Démasquons les assassins de Pierre Overney et leurs complices (1972)

[Groupe pour la fondation de l’U.C.F. (ml), mars 1972.]

Malgré tous les mensonges déversés par la presse et la télé depuis vendredi, il est clair maintenant que le militant révolutionnaire Pierre Overney, qui a été assassiné aux portes de Renault Billancourt, l’a été de sang-froid et de façon préméditée.

C’est à la suite du meurtre de leur camarade que les militants et des ouvriers ont cogné les gardiens, puis la maîtrise.

La mort de Pierre n’est pas un accident regrettable. Les patrons tuent pour maintenir leur loi.

Pierre a été frappé en premier parce qu’il était un ouvrier révolutionnaire, parce qu’il s’est attaqué directement aux patrons.

Pourquoi les patrons en viennent-ils à assassiner maintenant ? A Renault, les cadences augmentent, les licenciements se multiplient ; les luttes aussi. La tension est vive depuis plusieurs mois.

La C.G.T.. est de plus en plus démasquée, elle est incapable d’endiguer la combativité ouvrière montante.

Les ouvriers ont compris qu’elle s’oppose aux luttes qui menacent réellement le pouvoir du patron. Voilà pourquoi le patron est venu au secours dé son allié principal.

Dans ce meurtre, patrons, P.C.F. et C.G.T. se sont répartis les tâches

1) Le patron grâce à sa police s’est chargé de l’exécution physique.

2) La C.G.T. et le P.C.F. se chargent de l’exploitation politique. Ils veulent implanter l’idée que les luttes « dans l’ordre et la dignité » qu’ils proposeraient sont les seules valables, opposées aux « luttes révolutionnaires » qui seraient stériles, dangereuses et profiteraient à la bourgeoisie.

A cette occasion, la C.G.T. s’est surpassée dans l’ignoble ; elle déclare froidement que Pierre, militant révolutionnaire assassiné par un flic du patron, était complice d’une provocation patronale !

Entre l’ouvrier qu’on tue et les tueurs, la C.G.T. et le P.C.F, ne font pas de différence ! Cela revient à justifier la nécessité politique de l’attentat fasciste.

Cette énorme saloperie a un objectif politique précis noyer dans l’idée générale des « violences » la guerre de classe impitoyable entre la bourgeoisie, ses flics et ses tueurs d’une part, le prolétariat et le peuple révolutionnaire d’autre part ; désarmer le peuple face à la violence des patrons qui tuent dans la production, envoient leurs bandes fascistes contre les immigrés et quand il le faudra, élimineront physiquement les combattants révolutionnaires.

IL FAUT BIEN COMPRENDRE QUE LE MEURTRE D’UN MILITANT A RENAULT N’EST PAS UN ACCIDENT. C’EST CE QUE FAIT LA BOURGEOISIE AVEC LA COMPLICITÉ DE LA C.G.T. ET DU P.C.F. QUAND ELLE NE PEUT PLUS FAIRE AUTREMENT POUR EMPÊCHER LA MONTÉE DES LUTTES DE MASSE.

La bourgeoisie oppose la violence armée aux ouvriers, au peuple et aux révolutionnaires.

Pour avancer dans la lutte et la révolution, nous devrons faire face sur ce terrain là, et à sa violence fasciste, nous opposerons la violence révolutionnaire de masse.

EXIGEONS LA DISSOLUTION DES MILICES FASCISTES DANS LES USINES !
Mais ne nous faisons pas d’illusions !
La violence de la bourgeoisie sera de plus en plus directe.
PRÉPARONS-NOUS A Y RÉPONDRE PAR LA VIOLENCE DE MASSE ! 

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UCF-ML: Tract du 15 mars 1972

[Une unité parisienne du Groupe pour la fondation de l’U.C.F. (ml), tract du 15 mars 1972.] 

QUI PARLE, qui raconte ce qui s’est passé à Renault ? Les bourgeois et leurs alliés.

Le jour même de l’enlèvement du cadre Nogrette, ils nous disaient : « La réprobation de la population est unanime. »

Est-ce dans les ateliers, dans les couloirs du métro qu’ils avaient été en discuter, ou bien dans les bureaux des patrons qui ont peur d’être séquestrés ?

Nous, on a bien plutôt eu l’impression que tout le monde était content de voir une crapule, qui passe sa vie à organiser des licenciements, gardée à l’ombre pendant 2 jours.

Mais en même temps, l’enlèvement sert à passer sous silence la question de l’organisation de tout le peuple contre la répression des patrons.

La mort de l’ouvrier révolutionnaire Pierre Overney était l’affaire de tout le monde. Le jour de son enterrement, 200 000 personnes – jeunes, ouvriers français et immigrés – sont descendues dans la rue pour crier leur haine des patrons, de leurs flics et de leurs complices.

De même, ce qui se passe aujourd’hui à Renault appartient à tous les ouvriers, à tous les gens du peuple.

C’est à eux de prendre la parole. C’est à eux de s’unir pour soutenir au maximum les ouvriers de Renault qui travaillent sous le regard des flics ; pour exiger la libération des camarades de Pierre Overney, licenciés et emprisonnés au lendemain du meurtre.

LIBÉRATION IMMÉDIATE DES 7 OUVRIERS DE RENAULT EMPRISONNES !
RÉINTÉGRATION DE TOUS LES OUVRIERS LICENCIÉS APRES LA MORT DE PIERRE.
DISSOLUTION DES MILICES PATRONALES !

C’est aux ouvriers, c’est aux gens du peuple de tirer les leçons de ce qui se passe à Renault, pour mieux lutter et mieux s’organiser dans chaque quartier.

Patrons et C.G.T. ont dit que les ouvriers de Renault n’ont pas bougé parce que « cette affaire » ne les intéressait pas. C’est archi-faux. Presque tous voulaient riposter.

S’ils n’ont pas pu riposter sur le champ, c’est parce qu’ils en ont été empêchés :

– par la répression féroce du patron. Depuis le meurtre de Pierre, l’usine est entourée de C.R.S., les cadres et la maîtrise se sont regroupés pour empêcher tout rassemblement, les chefs font monter les ouvriers un par un dans les bureaux pour les menacer de licenciement s’ils défendent leurs camarades ;

– par la répression du P.C.F. et de la C.G.T. Ceux-ci continuent à raconter que le meurtre de Pierre Overney était une affaire entre gauchistes provocateurs et patron. La C.G.T. laisse faire les licenciements, elle laisse faire les milices du patron ou même elle les applaudit. La violence du patron, elle fait semblant de ne pas la voir. La volonté de résistance des ouvriers, elle la condamne.

Voilà pourquoi nous avons crié à l’enterrement de Pierre : « Le patronat arme ses milices, le P.C.F. désarme les travailleurs ».

Or, face à cela, les ouvriers de Renault se sont trouvés révoltés, mais isolés et impuissants. Il y avait devant eux l’appareil de répression du patron, l’appareil du syndicat sur lequel on ne pouvait pas compter. Il n’y avait pas d’organisation des ouvriers pour briser l’intimidation des chefs et organiser la riposte.

A Renault, pour résister aux licenciements et à la répression du patron, il faut construire l’organisation des ouvriers.

Dans notre quartier, c’est la même chose. Pour résister aux licenciements ou à la fermeture des usines ; pour résister aux expulsions dans les vieux logements et dans les hôtels de travailleurs immigrés, les ouvriers, les jeunes et les habitants du quartier ne peuvent compter que sur eux-mêmes.

Il faut construire des organisations qui appartiennent aux ouvriers et au peuple, qui soient leur instrument pour prendre conscience de sa force et unir le maximum de gens autour de soi.

Face aux patrons, aux propriétaires, à tous ceux qui divisent et désarment, il faut former le camp du peuple.

DANS LES USINES ET LES QUARTIERS,
CONSTRUISONS LES ORGANISATIONS DU PEUPLE !

CONSTRUISONS LE NOUVEAU PARTI COMMUNISTE !

Des maoïstes du quartier. 

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Détruisons l’armée bourgeoise! Construisons l’armée populaire! (1976)

Ce n’est pas en deux pages que l’on peut argumenter pleinement un sujet aussi vaste. Aussi nous contenterons-­nous de donner brièvement nos positions sur les différents points importants concernant la question. 

1. POUR LA LIBÉRATION DES EMPRISONNES ! 

Nous exigeons la libération de tous les civils et soldats emprisonnés, la levée de toutes les inculpations et l’arrêt de toute répression dans les casernes.  

Nous dénonçons les manoeuvres révisionnistes et réformistes trahissant les objectifs de lutte des emprisonnés; ce n’est pas le moral de l’armée bourgeoise que les révolutionnaires civils et militaires voulaient détruire, c’est l’armée bourgeoise elle-­même.

Nous soutenons les revendications des soldats pour l’amélioration de leurs conditions de vie, contre les brimades, contre tout ce qui caractérise une armée bourgeoise.  Nous soutiendrons les formes d’organisation qu’ils se donneront. Le fond, le programme de lutte prime sur la forme, le type d’organisation.  

Néanmoins, nous dénonçons les manoeuvres trotskystes visant à introduire les divisions du mouvement syndical dans le mouvement des soldats, c’est-­à­-dire prouvant une nouvelle fois leur rôle de valet au service du tandem réviso­-réformiste.  

Nous soutenons toutes les luttes opposant des fractions du peuple à l’armée bourgeoise, c’est-à-­dire que nous soutenons les paysans expulsés de leurs terres comme au Larzac, les étudiants de Vincennes voulant transformer le fort de Vincennes en annexe de leur université, etc… 

2. DÉTRUISONS L’ARMÉE BOURGEOISE 

L’armée française d’aujourd’hui est une armée au service de la classe dominante bourgeoise.  C’est l’un des piliers du système capitaliste français. Sa conception est bourgeoise: hiérarchie; idéologie raciste, phallocrate et fascisante; coupure entre officiers et soldats; coupure entre peuple et armée; etc…  

Nous récusons donc toute politique visant à tromper le peuple en lui faisant croire qu’il suffit de changer de chefs pour changer l’armée. On a vu le résultat au Portugal: une armée bourgeoise reste bourgeoise. La « démocratiser » signifie éliminer ses aspects les plus injustes, mais son essence demeure bourgeoise. Il faut donc détruire cette armée comme tous les piliers du système capitaliste.  

L’armée bourgeoise a plusieurs fonctions:

– elle poursuit le travail idéologique de l’école bourgeoise, en embrigadant la jeunesse pour lui inculquer l’idéologie bourgeoise de division, d’égoïsme, de phallocratie,etc…   

– elle sert à briser les grèves (éboueurs, transports, contrôleurs aériens,…) pacifiquement aujourd’hui en opposant soldats et grévistes; violemment demain s’il le faut (il y a eu des précédents). 

– elle sert et protège les intérêts de l’impérialisme français soit dans ses colonies (Djibouti, Antilles), soit dans ses néo­colonies (Tchad).   

– elle est une des armes de l’impérialisme mondial contre les peuples (occupation de la RFA, complots en Afrique, armement des rebellions contre-­révolutionnaires).  

– elle n’est en rien garante de notre indépendance nationale, fidèle en cela à son passé historique (1870, 1939-­1940).

Aucune mesure que nécessite une véritable défense nationale n’est prise, n’en déplaise à l’H.R. comme au PCR. HR a une position claire sur la question, que nous récusons totalement (« des MiG 23 remontent la vallée du Rhône; (…) les forces pro­soviétiques organisent la subversion dans l’armée et cherchent à saper sa mission de défense nationale », cf. le tract intitulé « Organisons la riposte à l’offensive de l’URSS de Brejnev », daté de février 1976 et signé du Mouvement pour l’Indépendance et la Liberté, organisation créée, impulsée et contrôlée par l’H.R.).  

Quant au PCR, tout eh reconnaissant la juste lutte des comités de soldats, il reconnaît un caractère de défense nationale à l’armée bourgeoise, contradiction l’amenant ni plus ni moins à paralyser l’action de ces comités sous le prétexte de préserver l’aspect défense nationale.

Ainsi dans « Front Rouge » n°3 de février 1976, organe théorique du PCR, il se déclare nettement « contre la désagrégation immédiate de l’armée bourgeoise » !  Cette armée ne sert donc à rien pour le peuple, ce n’est qu’un instrument d’exploitation et d’oppression au service du capitalisme. 

3. CONSTRUISONS L’ARMÉE POPULAIRE ! 

Le peuple, ne devant pas compter sir la « démocratisation » de l’armée bourgeoise proclamée par les révisionnistes et les réformistes, doit donc se construire son armée.  

Notre but est d’oeuvrer à l’édification d’une véritable armée du peuple, liée au peuple, au service du peuple, pilier de la dictature du prolétariat et seule garantie de l’indépendance nationale et de la défense du socialisme.  L’étape actuelle n’est pas encore à l’édification de cette armée.

A chaque étape de la lutte des classes correspond un niveau de répression précis et donc un niveau de riposte précis. 

Cela dépend de l’évolution de la prise de conscience des masses de cette vérité que le « pouvoir est au bout du fusil »: La lutte idéologique pour faire progresser cette idée est primordiale pour assurer l’efficacité de sa mise en pratique.  Les masses ont déjà une riche expérience politico-­militaire dont la Résistance est l’un des plus glorieux aspects.

Aujourd’hui, à la répression, les masses opposent la Résistance d’une façon de plus en plus systématique.

Des couches avancées des masses sont même passées du stade de la Résistance à celui de l’attaque (vignerons, étudiants, une fraction de la classe ouvrière).  Les tâches des communistes aujourd’hui sont de faire triompher l’idée qu’à l’exploitation, à l’oppression violente de la bourgeoise ne peut répondre que la violence révolutionnaire organisée, de masse.  

Pour cela, les communistes doivent:  se porter à la tête du mouvement des soldats pour en disputer la direction aux alliés de la bourgeoisie et permettre le développement des idées justes des soldats;  militer dans l’armée de métier et de conscription pour aider à l’organisation et à l’unification des comités de soldats;  s’organiser eux­-mêmes au sein de l’armée, dans des cellules communistes clandestines, lorsque cela est possible;  à un niveau plus large que la lotte dans les casernes, les communistes doivent populariser la violence juste des masses et aider à l’organisation des noyaux conscients du problème;  poser parallèlement la question de l’organisation de milices populaires dans les usines, les quartiers et es campagnes. ­

Assumer la violence révolutionnaire aujourd’hui, être aux côtés des masses contre la bourgeoisie et sa violence, c’est ouvrir la voie à la création de l’armée populaire qui se construira entièrement en dehors de l’armée bourgeoise. 

Rejeter toute pratique violente comme aventuriste, c’est refuser la préparation idéologique des masses, nier le caractère obligatoirement violent de la révolution, rejeter l’armée populaire.  

C’est appliquer la politique trotskyste qui meuble ses journaux de fusils mais crie à la provocation quand les masses s’arment.  Nous devons donc développer les luttes dans les casernes et la militarisation des luttes prolétariennes de masse, tout en jetant les bases de l’organisation armée communiste.  

Plus les masses seront conscientes de la nécessité d’une armée populaire sous direction de leur parti d’avant­-garde, plus la victoire politique sera assurée. « Sans armée, le peuple n’aurait rien. » (Mao Tsé­toung). 

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Un collectif pour l’unité des marxistes-léninistes, pourquoi? (1976)

Ce texte a été publié dans la brochure « Unité­-critique-­unité » du Collectif pour l’Unité des Marxistes Léninistes en mai 1976.

En décembre 1975 s’est créé un collectif rassemblant, plusieurs organisations se réclamant du marxisme léninisme et de la pensée mao tsetoung. Ces organisations sont « Le Travailleur », « Drapeau Rouge », « Parti Communiste Marxiste Léniniste de France­ Comité de Nancy », « Parti communiste révolutionnaire » et « La Cause du Peuple ».  

Quelle peut être l’utilité d’un tel collectif et quels sont ses objectifs? A notre avis, un tel collectif se doit de répondre aux besoins de la situation actuelle. Ces besoins consistent à UNIR sur des bases prolétariennes tous les maoïstes afin d’accélérer le processus révolutionnaire. 

Pour permettre la conduite victorieuse du processus révolutionnaire, il est nécessaire de construire un parti qui soit communiste et prolétarien. Un tel parti lié aux masses n’existe pas aujourd’hui.  

Unir tous les maoïstes, c’est remplir une des conditions nécessaires pour la création de ce parti. La tâche principale du collectif est d’aboutir à la fusion des maoïstes dans une organisation communiste unique, première étape sur la voie de la création du parti communiste révolutionnaire prolétarien. 

Pour mener ce processus, le collectif doit organiser des débats théoriques qui aideront à discerner ce qui nous unit et ce qui nous divise, puis permettra la résolution de nos divergences au moyen de la lutte idéologique.  Parallèlement, le collectif doit permettre l’unité d’action entre les organisations membres du collectif au fur et à mesure que l’accord se fait. L’unité d’action doit se faire à chaque fois que les maoïstes arrivent à un accord politique sur un point.  

Il faut souligner que toute fusion ne peut être que l’aboutissement d’un processus d’unité théorique et pratique approfondi. Nous récusons tout processus qui se limiterait à se contenter de débats théoriques au sommet ou à pratiquer une unité d’action sans principes pour la guider. Ainsi nous éviterons le dogmatisme et l’opportunisme.  

Deux principes fondamentaux guident le processus d’unification:  PAS D’UNITÉ SANS LUTTE !  LE PARTI SE RENFORCE EN S’ÉPURANT !  

Nous récusons toute manœuvre opportuniste d’unité sans principe où, par une attitude désinvolte, une organisation accepterait n’importe quoi dans le seul but de manipuler les autres organisations.   

Pour nous, de plus, il est inéluctable que l’unité sera l’unité des maoïstes et non celle des organisations se réclamant du maoïsme, c’est-­à-­dire que le mouvement devra s’épurer de tous ses éléments sectaires, révisionnistes ou néo-­trotskystes qui refuseraient de rectifier leurs erreurs. 

En conclusion, pour nous, ce collectif travaille donc à l’unité des maoïstes pour une organisation communiste unique, basée sur nos convergences, les aspects positifs de notre pratique et nos acquis théoriques. Son but sera de rattraper le retard pris par le mouvement maoïste sur le mouvement des masses, renforcer notre liaison aux luttes, conditions impérieuses pour la création d’un véritable Parti Communiste. 

