La colline Gellért de Budapest abrite le Monument de la Libération érigé en 1947 pour fêter le second anniversaire de la libération par l’armée rouge.
Zsigmond Kisfaludi Strobl a ici formé une oeuvre entière et puissante, un chef d’oeuvre. On a en effet une grande statue allégorie de la victoire surplombant un soldat de l’armée rouge, avec sur les côtés un homme terrassant un dragon et un jeune transportant un flambeau.
Ce monument a été très largement remodelé depuis par nécessité d’anticommunisme.
Le soldat de l’armée rouge a été enlevé, la statue ayant déjà dû être refaite après sa destruction lors de l’insurrection anti-communistes de 1956. Les inscriptions en l’honneur de l’armée rouge ont depuis enlevées également, etc.
C’est que l’oeuvre, surplombant Budapest, était en soi une ode au communisme, le symbole de la victoire de la république populaire.
Le personnage féminin de 14 mètres qui surplombe le groupe a ceci de très intéressant qu’il présente une certaine rigidité, rendue nécessaire par sa hauteur et son prolongement du long socle-piédestal. La figure culmine ainsi à 40 mètres de hauteur.
Or, cette rigidité est précisément atténuée par trois éléments. Il y a d’abord la feuille de palmier tenue à bout de bras, permettant de « fermer » la représentation et d’y apporter une touche atténuante par rapport à la rigidité, avec les éléments du végétal s’orientant dans plusieurs directions, d’ailleurs contradictoires, vers le haut et le bas.
Il y a ensuite le drapé formant l’habit porté, qui est littéralement une sorte de contenant d’où s’extraie le corps devenant porteur lui-même. Cela fait une sorte d’emboîtement très significatif.
Les trois autres éléments présentent chacun leur particularité. Sur l’un des côtés, on a une figure terrassant un dragon, avec une dimension réaliste s’effaçant pratiquement entièrement derrière l’allégorie. Cela étant, il y a un mouvement qui a un sens dans la mesure où cela correspond au mouvement de la statue lui faisant pendant.
La figure au flambeau est en effet allégorique, atténuant l’effet massif qu’aurait eu une celle de ces statues si isolée. Le côté triomphant – une sorte d’élan porté à son paroxysme allégorique, d’élégance rendue solide de par le contexte historique d’adversité – l’emporte.
La troisième figure prend alors tout son sens, car elle se situe entre les deux éléments sur le côté et son prolongement vertical consiste en la figure féminine allégorie de la victoire. Il y a ici un côté démonstratif – idéologique correspondant au choix de l’endroit. Le réalisme est au service de la cause de manière relativement directe, de par la fonction idéologique.
Le Monument de la Libération est ainsi une oeuvre allégorique plus que réaliste, mais elle n’aurait pas être produite sans la base réalisme qui est son fondement même, même si extrapolé.
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