En Yougoslavie, le Parti Communiste s’est dissous, littéralement, dans le Front ; le Parti Communiste de Yougoslavie devient une sorte de société secrète, il n’existe plus du tout de manière publique.
Dans la foulée, des bons rapports furent établis avec les pays impérialistes, avec un soutien américain matériel qui fut très significatif, alors que la perspective de la collectivisation des terres fut rejetée. La socialisation de l’industrie céda également la place aux conceptions « autogestionnaires ».
La répression s’abattit sur les opposants à ce déviationnisme, 250 000 personnes étant visées. Un camp fut mis en place pour 13 000 prisonniers sur deux îles désertes, Goli Otok et Sveti Grgur. Une figure de l’opposition communiste fut Vlado Dapčević, emprisonné, s’enfuyant en Albanie puis en URSS, fuyant l’URSS révisionniste pour aller en Europe occidentale et y affrontant la répression, finalement enlevé par les services secrets roumains et yougoslaves, faisant 13 ans de prison, continuant à chaque fois la lutte.
Le régime titiste mit en avant le thème des « non alignés », du troisième camp, rejetant le camp socialiste et aussi, prétendument, le camp impérialiste.
Comme le constate un article de Pour une paix durable, pour une démocratie populaire, en octobre 1949 :
« Le but principal de ces affirmations – c’est-à-dire des thèses titistes – est de « prouver » qu’il est possible de faire la révolution dans les différents pays et de libérer les peuples coloniaux du joug impérialiste, non pas sur la base du rassemblement des forces de la classe ouvrière internationale, de toutes les masses exploitées et des peuples coloniaux, mais dans une lutte isolée des peuples des différents pays et des colonies sans aucune liaison avec la lutte générale du prolétariat mondial contre l’impérialisme. »
Enfin, le régime titiste trahissait ce faisant également le Parti Communiste de Grèce, en pleine guerre de libération contre le régime anglo-américain ; la Yougoslavie ferma ses frontières aux forces partisanes, mais pas aux troupes réactionnaires qui purent ainsi les prendre à revers.
Le processus de critique puis de dénonciation de la ligne yougoslave passa, en mars et en mai 1948, par deux lettres envoyées au nom du Comité Central du Parti Communiste (bolchévik) de l’URSS au Comité Central du Parti Communiste de Yougoslavie.
Enfin, face à la position yougoslave toujours plus agressive, le Kominform réalisa en juin 1948 une résolution qui affirme que
« la direction du Parti Communiste de Yougoslavie suit, ces derniers temps, dans les questions principales de la politique extérieure et intérieure, une ligne fausse représentant l’abandon de la doctrine marxiste-léniniste. »
Selon le Kominform,
« les dirigeants du Parti Communiste de Yougoslavie glissent de la voie marxiste-léniniste dans la voie du parti des koulaks [paysans riches] et des populistes sur la question du rôle dirigeant de la classe ouvrière, en affirmant que les paysans constituaient ‘la base la plus solide de l’État yougoslave’ ».
Le régime titiste affirmait en effet déjà être sur la voie du socialisme, et avoir donc dépassé les antagonismes de classe, alors qu’en fait la lutte des classes s’intensifiait dans les campagnes où régnait de fait la propriété privée, la petite production engendrant systématiquement le capitalisme.
Par conséquent,
« le Bureau d’Information est unanime à conclure que les dirigeants du Parti Communiste de Yougoslavie, par leurs vues anti-soviétiques et anti-Parti, incompatibles avec le marxisme-léninisme, par toute leur conduite et leur refus de participer à la session du Bureau d’Information, se sont mis dans l’opposition envers les Partis Communistes affiliés au Bureau d’Information, qu’ils se sont engagés dans la voie de la division du front unique socialiste contre l’impérialisme, dans la voie de la trahison de la cause de la solidarité internationale des travailleurs et du passage aux positions du nationalisme. »
Le régime titiste accentua toujours davantage son positionnement anti-communiste, aussi le Kominform formula une résolution totalement nette, en novembre 1949. Intitulée « Le Parti Communiste de Yougoslavie aux mains des assassins et des espions », on y lit entre autres :
« Si, dans sa conférence de juin 1948, le Bureau d’Information des Partis Communistes a constaté le passage de la clique Tito-Rankovitch de la démocratie et du socialisme au nationalisme bourgeois, la période écoulée depuis cette conférence du Bureau d’Information a vu s’achever le passage de cette clique du nationalisme bourgeois au fascisme et à la trahison directe des intérêts nationaux de la Yougoslavie.
Les événements des derniers temps ont montré que le gouvernement yougoslave se trouve dans l’entière dépendance des cercles impérialistes étrangers et s’est transformé en un instrument de leur politique agressive, ce qui a abouti à la liquidation de l’indépendance et de la souveraineté de la République yougoslave.
Les Comité Central du Parti Communiste et le gouvernement de Yougoslavie se sont liés complètement aux cercles impérialistes contre l’ensemble du camp du socialisme et de la démocratie, contre les Partis Communistes du monde entier, contre les pays de démocratie populaire et l’URSS.
La clique des espions et des assassins à gages de Belgrade s’est ouvertement acoquinée avec la réaction impérialiste et s’est mise à son service, ainsi que l’a révélé en toute clarté le procès de Rajk et de Brankov à Budapest. Ce procès a montré que les gouvernants yougoslaves actuels sont passés du camp de la démocratie et du socialisme à celui du capitalisme et de la réaction, sont devenus les complices directs des fauteurs d’une nouvelle guerre et s’efforcent, par leurs actes de trahison, de mériter les louanges et de gagner les faveurs des impérialistes.
Le passage de la clique Tito au fascisme n’est pas l’effet du hasard ; il s’est effectué sur l’ordre des maîtres de cette clique, les impérialistes anglo-américains, à la solde desquels elle est depuis longtemps, ainsi que cela vient d’être révélé.
C’est pour exécuter la volonté des impérialistes que les traîtres yougoslaves se sont assigné le but de créer, dans les pays de démocratie populaire, des bandes politiques composées d’éléments réactionnaires, nationalistes, cléricaux et fascistes, afin de faire, avec leur appui, des coups d’Etat contre-révolutionnaires dans ces pays, de détacher ces pays de l’Union soviétique et de tout le camp socialiste et de les soumettre aux forces de l’impérialisme.
La clique Tito a fait de Belgrade un centre américain d’espionnage et de propagande anti-communiste. »
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