Aujourd’hui, dans ce qui s’appelle le mouvement maoïste, plusieurs types d’attitudes anti-­unitaires se développent sous différentes formes:  – ce sont le Nouvel Éveil et l’Union des Communistes de France qui ont refusé de participer au collectif sans donner de raison.

Courant avril 1976, l’UCF enverra finalement un observateur dont l’attitude sera des plus équivoques (« l’unité, on s’en fout » ….).  – c’est aussi le refus de participer au collectif émis par l’Humanité Rouge dont les motifs ne sont que de fallacieux prétextes: H.R. explique son absence par la prétendue présence du groupe opportuniste et trotskyste « Révolution! » au collectif (présence rejetée par la majorité du collectif sauf le PCR) et en annonçant l’échec du collectif avant même qu’il n’existe (Le pessimisme érigé en doctrine).  

Le véritable motif a été dévoilé dans les colonnes de son quotidien: « d’ailleurs ce n’est pas pour rien que le Parti marxiste léniniste a été acclamé car il est la preuve que tant qu’existera un prolétariat, il existera un parti pour défendre jusqu’au bout ses intérêts de classe.

Et le plus ardent désir des travailleurs avancés, le rassemblement national l’a aussi montré, c’est de voir leur parti se renforcer rapidement par l’unification des différentes formations se réclamant du marxisme-léninisme: c’est ainsi que le cri « unité, unité » a été entendu à plusieurs reprises tandis que le nom du parti communiste marxiste léniniste de France, à l’initiative actuellement du processus d’unification, a été applaudi et scandé. » (H.R. n°430 du 17 février 1976).  

Passons sur l’ironique « a l’initiative du processus d’unification », pour simplement souligner que pour l’H.R., il n’y a pas d’autre unité que chez eux.  – Enfin, c’est à l’intérieur même du collectif l’attitude du PCR qui approuve le processus d’unité du sommet à la base,en parole, et le bloque en pratique. 

Pas un mot sur le collectif dans le « Quotidien du Peuple » depuis sa naissance il y a six mois, un grand nombre de militants de base non informés,etc..  De plus, le PCR mène un double jeu assez obscur avec les groupes trotskystes G.O.P. et « Révolution! », ce qui semble incompatible avec les objectifs initiaux du collectif.  

Le collectif se doit de combattre ces attitudes pour démasquer les éléments sectaires présents dans chaque organisation et y faire triompher la ligne de gauche.

Le collectif renforcera ainsi la détermination des camarades luttant pour l’unité dans les groupes anti­-unitaires. C’est dialectique.  

Le processus d’unification qui peut, doit et déjà se réalise dans le collectif renforcera les lignes de gauche des organisations sectaires. Nous ne devons pas craindre de créer ce que certains appellent une « 3ème force » (la première et la seconde étant, selon eux, l’Humanité Rouge et le PCR), car, dans la réalité, la question ne se posera pas comme cela.  

Il n’y aura que deux camps, deux lignes, celle de l’unité des maoïstes, donc du renforcement du camp du peuple, et celle de la division, du sectarisme et de la chapelle, donc de l’affaiblissement du camp populaire.

Soit une fois de plus, nous retrouvons l’éternel et inévitable combat de classe entre la ligne prolétarienne et la ligne bourgeoise.  

TOUT CE QUI UNIT LE PEUPLE EST JUSTE !  TOUT CE QUI LE DIVISE EST ERRONÉ !  

Sujets d’études proposés: » C’est seulement par l’unité du parti communiste qu’on réalisera l’unité de toute la classe et celle de toute la nation.  » MAO TSE­TOUNG, page 277, éditions de 1967, Petit Livre Rouge.  

Donc, pas d’unité POPULAIRE sans UNITÉ des COMMUNISTES.  »

Ce procédé démocratique destiné à résoudre les contradictions au sein du peuple, nous l’avons résumé en 1942 dans la formule: UNITÉ­ CRITIQUE­ UNITÉ.  

Plus explicitement, c’est partir du DÉSIR d’UNITÉ et arriver, en résolvant les contradictions par la CRITIQUE ou la LUTTE, à une nouvelle UNITÉ reposant sur une BASE NOUVELLE. » MAO TSE­ TOUNG, page 278 du Petit Livre Rouge. 

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Le peuple au quotidien (1976)

Le texte sur l’expérience du Comité de Lutte contre le Chômage a été publié dans « La Cause du Peuple » n°7 et est une critique dans la pratique de la ligne erronée du PCR. Ayant reconnu cette critique juste en public, des dirigeants du PCR promirent en janvier 1976 une autocritique publique dans leur presse.  

Pour réfuter de suite les arguments qui nous accuseraient d’ériger en ligne général du PCR les erreurs d’une de ses unités, nous tenons à préciser que l’expérience des comités de lutte contre le chômage n’est qu’un exemple précis parmi d’autres du décalage existant entre PCR et organisations de masse.  

Nous aurions pu aussi bien citer les Comités Indochine Palestine, les Comités pour l’Abrogation de la Circulaire Marcellin-­Fontanet, les Comités Même Combat, etc…

Ceci est le reflet de la ligne politique du PCR. En fait, le PCR a une ligne opportuniste de récupération de mots d’ordre de ceux qui luttent sans articulation avec la pratique sociale.  Il n’a pas de réelle ligne politique avec stratégie, tactique, analyses scientifiques des classes en France, etc…  Il n’a qu’une ligne gauchiste que nous analyserons en détail dans un prochain texte. 

« Comme nous l’expliquions dans le numéro 5 de « La Cause du Peuple », il se développait dans les 18, 19 et 20e arrondissements de Paris l’embryon d’une véritable organisation de masse, le COMITÉ de LUTTE contre le CHÔMAGE.  Le texte qui suit explique ce qu’il en est advenu.

Créé en mai dernier (1975), le Comité de Lutte contre le Chômage, association déclarée (loi de 19Ol) regroupait des personnes de toutes opinions dont le but principal était de défendre les chômeurs et de soutenir les travailleurs en lutte.  

Pour cela, le C.L.C. fut structuré en plusieurs commissions dont les compte­-rendus étaient centralisés lors d’une assemblée générale hebdomadaire, le plus souvent publique, et seule instance de décision, chaque membre du CLC pouvant y exprimer ses opinions, ses besoins et y soumettre ses propositions.  

Les différentes commissions avaient pour objectif de permettre aux militants du CLC de combiner leur travail pratique avec un travail de réflexion sur cette pratique, pour en tirer les leçons et progresser.  

Aussi fut-­il mis en place ou envisagé les commissions suivantes: Groupe juridique : lié à un collectif d’avocats, ce groupe assurait la formation juridique de chaque militant pour qu’il soit capable de répondre à chaque problème des masses (droit aux allocations, constitution des dossiers, démarches administratives,…).

Inutile de souligner l’importance de ce groupe lorsqu’on connaît la coupure actuelle entre les problèmes concrets des masses et les propositions des groupuscules.  ­ Groupe Français-­Immigrés ; sa tâche fut d’affronter les problèmes spécifiques des travailleurs immigrés, de permettre au CLC de se solidariser avec eux.  

Groupe économie politique ; il se fixait pour but d’analyser le chômage et ses causes, de le replacer dans le cadre du système et de sa crise, et d’en tirer une ligne pour le CLC.  ­ Groupe usine : son rôle était de populariser sur les quartiers les luttes des travailleurs et de les soutenir (collectes, propagande) afin de permettre l’unité chômeur­travailleur actif. Groupe chômeur : il consistait en un travail d’information sur les droits des chômeurs et mettre en pratique des aides concrètes (garderies d’enfants, vente directe paysans­-chômeurs,etc…) 

Groupe atelier : il confectionnait tout le matériel de propagande et réfléchissait aux initiatives possibles telles que fête,etc… Très vite, le CLC regroupa des chômeurs, des travailleurs immigrés, des ouvriers des 18,19 et 20e, des ménagères, des militants maoïstes de « La Cause du Peuple » et des membres de « Front Rouge ».  Pour une fois que les spécialistes du sabotage d’organisations de masse se désintéressaient d’une telle expérience, le CLC semblait avoir un « bel avenir »…. 

DE LA CONCEPTION DU « PARTI »  COMME ROULEAU COMPRESSEUR 

L’attitude des camarades de « Front Rouge » sera en contradiction permanente avec les intérêts du CLC et des masses, et sera marquée par un blocage progressif du CLC.  Leurs motivations étaient claires, ils ne cessèrent de les murmurer au début du CLC pour les dévoiler publiquement en assemblées générales à sa fin; le « PCR » est LE parti des masses, il doit donc diriger LES organisations des masses, y compris le CLC, et c’est SA ligne que les militants du CLC doivent appliquer!  

C’est la conception rouleau­compresseur du « parti » qui nivelle tout, les initiatives comme les idées. C’est le « Parti­-Attila », là où il passe, plus rien ne repousse, ni idée, ni initiative, la révolution trépasse!

Concrètement, cette ligne fut marquée par une série d’actes scandaleux dont nous ne donnerons que les exemples les plus significatifs: Au niveau du groupe usine, d’une part les militants de « Front Rouge » monopoliseront les interventions du CLC sur l’usine Chausson en grève, intervenant tantôt au nom du « PCR », tantôt au nom du CLC, prétendant donner des leçons aux grévistes. 

Leur approche d’une lutte dure faite de l’extérieur un mois et demi après le début de la grève fut très mal reçue par les piquets de grève. Cette action irresponsable est d’autant plus grave que la veille une délégation mandatée par le CLC avait été reçue à bras ouverts par le comité de grève A L’INTÉRIEUR de l’usine.  

Bilan: le CLC sera discrédité à Chausson (« Front Rouge » utilisera cette méthode partout: les mêmes venaient en militants du CLC, puis en vendeurs de « Front Rouge », quand ils ne mélangeaient pas les deux…).  

Lors d’une réunion publique du C.L.C., ils amèneront (la veille de la reprise à Chausson!) un travailleur qui aura peine à s’exprimer, les militants de « Front Rouge » ne cessant pas « d’expliquer » la situation de l’usine à sa place!  

Autre type de pratique en usine: depuis plus de trente ans, Cadot, dans le 19e (boulangerie industrielle dirigée par un patron de combat, président de la chambre syndicale de la boulangerie) n’avait pas connu de grève. Pour des questions d’horaires et d’heures supplémentaires non payées, Cadot se met en grève avec la particularité de s’insérer dans le cadre d’une revendication générale de toute l’alimentation: la boulangerie est la seule branche à ne pas avoir de convention collective.  Leur action reçoit le soutien total de la CGT qui en fait son cheval de bataille .

Le « PCR » sans étude, ni enquête, ni analyse intervient là aussi de l’extérieur, amalgamant « PCR » et CLC avec des panneaux et des tracts signés tantôt l’un, tantôt l’autre.  Leurs interventions inopportunes furent considérées comme provocatrices, surtout que l’usine était occupée par un commando armé de la CFT commandé par Simakis en personne.

Et la police en permanence jour et nuit en face du piquet de grève n’attendait qu’une occasion pour le chasser, casser la grève et remettre aux calendes grecques la signature de la convention collective intéressant toute la profession!  Les bons contacts établis par les militants du CLC furent sabotés par cette action irréfléchie (notamment des collectes prévues sur les marchés avec la présence des grévistes!).  

Au niveau du groupe chômeur, un certain nombre d’initiatives toutes plus intéressantes les unes que les autres furent engagées ou proposées: collecte de vêtements pour les plus nécessiteux, projets de loisirs politiques, coopérative alimentaire permettant l’unité paysans-­chômeurs, et aussi la très importante question de l’aide juridique pour armer les masses contre les pièges du pouvoir (bureaucratie, lois incompréhensibles, papiers à remplir introuvables, démarches affolantes…).  

Face à ces problèmes importants nécessitant de nombreux militants, « Front Rouge » répondit par le mépris, préférant noyauter la commission économie politique afin que la ligne définie soit la sienne, plutôt que de se répartir correctement les tâches.  

« Front Rouge » bloqua toutes les initiatives jugées secondaire, car « respirant la charité et le réformisme »… « Front Rouge » rejeta toute formation juridique , car répondre aux besoins des masses, c’est bien connu, c’est du révisionnisme!!!

Il n’y eut donc pas de coopérative de nourriture, pas de distribution de vêtements, pas de loisirs politiques (si ce n’est une fête que « Front Rouge » voulut organiser pour le 14 juillet et dont il ne se préoccupa qu’à partir du 7 juillet, alors qu’il bloquait depuis un mois la même initiative proposée par le groupe atelier! Bilan: elle n’eut pas lieu).  

Quant à la formation juridique, les travailleurs du 20e, par exemple, durent aller trouver les camarades du CLC 19e pour obtenir des renseignements, le CLC 20e, entièrement contrôlé par « Front Rouge », étant incapable de leur répondre!  

Au niveau du groupe immigration, l’attitude du CLC ­ »Front Rouge » 20e fut la plus significative. Dans le 20e, le CLC était mobilisé sur un foyer qui avait la particularité d’être le siège de l’Amicale des Marocains et d’être dirigé par le responsable de la police marocaine pour toute l’Europe!  Il fallait donc être prudent et ne pas entraîner les travailleurs immigrés dans des actions aventuristes. « Front Rouge » ne trouvera rien de mieux que de diffuser par tract le nom d’un des travailleurs du foyer pour le citer en exemple! 

Bilan : ce travailleur sera expulsé manu militari du logement qu’il occupait depuis des dizaines d’années et les polices marocaine, algérienne, tunisienne et française interviendront sur les résidents.

« Front Rouge » sera interdit de séjour au foyer, et par conséquent le CLC 20e entrera en crise et exclura tous les immigrés en faisant partie! Qu’est­ce que peut bien être une organisation de masse sans masses? Rien, et le CLC 20e disparaîtra!  

Au niveau du fonctionnement général, « Front Rouge » tentera donc d’imposer sa ligne, ligne dont on a pu voir ce qu’elle signifiait concrètement par les exemples ci­dessus.  

Pour cela, leur stratégie reposera sur une conception erronée, celle de l’organisation de masse qui est pour eux la même chose qu’un parti: les règles de fonctionnement de l’un doivent être appliquées dans l’autre.  Or, structurer une organisation de masse comme un parti, c’est finalement rejeter tous ceux qui ne sont pas obligatoirement d’accord avec ce parti, et réduire le caractère de masse! 

Dans le cas concret du CLC, « Front Rouge » voulait imposer la même structure bureaucratique que celle en vigueur chez eux: structuration de chaque commission avec délégués centraux et intermédiaires, un comité directeur, des spécialistes, le refus de tourner dans les tâches pour donner à chacun une formation et une vue large des problèmes, un contrôle policier sur la propagande et même sur les attitudes des militants du CLC n’appartenant pas à « Front Rouge », aucune autonomie à la base, pas d’esprit d’initiative possible.

En un mot, « Front Rouge » voulait contrôler le CLC.  Pour cela, « Front Rouge » a établi des distinctions dans le langage comme dans la pratique entre SES militants et les « autres », autres qui se révélèrent finalement être évidemment des « antipartis » farouches… 

Ce furent aussi les bourrages de salle (avec des militants de banlieue), une organisation dans l’organisation (« Front Rouge » avait sa direction, son assemblée générale propre, ses circulaires internes sur le CLC), les tentatives d’isolement des indésirables pour les exclure, la confusion permanente (ainsi, imposer sur les marchés des panneaux dont le texte ressemblait point par point, comme par hasard, à celui des affiches « PCR » collées juste avant autour du marché, comme par hasard aussi…).

Pour les camarades désireux d’entrer au CLC, c’était impossible, car partout CLO= « PCR »!  « Erreurs » et « autocritiques » de la part des militants de « Front Rouge » se succédèrent ainsi à un rythme très rapide, devenant les unes et les autres de plus en plus convaincantes et de plus en plus grossières. 

Que reste-­t-il du CLC ? 

‘Transformant les assemblées générales en règlements de compte ‘aussi stériles que constants, « Front Rouge » bloqua le développement du comité et à la rentrée de septembre, s’empressa d’en prendre le contrôle, en excluant tous les « antipartis » (soit tous les militants non­-membres de « Front Rouge », drôle de conception d’une organisation de masse!), a dissous les commissions, érigé un comité directeur, limité les assemblées générales à deux par mois, pour finalement arriver à la mort politique du CLC en octobre…  

Les leçons:  Nous avons décidé de nous appuyer sur les aspects positifs de cette expérience qui sont que, pour avoir une existence, une organisation de masse doit être dans les masses, répondre à leurs besoins, aussi bien politiques que matériels (d’où les initiatives positives sur l’aide juridique, les vêtements, etc…) 

A partir de là, un certain nombre d’inorganisés, de travailleurs immigrés, et les maoïstes de « La Cause du Peuple » se sont regroupés fin septembre pour repartir sur de nouvelles bases.  

Nous voulons mettre en pratique ce qui a été bloqué au CLC et aussi aller plus loin. Pour cela, de nouvelles liaisons ont été établies, notamment avec le Groupe de Résistance Active aux Transports Publics Payants qui exige à court terme la gratuité des transports pour les chômeurs et à long terme la gratuité totale. 

C’est aussi la perspective des comités de résidents permettant l’unité des locataires contre toutes les divisions imposées par l’idéologie dominante bourgeoise.  

Par conséquent, il faut rompre avec la pratique militante gauchiste infantile qui s’appuie essentiellement sur le discours et le racolage et non sur une pratique de LUTTE et d’UNION. 

Les militants maoïstes et des non maoïstes de l’ex­CLC 18­-19e 

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Les masses sont les véritables héros (1976)

Seconde partie d’un article envoyé au quotidien « Humanité Rouge » et concernant la critique des positions de ce groupe.  

« TOUTE IDÉE ERRONÉE, TOUTE HERBE VÉNÉNEUSE, TOUT GÉNIE MALFAISANT DOIVENT ÊTRE SOUMIS A LA CRITIQUE ET IL NE FAUT JAMAIS LEUR LAISSER LE CHAMP LIBRE. »MAO TSE­TOUNG Intervention à la conférence nationale du Parti Communiste Chinois sur le travail de propagande, mars 1957

Puisque nous avons aujourd’hui la possibilité de nous exprimer dans le quotidien « Humanité Rouge », ce qui est une initiative sympathique pour l’unité et, espérons­-le, qui aura des lendemains, nous allons expliquer les divergences qui aujourd’hui empêchent une unité réelle.  

