Le contexte précipita les choses, dans la mesure où les ultras du côté français considéraient qu’il suffirait de pousser le processus de répression jusqu’au bout pour avoir la victoire.
Le noyau dur de ces ultras étaient le « Groupe des Sept », avec notamment l’avocat Pierre Lagaillarde qui était président de l’Association Générale des Étudiants d’Alger, de l’agriculteur monarchiste et catholique Robert Martel surnommé « le chouan de la Mitidja », de trois poujadistes (le docteur Bernard Lefèvre, le restaurateur Roger Goutailler, le cafetier Joseph Ortiz).
L’initiative fut appuyée par le général Massu et cela aboutit au coup d’État militaire en Algérie menée par les généraux Raoul Salan, Edmond Jouhaud, Jean Gracieux, ainsi que l’amiral Auboyneau.
Fut formé un comité de salut public d’Alger appelant à la formation d’un gouvernement du même type, la figure de Charles de Gaulle étant également mise en avant, alors que l’Opération « Résurrection » instaurait un comité de salut public en Corse.
Le président René Coty appela alors Charles de Gaulle à former un gouvernement le 1er juin, et il obtint même dès le lendemain les pleins pouvoirs pour six mois.
Le coup d’État était parfait : de Gaulle fonda un nouveau régime, la cinquième république, approuvé à 80 % le 28 septembre 1958, la droite triomphant aux législatives de novembre, de Gaulle étant élu président de la république en décembre avec 77,5 % des voix, au suffrage indirect (80 000 électeurs, choisis parmi les élus).
C’était une formidable victoire de l’armée, aidée de la bourgeoisie financière et des monopoles.
En effet, depuis que Charles de Gaulle s’était fait mettre de côté politiquement en 1946, la France s’est caractérisée par une domination de la bourgeoisie industrielle mettant en place une logique de « démocratie chrétienne », acceptant ouvertement la présence historique de l’armée nord-américaine en France, l’intégration dans l’OTAN, le projet du traité de Rome marquant la naissance de l’Europe économique accompagnée d’une forte pénétration américaine liée au plan Marshall.
L’arrivée de de Gaulle au pouvoir en 1958 va marquer une rupture avec cette époque : la France va rompre avec l’OTAN, l’État va être centralisé, une ligne corporatiste va être mise en place ; la télévision avec l’ORTF devient une véritable agence d’information d’État, la politique artistique est totalement encadrée par le ministre d’Etat aux affaires culturelles André Malraux, etc.
Peugeot (1965) et Wendel (1967) deviennent des Sociétés anonymes, les banques lancent les SICAV afin de drainer l’épargne des particuliers, les banques se voient accorder de nouveaux droits (libre ouverture de nouveaux guichets, fin de la séparation entre banques de dépôts et banques d’affaires…).
Les principaux bénéficiaires sont aussi dans les monopoles de l’industrie : l’industrie nucléaire, les industries mécaniques, les industries électriques, l’industrie automobile, les industries aérospatiales, la construction navale.
Une convention État-sidérurgie sera signée en 1966 avec la chambre patronale de la sidérurgie, qui garantit le financement de la restructuration complète de l’industrie, avec même une délocalisation vers les zones portuaires.
La base nationale du capital français ainsi pour ainsi dire protégée, le capital financier peut se renforcer grâce à des industries « à haute plus-value », une poignée d’entreprises bénéficiant même de 67% de l’aide au développement (Thomson, C.G.E., Rhône-Poulenc, Pechiney-Ugine-Kuhlmann, Creusot-Loire, C.E.M., Schlumberger, Air Liquide).