Le matin du 24 février, la veille du dernier jour, une résolution fut adoptée quant au rapport fait par Nikita Khrouchtchev dix jours plus tôt. Elle encourage le Comité Central « à ne pas faiblir dans la lutte contre les vestiges du culte de la personnalité ».
La résolution n’en dit pas plus sur la question de Staline, posée ici seulement en filigrane.
Mais un fait marquant à cette occasion fut la proposition d’une base de travail de 19 pages pour la résolution, réalisée par un groupe de 45 hauts responsables du PCUS se présentant comme la « commission de préparation pour la résolution du XXe congrès sur le rapport du Comité Central du PCUS ».
Formellement, cela n’a pas de sens, car le rapport est fait au congrès et pas avant. C’était là clairement un appui ouvert à Nikita Khrouchtchev.
Un autre aspect intéressant est que la résolution finale ne salue pas le rapport dans son ensemble (contrairement aux autres congrès), mais « approuve les propositions et conclusions du Comité Central contenues dans son rapport ». Cette formulation n’était pas contenue dans la base de travail ; l’ajout présente une mobilisation en faveur de Nikita Khrouchtchev.
C’est là un aspect très important, car il faut bien saisir que le fameux « rapport secret » n’a pas été lu pendant le congrès, mais après le congrès, alors qu’il était officiellement terminé. Cela signifie que le PCUS était déjà « embarqué » avec Nikita Khrouchtchev et que son « rapport secret » ne pouvait politiquement qu’être accepté par les délégués.
Le matin du vendredi 24 février 1956, Mikhail Pervukhine qui était président de séance annonça ainsi deux choses : une réunion des délégués à 17 heures, puis leur réunion à huis clos à 18 heures.
Le congrès avait donc, avant la réunion à huis-clos, déjà voté les membres du Comité Central. Et c’est seulement après, alors que tout a été verrouillé, que le rapport secret a été lu par Nikita Khrouchtchev.
Le nouveau Comité Central reflète justement cette prise du pouvoir par la clique de Nikita Khrouchtchev. il compte 133 titulaires contre 125 auparavant, avec 122 suppléants contre 111 auparavant.
Des 125 membres du Comité Central élu en 1952 au XIX congrès, 44 avaient été écartés.
33 % des membres du Comité Central issu du XXe congrès étaient nouveaux, avec le quart des nouveaux membres étant lié à l’activité de Nikita Khrouchtchev en Ukraine.
Sur ces 255 titulaires et suppléants du Comité Central, pratiquement la moitié – 123 – sont des secrétaires des républiques, territoires autonomes et régions. Leur nombre était de 92 sur 236 au congrès précédent. Le Parti est ici asphyxié par l’appareil de direction.
Cela est d’autant plus marquant que le nombre de membres du Comité Central relevant de l’administration étatique est le même (48 titulaires et 52 suppléants, 44 et 54 précédemment). On trouve, dans le même ordre d’idée, seulement 3 intellectuels membres titulaires du Comité Central, 8 militaires, 1 dirigeant syndical.
On ne trouve pareillement que deux responsables de l’appareil de sécurité : le ministre de l’intérieur venant d’être nommé, et le responsable de la sécurité d’État. On a trois responsables militaires : les maréchaux Georges Joukov, ministre de la Défense, Radion Malinovski, commandant de la région militaire d’Extrême-Orient, et Cyrille Moskalenko, commandant de la région de Moscou.
Radion Malinovski, très proche de Nikita Khrouchtchev, deviendra rapidement le principal responsable des forces armées et une figure majeure du social-impérialisme soviétique.
A cela s’ajoute que le Comité Central, dès sa première réunion, nomma également quatre proches de Nikita Khrouchtchev comme candidats au Présidium, sur les six possibles, et alors que le Présidium disposait de 11 membres en tout. Trois de ces candidats étaient par ailleurs membres du Secrétariat du Comité Central, qui comptait au total huit membres (dont trois déjà membres du Présidium).