Les camarades de l’H.R. développent depuis un certain temps une ligne qui nous parait ne pas tenir compte de la réalité et faire preuve d’un grand dogmatisme.  

Que l’URSS soit une superpuissance agressive, que sa rivalité avec cette autre superpuissance agressive que sont les États-Unis menace la paix mondiale, qu’il faille se préparer à l’éventualité d’une 3e guerre mondiale interimpérialiste, tout cela, aucun communiste ne le nie. 

C’est une réalité. Mais comme nous l’enseigne le président Mao, d’une part soit la guerre impérialiste déclenche la révolution, soit la révolution conjure la guerre impérialiste, d’autre part la tendance principale al’heure actuelle dans le monde est a la révolution.  

Cela est concrétisé par les victoires des peuples d’Indochine ou d’Afrique de plus en plus nombreuses, par les défaites subies par l’impérialisme, que ce soit en Indochine pour les U.S.A. ou en Égypte pour l’URSS par exemple.  

Il est alors donc clair que la meilleure façon de préparer l’avenir, c’est d’intensifier le combat pour la RÉVOLUTION PROLÉTARIENNE, pour instaurer la DICTATURE DU PROLÉTARIAT, seule garantie sérieuse de notre indépendance nationale et de la sauvegarde du socialisme.  

Or, concrètement, que fait l’H.R.? Face aux dangers de guerre, l’H.R. déclare que notre objectif principal devient la sauvegarde de notre indépendance nationale et le renforcement de notre défense national, au détriment de la lutte des classes.  

Pour l’H.R., la contradiction principale n’est plus bourgeoisie­/prolétariat, mais passe entre l’URSS et la France, entre le P »C »F et le reste du pays, droite-gauche toutes confondues!  Une telle ligne ne peut alors amener qu’aux pires attitudes: on l’a vu par les prises de position de l’HR contre les luttes de soldats « sabotant notre défense nationale » ou lors de ce fameux meeting de 1975 où à la même tribune se côtoyaient Camille Granot de l’H.R. et les pires fascistes tel que Patrice Gélinet, qui fut membre tour à tour de « Jeune Nation », »Occident », »Action Nationaliste »­, « Ordre Nouveau » (dont il fut le candidat en 1971 dans les 1,2,3 et 4e arrondissements de Paris), puis rejoignit en janvier 1975 le « Groupe Action Jeunesse » célèbre pour ses ratonnades dans les facultés au sein duquel il représente le Centre d’Etudes sur l’Indépendance Nationale…  

Voilà le passé historique de cet étudiant de sciences-­politiques qui présidait le meeting… Cette ligne aurait été autocritiquée dans « Prolétariat » n°11.

Mais cette autocritique nous semble particulièrement insuffisante. Cette ligne erronée est toujours appliquée, il n’y a eu que déplacement de son porte­parole, d’H.R. au Mouvement Indépendance et Liberté, organisation contrôlée, créée et impulsée par l’H.R., dans les tracts duquel nous lisons les aberrations suivantes:  « des MIG 23 remontent la vallée du Rhône; des journaux français ainsi que l’ORTF sont traînés dans la boue par le gouvernement soviétique; (….) les forces prosoviétiques organisent la subversion dans l’armée et cherchent à saper sa mission de défense nationale ». (Extraits du tract du M.I.L. d’appel au meeting du 24 février 1976, donc bien postérieur à « l’autocritique » de « Prolétariat » n°11 et au discours de Jurquet du 14 février 1976, dans lequel cette ligne était « critiquée »).  

Pour nous, le refus de réellement autocritiquer une telle ligne est un barrage à toute possibilité d’unité.  Alors, comment voyons­-nous l’avenir de « l’unité idéologique, politique et organisationnelle » avec l’H.R. ? Ce sont les masses qui trancheront et la pratique révolutionnaire, et non pas le baratin d’où qu’il vienne.

L’HR ne peut de toute façon avoir un avenir révolutionnaire que par le biais d’une attitude communiste ne craignant pas de reconnaître, autocritiquer et réformer ses erreurs.  

L’unité des communistes se fera, avec l’HR peut­-être; avec ses éléments communistes sûrement.  « LES MASSES SONT LES VÉRITABLES HÉROS, ALORS QUE NOUS SOMMES SOUVENT D’UNE NAÏVETÉ RIDICULE, FAUTE DE COMPRENDRE CELA, IL NOUS SERA IMPOSSIBLE D’ACQUÉRIR LES CONNAISSANCES MÊMES LES PLUS ÉLÉMENTAIRES. »  MAO TSE­TOUNG « Enquête à la campagne » mars-­avril 1941  

Quelques nouvelles significatives : Nous pouvons lire dans le bulletin de la cellule Suzanne Masso du P.C.M.L.F. intitulé « Le Poing Levé », n°2 de mars 1976, : »Seul un parti marxiste léniniste puissant pourra mettre hors d’état de nuire toute l’armée des cosaques (…) » dans un article intitulé  » A la SNECMA, les « cosaques » mordent la poussière. » 

Précisons que les « cosaques », dans leur terminologie, correspondent aux militants du P »C »F et de la CGT…  Type de mot d’ordre scandé vigoureusement pour un 1er mai de lutte ouvrière dans le cortège de « l’Humanité Rouge » cette année: « Marchais, traître à la nation! ».

Quelle nation? Lu dans « l’Humanité Rouge » quotidienne n° 468 du 10 avril 1976 à propos d’une invitation reçue par Krivine de la part des sionistes de « l’appel unifié juif de France » :  » Cette organisation (l’appel unifié juif de France) qui prétend identifier juif et sioniste a de bonnes raisons pour considérer la Ligue trotskyste comme de ses amis ».  

Au cortège d’H.R. du 1er mai 1976, les banderoles du M.I.L. étaient bleues. Fut­-ce un hasard si dans l’ordonnance du cortège, il se trouva que les différentes banderoles d’HR rouges, bleues et blanches se trouvèrent placées de telle façon que cela formait ni plus ni moins qu’un drapeau versaillais bleu­-blanc-­rouge?  Sûrement qu’un hasard … 

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La tendance principale est à la révolution (1976)

Le courant de l’histoire est irréversible : les pays veulent leur indépendance, les nations leur libération et les peuples la révolution. 

1. LES RIVALITÉS INTER-­IMPERIALISTES 

Plusieurs impérialismes se disputent l’hégémonie mondiale sur les plans économique, idéologique, politique et militaire, par petits pays interposés.  Seulement deux sont dominants aujourd’hui: l’impérialisme américain et le social­impérialisme soviétique. Leurs champs de bataille ont pour nom Portugal, Angola, entre autres.

Dans chaque cas, c’est à qui s’emparera des richesses du pays convoité pour satisfaire ses propres besoins économiques, secours appréciables dans le cadre de la crise mondiale du système capitaliste. Pour parvenir à leurs buts, chaque superpuissance agit par l’intermédiaire d’agents de ses intérêts au mépris de l’intérêt des peuples. 

Peu importe aux États-­Unis ou à l’URSS que leurs manœuvres plongent l’Angola dans la guerre civile, la ruine économique et la division du peuple, du moment que cela renforce leur domination. Cette rivalité, de plus, accentue le danger de guerre mondiale.  

Mais « OU LA GUERRE CONTRE­-RÉVOLUTIONNAIRE DÉCLENCHERA LA RÉVOLUTION, OU BIEN LA RÉVOLUTION CONJURERA LA GUERRE CON­TRE-RÉVOLUTIONNAIRE » nous enseigne le président Mao.

 Et de rajouter dans sa déclaration de mai 1970 que « LA TENDANCE PRINCIPALE EST A LA RÉVOLUTION! ».  

En effet, les victoires populaires de ces dernières années le confirment: Vietnam, Laos, Cambodge, Mozambique, Guinée-Bissau, LA GUERRE DU PEUPLE EST INVINCIBLE !  Ce sont autant d’espoirs pour l’avenir des tempêtes révolutionnaires qui se lèvent de la PALESTINE à l’ARGENTINE ! 

2. D’OÙ VIENT LA CRISE ? 

La crise du système capitaliste est liée à la rivalité opposant les puissances impérialistes entre elles, notamment États­Unis, URSS, Japon et Europe.  

L’Europe et le Japon se trouvaient en position de force pour les raisons suivantes:  – aucune charge militaire importante ne repose sur leur économie (ils ne mènent pas de guerre, n’entretiennent pas d’immenses armées d’occupation, n’ont pas à équiper d’armées mercenaires). – ils tirent des bénéfices de la surexploitation des travailleurs immigrés (pour l’Europe) ou locaux (pour le Japon en Asie du sud­ est).  – ils développent un néocolonialisme plus rentable que l’ancien (°2).  

Europe et Japon représentaient donc un concurrent réel face à l’impérialisme américain déclinant (échecs militaires en Indochine, scandales intérieurs style Watergate, velléités d’indépendance émanant de gouvernements auparavant très dévoués) et au système soviétique en crise. 

En effet, les fortes dépenses de l’URSS en matière d’armement et de conquêtes spatiales se sont doublées de sérieuses difficultés économiques basées sur la technocratie et les erreurs de planification, certains secteurs étant sujets depuis la restauration du capitalisme à des tendances similaires à celles du capitalisme concurrentiel sauvage. 

Pour s’en sortir, l’URSS est obligée d’acheter massivement du blé américain, de développer son industrie en commandant des usines aux trusts américains, d’accepter des milliers de dollars de prêts, ce qui établit une dépendance relative de l’URSS par rapport aux États-­Unis pour au moins dix ans.  

États-­Unis et URSS ont donc tous deux intérêt à briser la puissance économique montante de l’Europe et du Japon pour réimposer leur hégémonie.

L’offensive américaine se développera en plusieurs étapes: en 1971, le dollar sera dévalué, sa convertibilité en or suspendue, des mesures draconiennes de contrôle seront instaurées, et la panique monétaire savamment orchestrée, permettant aux États-­Unis de stabiliser leur déficit et de bloquer l’hémorragie de capitaux.  

Dans une seconde phase, l’impérialisme prit prétexte de la guerre israélo­-arabe d’octobre 1973 pour provoquer une « crise » de l’énergie, basée sur une propagande dont les thèmes tournaient autour d’une prétendue pénurie d’énergie.  Les prix de l’énergie (le pétrole surtout) subirent alors une hausse massive, portant un rude coup aux économies européennes et japonaise obligées de payer plus cher leur pétrole, et perdant leurs sources d’énergie à bon marché. 

Les conséquences:  – affaiblissement du dynamisme économique de l’Europe et du Japon, obligés de réduire leur consommation d’énergie et de sortir plus de devises pour payer celle-­ci. ­- une hausse des prix dans les pays touchés, un renforcement de l’exploitation capitaliste, le développement du racisme anti­arabe prenant comme bouc émissaire de la crise les pays arabes producteurs de pétrole, lesquels avaient cependant le droit de vendre leurs richesses nationales à un juste prix pour combattre le pillage économique impérialiste.  – la hausse du pétrole arabe, d’extraction peu onéreuse. permet l’exploitation de gisements pétrolifères américains (gisements off­ shore, le coût de production demeurait très élevé et par conséquent non compétitif sur le marché mondial.  ­

Les profits extorqués, que ce soit par la vente du pétrole du Tiers-Monde et des Etats­-Unis ou que ce soit par la spéculation sur les stocks pétroliers, permettent aux compagnies pétrolières américaines d’investir dans des formes d’énergie telle que l’énergie nucléaire ou solaire… leur assurant ainsi une reconversion payée par les profits accumulés en grande partie sur le dos des nations productrices (en 1974, les États-­Unis contrôlent les sources d’énergie, les transports et les réseaux de distribution du pétrole arabe, prennent en main l’industrialisation des pays arabes.

En huit mois, les profits des principales sociétés pétrolières américaines augmentent de 50 à 100 %).  Mais si les deux impérialismes se sont mis d’accord pour briser les reins de leurs concurrents, par contre leur mentalité de bandits se disputant un butin reprendra vite le dessus pour ce qui est de savoir qui instaurera son hégémonie sur les vaincus.  L’impérialisme américain saura montrer que, même déclinant, il demeure dangereux.  

Il doublera sa victoire économique de victoires politiques telles que le renversement d’Allende au Chili en 1973, l’expulsion des conseillers soviétiques d’Egypte, le remplacement de Brandt par Schmidt en Allemagne de l’ouest (grâce à une habile provocation de la C.I.A. : l’affaire Guillaume), celui d’Edward Heath par Harold Wilson (vu l’incapacité du premier ministre à résoudre la crise: grève des mineurs) et celui de Pompidou par Giscard d’Estaing. Ainsi,en un an, l’impérialisme américain faisait un retour en force.  

Économiquement, le dollar remontant et la balance américaine des paiements redevenant excédentaire, l’Europe et le Japon sont amenés à capituler en reconnaissant le dollar comme moyen international de paiement à la place de l’or.  

Ils n’avaient pas d’autre choix pour couvrir leurs déficits pétroliers. Sauvés à court terme, ils sont condamnés à long terme à accroître leurs achats aux Etats­-Unis pour régler leurs dettes liquides accumulées (100 milliards de dollars­-papiers).  

Cette politique de hausse de l’or et des superprofits permettra aux Etats-Unis d’enregistrer les premiers signes de la relance économique en juin et juillet 1975 (baisse du chômage, augmentation des revenus des particuliers, progression de la production industrielle, reprise des ventes d’équipements ménagers) et d’investir les profits extorqués dans de nouvelles formes d’énergie (nucléaire, solaire…). 

Parallèlement, la non­-convertibilité des dollars en or liée à l’inflation Parallèlement, la non­convertibilité des dollars en or liée à l’inflation monétaire ont entraîné une hausse de l’or profitable aux pays qui en produisent (URSS, Afrique du sud).  

Maintenant, le marché commun est très ébranlé. Pour combler le déficit creusé par la hausse de l’énergie (10,5 milliards de dollars pour la Grande­Bretagne; 4,5 pour la France en 1974), il va leur falloir comprimer leur demande intérieure, pousser leurs exportations, revoir leur politique économique et obligatoirement le faire sans léser les intérêts américains.  

Pour préserver une reproduction minimum de leur capital, et leur compétitivité sur le marché mondial, les capitalistes européens et japonais n’ont pas d’autre solution que de faire payer aux peuples la survie de leur système, êtes capitalistes, après avoir fait miroiter la fameuse société de consommation et de bien-­être, sont obligés de reconnaître la crise actuelle et de trouver le discours qui fera passer facilement les sacrifices demandés.  

La solution du style guerre impérialiste comme en 1914­-1918 ou en 1939-­1945 n’est plus l’idéal car elle s’est avérée être le catalyseur de grands processus révolutionnaires (URSS de 1917 et Chine de 1949 par exemple).  

Le racisme anti­arabe peut être un moyen de détourner la colère populaire vers de faux responsables, les pays arabes producteurs de pétrole, tout comme la démagogie peut être l’artifice idéal pour faire avaler la pilule des restrictions.  Mais ce racisme est utilisé ponctuellement par la bourgeoisie, à des périodes précises: montée des luttes de travailleurs immigrés par exemple. 

3. REDISTRIBUTION DES FORCES POLITIQUES 

Après l’offensive économique américaine s’organise une redistribution des forces politiques à partir des données de la nouvelle situation.  D’une part, l’impérialisme américain remet en selle les sociaux­ démocrates européens comme alternative pour résoudre la crise, d’autre part les bourgeoisies nationales se retrouvent réduites à redéfinir leurs alliances de classe pour la défense de leur propre impérialisme et de leur indépendance.  

L’URSS définira à partir de là une stratégie globale d’union entre les P »C » représentant ses intérêts en Europe et les, bourgeoisies nationales.  Ce sont les efforts du P »C »F vers l’UDR, le « compromis historique » proposé par le P »C »I à la démocratie chrétienne, la main tendue du P »C »E vers les monarchis­tes,etc… Pour contrer cette manoeuvre, les Etats-­Unis favorisent au maximum le développement des partis « socialistes » et tentent de faire échouer tout rapprochement.  

La stratégie de l’URSS s’appuie actuellement sur deux tactiques non antagoniques à l’heure actuelle, mais pouvant le devenir. C’est d’une part la tactique style P »C »P , purement social-­fasciste, visant à la prise du pouvoir par la force (noyautage de l’appareil d’état, répression ouverte des masses, putsch).

C’est d’autre part une tactique de type social-­démocrate dans des pays où les représentants de l’URSS ont besoin d’une façade démocratique et d’une base de masse pour parvenir à leurs fins de prise  du pouvoir, par des moyens électoralistes.  

Ce sont les cas du P »C »F, P »C »E et P »C »I.  Qu’il y ait des tiraillements entre les deux tactiques développées, cela est vrai, nous l’avons vu au congrès du P »C »US de février 1976, mais de là à en déduire le schisme du révisionnisme mondial, c’est aller trop vite.

Ni Marchais, ni Carillo, ni Berlinguer n’en sont à traiter Brejnev en ennemi.  Cela montre seulement que tous les P »C » ne sont pas de vulgaires mercenaires de l’URSS, comme Cuba par exemple, agent n°l des agressions social­impérialistes en Afrique.

Face à cette situation, l’attitude la Chine est claire: tout ce qui divise l’ennemi est juste.  

D’une part, la Chine favorise tout ce qui divise l’impérialisme (rupture de l’isolement du Japon en Asie, appels à l’unité européenne contre les USA et l’URSS,…), d’autre part elle soutient toujours fermement les luttes révolutionnaires: « LE PEUPLE CHINOIS CONSIDÈRE COMME SIENNES LES VICTOIRES REMPORTÉES PAR LES PEUPLES D’ASIE, D’AFRIQUE ET D’AMÉRIQUE LATINE DANS LEURS LUTTES ANTI­-IMPÉRIALISTES ET TOUTES LEURS LUTTES ANTI­-IMPÉRIALISTES ET ANTI-COLONlALlSTES ONT SA SYMPATHIE ET SON SOUTIEN CHALEUREUX. » Mao Tsé­ Toung.  

