Il n’existe pas d’analyse de l’inflation par Karl Marx. Il connaissait pourtant le principe de l’inflation, c’est-à-dire de la hausse des prix. S’il n’aborde donc pas cette question en tant que tel, c’est qu’il a choisi de ne pas le faire.
Pourquoi a-t-il choisi de ne pas le faire ? Parce que pour lui cette question se ramène à celle du prix – les prix des marchandises, les prix du travail.
Maintenant, il faut voir la situation à son époque. Lorsque le capitalisme apparaît, et ce jusqu’à la première guerre mondiale, l’inflation reste marginale. Karl Marx, au 19e siècle, ne pouvait constater qu’une inflation aux confins du mouvement général du mode de production capitaliste.
L’inflation est alors une sorte de friction dans les rouages capitalistes, c’est anecdotique.
Par contre, à partir de 1914, l’inflation s’installe durablement dans le capitalisme, c’est une norme.
Voici un graphique présentant l’inflation aux États-Unis. Avant 1914, l’inflation était en rapport direct avec les cycles capitalistes et apparaissait massivement de manière épisodique. Avec la première crise générale du capitalisme, l’inflation s’installe par contre.
Le tableau suivant présente l’inflation au Royaume-Uni et aux États-Unis, pour les 19e et 20e siècles. On voit très clairement comment le capitalisme se développe au 19e siècle sans inflation, et au 20e siècle avec elle.
En conséquence, l’inflation moderne, systématisée dans le capitalisme, est autre chose qu’une simple « hausse des prix », elle diffère de ce dont Karl Marx parlait ; en même temps, ce phénomène ne peut qu’être le prolongement de la réalité du capital lui-même, que Karl Marx a parfaitement expliqué.
Il ne faut pas chercher l’inflation comme « nouveau » phénomène en soi. On doit comprendre l’inflation à partir de ce qui est présenté dans Le capital de Karl Marx. Une fois cela fait, on pourra vérifier en comparant avec ce que Karl Marx dit au sujet de l’inflation à son époque, et qu’il ramène à la hausse des prix.
Et il est une chose qu’on remarque tout de suite. L’inflation qui se systématise va de pair avec l’expansion massive des forces productives. Voici le PIB français. Quand on sait que l’inflation s’installe systématiquement au 20e siècle, notamment à partir de 1945, alors le rapport est évident.
C’est tellement vrai que même aux États-Unis, la superpuissance dominante dans la seconde moitié du 20e siècle, l’indice des prix à la consommation témoigne d’une hausse ininterrompue.
Ainsi, l’inflation s’établit parallèlement à l’expansion des moyens de production. C’est là qu’est la première clef.