflige la misère aux petites gens, cependant que de louches trafiquants font des fortunes vertigineuses; le poids écrasant des impôts! L’impossibilité, de jour en jour plus évidente, de la « reconstitution européenne » dans le cadre du régime actuel; un nombreux renouveau du militarisme et des armements, de la diplomatie secrète et du jeu néfaste des alliances, annonçant de nouvelles catastrophes…
Tout annonce l’écroulement du capitalisme et pose aux peuples, l’impérieux dilemme. :
— La révolution ou l’esclavage !
Depuis la fin de la guerre, la réaction française au pouvoir sous le nom de Bloc National n’a cessé de saboter la paix et d’exciter contre la France officielle la juste colère de tous les peuples du monde.
Par la faute des Millerand, des Poincaré et d’une Chambre infâme de millionnaires et de mercantis, la France est entourée de l’hostilité générale. Elle n’a comme alliés que les gouvernants des petits États sans indépendance, achetés avec les millions des contribuables français, mais dont les peuples désavouent la vassalité.
Sous le prétexte mensonger d’exiger de l’Allemagne le paiement des réparations, en réalité pour satisfaire aux appétits d’une clique d’industriels et de financiers qui fait la loi dans ce pays, le Bloc National a entrepris l’occupation de la Ruhr qui porte à son comble le désastre européen.
Non seulement il a plongé ainsi le peuple allemand dans une misère atroce, crime inexpiable, non seulement il a augmenté le déficit du budget français au lieu de le réduire, mais il a irrémédiablement compromis toute chance de restauration économique de l’Europe.
Les capitalistes français et allemands s’entendent aujourd’hui comme larrons en foire au détriment de la classe ouvrière de France et d’Allemagne qui devra payer les frais de l’opération criminelle.
Et pour assurer sa toute-puissance établie sur la misère de multitudes exploitées et opprimées, le Bloc National, gendarme de l’Europe, entretient une armée gigantesque et parasitaire.
Seule, la République ouvrière et paysanne des Soviets de Russie, malgré son isolement et les ruines causées par la guerre et la contre-révolution, travaille à maintenir la paix et à créer des œuvres de vie, tandis que le Bloc National poursuit son œuvre de mort.
A la veille d’être chassé du pouvoir, le Bloc National lègue au pays un triste héritage ; augmentation de 20 % de tous les impôts, directs et indirects, livraison des monopoles d’État à la voracité du capital privé, abandon de la réforme des pensions, retrait du projet des assurances sociales. Par contre il ne parle nullement d’évacuer la Ruhr, de réduire les dépenses militaires et de cesser ses envois d’argent aux États vassaux de l’Europe centrale.
Le Parti Communiste dénonce aux masses populaires l’irrémédiable banqueroute de la bourgeoisie, son impuissance à sauver la civilisation, son incapacité d’enrayer la crise économique qui épuisé lentement les peuples, de rétablir un minimum de paix, de sécurité et de bien-être pour les masses.
Inquiète de la haine croissante que suscite dans le pays le Bloc National, la bourgeoisie prend la précaution de constituer un nouveau bloc de défense capitaliste qui, sons le nom dé Bloc des Gauches, continuera à duper les masses populaires.
Le Bloc des Gauches n’est pas une nouveauté. Quinze années de domination radicale avant la guerre ont montré que les travailleurs auraient tort d’attendre que la bourgeoisie gouvernante, quelles que soient les étiquettes dont elle se pare, autre, chose qu’oppression, exploitation et parfois même répression sanglante.
Les fusillades du Havre n’ont fait qu’éveiller l’écho des fusillades Draveil et de Narbonne. Sous le règne même du Bloc National, trois membres du Parti radical siègent aux côtés de Poincaré au Conseil des ministres. Les futurs chefs du Bloc des Gauches, Herriot et Franklin-Bouillon se sont associés à la politique impérialiste du Bloc National, dirigée contre la classe ouvrière : impôts écrasants, révocation de 25.000 cheminots, crédits pour l’opération criminelle de la Ruhr.
A bas la bourgeoisie ! Place au prolétariat ! Contre le gouvernement capitaliste incapable et sanguinaire, contre le despotisme d’une oligarchie de métallurgistes, de banquiers et de mercantis, qui oppriment et dévalisent la France, le Parti Communiste lève le drapeau du gouvernement ouvrier et paysan.
Seul un gouvernement ouvrier et paysan, soutenu par les organisations de travailleurs, sauvera le pays de la tyrannie de l’argent, de la barbarie de la guerre, des crimes du fascisme et de la réaction.
Le gouvernement ouvrier et paysan, c’est le salut pour l’immense majorité du peuplé, pour tous ceux qui travaillent sans exploiter le travail d’autrui.
Le gouvernement ouvrier et paysan ne sera pas une institution parlementaire, il sera appuyé sur les organes de classe au prolétariat, syndicats, conseils d’usines, etc. Son action favorable aux exploités lèvera contre lui l’opposition violenté de ta bourgeoisie menacée dans ses privilèges et qui ne reculera devant aucun moyen pour l’abattre.
Le gouvernement ouvrier et paysan mobilisera toutes les forces ouvrières pour se défendre par tous les moyens et pour instaurer la dictature du prolétariat des villes et des campagnes seule, capable de vaincre définitivement la bourgeoisie.