Prenons un exemple : en 1974, la Chine rétablit ses relations diplomatiques avec la Birmanie, ce qui entraîna la réouverture des frontières entre les deux pays sur la base des cinq principes de la coexistence pacifique et pour le renforcement de la politique de non-­alignement, affaiblissant les deux superpuissances.  De plus, quelques mois après, la Chine en profitait pour livrer des tonnes d’armes au Parti Communiste de Birmanie !

Chaque rétablissement de relations diplomatiques fut caractérisée par un même résultat : Ethiopie, Zaïre…  Cela montre le ridicule des chantres du trotskysme international qui, au nom de la pureté des principes figés, ne comprennent rien à la réalité, au jeu des contradictions et à la politique extérieure chinoise.  La Chine doit en plus faire face aux visées de son voisin soviétique dont la stratégie en Asie est de l’encercler militairement.

L’URSS concentre un million d’hommes sur les frontières chinoises, provoqua notamment la sécession du « Bengla Desh » en 1971, avec l’appui de l’Inde.  

En amenant Nixon à permettre son accession à l’O.N.U. en 1972, la Chine rompit son isolement. Et c’est en vain qu’aujourd’hui l’URSS tente de pousser les révolutionnaires Indochinois contre ce qui fut l’un de leurs plus fermes soutiens, la République Populaire de Chine.  

De toute façon, il est clair que pour nous ce sont les communistes de France qui feront la Révolution en France et qu’il y a deux attitudes erronées à combattre:  – celle qui amènerait les communistes à plaquer la juste politique chinoise sur la situation française.  – celle qui amènerait à juger les communistes français sur les actes des communistes de tel ou tel pays. Les communistes français doivent être jugés sur leurs propos et leurs actes propres. 

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Des zones libérées? (1975)

(Texte rédigé par les unités communistes de Paris 10ème, Meudon, Paris sud et Antony, mars 1975.] Sur la question des « zones libérées » qui était à la base du cahier liquidateur de 1973-­1974, nous publions ici un texte défendant cette thèse (paru dans « La Cause du Peuple » n°2) et un texte dénonçant cette théorie (paru dans « La Cause du Peuple » n°3).

La ligne développée par ce second texte l’emportera à la Conférence Nationale Maoïste de février 1975.

Des « zones libérées » en France ? 

Impossible! disent certains; « on ne peut aménager le système capitaliste » ou « le pouvoir est UN, il ne se grignote pas » (HR, Communisme,etc…)  Nos ossifiés, à qui la seule perspective de chercher des lois spécifiques de la révolution en France, c’est-­à­-dire de s’engager dans une pratique subversive, donne des frissons dans le dos, et les liquidateurs du mouvement « mao », se retrouvent (qui l’eût cru?) dans cette même attitude: tourner résolument le dos aux luttes des masses. 

Depuis 68 la révolution idéologique est à l’ordre du jour. Après la résistance violente au despotisme capitaliste (actions de représailles), une nouvelle exigence s’impose, celle d’une existence sociale radicalement différente, mieux, sa réalisation (partielle, temporaire): la conquête par les masses de ce qu’on a appelé les « zones libérées ».  

Cela peur aller de la gare Saint­-Lazare où les maos de la Gauche Prolétarienne imposaient en 197O la démocratie des masses et, sous la protection de ces dernières, paralysaient l’intervention des flics jusqu’à Lip qui se situe à un niveau beaucoup plus élevé.  Ainsi au sein du pays capitaliste, apparaissent des éléments qui font manifestement partie de la vie future, quand le peuple sera au pouvoir.  

Une « zone libérée » ne s’édifie pas à l’occasion de n’importe quelle action où le peuple est impliqué: une grève bureaucratique même avec occupation ne peut en aucun cas instaurer un contre-­pouvoir populaire, c’est seulement le cas lors des luttes vraiment révolutionnaires.  

Par suite du rapport des forces, ce pouvoir ne peut être qu’éphémère, mais on l’a vu surgir plus d’une fois depuis 1968. Le mot d’ordre de prendre du pouvoir, de libérer son usine,son école, etc… part de la réalité: il s’inscrit dans une stratégie de guerre prolongée.  

CE QUI DÉFINIT UNE ZONE LIBÉRÉE, CE SONT TROIS CARACTÉRISTIQUES: 

1. Le pouvoir est passé pour un temps dans les mains du peuple. Ce pouvoir est différent selon le secteur: en mai 68, toute la région de Nantes­Saint Nazaire était « libérée »; cela voulait dire par exemple que la préfecture devait s’adresser aux organes de pouvoir populaire pour obtenir des bons d’essence.  Cinq ans plus tard à Lip ou chez Manuest, le pouvoir ouvrier s’exerce notamment par la mise en route de la production sous direction ouvrière.  Au sein de l’appareil scolaire, un contre­cours est aussi l’exercice du pouvoir par les masses lycéennes contre la répression et le savoir bourgeois.  

2. Apparition de rapports sociaux nouveaux. Initiative libérée, changement des mentalités, apparition dans l’exercice collectif du pouvoir de rapports humains nouveaux, sont les manifestations qui tiennent le plus à coeur au peuple; à Lip, les ouvriers et les ouvrières insistaient beaucoup sur cet aspect: résolutions des contradictions entre hommes et femmes, entre O.P. et O.S., entre employés de bureaux et ouvriers­, etc…  

3. Protection de la zone, soit par des milices d’autodéfense, soit par la réalisation de l’unité populaire autour de la zone: Lip en est l’exemple le plus achevé. 

POURQUOI LA GUERRE PROLONGÉE ? 

Aujourd’hui, la constatation de ce phénomène de masse qu’est le surgissement même très éphémère de « zones libérées » doit guider la pratique des maos. Pour deux raisons:  C’est à l’heure de la révolution idéologique une orientation conforme à la réalité et des plus subversives.  

L’expérience que font les masses quand temporairement elles s’emparent du pouvoir leur ouvre des horizons nouveaux et leur donne un avant-­goût du socialisme, bien plus puissant qu’un discours de propagande. Se référer à ces expériences est le meilleur moyen de faire comprendre ce qu’est la dictature du prolétariat. 

Ayant goûté à la vie nouvelle les masses ne refusent plus le socialisme à cause de l’image qu’en renvoient l’URSS et la Pologne où l’on tire sur les ouvriers.  

Nous avons le choix entre cette stratégie de lutte populaire prolongée dont chaque bataille vise à prendre du pouvoir en attendant de conquérir le pouvoir(central) et le mirage du « grand soir » précédé par l’accumulation pacifique des forces qui conduit finalement au réformisme.  Des « zones libérées » en France ? (réponse au débat) L’article paru dans « La Cause du Peuple » n°2 et ouvrant un débat sur les « zones libérées » est marqué par un certain nombre de confusions.  

Il y a dès le début un refus de préciser dans quelle phase se place le débat: celle de la lutte armée ou celle de la révolution idéologique? Refus aussi d’analyser concrètement le contexte social.  Les auteurs du texte refusent aussi de préciser exactement la signification d’un « contre­-pouvoir ».  

On peut de ce fait rattacher le terme « contre-­pouvoir » à tous les concepts réactionnaires résultant de l’influence de la classe politique et culturelle bourgeoise depuis 1968 dans le but de SABOTER et de DÉTRUIRE le mouvement révolutionnaire: « contre­-culture », « libération », « cultiver ses différences », « pratique subversive » tombant du ciel, « marginalité », etc…  

La confusion réside aussi entre RAPPORTS de FORCE et PRISE de CONSCIENCE: le refus d’établir un lien dialectique entre ces deux concepts est flagrant.   

D’autre part, le texte laisse croire que la prise du pouvoir central est le RÉSULTAT d’une SOMME de prises de pouvoirs locaux (au sens le plus large), sans se poser le problème de la nature du pouvoir populaire naissant, de savoir s’il détruit l’appareil d’Etat bourgeois ou non ? 

Faute de détruire le pouvoir bourgeois, la prise du pouvoir central ne peut être que remise aux calendes grecques, en refusant de la poser CLAIREMENT et/ou en lui substituant des prises de pouvoir locales, nouvelle formule du grignotage réformiste.  

Ce texte refuse aussi de poser le problème de la VIOLENCE RÉVOLUTIONNAIRE d’une manière explicite et claire: la mise en avant de cette théorie dans le contexte d’une révolution idéologique, des « zones libérées » peut amener à une pratique non-violente, le grignotage pouvant s’effectuer pacifiquement, voire légalement.  

Or, il est nécessaire pour les communistes d’établir un lien dialectique entre PRATIQUE de MASSE et NIVEAU de CONSCIENCE.  

Par rapport à l’exemplarité de certaines luttes ou modes de luttes, l’instauration de rapports nouveaux durant une période ÉPHÉMÈRE dans le TEMPS et l’ESPACE amènent les communistes à dénoncer le caractère éphémère: les masses en lutte entrevoient des caractéristiques du socialisme, mais ce n’est PAS LE SOCIALISME, c’est une vision d’ESPOIR, ce n’est pas une RÉALITÉ CONCRÈTE. 

D’où la réaffirmation de la nécessité de la LUTTE des CLASSES. Dans la réfutation de la théorie des « zones libérées », nous devons nous attaquer en particulier aux exemples choisis et leur opposer des exemples vivants et explicites.  

Les « zones libérées » existant actuellement en Indochine par exemple sont marquées par une LIBÉRATION de régions entières par les armes et INSTAURATION d’un réel pouvoir populaire avec ses structures politiques, économiques, militaires et culturelles.  

De même, dans le « Free Derry » irlandais de 1969, les masses défendaient militairement leurs zones libérées et possédaient des structures de pouvoir (un parlement populaire par exemple).  

Les exemples cités n’ont aucune de ces caractéristiques. Ainsi, considérer la Gare Saint­-Lazare comme une zone libérée est totalement erroné.  L’idéologie dominante bourgeoise y demeurait en martre: par le biais des publicités, des ventes de journaux fascistes, par le paiement des tickets de métro, etc…  

La gare Saint­-Lazare libéra l’expression des masses, devenait certaines heures un grand forum.

Mais ce n’était pas une ZONE LIBÉRÉE car l’idéologie bourgeoise guidait toujours les principales activités de la gare.  Dans les contre-­cours, l’aspect principal n’est pas la prise ou non d’un pouvoir, mais l’usage qu’il en était fait. Cela a-­t-­il permis une modification radicale des rapports à l’école?  

Ces contre-­cours servirent à occuper les grévistes, à prendre en main leurs problèmes scolaires et à lancer le débat sur l’école, le cours, le prof, etc…  Mais on y dispensait toujours l’idéologie bourgeoise.  L’étudiant ou le lycéen remplaçant le prof en arrivaient à singer celui-­ci et à reproduire le même système.

Le contre-­cours n’a guère abouti à une remise en cause de la division entre théorie et pratique, par exemple.  Passons sur l’exemple de Nantes ­ Saint­-Nazaire qui est un cas particulier.

Les auteurs de l’article le coupent de la réalité concrète de 1968: un pays en grève totale, une bourgeoisie apeurée, l’armée prête à intervenir, des émeutes quotidiennes, etc… 

Rien à voir avec Lip, par exemple, une « flamme dans un océan de tranquillité » (dixit « Libération »).  Une étude précise de la « Commune de Nantes-­Saint-Nazaire » serait intéressante, mais sans oublier le contexte national qui l’a permise: un climat de grève nationale prolongée avec batailles de rues. Pour ce qui est des rapports nouveaux créés à Lip, il ne faut pas oublier qu’ils furent restreints.  

Ainsi il n’y eut pas l’application du mot d’ordre « A TRAVAIL ÉGAL, SALAIRE ÉGAL » ; la contradiction jeunes­-vieux persistait (cf. les manifestations après l’occupation policière ou les tentatives infructueuses des lycéens de Besançon pour entrer dans l’usine); le blocage par rapport à la violence; etc… Lip, zone libérée idéologique, à la recherche d’un patron !?!  

Les adeptes des « contre­-pouvoirs » ne seraient­-ils pas en réalité des aspirants réformistes à régenter les masses en leur faisant prendre des vessies pour des lanternes, l’autogestion pour le socialisme, et l’idéologie bourgeoise pour un idéologie prolétarienne ?  (cf. l’article « Amsterdam, et ses freaks, une bonne ville où l’on peut tout faire, discrètement », de J.P. GENE, in « Libération » du 31 janvier 1975, qui est une référence très intéressante à tous les niveaux pour ce qui est d’analyser concrètement une « zone libérée » de ce style, un « contre-­pouvoir »…).

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Des ossifiés? (1974)

La Cause du peuple n° 1, novembre 1974.]

Pierre Victor et Geismar ayant décidé de prendre leur retraite de révolutionnaires professionnels ont voulu camoufler leur démission en passant la balle à un « grand rassemblement » dans lequel les maoïstes auraient perdu leur autonomie politique.

A présent que leur projet utopique et confus d’un « mouvement » mélangeant tous les gauchismes a lamentablement échoué il ne leur suffit plus d’avoir détruit l’organisation, il leur faut en outre empêcher quiconque d’en créer une autre qui relèverait le flambeau du maoïsme vivant, donc saboter notre tentative.

Son succès prouverait que la liquidation, loin d’être une fatalité, résultait de leur seule initiative criminelle.

Voilà pourquoi ils s’efforcent de nous discréditer en nous collant l’étiquette d’ossifiés. Le sommes-nous parce que nous nous réclamons de Mao et de la révolution culturelle ? Le sommes-nous parce que nous nous appuyons sur les enseignements du mouvement de masse depuis mai-juin 1968 jusqu’à Lip ?

Le sommes-nous à cause de notre combat dans les rangs des maos de « La Cause du Peuple » et de notre volonté de préserver les acquis de leur expérience ?

Doit- on considérer les textes définissant notre ligne jusqu’en été 1973 comme procédant de ce R marxisme-léninisme ossifié n tellement honni ? Si telle est la pensée de Pierre Victor alors nous ne connaissons qu’un mot pour le qualifier : renégat.

Mais il y a pire. Comment, pire qu’un renégat ?… oui, un escroc politique !

On le devient quand on prétend faire une propriété personnelle de ce que des milliers de militants ont créé ; quand on s’évertue à stériliser le capital politique qu’ils ont accumulé à travers tant de luttes ; quand on exploite sans vergogne contre le maoïsme les sacrifices qu’ils ont consentis sous son drapeau.

Non Gilles Tautin et Pierre Overney ne sont pas morts pour que vous puissiez un jour fonder un n centre de recherche » ou vous retirer dans vos communautés idylliques ! Ils ont donné leur vie pour que leurs camarades continuent le combat jusqu’à la victoire du socialisme.

C’est ce que nous faisons.

NB : Le 6 janvier 1975, le directeur de « La Cause du Peuple », Daniel Gréaume, a envoyé au directeur de « Libération », Serge July, la lettre suivante qui, au moment où nous mettons sous presse (28 janvier), n’avait pas été insérée.

A la suite du communiqué concernant « La Cause du Peuple », paru dans votre journal le 30 novembre et de votre refus persistant de publier une déclaration signée par moi, j’ai l’honneur de faire valoir mon droit de réponse à un texte qui qualifie la sortie de « La Cause du Peuple » de « tentative de récupération ».

Si moi, ex-président de l’« Union nationale des comités de lutte d’atelier » ait accepté d’assumer les responsabilités de directeur de ce journal c’est parce qu’en tant qu’ouvrier j’ai ressenti dans les masses le besoin de relever le drapeau rouge du maoïsme.

Les auteurs du communiqué affirment que « la nature du combat mené autour » de « La Cause du Peuple », dans le passé « mérite le respect ». Pour moi respecter ce combat c’est le poursuivre jusqu’à la victoire du prolétariat. 

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Pour un nouveau rassemblement maoïste! (1974)

[Appel n° 2 – 18 juin 1974]

Après a décision des dirigeants de « La Cause du Peuple » de dissoudre l’organisation et face à la carence allant de pair avec de graves déviations de ces mêmes responsables, il est urgent de sauver de la liquidation les forces révolutionnaires qui les ont suivis jusqu’ici afin que se poursuive la marche en avant du maoïsme vivant dans notre pays.

A la suite d’un premier appel, des militants représentant une dizaine d’unités de la région parisienne se sont réunis le 15 juin pour discuter des moyens de sortir de la crise.

Alain Geismar a présenté un point d’information sur ce que l’ex-groupe central a fait et surtout n’a pas fait depuis cinq mois.

Cependant aussitôt que des critiques se sont élevées, sa première réaction a été de fuir le débat. Celui-ci s’est poursuivi sans lui.

Il a été décidé de convoquer pour la fin juillet une conférence de travail portant sur les thèmes suivants: – bilan critique de l’expérience accumulée par les maos de « La Cause du Peuple » de 1968 à 1973;
– critique de l’orientation actuelle du groupe central ex mao;
– analyse de la conjoncture politique en France et dans le monde;
– nos tâches actuelles et notre stratégie d’ensemble;
– de quelle organisation avons-nous besoin.

Nous préparerons cette conférence en étudiant successivement chacun de ces points lors de réunions hebdomadaires auxquelles nous convions tous ceux qui ne veulent pas se résigner à la liquidation du maoïsme en France.

Le texte qui suit n’est qu’une intervention dans le débat ouvert que nous voulons aussi large que possible. C’est seulement à l’issue de celui-ci que nous pourrons répondre aux questions que se posent les militants et les masses, et nous unifier sur une ligne élaborée collectivement.

LA FAILLITE DE L’ANCIENNE DIRECTION

La situation actuelle est l’aboutissement d’un long processus de dégénérescence.

Une de nos tâches sera d’en rechercher l’origine et le mécanisme. Nous constatons simplement que les Cahiers N° 2 tombent dans l’anarchisme quand ils rejettent toutes les fautes sur les cadres (en général) et l’organisation centralisée (en général).

Ils déforment et donnent un contenu réactionnaire au concept d’avant-garde pour conclure que si nous sommes des petits bourgeois autoritaires, coupés des masses, etc. c’est la faute à Lénine et à Mao!

