Au moment du troisième congrès de l’Internationale Communiste, une Internationale Syndicale Rouge est en train de se mettre en place et doit dans la foulée tenir son premier congrès. Elle a face à elle une internationale syndicale basée à Amsterdam et rassemblant tous les réformistes.
Grigori Zinoviev fait un long rapport de la question syndicale et dresse le portrait de trois courants auxquels il faut faire face :
a) les réformistes, dont le Français Léon Jouhaux est une figure tutélaire ;
b) le syndicalisme qu’on retrouve surtout en Suède et en Allemagne, faibles numériquement mais qui veulent aller dans le sens de l’Internationale Communiste, tout en ayant une ligne somme toute réformiste ;
c) les syndicalistes révolutionnaires tenant de la charte d’Amiens, qui prône le « neutralisme » politique dans l’activité syndicale.
Grigori Zinoviev dit au sujet de ce dernier courant notamment que :
« On pouvait comprendre la Charte d’Amiens en 1906. On pouvait comprendre comment elle a émergé. Mais on ne peut vraiment que regretter qu’on vienne avec cela en 1921, 15 ans après, après la guerre, après la naissance de l’Internationale Communiste, après la révolution russe, après les luttes des syndicats russes qui ont joué un rôle si important dans notre révolution.
Si on prend un ouvrier syndicaliste-révolutionnaire commun, il se sentirait insulté de mes explications comme quoi il est objectivement prisonnier de la bourgeoisie. C’est pourtant un fait. »
La ligne des communistes russes était claire et dans le même esprit que lors du deuxième congrès : puisqu’il y avait un afflux dans les syndicats depuis 1918, ceux-ci avaient une nature de masse et il fallait donc y travailler.
Mais le débat quant à la question syndicale fut à la fois long et prévisible, car il s’affrontait d’un côté les partisans du syndicalisme révolutionnaire avec comme représentant les IWW des États-Unis, et de l’autre la conception des communistes russes, finalement aisément accepter par tous, du moins en apparence.
La résolution sur le rapport de l’Internationale Communiste et l’Internationale Syndicale Rouge se constituant montre bien la hiérarchie politique choisie :
« Toute lutte économique est une lutte politique, c’est-à-dire une lutte menée par toute une classe. Dans ces conditions, Si considérables que soient les couches ouvrières embrassées par la lutte, celle-ci ne peut être réellement révolutionnaire, elle ne peut être réalisée avec le maximum d’utilité pour la classe ouvrière dans son ensemble que si les syndicats révolutionnaires marchent la main dans la main, en union et en collaboration étroite, avec le Parti Communiste du pays.
La théorie et la pratique de la division de l’action de la classe ouvrière en deux moitiés autonomes est très pernicieuse, surtout dans le moment révolutionnaire actuel. Chaque action demande un maximum de concentration des forces, qui n’est possible qu’à la condition de la plus haute tension de toute l’énergie révolutionnaire de la classe ouvrière, c’est-à-dire de tous ses éléments communistes et révolutionnaires.
Des actions isolées du Parti Communiste et des syndicats révolutionnaires de classe sont d’avance vouées à l’insuccès et à la débâcle. C’est pourquoi l’unité d’action, une liaison organique entre les Partis Communistes et les syndicats ouvriers, constituent la condition préalable du succès dans la lutte contre le capitalisme. »
Désormais, la question de l’orientation à suivre dans le travail syndical allait devenir l’une des grandes actualités de l’Internationale Communiste et de son Exécutif.
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de l’Internationale Communiste