La ligne des « barricades » reflète d’autant plus un volontarisme suiviste que, entre-temps et parallèlement, le Parti Communiste n’arrive pas à mobiliser à partir de lui-même, ni pour le premier mai, ni pour célébrer la Commune de Paris au mur des fédérés, ni pour l’initiative anti-guerre du premier août, alors que ce sont les dates clefs pour lesquelles une grande énergie est investie.
Le premier mai 1930, l’Humanité est ainsi saisie, même si 80 000 exemplaires sont tout de même diffusés, les rassemblements ne dépassent pas l’influence immédiate du Parti, tout comme le 25 mai 1930 pour la Commune au mur des fédérés, avec plusieurs dizaines de milliers subissant une attaque de la police.
Craignant encore un manque de succès, le Comité Central du Parti Communiste produisit alors juste avant le premier août 1930 un document réalisé avec l’Internationale Communiste lançant un grand avertissement.
Hors de question de continuer à accepter une démarche rentre-dedans dans le style français, cette fois il faut œuvrer de manière multiple et constructive. Il est ainsi dit :
« L’Internationale et le Parti communiste ont attiré justement l’attention des masses travailleuses sur l’aggravation du danger de guerre : guerre entre les États impérialistes en proie aux difficultés économiques, guerre surtout du monde capitaliste contre l’État soviétique où se réalise le socialisme.
L’Internationale Communiste et le Parti considèrent comme une tâche constante et primordiale, plus que jamais actuelle, la lutte effective contre le danger de guerre, notamment par l’organisation de puissantes démonstrations prolétariennes à l’usine et dans la rue, et par la préparation méthodique de la grève politique de masse, en liaison avec la défense des revendications partielles des travailleurs.
Le Comité Central sur proposition du bureau politique estime qu’il ne convient pas de maintenir, pour le 1er Août 1930, le mot d’ordre de « grève politique de masse ». La « GRÈVE POLITIQUE DE MASSE » n’est pas un jeu auquel on se livre PÉRIODIQUEMENT et pour une journée (…).
La réalisation de la « GRÈVE POLITIQUE DE MASSE » exige un effort considérable du Parti pour le RASSEMBLEMENT ET L’ORGANISATION PRÉALABLES des prolétaires en parant des revendications les plus minimes de la classe ouvrière (augmentation de salaires, assurances sociales réelles aux frais des exploiteurs et de l’État et gérées seulement par les ouvriers, journée de sept heures, etc.), pour aboutir à la lutte pour les objectifs politiques et fondamentaux du prolétariat.
Or, la journée du 1er Août 1929, première grande manifestation révolutionnaire internationale contre la guerre impérialiste et les journées des 6 mars et 1er mai 1930 ont souligné la faiblesse extrême d’organisation des masses et de leur guide, le Parti communiste.
Le 1er Août 1929 a mobilisé les masses dans une journée de grève politique. Le 1er Août 1930 doit connaître d’autres formes de lutte : démonstrations de rues, manifestations à l’intérieur et à la sortie des usines.
Le 1er Août 1930 doit se dérouler sous le signe de l’ORGANISATION DES MASSES, du renforcement du Parti communiste et des organisations révolutionnaires du prolétariat (…), pour la réalisation d’un véritable Front unique groupant les ouvriers communistes et socialistes, [et les syndiqués] unitaires, confédérés et inorganisés, dans les comités de lutte, élus démocratiquement par la masse et n’agissant que sous le contrôle permanent de la masse (…).
Le Comité Central, en indiquant pour le 1er Août d’autres formes de lutte que la grève dans tout le pays, condamne à l’avance les interprétations erronées et dangereuses des adversaires opportunistes et « gauchistes » de la ligne juste du Parti.
Il souligne contre les opportunistes que le retrait, pour le 1er Août, du mot d’ordre de GRÈVE POLITIQUE, ne signifie en aucune façon une atténuation de la lutte contre la guerre impérialiste, dont le danger croît, ainsi qu’en témoignent les événements quotidiens, non plus qu’un abandon de la « grève politique de masses ».
Il souligne contre les « gauchistes » que ce retrait ne signifie pas un recul vers des « formes périmées » de lutte, mais le souci de procéder à un rassemblement et à l’organisation de plus larges masses. »
Ce fut cependant encore un échec, relatif puisqu’il y avait plusieurs dizaines de milliers de personnes, mais c’est toujours l’environnement direct du Parti, alors qu’il y eut encore des arrestations préventives, comme celles du rédacteur en chef de l’Humanité Florimond Bonte et de son gérant Marcel Mérel-Vevoz, du secrétaire de la Fédération unitaire de l’Alimentation Maurice Simonin, du secrétaire de la Fédération des marins de la CGT Unitaire Auguste Dumay.
Il en alla de même pour le premier mai 1931, où même plus de mille personnes furent arrêtés à la suite d’un meeting au Cirque d’hiver, ou bien encore avec les 40 000 manifestants fin mai 1931 pour le rassemblement traditionnel pour célébrer la Commune de Paris.
Au lendemain du premier août 1931, c’est toujours le même terrible constat très dur qui s’impose : la mobilisation n’a pas dépassé le cadre habituel du Parti.
Et lorsque les Jeunesses Communistes essaient de manifester pour la Journée internationale de la jeunesse le 6 septembre 1931, la répression est immédiate et débouche sur une centaine d’arrestations.
Il y a même, au sens strict, régression ; il y a ainsi 3 300 cellules du Parti en 1927, mais seulement 1 350 en 1931, alors que le nombre de cellules d’entreprises passe lui-même de 900 à 300.
Le Parti Communiste est passé de pratiquement 54 000 membres en 1927 à 38 500 en 1929, puis un peu plus de 30 000 en 1931. L’Humanité a perdu des dizaines de milliers de lecteurs, tombant à 140 000, dont 27 000 à Paris.
C’est que le Parti Communiste a un grand problème et il est interne.
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