Les Cahiers abandonnent le point de vue de classe puisqu’ils confondent direction prolétarienne et direction bourgeoise, identifiant le centralisme démocratique au centralisme (en général) et celui-ci au style de commandement bourgeois.

Ils invoquent l’exemple du PCUS et du PCF, mais les directions de ces partis sont autoritaires parce que bourgeoises.

Pour Mao, par contre, le centralisme démocratique est la méthode de direction propre au prolétariat conscient. La démocratie en est l’aspect principal.

Il n’y a pas de centralisme prolétarien sans démocratie et inversement. Cette méthode consiste à élaborer la ligne politique en systématisant les idées justes des masses. Il n’est pas étonnant que nos adjudants anti-autoritaires les plus forcenés exercent la dictature bourgeoise aussitôt qu’ils s’emparent de la moindre parcelle du pouvoir.

Les Cahiers tentent de tromper les militants en jouant sur les mots.

De ce que les ouvriers de LIP ont lancé des actions « d’avant- garde », ils concluent que les travailleurs n’ont plus besoin d’une « avant-garde ». Il s’agit d’une escroquerie verbale.

Certes, les masses sont capables d’initiatives qui bouleversent ciel et terre. L’histoire en offre mille exemple, mais elle nous enseigne aussi qu’en l’absence d’une avant-garde à la hauteur des tâches objectivement à l’ordre du jour, la réaction finit toujours par reprendre le dessus. Pour en revenir à LIP, faute d’une avant-garde unissant le camp du Peuple, la candidature Piaget n’a pu être imposée!

Théorisant une situation particulière à LIP, les Cahiers prétendent par ailleurs qu’une cellule communiste ne sert jamais à rien au sein du mouvement de masse. En réalité, celui-ci en a le plus souvent besoin pour s’unifier, s’organiser, s’exprimer.

La logique des Cahiers conduisait à la dissolution de I’UNCLA sous prétexte que LIP est apparu là où cette organisation n’était pas implantée!

L’ancienne direction n’a pas seulement abandonné le terrain du marxisme, elle a aussi lamentablement échoué sur le plan pratique. Elle s’est montrée incapable de remplir son mandat. La Conférence nationale des 3 et 4 novembre 1973 avait décidé la création d’un magazine théorique populaire et la publication d’une série de brochures. Rien n’a été fait.

La Conférence nationale des 1er, 2 et 3 février 1974 avait prévu en outre l’organisation de « journées de la pensée révolutionnaire », la convocation au printemps d’une seconde Conférence nationale, et entre temps, la circulation de thèses et de bilans en vue d’alimenter le débat. Là encore, carence totale.

Actuellement, les cinq membres de l’ancien centre se démènent beaucoup pour mettre sur pied le vaste rassemblement envisagé par les Cahiers. Ce devait être une organisation qui n’en serait pas une mais un « mouvement » ayant un centre qui ne centraliserait plus, tout en centralisant un peu (quand même !).

Autrement dit une avant- garde se déniant comme telle où des maoïstes, leur drapeau dans la poche (et leur mouchoir dessus) côtoieraient des trotskystes protestant du contraire et des anarchistes se réclamant de Marx mais crachant sur Lénine.

Dans ce crépuscule des révolutionnaires désenchantés, tous les chats seraient gris et les militants, devenus indistincts des masses, resteraient éternellement dans la communion, pardon la communauté, des travailleurs « lipisés ».

En attendant cette « parousie » d’une France lipisée, nos illuminés de la mystique Lip multiplient (sans grand succès) les négociations avec divers appareils par-dessus la tête des militants, entendu que ceux-ci doivent espérer le salut d’initiatives prises dans les hautes sphères.

Or, il est clair que depuis le 3 février, l’organisation n’a plus aucune sorte d’existence. Quant au groupe central, il n’a pas accompli les tâches transitoires pour lesquelles il avait été élu, ni convoqué la Conférence nationale pour lui rendre compte. Ces trois faits lui enlèvent toute qualité pour parler au nom des « Maos » de « La Cause du Peuple ». Ce sont des têtes sans corps qui se promènent en proposant à leurs interlocuteurs :« Amenez vos masses, nous vous offrons des chefs. »

QUELLE ISSUE ?

Il est temps que les militants se ressaisissent et ne s’en laissent plus conter par les ex-dirigeants qui ont trahi leur confiance. Le moment est critique. Il appartient à chacun de prendre ses responsabilités.

Ne comptez pas sur les autres pour redresser une situation qui tourne à la catastrophe. Abandonnez vos illusions et préparez-vous à la lutte. Il y va de la ligne, il y va de l’avenir révolutionnaire.

Nous devons nous unifier en vue de préserver les acquis positifs très riches de l’expérience accumulée par les « Maos de La Cause du Peuple », tout en critiquant les erreurs et les points faibles de leur pratique. En même temps nous devons nous unir à tous ceux qui sont venus au maoïsme en suivant un itinéraire différent mais à partir des grands mouvements de masse depuis mais-juin 1968.

Le peuple a besoin d’une organisation communiste révolutionnaire dont la ligne exprime et unifie ses luttes. Une telle organisation est nécessaire :

1. Pour assurer la fusion du marxisme-léninisme-maoïsme avec le mouvement populaire et y combattre l’idéologie bourgeoise. Celle-ci rétablit constamment sa domination dans les intervalles qui séparent les luttes à moins que la prise de conscience des masses ne soit consolidée par la propagande communiste.

2. Pour donner aux masses un point de vue d’ensemble et des perspectives stratégiques claires à partir d’une systématisation de l’expérience historique. Faute de quoi le processus révolutionnaire ne pourra être poursuivi jusqu’au bout : jusqu’à la prise du pouvoir, les transformations socialistes, le communisme.

Notre but néanmoins n’est pas de créer un groupuscule, c’est à-dire une secte, de plus. Il n’y a pas de recette pour éviter ce risque. A titre de contribution au débat, nous proposons cependant quelques opinions à la réflexion des camarades.

CE QUI NOUS DISTINGUE

Nous ne serons pas semblables aux groupuscules ossifiés qui se contentent de rabâcher dans leur propagande la vérité universelle du marxisme-léninisme.

La pratique concrète pose des problèmes toujours nouveaux dont la solution n’est pas dans les classiques. Ceux-ci aident seulement à trouver cette solution et à se garder de certaines erreurs si l’on sait s’en servir sans dogmatisme.

Il faut partir de la réalité, recueillir les idées justes des masses en participant à leurs luttes qui transforment cette réalité pour enrichir la théorie de nouveaux concepts qui à leur tour éclairent la pratique.

Ce processus est celui de l’auto-éducation des masses. Croire que les théoriciens peuvent élaborer en chambre des analyses guidant l’action révolutionnaire, c’est du dogmatisme.

Compter sur la spontanéité des masses pour faire l’économie du moment de la systématisation par les communistes armés de la science prolétarienne, c’est de l’empirisme. Il existe une voie juste entre ces deux écueils.

Les « Cahiers » déclarent que la théorie est toujours à faire, elle n’est pas déjà faite. C’est faux, parce qu’unilatéral. L’assimilation de la théorie « déjà faite » est la condition nécessaire (pas suffisante) pour élaborer la théorie de notre pratique actuelle. Face à celle-ci nous ne partons pas de zéro.

Donc nous ne serons pas non plus pareils aux anarcho-spontanéistes qui, sous prétexte de libérer la parole du peuple et de ne pas en laisser le privilège aux détenteurs de la théorie, en arrivent à nier la vérité universelle du marxisme-léninisme-maoïsme et intiment silence à l’idéologie prolétarienne, laissant seul audible le discours de la petite bourgeoisie.

Le résultat est la capitulation sur toute la ligne devant la pression de celle-ci (cf. les entretiens de Sartre, Gavi et Victor).

Les jeunes qui refusent l’autorité des pontes académiques ont raison. On les comprend même quand ils glissent dans un rejet de la théorie marxiste qu’ils ne connaissent qu’à travers des propagandes dogmatiques et stéréotypées.

Tout autre est le cas des savants contempteurs du savoir livresque qui crachent sur ce plat pour en dégoûter les autres et se le réserver à eux-mêmes. Ils détournent les militants de l’étude du marxisme comme si pour éviter le culte du livre il fallait tomber dans l’obscurantisme bourgeois.

Nous voulons une organisation démocratique, ce qui suppose que les militants aient une formation théorique sinon ils ne pourront participer effectivement à l’élaboration de la ligne.

Il faut en outre que les idées circulent non seulement verticalement mais aussi horizontalement au moyen d’un bulletin intérieur. La critique et l’autocritique doivent être pratiquées constamment.

Nous voulons une organisation où la plus large autonomie soit laissée aux unités de base. Pas de généralisation hâtive d’expériences-types. La tactique dépend de la situation concrète locale que seuls peuvent apprécier les militants sur place.

Nous voulons une organisation dynamique qui sache s’intégrer aux masses, vivre et lutter à leur rythme, être à leur écoute. Il faut que les gens du peuple se reconnaissent en nous et nous considèrent seulement comme les éléments les plus actifs et les plus conscients de leur camp.

Nous voulons une organisation fonctionnant avec discipline et continuité. L’alternance d’activisme et de passivité, de constructions et de dissolutions, ainsi que la déperdition constante de militants et de cadres expérimentés qui caractérisaient l’ex-Gauche Prolétarienne rendaient impossible l’accumulation des forces. 

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Notes sur la conférence de la Toussaint (1974)

[P. Boisgontier. Nouvelle Cause du peuple.]

« Un centre de recherche sur la révolution » ou encore « un centre de documentation sur les révoltes populaires » ou bien « un lieu de rencontre et d’échanges de tout ce qui est ou se pense « subversif ».

Voilà sur quelle proposition s’est achevé le dernier rassemblement convoqué à l’initiative d’un certain nombre de militants « historiques » de l’ex-G.P. dont ses dirigeants les plus notoires.

En soi l’idée n’est pas mauvaise. Cela fait même un certain temps que les Italiens l’ont mise en pratique. Il n’y a pas à ergoter, un centre de documentation-recherche qui donnerait enfin à « l’autre gauche » celle qui refuse et Mitterrand et Marchais la possibilité d’avoir une « mémoire » un peu organisée et par là un peu plus de moyens matériels pour réfléchir sur les choses. Un tel centre serait une initiative positive.

Et pourtant l’accueil que l’idée a reçu permet de douter fort qu’elle vienne rapidement à réalisation. C’était le dimanche matin, dernier jour de la rencontre en fin d’assemblée générale. La proposition a tellement fait l’effet du nième gadget que ses promoteurs (une fraction de l’ex-direction) ont du s’empresser de prévenir la critique en spécifiant qu’il s’agissait là seulement d’une idée parmi d’autres et absolument pas de l’aboutissement de la rencontre…

Le malheur veut que tout le reste de l’assemblée générale s’est trouvé consacré de fait à cette idée « parmi d’autres » et que la réunion s’est finalement dispersée l’après-midi sans qu’un débat de fond ait pu se développer sur les « autres points » pourtant présents à l’esprit de plus d’un des participants : « la dissolution n’arrête pas la lutte des classes », « chacun dans son coin, c’est bien beau, mais quand on se retrouve on aimerait aller plus loin », « ce n’était pas la peine de faire faire des centaines de kilomètres à tout un tas de copains pour accoucher d’un centre de recherche », etc.

De tout cela il en fut peu question, ce n’était vraiment pas le problème à l’ordre du jour. En bref, l’achèvement d’un cycle : faute d’avoir fait la révolution, dans les temps impartis… on va l’étudier.

C’est vraiment en une phrase tout le rassemblement de la Toussaint conçu et dirigé de telle manière qu’il ne pouvait en ressortir une nouvelle fois que l’entérinement d’une idée « d’en haut »… hormis le fait de s’être quand même rencontrés.

UN CURIEUX TEXTE D’INVITATION :

Dès le stade de la préparation, on pouvait se douter qu’il y avait anguille sous roche. Et en premier lieu le texte d’invitation est un chef-d’ozuvre de confusion.

On y invite tout ce qui avait compté dans la G.P. : « Pour l’essentiel, d’anciens responsables de la G.P. » Mais on pense large : « Il est nécessaire que soient présents des camarades des premières années de la gauche qui ont pu prendre des distances par rapport au mouvement »… et ainsi, un certain nombre d’exclus eurent le plaisir de pouvoir confronter leur expérience « d’éloignement » !

(C’est là un des petits paradoxes de ce rassemblement que d’avoir vu des membres de l’ex-direction s’efforcer de récupérer certains camarades qu’ils avaient exclus avec perte et fracas dans les années 71-72 pour manquement au ‘ centralisme démocratique ‘ façon G.P. : Je ne veux voir qu’une seule tête !) !

Mais en même temps on prend des précautions contre les perturbateurs éventuels. Seul l’esprit G.P. est admis ! Qu’est-ce que l’esprit G.P. en 1974 !

Si les invitants le savent, ils se sont bien gardés de le dire autrement que par la négative :« Sont exclus de fait (du rassemblement) ceux qui veulent reconstruire sur une base ML ! (Cf. les camarades qui ont entrepris de faire reparaître « La Cause du Peuple ».)

Et ainsi, d’emblée, on met hors du coup les contradicteurs, alors même qu’on annonce comme thème de la rencontre celui où justement le débat principal passe avec ces contradicteurs.

Comment vouloir traiter correctement de la question posée : « où en sommes-nous d’une théorie de la révolution, de la pratique subversive en France » si l’on met ainsi « hors jeu » ceux des anciens de la G.P. à avoir encore quelques idées sur la théorie de la révolution « tout court » !

En fait, la suite de l’invitation répond à cette question ; ce qu’on peut appeler le terrorisme anti-marxiste-léniniste implicite de l’invitation (et qui a pesé comme une chappe sur tout le stage) se comprend quand on lit le reste.

Les auteurs (six chefs « historiques » de la « CDP ») s’interrogent à un très haut niveau d’abstraction, sans référence concrète, sans référence historique, sur l’en soi de la théorie de l’organisation avec la préoccupation évidente d’en rester à l’interrogation. L’argumentation se déroule en deux temps tout aussi vicieux l’un que l’autre.

Premier temps : en substance, « autrefois nous, maos, nous étions organisés, maintenant nous sommes dissous. Certains pensent que cela signifie notre échec… mais n’est-ce pas plutôt le signe que « toute organisation est mortelle », qu’il faut aujourd’hui penser non plus en terme d’organisation intangible jusqu’à la révolution, mais en terme de « mouvements » successifs mourant les uns après les autres »… et ainsi le centralisme démocratique ne se trouve-t- il pas remis en cause !

Et voilà le premier doute merveilleux qui permet tranquillement de passer à côté et complètement à côté de ce qui est la vraie question : quelle était la politique de ladite organisation dont vous dites qu’elle ne pouvait que mourir !

Affirmer l’inéluctabilité de la mort d’une organisation, n’est-ce pas un moyen commode pour éviter de s’interroger sur ses causes ! Et si elle était morte assassinée ?

Deuxième temps : le centralisme démocratique et l’organisation chargés de toutes les maladies comme l’âne de la fable, c’est déjà pas mal, mais si le cadavre se réveillait quand même ? Alors on y va d’un autre raisonnement tout aussi abstrait : « contre l’autre « noyau dur » du marxisme-léninisme, à savoir « la dictature du prolétariat ». »

Et voilà à peu près le schéma : « Mettre en question le centralisme démocratique, c’est pas mal, mais ça pose la question du centre (pour sûr !), or on nous a appris que le parti devait être sous direction du prolétariat (ce que G.P. dixit, il y a longtemps), or il y a eu comme une malédiction qui sans arrêt nous a ramenés à un esprit prolétarien étroit. N’y a-t-il pas là la preuve qu’il y a quelque chose de pipé et qu’il vaut mieux ne plus parler de direction du prolétariat si l’on veut que les autres couches du peuple puissent faire entendre leur voix !».

Et voilà… A croire que les auteurs du texte ont tout oublié de leurs lectures passées notamment « le manifeste communiste » et Mao qui permettent de résoudre l’apparente contradiction dans laquelle ils essaient de nous entortiller. Qu’il y ait des contradictions entre la classe ouvrière et ses alliés, personne ne le nie. Ce n’est pas une raison pour tout foutre dans le même panier !

A moins, justement que cela ne permette de passer bien tranquillement à côté, là encore, d’un des plus beaux paradoxes de la G.P. – « C.D.P. », à savoir que les plus ouvriéristes et prolétariens étroits de ladite organisation n’ont certainement pas été dans l’ensemble des membres de la classe ouvrière mais des petits bourgeois intellectuels complexés à en mourir par leur origine de classe !… et qui viennent maintenant de la redécouvrir!

Et ainsi en deux temps, tout semble mis par terre et le chemin est grand ouvert pour le bavardage éclectique. Le rassemblement a été très largement à l’image de l’invitation.

UN RASSEMBLEMENT « TRAINING-GROUP »

Les « six » historiques invitants attendaient une centaine de participants, il en vint deux cents bien tassés. Fidèle à l’esprit de la convocation, Alain Geismar proclamait « l’autogestion » de la réunion. Le texte d’invitation étant lui-même mis de côté : « On discutera de ce qu’on voudra… », « en autant de groupes qu’on voudra ».

Rien de mieux pour maintenir l’opposition éventuelle dans la dispersion et permettre ainsi à la pensée idéaliste présidant à la convocation de se mettre à l’abri de coups trop concertés jusqu’à l’accouchement de la souris finale qu’est le centre de recherches dont on a déjà parlé.

Qu’on s’imagine en effet que le travail s’est déroulé dans des commissions sans aucune mise en commun intermédiaire et cela durant les deux premiers jours de la rencontre. Le groupe invitant, le seul à avoir un reste de fichier, le seul à avoir eu la possibilité de se concerter, le seul à avoir pu réaliser un texte… est bien entendu dûment réparti dans chaque commission.

Comme on voit, derrière sa façade « d’autogestion », le stage n’a pas failli à la bonne tradition du « centralisme démocratique » façon ex-direction.

Aussi, bien malin serait celui qui pourrait prétendre avoir une connaissance d’ensemble de la conférence. Autant de points de vue qu’il y a de commissions, l’assemblée générale finale n’ayant absolument pas permis de regrouper les points de vue en positions concertées. On peut seulement donner des notations.

