Les tenants du syndicalisme libre, s’ils avaient le « manifeste des douze » de 1940, n’avaient toutefois plus l’initiative. Le PCF menait la résistance et il prônait l’unité à la base pour une nouvelle CGT. Il était impossible de faire face à un tel succès populaire et les tenants du syndicalisme libre durent donc composer. Différentes réunions clandestines eurent lieu à partir de 1943, car la CGT ne pouvait que se réunifier face à l’occupant allemand, la pression des masses étant aussi forte qu’en 1936.
La CGT intégra ainsi les Comités départementaux de la Libération, appelant à la grève générale le 18 août 1944. Dès le lendemain commence l’insurrection parisienne, alors que l’Appel de la CGT clandestine aux travailleurs de France, publiée auparavant, prônait la mise en place de milices patriotiques.
A la fin août 1944, il y avait à la direction de la CGT 6 personnes liées à la CGT de tradition réformiste, 3 de la tradition CGT Unitaire liée au PCF.
Finalement, début septembre 1945, la CGT a comme dirigeants à la fois Léon Jouhaux, l’ex anarchiste toujours anticommuniste forcené mais désormais réformiste, et Benoît Frachon lié au PCF.
On retrouve ici les deux tendances s’étant affirmées dans la CGT à la suite d’Octobre 1917 en Russie. Léon Jouhaux est secrétaire de la CGT depuis… 1909, et l’adjonction d’un autre secrétaire, communiste, témoigne de la base pro-PCF dans la CGT, puisque le vote de 1945 créant cette fonction a été victorieux avec 23 fédérations contre 15, 66 unions départementales contre 27.
En fait, la CGT n’avait plus connu de réelle unité depuis la révolution russe, à part au moment de 1936. En fait, si la majorité des socialistes avait rejoint l’Internationale Communiste lors du congrès du Parti socialiste SFIO en 1920 à Tours, mais la CGT restait quant à elle à la traîne.
Possédant une véritable identité, entre réformisme et anarchisme, elle s’opposa au communisme. Cela n’empêche pas une opposition de naître, mais celle-ci était surtout portée par les Comités syndicalistes révolutionnaires.
D’ailleurs, si l’on regarde bien, bon nombre de communistes avaient également, en réalité, une lecture syndicaliste révolutionnaire. Concrètement, on peut s’apercevoir que l’interprétation de ce qu’était le bolchevisme pour bon nombre d’adhérents au Parti Communiste était largement erronée. Il s’ensuivit un parcours chaotique pour la Section Française de l’Internationale Communiste.
La CGT fut en mesure de mettre à l’écart ces velléités syndicalistes révolutionnaires entremêlées de revendications communistes. Dès 1921, la tendance révolutionnaire est donc mise à l’écart, fondant une CGT dite unitaire, avec des communistes et des syndicalistes révolutionnaires, ce qui était intenable également.
Un épisode marquant fut d’ailleurs la « fusillade de la Grange-aux-Belles », en janvier 1924, où un meeting communiste fut faire face aux provocations des syndicalistes révolutionnaires. Cela se termina au pistolet, avec deux morts.
L’intense activité de l’Internationale Communiste força toujours plus le cours des choses et les syndicalistes révolutionnaires fondirent alors en 1926 la Confédération générale du travail – Syndicaliste révolutionnaire.
Les choses en restèrent là jusqu’à la crise des années 1930. La CGT, s’unifiant sous l’impulsion des masses antifascistes face au 6 février 1934, était passé d’un million à cinq millions de membres dans le cadre du Front populaire. Les communistes revenaient sur le devant de la scène.
Cependant, avec l’enlisement du Front populaire, les forces anticommunistes finirent par l’emporter et profitèrent du pacte germano-soviétique pour écraser les communistes par ailleurs désormais pourchassés par l’État lui-même. La Résistance et la Libération renversaient la situation et ramenaient les communistes sur le devant de la scène, dans le même schéma qu’en 1936.