« Mao, dans son Analyse des classes de la société chinoise (1926), oppose la lutte de la révolution à celle de la contre-révolution, avec la « bannière rouge de la révolution, levée par la IIIe Internationale, afin de rallier autour d’elle toutes les classes opprimées du monde; l’autre bannière est le drapeau blanc de la contre-révolution, et c’est la Société des Nations qui l’a levé afin de rallier autour d’elle toutes les forces contre-révolutionnaires du monde ».
Mao distingue les classes de la société chinoise en fonction de comment elles se décideraient, pour l’avancée de la révolution, entre la bannière rouge et la bannière blanche. Cela ne lui suffisait pas d’analyser la situation économique des différentes classes de la société chinoise. Faisait partie de son analyse également la prise de position des différentes classes par rapport à la révolution.
Il n’y aura pas de rôle dirigeant des marxistes-léninistes dans les futurs luttes de classes si l’avant-garde ne tient pas elle-même la bannière rouge de l’internationalisme prolétarien et si l’avant-garde ne répond pas elle-même à la question de savoir comment sera érigée la dictature du prolétariat, comment le pouvoir politique du prolétariat doit être exigé, comment le pouvoir de la bourgeoisie doit être brisé, si elle n’est pas prête avec une pratique à y répondre.
L’analyse de classe dont nous avons besoin n’est pas à faire sans pratique révolutionnaire, sans initiative révolutionnaire.
Les « revendications révolutionnaires de transition » que les organisations prolétaires ont posé ici et là, comme la lutte contre l’intensification de l’exploitation, la réduction du temps de travail, contre le gaspillage de la richesse sociale, pour le même salaire entre hommes, femmes et travailleurs immigrés, contre les cadences infernales, etc. – ces revendications de transition ne sont rien que de l’économisme syndicaliste, tant que n’est pas répondu en même temps à la question de savoir comment briser la pression politique, militaire et propagandiste qui se mettront de manière agressive au travers de la route de ces revendications si elles soulèvent des luttes de classe massives.
Mais après – si on en reste à elles – ce n’est plus que de la merde économiste, parce que pour elles cela ne vaut pas le coup de prendre en charge le combat révolutionnaire et de mener à la victoire, parce que « vaincre suppose que l’on accepte le principe selon lequel la vie n’est pas le bien suprême pour les révolutionnaires » (Debray).
On peut intervenir de manière syndicaliste avec ces revendications – mais « la politique trade-unioniste de la classe ouvrière est la politique bourgeoise de la classe ouvrière » (Lénine). Ce n’est pas une méthode d’intervention révolutionnaire. »
Fraction Armée Rouge: Sur la conception de la guérilla urbaine, 1972
Le maoïsme est apparu dans les années 1960 avec deux exigences ayant la même substance. Il fallait faire avancer la révolution en mobilisant les masses, cependant pour que cela puisse être fait, il fallait que celles-ci décrochent des institutions, tant de l’État que de l’économie capitaliste.
Sans cela, rien n’était possible. On pouvait bien sûr s’abstenir de vouloir la révolution et éventuellement revendiquer, gagner quelques acquis – mais aucunement, donc, changer les choses en profondeur. Le Parti Communiste Français s’est accommodé de cela, ainsi que les partis soutenant l’Union Soviétique en général. Mais pas les maoïstes.
Les exigences des maoïstes : l’initiative révolutionnaire
Les maoïstes ont exigé l’initiative révolutionnaire, et ce dans tous les domaines. La première organisation maoïste française, l’Union des Jeunesses Communistes (marxistes-léninistes), souligne l’importance de cette question en affirmant :
« Il faut constamment avoir à l’esprit les tâches générales que doit être capable de remplir un véritable Parti marxiste-léniniste ; le parti marxiste-léniniste doit :
1° être présent dans toutes les classes et couches du peuple, en prenant la direction de toutes les forces populaires qui luttent contre la réaction ;
2° organiser toutes les formes de lutte des classes (politique, économique, théorique, idéologique, armée…) »
UJC (ml) : Édifions en France un Parti Communiste de l’époque de la révolution culturelle (1967)
Il y a eu un style maoïste propre à chaque pays, sous la forme d’une manière d’exister au quotidien, avec des valeurs à part, une démarche de rupture. Ce sont les « naxalites » en Inde, les « brigadistes » en Italie, les « maos spontex » en France, les « Weathermen » aux États-Unis, les « prolétariens » au Bangladesh, etc.