1. L’ex-groupe dirigeant ne sait manifestement plus où il va, il a perdu toute unité de pensée. Certains de ses membres pensent à Piaget, ils ont encore la volonté de se battre. Mais d’autres ont carrément sauté hors du temps et des luttes.

Ainsi a-t-on vu l’ancienne direction lyonnaise (toujours représentée dans le passé à la direction nationale) célèbre par son sectarisme et ses ravages dans le mouvement démocratique et dans le mouvement de la jeunesse, faire l’apologie de la communauté pauvre (moins de 300 F par mois et par personne) présentée comme le « sésame ouvre toi » de la subversion, la « nouvelle barre de fer 1974 ».

Inutile de dire que cette transformation des « sécateurs » d’autrefois en « humbles roses communautaires » n’a pas été du goût de quiconque était un peu enraciné dans la vie, qu’il soit ouvrier ou intellectuel. Cette position utopiste ne mérite même pas la critique, seulement une remarque sur la manière dont elle a été présentée comme fidèle expression de l’esprit G.P., comme l’apologie du rêve en tant que mode de subversion.

Cela vaut qu’on s’y arrête parce qu’il y a là l’illustration idéaliste de ce qui est peut-être la seule idée juste qui reste du naufrage, l’idée qu’il faut « remplir » la révolution et qu’il ne suffit pas seulement de « durcir ».

Il semble que cette idée-là s’est développée dans pratiquement toutes les commissions. Ce n’est pas une idée nouvelle. On pourrait dire que c’est un des héritages de la « C.D.P. », ce qui devrait permettre de poursuivre pour ceux qui n’ont pas accepté de jeter le bébé avec l’eau du bain.

2. Il y a un paradoxe à ce que plus d’un an après la proclamation de la dissolution, plus de deux cents « ex » éprouvent le besoin de se retrouver ! Et de ce point de vue, le rassemblement est une preuve de plus de la résistance spontanée que depuis des années, la base « mao » n’a cessé de développer contre l’idée de dissolution présentée comme dispersion des forces.

Mais en même temps, et cela m’a beaucoup frappé, la majorité des participants, si critiques qu’ils soient à l’égard de la dissolution-dispersion, la ressentait partout comme une libération. La fin d’un carcan qui dans le passé les avait trop souvent obligés à aller à l’encontre de ce que leur sensibilité de militants leur permettait d’appréhender.

Il y a là, la base pour une réflexion de bilan, une mise en cause matérialiste des us et coutumes de l’ex- direction et de tous ses relais, et une critique auto-critique générale.

3. Il ne faut pas cependant se cacher le stade avancé de dégénérescence que marque ce stage car sinon on risque de se faire beaucoup d’illusions sur une possibilité de continuer sans rupture. Le tir de barrage ou le nuage de fumée que l’ex-direction a étendu devant le passé pour en interdire une critique collective concrète est d’une grande efficacité.

Plutôt que d’analyser ce passé, la nouvelle théorie de l’organisation comme « négation permanente de l’organisation » (voir la substance du texte d’invitation) est un discours entièrement corrodant s’il n’est pas contré correctement (c’est-à- dire par une nouvelle pratique collective).

Il prend appui sur le réflexe de libération expliqué plus haut, et sur le sentiment de défense typique de centaines et de milliers d’anciens camarades :« On s’est fait baiser ensemble, si on se remet ensemble, on se fera baiser encore. » Et ainsi s’infiltre largement l’idéologie d’impuissance qui caractérise complètement « l’ex-direction ».

4. C’est cette idéologie d’impuissance qu’il faut battre en brèche. Non pas à coup de déclarations volontaristes, ou en assènant des excommunications à ceux qui la professent, mais en les laissant de côté et en passant à une nouvelle pratique. Cela suppose qu’on se libère des sophismes à la mode sur la faillite de la G.P. – « C.D.P. ».

Cette faillite est explicable. Cela suppose aussi qu’on oppose une attitude résolument matérialiste face à tous les autres sophismes concernant la suite et qui se résument en une seule question qu’on vous balance à la tête :« Et toi, qui critiques si fort le passé, que proposes-tu pour aujourd’hui ? » avec sous-entendu toute l’attitude individualiste.

Comme si la nouvelle pratique ne suffisait pas pour naître que tout ceux qui refusent la liquidation des acquis du mouvement mao se réunissent à nouveau ! C’est la leçon principale du stage à mes yeux ! 

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Comment peut-on être maoïste? (1974)

[La Cause du peuple n° 1, novembre 1974.]

La tête de Mao qui accompagne notre titre suscitera sans doute des questions. Les uns diront qu’elle « fait chinois », d’autres qu’elle relève du culte de la personnalité.

C’est ainsi que fut justifiée son élimination en septembre 1972, première d’une série de capitulations menant à la liquidation un an après. En rétablissant cette figure nous ne faisons rien d’autre que proclamer notre attachement au maoïsme.

Il est vrai que celui-ci est chinois, mais pas plus que le marxisme n’est allemand ou le léninisme russe ! Elaboré pour résoudre les problèmes de la lutte des classes dans un pays déterminé il comporte des aspects spécifiques à ce pays, mais aussi des enseignements universels précieux pour nous.

On peut en dire autant « mutatis mutandis » pour le léninisme. Il ne s’agit pas pour nous de plaquer sur la réalité française, on ne sait quels schémas copiés de la révolution chinoise.

Notre tâche est de dégager, à travers notre pratique, la théorie nouvelle requise par la révolution en France. Cependant l’assimilation de la pensée de Mao Tsé-toung peut nous y aider ; plus, elle est indispensable pour résoudre les problèmes nouveaux.

Les révisionnistes se disent disciples de Marx et de Lénine qu’ils ont momifiés. Ils s’efforcent de rendre leur doctrine inoffensive, quand ils ne la retournent pas contre les masses.

Aujourd’hui, seule la référence à Mao Tsé-toung et à la révolution culturelle permet de tracer une nette ligne de démarcation d’avec les pseudomarxistes. De même, après octobre 1917, se dire marxiste ne signifiait plus grand-chose. Les révolutionnaires conséquents étaient parmi ceux qui se réclamaient de Lénine.

Nous disons bien « parmi » car la fidélité affichée à la théorie révolutionnaire est une condition nécessaire mais non suffisante pour être un vrai communiste, le critère principal étant la pratique. Quant au culte de la personnalité, qu’on se rassure. Nous n’y sommes jamais tombé dans « La Cause du Peuple » et pas davantage dans les publications antérieures de l’U.J.C. (m-l).

Pour nous, Mao Tsé-toung n’est pas un a sauveur suprême ; il est le produit de la révolution chinoise. Ses idées justes, il les a tirées de la pratique des masses. Sur notre journal, sa figure fonctionne comme un symbole au même titre que la faucille et le marteau.

Elle renvoie à la théorie de la révolution à son étape actuelle. Certes, nous vivons à la même époque que Lénine, celle de l’impérialisme, des guerres et des révolutions ; mais le président Mao a développé le marxisme-léninisme sur plusieurs points décisifs ; il lui a fait réaliser un bond en avant.

Le matérialisme historique et dialectique progresse sans cesse tout en restant lui-même. Marx avait appris auprès des socialistes français, Lénine a étudié Marx, Mao a commencé en se mettant à l’école de ses deux prédécesseurs et nous à la sienne. Le cercle est bouclé. On ne saurait enfermer la vérité dans les frontières d’un pays ou les limites d’une époque.

Les réactionnaires nous qualifient parfois de « Chinois ». Pourtant ils considèrent comme « français » de se prosterner devant les images d’un Nazaréen d’il y a deux mille ans ou de copier les modes, voire le jargon, américains !

Les préjugés que la bourgeoisie inculque aux masses, sa pression idéologique omniprésente, ne nous pousseront jamais à mettre le drapeau du maoïsme dans notre poche, encore moins à renoncer aux acquis théoriques que nos camarades du monde entier ont payés de leur sang. 

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Pourquoi une nouvelle Cause du Peuple? (1974)

[La Cause du peuple n° 1, novembre 1974.]

Le 13 septembre 1973 paraissait le dernier numéro de « La Cause du Peuple-J’Accuse ». Depuis, plus rien ; que ce soit au niveau de notre propagande comme à celui de notre pratique nationale unifiée. Pourquoi ?

Toute organisation comporte une gauche et une droite. Son histoire est celle de la lutte entre deux voies. Chez les maos de « La Cause du Peuple » la voie bourgeoise l’a momentanément emporté.

Nous travaillons actuellement à un bilan critique de notre pratique depuis 1968 de façon à préserver les acquis tout en évitant le retour des erreurs. Nous pourrons ainsi reprendre notre marche en avant. Un tel bilan ne peut être que le fruit d’un débat très large auquel nous convions tous les anciens camarades.

Pour notre part nous leur soumettons dans ce qui suit une première analyse du mécanisme de la dégénérescence qui a conduit à la liquidation.

1. Points forts et points faibles des « Maos ».

Quand en septembre 1968 nous avons fondé la « Gauche Prolétarienne », nous sommes partis avec deux idées : prolétarisation, militarisation. Par la suite, en 1969-1970, les actions de « Nouveaux Partisans » ont fait éclater les contradictions de classe et ouvert des perspectives nouvelles à la révolution dans les pays capitalistes développés.

Nous avons lutté pour l’autonomie ouvrière contre l’esprit syndicaliste qui divise le peuple, capitule face à l’ennemi, respecte la hiérarchie et la légalité.

Nous avons popularisé les formes les plus efficaces de lutte, celles aussi qui éduquent les masses et les préparent à la révolution : cassage de gueule des petits chefs, sabotages, séquestration, « grandes lessives » des bureaux. Nous avons enfin tenté de faire converger les luttes et d’unir concrètement les classes et couches populaires.

Notre itinéraire est jalonné par de grandes victoires, couronnées par la création de l’U.N.C.L.A., mais aussi par des échecs dont les leçons restent à tirer.

L’une d’entre elles porte sur la tendance des militants à comprendre d’une manière unilatérale les orientations qu’ils reçoivent du Centre. Celui-ci doit combattre inlassablement les penchants au schématisme, à l’outrance, qu’on observe surtout chez les jeunes, nombreux dans nos rangs. L’incurie de l’ancienne direction fut totale à cet égard. Nous en donnerons quelques exemples.

Un des grands acquis de la « Gauche Prolétarienne » est que la méthode correcte pour élaborer la ligne et diriger les luttes c’est de partir des masses pour revenir aux masses, non de partir des livres pour revenir aux livres.

C’est en transformant la réalité qu’on la connaît. La solution des problèmes concrets n’est pas dans les classiques, même s’ils peuvent nous aider à la dégager de notre pratique. Nous avions raison de mettre ainsi l’accent sur la pratique mais non d’avoir encouragé le mépris du « savoir » en général, le mépris des livres et de la théorie marxiste-léniniste.

Déjà dans l’U.J.C. (m-l) après la rectification de septembre- octobre 1967 les cadres affirmaient qu’on pouvait être un bon communiste en n’ayant assimilé que le petit livre rouge. Plus tard, dans la G.P., même ce recueil de citations (pourtant précieux) était rarement utilisé.

Les militants n’ayant aucune formation théorique ne pouvaient plus systématiser les enseignements de leur propre expérience. A partir de 1972, les unités n’ont plus rédigé de bilans. Ainsi la base participait-elle de moins en moins à l’élaboration de notre politique d’où blocage du centralisme-démocratique et de la ligne de masse. Les militants appliquaient mécaniquement les directives venues d’en haut parfois sans les comprendre et surtout sans réfléchir à la situation concrète.

Dans ces conditions comment pourraient-ils distinguer les erreurs et les réfuter quand les dirigeants ont commencé à basculer dans l’anarchisme ? L’ancienne direction eut le mérite, du temps qu’elle était communiste, d’avoir insufflé aux militants une volonté enthousiaste de se lier aux masses et de se battre à leur côté.

Les maos de « La Cause du Peuple » se sont distingués par leur capacité d’impulser des luttes, légales ou illégales, violentes ou non, avec initiative, audace, esprit de sacrifice. Loin d’être sectaires, ils considéraient l’organisation comme un instrument au service des luttes non comme une fin en soi.

Ils ne se présentaient pas aux masses comme des professeurs ès-marxisme racolant pour leur coterie, mais comme des combattants résolus et un peu plus conscients.

Le revers de la médaille est que la combativité sans l’idéologie prolétarienne, peut être un aspect de la mentalité de « hors la loi » ou de baroudeur gauchiste. On avait tendance à recruter n’importe qui, la volonté de se battre étant le seul critère.

Le résultat fut l’afflux d’éléments déclassés, voire lumpen, qui ont introduit un style de travail déplorable caractérisé par :

1°) la répugnance à effectuer un travail prolongé dans les masses pour consolider sur le plan politique et organisationnel les résultats acquis au cours des luttes ;

2°) l’absence de discipline, de méthode, de sens des responsabilités (bref, la pagaille) ;

3°) l’impatience et la tendance à jeter son va-tout dans chaque bataille considérée comme devant décider de la guerre, avec pour conséquence l’usure rapide des militants.

A l’étape suivante l’accent mis unilatéralement sur « l’élargissement », les objectifs démocratiques, le ralliement des bourgeois libéraux a conduit à prôner une justice et une vérité au- dessus des classes, à organiser les ouvriers uniquement sur la base du « on ne fait pas de politique ».

2. La liquidation.

Par suite de ces erreurs persistantes dans la ligne (mais qui en constituaient un aspect subordonné) la composition de l’organisation et l’idéologie de ses militants se sont modifiées graduellement jusqu’au moment où le caractère petit-bourgeois y est devenue prédominant.

La direction a tenté de réagir contre les déviations opportunistes qui relevaient sans cesse la tête. Le dernier de ces combats d’arrière-garde a été livré avant l’été 1973. A la rentrée ce fut la fin. Transfiguré par la révélation mystique de « Lip » notre grand chef charismatique a capitulé devant la pression de la base. Seulement cette base il se l’était donné lui-même.

Selon que le style de travail et la conception du monde sont prolétariens ou petits- bourgeois le métabolisme de l’organisation la transforme dans un sens ou un autre. En l’occurrence les révolutionnaires conséquents ont été éliminés alors qu’affluaient les élément anarchisants.

L’ex-direction, sous prétexte de lutter contre l’autoritarisme, a jeté le bébé avec l’eau sale du bain. Elle a détruit sans rien construire. Ces gens-là ont longtemps protesté qu’ils ne voulaient absolument pas liquider mais seulement écarter l’ancien pour faire place nette au nouveau.

Il fallait « casser la boutique » pour que le grand « mouvement » révolutionnaire, surmontant les querelles de sectes, puisse voir le jour. Ce n’était là qu’un mirage ou plutôt un miroir aux alouettes avec lequel on leurrait les militants.

Certains disent :« On ne peut accuser de tout un seul homme sinon c’est le culte de la personnalité à rebours. » Certes, mais en tant que premier dirigeant, il assume la responsabilité principale. Il ne peut la rejeter sur personne. Entre le centre et la base il y a interaction dialectique, non circulaire, un de ses aspects étant dominant. Les mettre sur le même plan c’est vouloir noyer le poisson pour protéger un individu.

Le marxisme exige qu’on intègre l’organisation dans la totalité plus vaste de la formation sociale. En dernière analyse, les causes de la liquidation sont à rechercher du côté des conditions de la lutte des classes dans un pays comme la France où les ouvriers ont « quelque chose à perdre », ce qui crée un terrain favorable au réformisme. Il n’en reste pas moins que cette explication ne suffit pas, car les facteurs sociaux sont médiatisés par des individus.

Si l’on veut y voir clair, il faudra non seulement analyser avec précision la lutte entre les deux voies dans l’organisation, mais aussi enquêter sur les motivations personnelles et l’idéologie du principal dirigeant. Une telle étude sera des plus instructives, notamment pour ceux qui lors de l’affaire Lin Piao se montraient sceptiques et ne comprenaient pas qu’un grand révolutionnaire en apparence puisse trahir « du jour au lendemain ».

Certains camarades nous disent : il faut laisser une issue à Pierre Victor. C’était justement ce que faisait Kostas Mavrakis dans son article de Théorie et Politique N° 2. Malheureusement, son appel ne fut pas entendu. Comme l’a dit Mao :« Il est difficile de se rééduquer quand on a pris l’initiative de commettre de graves erreurs de principe, de ligne ou de direction. » L’honneur révolutionnaire « …est comme une île escarpée et sans bords. On n’y peut plus rentrer dès qu’on en est dehors ».

3. Un abîme sans fond.

L’ancienne direction qui n’en finit plus de liquider a convoqué le 1er, 2 et 3 novembre une conférence. De nombreux ex-militants en ont profité pour se retrouver et causer. Par la même occasion ils ont pu apprécier où en était le groupe invitant.

Ces individus après avoir dissout l’organisation s’en prennent au marxisme- léninisme (ils disent le « meu-leu ») qui en a vu d’autres. Ils mettent en doute le rôle dirigeant du prolétariat mais doutant de leur doute ils érigent leur doute en principe ! En fait ils tournent en rond. Coupés des masses et de toute pratique ils n’ont plus d’idées, eux qui en avaient autrefois dix dès qu’ils se grattaient la tête.

Cherchant à définir de nouvelles pratiques subversives ils n’ont su proposer qu’une communauté ouvrière-artisanale à la campagne qui s’organise pour échapper au salariat. Ces formes de repli utopique à l’abri de la lutte des classes avaient déjà été proposées par le groupe « Vive la Révolution » quand il s’est dissous il y a trois ans.

Les coopératives formées par d’anciens résistants après la guerre en étaient une version plus ancienne. Inutile de dire que les communautés ne gênent pas le pouvoir, bien au contraire. Ce n’est rien d’autre que le « gaucho-réformisme » que Pierre Victor reprochait jadis à Philippe Gavi.

Ce même Pierre Victor a mis aussi en avant le projet d’un « centre de recherches » sur la révolution. Pour goûter l’ironie de l’histoire il faut se souvenir que la G.P. a été fondée fin 1968 en réaction à ceux qui préconisaient les recherches livresques et concevaient le Parti comme un club de discussion.