Pour que le gouvernement ouvrier et paysan devienne une réalité, que faut-il ?
Il faut battre la bourgeoisie!
Il faut constituer, aux élections comme en toutes circonstances favorables, le Bloc ouvrier et paysan, la coalition de toutes les forces des travailleurs, s’opposant aux Blocs bourgeois, au Bloc de gauche comme au Bloc National.
Ni Bloc National, ni Bloc de gauche, tous deux instruments du capital! Bloc ouvrier et paysan, instrument de libération du travail !
Le Bloc ouvrier et paysan, c’est l’union des travailleurs des villes et des campagnes, des ouvriers, paysans, employés, fonctionnaires, de tous ceux qui aspirent à un ordre social meilleur, de tous ceux qui souffrent de la dictature insolente des rois de l’argent.
Le Parti Communiste appelle les organisations prolétariennes à former avec lui le Bloc ouvrier et paysan et met et avant des candidatures ouvrières et paysannes comme seules susceptibles de grouper la majorité des travailleurs.
Comme programme du Bloc ouvrier et paysan et du futur gouvernement ouvrier et paysan, le Parti Communiste propose :
1) Extinction de la dette publique par la saisie des grandes fortunes. Suppression de l’impôt survies salaires et des impôts indirects ;
2) Socialisation des banques, des mines, des chemins de fer et transports maritimes, des usines et fabriques, des assurances, du commerce des pétroles, et, d’une façon générale, de toute industrie employant plus de cinquante ouvriers,
Établissement, dans toutes les industries socialisées ou non, du contrôlé ouvrier (s’exerçant par les Comités d’usines), de la journée de huit heures {six heures dans les industries insalubres) et du minimum de salaire. Droit de coalition et de grève aux fonctionnaires et aux travailleurs étrangers.
Assurances sociales, sans cotisation ouvrière, contre tous les risqués afférents à la vie et au travail des ouvriers, paysans, employés, fonctionnaires, Salaire minimum aux mutilés et retraités du travail et de la guerre, la maternité fonction sociale,
3) Abolition de la Constitution, bourgeoise : substitution à la pseudo-démocratie bourgeoise d’une démocratie purement ouvrière et paysanne associant les syndicats ouvriers à la gestion des services publics. Égalité de tous les droits pour tous les citoyens saris distinction de sexe ;
4) Réquisition des locaux d’habitation, taxation des loyers, construction par les municipalités d’immeubles à loyers bon marché ;
5) Répression rigoureuse de la spéculation. Contrôle des prix par des commissions, syndicales et coopératives, développement des coopératives avec l’appui financier du gouvernement ouvrier et paysan ;
6) Suppression de l’armée permanente et de l’industrie privée des armements. Désarmement de la bourgeoisie et répression des menées fascistes, Armement du prolétariat.
Formation d’une milice ouvrière et paysanne pour la défense des conquêtes du Bloc ouvrier et paysan. Abolition des conseils de guerre et des bagnes miliaires. Octroi de tous les droits de citoyens aux mobilisés. Formation de conseils de soldats et de marins pour la défense de leurs droits et de leurs intérêts ;
7) Droit des colonies à disposer librement d’elles-mêmes ;
8) Instruction gratuite, laïque et obligatoire de tous les enfants de 6 à 16 ans. Enseignement supérieur à la portée de tous. Mise à la charge de l’Étal des frais d’entretien des jeunes gens qui, appartenant à la classe ouvrière, auront fait preuve d’aptitudes particulières. Réforme des programmes, en vue d’associer intimement, à tous les degrés d’enseignement, l’instruction professionnelle et technique à l’instruction générale ;
9) Suppression de la magistrature, Généralisation du jury. Amnistie, générale aux victimes du capitalisme ;
10) Expropriation des grands propriétaires fonciers. Remise des fermes et métairies expropriées soit à des coopératives agricoles, soit aux familles paysannes qui les cultivaient précédemment. Crédit agricole d’État pour le perfectionnement de l’outillage et de la technique. Électrification des campagnes.
Admission des ouvriers agricoles, journaliers, domestiques de ferme au bénéfice des lois ouvrières et des assurances sociales, les petits propriétaires exploitant eux-mêmes conserveront la jouissance de leur propriété:
11) Paiement immédiat de leurs dommages de guerre restés en souffrance aux petits et moyens sinistrés, Révision des Indemnités accordées aux sinistrés de la grande bourgeoisie. Répression du trafic des bons de cession !
12) Constitution d’une haute-cour populaire qui aura à juger :
les responsabilités de la tuerie mondiale et de sa prolongation ;
les responsabilités encourues par les chefs militaires, grands et petits, dans la conduite de la guerre ;
les profiteurs de la guerre ;
13) Annulation du traité de Versailles, qui n’est qu’une déclaration de guerre permanente. Conclusion d’une paix véritable sans annexions ni contributions de guerre. Mise en commun des dettes de guerre et des réparations. Évacuation de toutes les régions occupées: rappel de toutes les missions militaires. Alliance avec l’Union des Républiques soviétiques:
14) Subvention [=remplacement] des États-Unis d’Europe à la pseudo-Société des Nations.
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et la bolchevisation du Parti Communiste
Section Française de l’Internationale Communiste