Engagés sur la voie glissante de la liquidation jusqu’où ces gens- là vont-ils tomber ? L’abîme appelle l’abîme, « abissus abissum invocat ». Refusant l’autocritique ils n’ont d’autre issue que la fuite en avant. On ne voit pas comment un « centre de recherche » leur permettrait de sortir du brouillard opaque où ils tâtonnent. Que font-ils aujourd’hui sinon théoriser leur impuissance et leur faillite en les tenant pour fatales ?

Déjà leur pessimisme à l’égard des masses ne connaît plus de bornes. Dans une conversation enregistrée avec Daniel Gréaume, Pierre Victor affirmait qu’aucun ouvrier ne veut la révolution violente. Geismar déclare à « Politique-Hebdo » que les ouvriers sont racistes et phallocrates.

Quant à leur compère Serge July il explique dans « Le Monde » que « Libération » n’est pas un journal d’opinion. II reprend ainsi à son compte l’idéologie de « France-Soir ».

Cela signifie en fait que toutes les opinions même réactionnaires peuvent figurer dans le journal à condition que July-Gavi décident qu’elles expriment des points de vues présents dans les masses, donc, selon eux, à l’exclusion du marxisme-léninisme. Ils ont ainsi publié des articles sionistes, antichinois, antiléninistes, ou faisant l’apologie de la drogue.

L’organisation mao étant dissoute il ne leur restait plus qu’à dissoudre à leur tour les « Comité Libération » pour échapper à tout contrôle. Enfin seuls ils ont fait régner la dictature bourgeoise dans ce journal pour lequel tant de maoïstes se sont dévoués jusqu’au moment où ils ont compris.

4. Ce que nous voulons.

Nous voyons d’ici Geismar nous lancer à la figure : « Et vous, que proposez-vous ? » sous-entendant que la catastrophe actuelle est une fatalité devant laquelle nous devrions nous incliner comme lui. En un sens, d’ailleurs, nous ne proposons rien, car nous ne venons pas avec un programme et une ligne tous faits. Ceux-ci seront le fruit d’une élaboration collective à laquelle participeront tous les anciens camarades qui n’ont pas mis la clef sous le paillasson.

Nous ne leur demandons pas de nous faire confiance mais de se faire confiance, en se lançant, par exemple, dans la bataille pour que « La Cause du Peuple » réponde vraiment aux besoins des masses. De même, l’organisation que nous voulons édifier sera ce que vous, les militants maos, en ferez.

Nous ne partons pas de zéro. L’expérience (positive et négative) accumulée par les maos de « La Cause du Peuple » depuis six ans est d’une immense richesse. Nous devons la mettre à profit. Néanmoins nous ne voulons pas revenir en arrière et reproduire la « vieille maison » avec ses tares. Nous visons à faire autre chose et mieux.

Les camarades, révoltés contre l’autoritarisme de la direction et des petits cadres, ont eu raison en un sens d’applaudir à la dissolution parce qu’elle leur permettait enfin de réfléchir par eux-mêmes et de résoudre avec initiative les problèmes concrets de la lutte des classes sur leur lieu d’implantation.

Que leurs aspirations aient été exploitées et détournées par le courant anarcho-liquidateur ne les rend pas moins légitimes. Nous leur demandons maintenant d’enregistrer le constat de faillite de Pierre Victor et compagnie pour prendre un nouveau départ.

Nous n’irons pas loin si nous nous battons chacun dans notre coin. Pour accomplir nos tâches politiques, nous avons besoin d’une organisation communiste

– liée aux masses, impulsant et coordonnant leurs luttes ;

– offrant un lieu où les idées justes des masses soient concentrées et systématisées après étude pour produire la ligne ;

– pratiquant le centralisme démocratique, la critique et l’autocritique, capable donc de faire constamment le bilan de son expérience, de rectifier ses erreurs et d’aller toujours de l’avant.

Il nous faut un système de presse diversifié nous permettant de toucher sur le plan national divers milieux et catégories sociales. Cette presse sera :

– un instrument d’agitation et de propagande ;

– un organisateur collectif, un agent d’unification des camarades ;

– un lieu de confrontation et d’étude pour caractériser la période, analyser la conjoncture et mener la lutte des classes dans la théorie.

En lançant ce journal, nous n’avons fait que sonner le rappel de toutes les bonnes volontés communistes, de tous les révolutionnaires conséquents qui refusent de céder au marasme et à la passivité. Face à l’ennemi, les militants et les groupes isolés sont comme les doigts de la main, l’organisation comme un poing serré.

« La Cause du Peuple » est morte, vive « La Cause du Peuple » !

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Le mouvement ouvrier issu de mai (1969)

Faire apparaître la classe ouvrière comme force politique indépendante, cela demande des précisions.  

En effet, il ne suffit pas seulement de libérer le prolétariat de l’emprise révisionniste et réformiste exercée par le P.C.F., C.G.T. et autres syndicats et partis traditionnels, mais de lui permettre de remplir son rôle historique, celui que Marx lui définissait en 1848 dans le manifeste du Parti communiste :  « De toute les classes qui à l’heure actuelle s’opposent à la bourgeoisie, le prolétariat seul est une classe vraiment révolutionnaire.  

Les autres classes périclitent et périssent avec la grande industrie ; le prolétariat, au contraire en est le produit le plus authentique. Les classes moyennes, petits fabricants artisans, paysans, tous combattent la bourgeoisie parce qu’elle est une menace pour leur existence en tant que classes moyennes.  Elles ne sont donc pas révolutionnaires, mais conservatrices ; bien plus, elles sont réactionnaires.  

Elles cherchent à faire tourner à rebours la roue de l’histoire. Si elles sont révolutionnaires, c’est en considération de leur passage imminent au prolétariat ; elles défendent alors leurs intérêts futurs et non leurs intérêts actuels ; elles abandonnent leur propre point de vue pour se placer à celui du prolétariat. » 

Déjà le vaste mouvement de la jeunesse intellectuelle a abandonné son propre point de vue pour se placer sous celui du prolétariat. En ce sens, il a joué le rôle d’avant­-garde en quelque sorte.  

Mais une avant-­garde en quelque sorte, cela ne peut durer qu’un temps. On l’a très bien vu en mai 68, où le mouvement étudiant a joué ce rôle, et qu’à vouloir le jouer trop longtemps, il s’est enlisé, se coupant dans une certaine mesure de la classe ouvrière.  

Ses caractéristiques (anti­impérialistes, anti­révisionniste, et de plus en plus anti­capitaliste) font du mouvement étudiant et de la jeunesse intellectuelle l’allié privilégié de la classe ouvrière dans la mesure cependant où il sert à développer l’autonomie ouvrière.  Sinon, cela revient à vouloir faire la révolution prolétarienne sans le prolétariat lui­-même.  

Le processus défini par Marx allant de la révolution prolétarienne n’est pas terminé ; nous sommes dans une phase de ce processus. La méthode maoïste nous apprend à saisir chaque processus dans son développement et non pas à fixer abstraitement le processus dans une phase, tout comme elle nous enseigne que l’histoire se fait et ne se refait pas.  

le retard du capitalisme français 

En mai 68, une fois de plus, les masses ont fait l’histoire. Il suffit d’ouvrir le grand livre de mai pour que s’éclaire l’histoire du mouvement ouvrier, ainsi que le présent et l’avenir.  Le mouvement populaire de mai 68 a provoqué une vaste modification des conditions objectives de la lutte des classes dans les pays capitalistes avancés.  

La seule issue du capital français réside maintenant dans le passage du capitalisme archaïque au capitalisme des monopoles. 

Depuis toujours, le Capital français a cherché à se protéger de la classe ouvrière en s’entourant du maximum d’alliés (cela va de l’épicier du coin, à la moyenne usine en passant par le gros propriétaire foncier).  Mais pour être un allié de la bourgeoisie, il faut que cela comporte un intérêt économique.  C’est pourquoi le développement de la grande industrie s’est trouvé freiné dans le seul but de ne pas faire disparaître les petits.

Dans le manifeste, Marx dit : « La société bourgeoise moderne, élevée sur les ruines de la société féodale n’a pas aboli les antagonismes de classes.  Elle n’a fait que substituer de nouvelles classes, de nouvelles conditions d’oppression, de nouvelles formes de lutte à celles d’autrefois. Cependant, le caractère distinctif de notre époque de la bourgeoisie, est d’avoir simplifié les antagonismes de classes.  

La société se divise de plus en plus en deux vastes camps ennemis, en deux grandes classes diamétralement opposées : la bourgeoisie et le prolétariat.  

En France, les deux vastes camps ne sont pas aussi nets. Au sein même des possédants, les intérêts se croisent, s’entrecroisent, se choquent et s’entrechoquent.  On a beau être bourgeois, on a avant tout les dents longues.

Pour discipliner tout ce joli monde, il faut de la poigne, ce qui explique que l’Etat français est un état des plus solides, des plus durs, des plus centralisés du monde.  Pendant des années, la classe ouvrière a payé le maintien de cette unité des possédants petits et gros, et ce, devant la concurrence du Capital financier international, en particulier U.S. qui, lui, est depuis longtemps débarrassé de tous les petits et moyens, pour concentrer ses industries en d’immenses unités homogènes et d’une compétitivité supérieure à l’échelle internationale. 

La bourgeoisie française se croyait ainsi protégée d’un affrontement avec la classe ouvrière ; c’était se mettre des œillères devant le développement des luttes à l’échelle mondiale. C’était voir le danger du dedans sans voir celui du dehors, et que le mouvement étudiant s’était emparé de la lutte des peuples opprimés du monde pour la porter en France avec toute la fougue de la jeunesse.

Fougue qui l’a conduite des petites manifestations de solidarité au Vietnam, aux nuits de barricades.  La suite on la connaît, dix millions d’ouvriers d’entreprises en grève, la bourgeoisie désemparée, affolée.  Heureusement pour elle, le P.C.F. et la C.G.T. étaient là pour faire la preuve la plus éclatante de leur « bonne volonté ». On négocie un plat de lentilles, contre la paix sociale. 

Un plat de lentilles que la grande industrie n’a pas digéré. Mai est passé, mais la grande peur des patrons reste ; les capitaux s’enfuient à l’étranger ; c’est le spectaculaire accord Fiat­Citroën ; on s’achemine vers la crise économique. 

Il faut redresser, récupérer les 10 %, les prix montent, on libère le développement de l’industrie avec le coup de pouce des prêts aux entreprises et de la suppression de la taxe sur les salaires.  Et la machine industrielle démarra en un bond fulgurant des profits et investissements.  

Mais c’est insuffisant, il faut que de Gaulle s’en aille ; c’est le référendum ; Pompidou, Chaban et la nouvelle société.  La nouvelle société de Chaban, c’est l’élimination progressive de tous les petits au profit des gros, pour arriver à la gestion directe de l’Etat, selon les intérêts des monopoles.  

Ce n’est pas une mince affaire, les seuls pays qui y sont parvenus (U.S.A., Allemagne, Japon) l’ont fait sur les ruines de la guerre. On peut dire sans se tromper qu’il nous est 100 fois plus facile de faire la révolution, qu’à la bourgeoisie de s’en sortir.  

les syndicats, l’autre jambe de l’appareil d’état avec la police 

Le développement du Capital vers le monopolisme ne peut se faire sans l’intégration des syndicats.  Pour la bourgeoisie, il faut éviter à tout prix le face à face avec la classe ouvrière ; pour cela, elle a toujours eu recours à des intermédiaires, à des tampons. 

aujourd’hui, les patrons sont POUR les syndicats 

A l’origine, les syndicats ont apporté la réponse organisationnelle qui a permis à la classe ouvrière de s’affirmer en tant que classe, mais uniquement dans le cadre étroit de l’usine, l’organisation pour la vente collective de la force de travail par la création d’un rapport de force entre ouvriers et patrons ; vente qui est à l’origine de la signature de contrats entre ouvriers et patrons.  En se développant de façon considérable, ils ont permis à la classe ouvrière d’apparaître sur la scène de l’histoire en tant que force organisée.  

En s’organisant par usines, par corporations, d’où les fédérations (de la chimie, de l’automobile, des papiers cartons, etc.) qui aujourd’hui ne veulent plus rien dire, tant les branches d’industrie sont dépendantes les unes des autres.  Les patrons ont très vite compris le danger que représentaient pour eux ces syndicats.

C’est pourquoi c’est eux-mêmes qui ont instauré les délégués du personnel au début du siècle, afin d’éviter le dialogue avec la masse.  De plus en plus, la bourgeoisie a besoin d’un tampon entre elle et la classe ouvrière. Aujourd’hui, un tampon ne suffit pas, ce sont les organisations entières qui servent, ou seront amenées à servir de tampon.  

Ce n’est pas le fait du hasard si la Suède, le Japon, les U.S.A., l’Allemagne comptent un très fort pourcentage de syndicalisation. En France, ce taux est très faible, de l’ordre de 15 à 20 %.  Pour Chaban, il faut des syndicats forts, des gens « représentatifs avec qui on peut discuter ».  

Ceyrac, membre du C.N.P.F. fera une déclaration disant que lui veut bien discuter avec les syndicats responsables, quant aux gauchistes, il ne connaît pas !  Papon, l’ancien préfet de police, dans un rapport au congrès de l’U.D.R. remarque le faible taux de syndicalisation et conclut qu’il faut renforcer les syndicats traditionnels.  

Pour cela, la bourgeoisie emploie deux moyens principalement : 1. Désigner ses interlocuteurs (syndicats traditionnels), n’accepter de discuter qu’avec eux, et laisser croire que ce n’est que par eux qu’il est possible d’obtenir des victoires.  Le récent accord Renault en est un bon exemple.  Ce que la Régie y a concédé sans lutte dépasse largement ce qu’elle a concédé après un mois de grève en mai 68.  Les seules clauses restrictives y sont d’autre part remarquables : elles ne concernent qu’une éventuelle non signature des syndicats (rien, ou presque rien d’accordé si les syndicats ne signent pas).  

2. Le développement de la C.F.T., syndicat jaune à l’échelle nationale, ce qui corespond grossièrement à présenter un tigre en papier d’un côté, pour que les ouvriers se jettent dans la gueule du loup (syndicatstraditionnels).  

C’est exactement ce qui se passe à l’heure actuelle à Citroën bien que ne correspondant pas à une tactique consciente de la part de Bercot, tant il est vrai que ce réactionnaire parmi les réactionnaires n’a pas encore compris ou ne veut pas comprendre que la C.G.T. ne demande qu’à l’aider ; elle en a pourtant fait les preuves en laissant le S.i.S.C. se développer et en se présentant maintenant comme la seule alternative possible face au danger du S.I.S.C. 

légaliser la lutte 

Le renforcement des syndicats correspond à une tentative de « légalisation » de la lutte dans les usines, à savoir donner à la lutte ouvrière le terrain choisi par la bourgeoisie ; sur ce terrain, la classe ouvrière est perdante à tous les coups.  Ce terrain tend à canaliser et même à institutionaliser la révolte spontanée des ouvriers. 

L’idéologie syndicale crée une nouvelle légalité dans les usines, elle détermine ce qui est permis et ce qui ne l’est pas, les cas défendables et non défendables. Ainsi on verra les syndicats contraints de s’opposer à un licenciement pour fait de grèves, mais jamais ils n’approuveront ni défendront un cas de sabotage individuel.  L’idéologie syndicale se traduit principalement par la routine, par les grèves prévues à l’avance et limitées dans le temps, par la discussion, la négociation.  

On discute avant de faire grève, on arrête la grève pour discuter.  De plus, cette idéologie est un frein puissant à l’esprit d’oser lutter, en laissant croire qu’il faut que tout le monde soit d’accord pour mener une lutte.  

De telles formes de lutte ne gênent pas les patrons.  

En connaissant la forme et la durée d’une lutte, ceux­ci peuvent aisément rattraper la production perdue. Chez Renault et dans de très nombreuses entreprises, les grèves sont pour ainsi dire planifiées, c’est-­à-­dire que dans le programme de production, il est tenu compte d’un certain nombre d’heures de grève éventuelles. 

Un ouvrier dira : « La grève, c’est comme un coup de poing. Quand on veut donner un coup de poing, on ne dit pas à l’adversaire : attention, je vais te donner un coup de poing. »  Le mouvement ouvrier spontané a rompu d’emblée avec la routine syndicale.  

C’est la grève des thermiques du Mans, des pistoleurs de Sochaux, de Wendel Sidélor en plein mois d’août.  On ne discute pas ; on impose.  Les revendications sont là obtenues de force et non de plein gré. On n’attend pas que tout le monde soit d’accord, car on sait que 84 ouvriers des thermiques du Mans peuvent bloquer la production de tout Renault.  

Le mouvement ouvrier spontané, c’est l’apparition embryonnaire de la classe ouvrière comme force politique, indépendante, c’est l’embryon de la rupture d’avec le révisionnisme et de l’idéologie qu’il engendre.  Le mouvement ouvrier spontané ne représente pas une force stable et consciente. Un jour, c’est à Sochaux, un autre à la R.A.T.P. ou au Mans.  Chacune de ces luttes a un contenu politique : les revendications salariales s’expriment par rapport à la vie chère, les logements, etc.

D’emblée, le cadre de l’usine est dépassé.  Dépassés aussi les clivages lutte politique, lutte économique, organisation pour la lutte économique (syndicats) et organisation pour la lutte politique (Parti).  Aujourd’hui, la question ne se pose pas tant en termes de revendications économiques ou politiques (récupérables ou non), mais plus en termes de formes de luttes employées.  

On a très bien vu en Italie que les revendications portent sur le contrôle des cadences, journées de maladies entièrement payées, hiérarchisation, etc., que ces revendications gênent le développement du Capital mais sont néanmoins digérables par lui ; ce qui a permis à la classe ouvrière d’Italie d’apparaître de façon autonome sur la scène politique, ce sont ses formes de luttes allant de la grève bouchon à l’utilisation de la violencerévolutionnaire.  

Ces formes de lutte ont plongé la bourgeoisie italienne dans une crise dont elle n’est pas prête de se relever.  Aux Etats­Unis, l’économie américaine supporte fréquemment et allègrement des grèves de plusieurs semaines, mais 600000 postiers en grève « illégale», et c’est la panique !  

Les révisionnistes d’Italie ont repris à leur compte tous les mots d’ordre gauchistes, y compris ceux demandant les délégués de chaîne élus sur le tas et révocables.  La seule chose, c’est que Agnelli les a baptisé spécialistes et érigés en instance légale, c’est-­à­-dire en interlocuteurs ayant leur mot à dire sur les cadences.  C’est par leurs formes de lutte que les ouvriers italiens sont passés de la revendication simplement économique dans le cadre des contrats annuels à la contestation politique. 

le « sauvage », l’illégal, effrayent la bourgeoisie 

La plus grande peur de la bourgeoisie, c’est de se retrouver face à face avec des masses en lutte.  C’est pourquoi elle a toujours désigné des interlocuteurs et aujourd’hui, ce sont les syndicats vis­-à-­vis desquels elle pratique une large politique d’ouverture et de concertation.  Ce n’est pas le fait du hasard, si le mouvement étudiant, ainsi que celui des petits commerçants et artisans ont pris des formes illégales (grèves avec occupation, séquestration, etc.) ; tous deux ignorent presque totalement l’idéologie syndicale.  

Ils optent pour des formes de luttes radicales. La dernière grève de Dauphine à caractère ultra­-réformiste a pris des formes telles que occupation, etc.  

La bourgeoisie réprime tout ce qui est illégal, tout ce qui est sauvage, tout ce qui ne provient pas de ses interlocuteurs. A Nanterre, la crèche saccagée, à Dauphine toujours l’intervention de la police même pour une lutte qui ne remettait pas en cause le pouvoir de la bourgeoisie. Vouloir revendiquer au lieu d’imposer, demander au lieu de prendre, vouloir créer un nouveau syndicat pour mener la lutte économique, c’est, un jour devenir inévitablement un interlocuteur valable pour la bourgeoisie.

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Nouvelle Cause du Peuple, NAPAP, Action Directe

Socialisation des luttes (1969)

légalité populaire et légalité bourgeoise 

Au siècle dernier et dans les débuts du XXème siècle, l’exploitation de la classe ouvrière se résumait principalement par la vente de la force de travail au prix le plus bas. Le salaire de l’ouvrier lui permettait tout juste de quoi manger et dormir enfin de pouvoir récupérer ses forces.  Au fil des années, les luttes ouvrières ont arraché à la bourgeoisie un surplus de plus en plus grand de la simple force de travail.  

En termes clairs, cela signifie qu’au siècle dernier : Nourriture + logement + vêtements = salaire ; reste 0. Aujourd’hui : nourriture + logement + vêtements = salaire + une certaine somme du salaire utilisée pour un minimum de confort (T.V., frigo, voitures, loisirs, etc.).  

Simplement ce qui est donné en plus dans l’usine pour le travail fourni est récupéré en dehors par les loyers, les supermarchés, etc. Le meilleur exemple en serait un ouvrier de Renault achetant une voiture Renault. 

La Régie lui donne un salaire, et en achetant une voiture à la Régie, l’ouvrier lui rend une partie de son salaire. On voit très bien que mener la lutte contre la vie chère, ce n’est pas seulement réclamer une augmentation de salaire ou une échelle mobile. C’est aussi mener la lutte pour faire baisser les prix.  

Les révisionnistes maintiennent dans la classe ouvrière une division entre les luttes dans l’usine (revendicatives) et les luttes à l’extérieur(politiques). En bref, dans l’usine, la politique, ça n’existe pas ; on revendique alors qu’à l’extérieur, on vote, et c’est ça la politique. Une politique de bulletin de vote pour des places à l’Assemblée, au Sénat, pour la gestion des municipalités. Là encore, l’esprit légaliste se manifeste en demandant.

On demande des crédits pour une piscine, pour une école, etc.  Dans les usines, face à la production, face à la maîtrise, l’instinct de classe est très aigu et se développe spontanément une très forte solidarité. Même si les heurts entre ouvriers sont très fréquents, en particulier entre français et immigrés, ce qui l’emporte avant tout, c’est la solidarité de classe.  

Dans l’usine, il existe avant tout un comportement franc, « pas gêné ». On se tutoie d’emblée, on n’hésite pas à se demander une cigarette, on discute facilement même si on ne se connaît pas.  Dans l’usine ,on sent concrètement qu’il y a un fossé entre l’ouvrier et le patron, et rien qu’une différence entre le français et l’immigré.  

Ainsi un ouvrier français ayant trouvé le portefeuille d’un marocain ira le lui rapporter en disant : « Je ne pouvais pas le garder, c’est un ouvrier».  Le côté : «C’est un ouvrier» l’emporte toujours sur celui : « C’est un étranger. »  L’idéologie bourgeoise tente de faire croire que dans l’usine, d’accord, on est ouvrier, mais qu’une fois passé la porte, on est citoyen, avec les mêmes droits pour tout le monde.  La preuve, il n’y a pas d’endroits interdits aux ouvriers, la priorité à droite est valable pour tous, la loi aussi.  

De plus en plus, les journaux sont faits pour tout le monde ; on vulgarise à souhait : l’art, le cinéma, la littérature, l’allemand pour tous, le yoga pour tous, la psychanalyse à la portée de tous.  Concentrés dans l’usine, les ouvriers se retrouvent souvent dispersés en dehors. On pourrait dire noyautés, même, par toutes les autres couches de la population.

Là, le comportement change. Demander une cigarette? On a l’impression de mendier. Discuter? on ne se connaît pas, etc.  De plus en plus, on assiste à une multiplication de journaux poussant à la consommation et à l’effacement de l’antagonisme de classe.  

Des journaux tels que LUI ou l’utilisation du rasoir électrique X ou du papier hygiénique Y permettent tous les succès (travail, femmes…).  Il est bien connu que tous les P.D.G., tous les hommes modernes, ouvriers ou patrons, lisent LUI.  Les différences entre ouvriers et patrons, ça n’existe pas, la seule existante, c’est entre les hommes modernes et les autres.  

Cependant dans les grandes cités ouvrières, on retrouve l’usine dans la vie.  C’est plus net dans les foyers comme à Flins où on a l’impression de quitter l’usine pour l’usine (foyer). Dans ces grandes cités, les perspectives de travail s’offrent d’elles­-mêmes.  Tout ce qui est fait à l’extérieur est récupérable à l’intérieur. Le rapport entre les luttes à l’intérieur et à l’extérieur est éminemment dialectique. 

ouvrier partout 

On est ouvrier, et on le sent très bien. L’accès aux merveilles publicitaires est irrémédiablement fermé.  Comment croire à l’égalité quand 100 F d’amende pour un salaire de 1 000 F, cela fait 10 % et que 100 F pour un salaire de 10000 F, cela ne fait que 1 %.  Comment y croire quand pour un ouvrier, 250 F de loyer mensuel, cela fait 1/4 du salaire et que pour d’autres, ça ne représente qu’un dixième.

Dans l’usine, on est réprimé par les chefs, la maîtrise, le règlement intérieur ; à l’extérieur, c’est l’appareil judiciaire et policier, l’administration répressive.  Quoi de plus humiliant que de faire la queue devant un guichet de sécurité sociale. On en sort avec l’impression d’être tributaire. Mais à l’extérieur de l’usine , comme à l’intérieur, se développent des formes de luttes individuelles exprimant la révolte des masses.

On vole dans les supermarchés, on ne paie pas les impôts, les amendes. Il n’existe pas deux esprits d’oser lutter, un pour l’usine, un en dehors. Il n’en existe qu’un qui consiste à combattre le capitalisme sous tous ses aspects.  Développer l’esprit d’oser lutter parmi les masses, c’est opposer à la légalité bourgeoise la légalité populaire.  Là non plus, on ne demande pas ; on impose ou on prend. Cela consiste à changer la vie, c’est­à­dire à développer actuellement tout ce qui est sauvage (crèche, loisirs, etc.), à instaurer un embryon de pouvoir populaire.  

Cela consiste à expliquer à l’ouvrier qu’il est normal de couler les cadences et de saboter la production, à dire à la ménagère qu’il est normal de voler dans les supermarchés, que des crèches, ça ne se réclame pas, cela se fait; que devant la grève des loyers, les grandes sociétés foncières sont impuissantes, etc.  Mais avec toujours en tête que c’est une lutte continue jusqu’à la révolution armée.  Déjà l’alpha sauvage est presque reconnue par la bourgeoisie. Les crèches sauvages le seront certainement aussi.

Mais elles ne le seront pas si elles n’existent pas, c’est évident.  la lutte continue, ne rien laisser intégrer  La seule chose qui n’est pas digérable par la bourgeoisie, c’est la révolution préparée par une lutte prolongée.  Créer des crèches sauvages et s’en tenir là, ce n’est pas mener une lutte prolongée.

Mais créer des crèches sauvages avec pour but qu’une fois admises par la bourgeoisie, il faudra continuer la lutte, continuer à développer l’esprit d’oser lutter des masses, c’est préparer effectivement l’insurrection armée.  Mais cela ne peut se faire qu’avec un point de vue dominant qui est celui de l’usine. On unira un employé et une ménagère sur le système des prix, pas sur le problème des cadences. Le seul moyen de ne pas faire la révolution qu’à moitié, c’est de partir des usines.  A travers les usines se posent tous les problèmes de la Révolution.

Unir le peuple sous la direction du prolétariat, c’est partir de la solidarité qui règne dans les usines pour l’étendre à toutes les couches de la population.  

Socialiser les luttes avec le point de vue dominant des usines, c’est mettre en application le mot d’ordre.  La classe ouvrière doit diriger en tout ; c’est-­à-­dire qu’en se libérant, la classe ouvrière libérera toute l’humanité, qu’elle ne peut se libérer qu’en libérant toute l’humanité.  Depuis mai, l’appareil d’Etat s’est considérablement renforcé, surtout en ce qui concerne la justice et la police.  Elle est désormais loin, l’image du gardien de la paix tranquille qui va à la bagarre uniquement parce qu’il y est obligé.  

La police est maintenant devenue un appareil à réprimer du jeune, du combatif ; l’appareil judiciaire et policier et omniprésent.  A Mantes, les flics qui descendent dans les cafés s’adressent directement aux cheveux longs. 

A l’issue d’une bagarre dans un foyer des Mureaux ou les C.R.S. ont chargé à la matraque, les inspecteurs reviendront avec trois cents photos de jeunes de la région prises à leur insu et dans les positions les plus insolites.  Le moindre gardien de la paix, même en réglementant la circulation, observe les individus.

On cherche, on traque les jeunes, les cheveux longs. C’est qu’il existe un vaste mouvement de la jeunesse qui lui conteste l’ensemble de la société capitaliste.  Il y a moins de différence entre un lycéen et un jeune ouvrier qu’entre un jeune ouvrier et un vieux réviso ; tout comme il y a moins de différence entre un étudiant et un jeune ouvrier qu’entre un ouvrier âgé et un intellectuel si progressiste soit-­il.  

Ce qui unit le mouvement de la jeunesse, c’est l’oppression, c’est sa révolte contre l’idéologie bourgeoise, c’est un véritable ciment pour l’unité populaire.  Le jeune ouvrier, le lycéen et l’étudiant, le jeune immigré et la jeune fille touchent toutes les couches de la population, car ils font partie de toutes ces couches, et sont unis par l’oppression idéologique commune.

Orienter le mouvement de la jeunesse intellectuelle vers la lutte dans les usines et les quartiers, dans la lutte sous touts les aspects de la vie, c’est se donner les moyens d’une unité populaire véritable. Il nous faut ici ouvrir une parenthèse sur le problème spécifique des immigrés.  

Il semble que jusqu’à présent, le mouvement révolutionnaire ait tellement spécifié le problème des immigrés que dans certains endroits, il s’est transformé en organisation de défense des immigrés.  De telle façon, le mouvement révolutionnaire n’a au mieux pas fait progresser l’unité des Français et des immigrés, et au pire accentué la division.  Le racisme en France est issu d’un certain chauvinisme datant de l’époque coloniale. Dans les livres de géographie pour enfants, on peut lire textuellement : « L’homme blanc a civilisé les pays africains. »  

Le racisme en France ne s’exprime pas tant entre les couleurs (supérieurs ou inférieurs), mais en terme de : « On leur a tout fait et ils nous ont chassés », « ils nous prennent notre travail, ils ont plus de droits que nous. »  Ce qu’il faut avoir en tête, c’est que l’on est ouvrier avant d’être immigré, et non pas l’inverse, en tenant compte simplement du problème spécifique. 

Les travailleurs immigrés sont coupés, isolés de la vie sociale. Hors de l’usine, ils sont maintenant dans les foyers ou dans de véritables ghettos tels que Barbes ou Belleville à Paris, quartiers quadrillés 24 heures sur 24 par la police ; où s’est tissé un véritable réseau de mouchards et de résidus de pègre chargés de dénoncer et de surexploiter les travailleurs immigrés.  

Le problème des immigrés se pose principalement en fonction de leur isolement par rapport au reste de la population. Isolement voulu et entretenu par la bourgeoisie. Rompre cet isolement en libérant les ghettos parisiens, permettre la liaison effective des immigrés avec le reste de la population, c’est renforcer l’unité des travailleurs français et immigrés.  

Il existe toute une série de moyens permettant « d’intégrer », si l’on peut dire, les travailleurs immigrés à la vie sociale en France.  Le terme « intégrer » est mauvais mais il n’en existe pas d’autre. En maintenant les immigrés dans leur isolement, comment renforcer leur unité avec tout le peuple ?  Comment faire pour qu’ils sentent qu’ils font partie de la classe ouvrière de France au lieu d’être une fraction de leur pays d’origine en France ? 

Vers un nouvel internationalisme 

Ces moyens, cela va de l’alpha dans le seul but d’apprendre à lire, à déchiffrer une fiche de paie ou les papiers de Sécurité sociale, à la lutte progressiste pour leurs droits démocratiques qui consistent à les protéger de la répression administrative (bureaux de mains­ d’œuvre, cartes de travail…)  Cependant, il faut tenir compte que la très grande majorité des travailleurs immigrés n’est que de passage.  

Qu’ils gardent malgré tout la nostalgie de leur pays d’origine et de ses traditions.  Par rapport à cela, l’internationalisme prolétarien ne doit pas être un vain mot.  Appliquer le schéma Palestine pour les arabes, grève des Asturies pour les Espagnols, ce n’est pas développer cet internationalisme. 

Ce qu’il faut démontrer, c’est que les luttes qui se mènent en France, en Espagne, en Palestine, servent les intérêts du prolétariat mondial et les concernent directement. Parler de Palestine aux Arabes ne suffit pas ; mais parler de la Palestine dans le but de développer la lutte des classes en France, en parler aussi aux travailleurs français en leur démontrant que cette lutte, c’est aussi la leur, c’est développer effectivement l’internationalisme prolétarien.  

La presse bourgeoise parle de tout mais elle le fait de telle manière que les luttes du Vietnam et de la Palestine sont des choses différentes, qu’il n’y a aucun rapport entre les grèves en France et celles aux États-Unis, en Suède ou en Belgique.  

Ce qu’il faut démontrer concrètement, c’est que le capitalisme dans son stade suprême, l’impérialisme, ne peut plus se développer ; que les peuples opprimés du monde portent des coups terribles à l’impérialisme hors de chez lui ; que les classes ouvrières des métropoles impérialistes les attaquent du dedans.  

Attaque de partout, l’impérialisme s’écroule petit à petit. L’union des travailleurs français et immigrés passe par la lutte commune là où ils sont concentrés, dans une même usine ou une même cité ; mais elle passe aussi par un soutien mutuel des luttes dans leurs pays propres. 

l’avenir nous appartient, organisons­nous !

Mai 68, dix millions de grévistes, toutes les usines occupées.  A Citroën, à Flins, à Sochaux, les ouvriers se battent contre les jaunes ou les C.R.S. pour défendre leur usine. En mai, des milliers, des dizaines de milliers de travailleurs ont posé la question du pouvoir, ont voulu faire la révolution. Après la trahison de juin 68 et la reprise du travail, la classe ouvrière n’a pas cessé de lutter.  

On a pu assister à une foule de grèves sauvages, illégales, rompant avec l’esprit syndical.  Après mai, ce n’est plus comme avant, des dizaines de milliers de travailleurs qui en mai ont voulu faire la révolution, ont senti concrètement ce que pourrait être le socialisme, la dictature du prolétariat.  Ces dizaines de milliers de travailleurs n’ont pas disparu. Il existe actuellement une avant-garde ouvrière qui s’exprime par ce qu’on appelle le mouvement ouvrier spontané.

Mais cette avant-garde ne s’est jamais stabilisée ; elle est toujours épisodique et inconsciente.  Le mouvement ouvrier ne s’est jamais concrétisé dans une forme organisationnelle quelle qu’elle soit.  Les seules formes organisées dans les usines, ce sont encore les syndicats.  Il n’existe pas encore d’exemple où les gauchistes soient apparus comme alternative aux syndicats. La raison en est simple ; l’organisation de la classe ouvrière ne peut venir que de la classe ouvrière elle-même.  

Et ce ne sont pas les groupuscules qui peuvent se substituer à cette organisation.  Parler d’autonomie ouvrière sans chercher la réponse organisationnelle à cette autonomie, c’est passer à côté de la plaque.  

Le mouvement ouvrier spontané s’exprime politiquement de façon indépendante ; mais pour qu’il soit capable de porter la lutte de l’ensemble des travailleurs de façon continue, il doit prendre corps dans une forme organisationnelle.  Une forme organisationnelle qui rompt avec les divisions économie / politique, intérieur à l’usine / extérieur.  

On est ouvrier partout, et partout, on doit combattre le capitalisme dans toutes ses formes. Partout on doit opposer à la légalité bourgeoise ou syndicale, la légalité populaire.

Rompre avec l’esprit légaliste, cela se fait dans et en dehors de l’usine, cela peut se faire dans et hors des syndicats. Vouloir militer dans les syndicats n’est pas faux en soit (suivant des conditions objectives), ce qui est faux, c’est de vouloir faire des syndicats « légaux » capables de discuter avec les patrons et le gouvernement.

Car toute une ligne politique, quand elle est fausse comporte un point de non retour et au fur et à mesure de son application dans la pratique, elle peut très bien devenir une voie bourgeoise. 

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