En France, le film La Chinoise de Jean-Luc Godard retranscrit de manière très efficace le style maoïste français. On y voit aussi ses limites : l’origine étudiante de beaucoup de ses membres, avec également un certain volontarisme, une approche formelle des choses, etc.
C’est la raison pour laquelle les « maos spontex » français ont attiré l’attention du monde entier après mai 1968, pour toutefois s’effondrer dès le début des années 1970 alors que la vague maoïste s’élançait justement alors dans toute une série de pays.
L’économisme syndicaliste des faux maoïstes
Au milieu des années 1990, la revue trimestrielle Front Social était publiée de manière relativement confidentielle, avec quelques centaines d’exemplaires. Cependant, elle a joué un rôle significatif en reconstruisant le maoïsme français et en en corrigeant les défauts.
La revue avait été fondée par un petit cercle de gens issus de la Gauche Prolétarienne, du mouvement autonome de la fin des années 1970, ainsi que de jeunes prônant la rupture et valorisant l’expérience révolutionnaire des années 1980 tels que les autonomes allemands.
Cela a changé la donne, car les vieux restes du maoïsme français entrés en totale décadence se cantonnaient dans une ligne de « CGT lutte de classes » absolument incompatible pourtant avec ce qu’a été le maoïsme.
Avoir changé la donne ne signifie pas qu’il y ait victoire complète. Ainsi, le développement de Front Social, son saut qualitatif aboutit au PCF (MLM), mais de manière entièrement séparée des restes décadents du maoïsme français.
Pour cette raison, la ligne « CGT lutte de classe » se retrouve encore aujourd’hui dans toute une série de groupes et structures se revendiquant en France de Mao Zedong ou bien du maoïsme.
C’est absurde. Comment peut-on se dire maoïste et soutenir la CGT, alors que celle-ci été le principal obstacle à mai 1968 ? Elle a été l’outil du PCF considéré par les maoïstes comme réactionnaire ! Elle fait partie, de manière complète, des institutions économiques capitalistes et étatiques !
Le suivisme et les prétentions des faux maoïstes
Les faux maoïstes ne vivent que de l’actualité de la CGT, des manifestations et des « mouvements sociaux », quand ils ne cherchent pas à parasiter tel ou tel phénomène à la mode, que ce soit en France ou à l’étranger.
C’est la raison pour laquelle on a l’absurdité de leur célébration d’un phénomène comme les gilets jaunes, alors que s’il y a une chose éloignée des gardes rouges, c’est bien eux.
Tout cela sert la prétention par les « faux maoïstes » de former une ligne de masses ayant du succès. Or, c’est vain. Les faux maoïstes ne touchent que superficiellement les choses et les gens. Et si en de rares occasions, ils parviennent à faire se bouger des gens, cela ne donne pas du mao spontex, mais du spontex toujours moins mao.
C’est qu’on n’affronte pas à coups de volontarisme le 24 heures sur 24 du capitalisme aliénant et exploitant le prolétariat métropolitain.
Le pillage intellectuel superficiel
Une autre caractéristique des faux maoïstes est le parasitage du PCF (MLM). Profitant du fait que nous refusons de céder aux sirènes du légalisme et des réseaux sociaux, du syndicalisme et du suivisme aveugle de tout ce qui bouge, les groupes et structures faux maoïstes se prétendent la faction la plus efficace sur le terrain, tout en jouant d’ambiguïtés dans leurs expressions idéologiques.
En clair, les faux maoïstes font semblant d’assumer ce que nous assumons, tout en disant que nous ne faisons rien, voire que nous n’existons pas. C’est absurde, mais une telle démarche permet de toucher les petits-bourgeois radicalisés cherchant à jouer avec le feu. Cela ne va pas sans incohérences, bien entendu.
Tel groupe se revendique de la guerre populaire. Cela implique une compréhension de la violence autre que symbolique. Mais il ne connaît ni la RAF, ni les Brigades Rouges, ni le PCE(r), ni les CCC. C’est totalement incohérent.
D’ailleurs, pour donner un exemple significatif, nous avions eu une discussion avec le Parti Communiste Maoïste d’Italie, qui existe depuis les années 1970 à travers différents noms. Nous leur avons dit : bon, c’est bien beau, mais, et les Brigades Rouges ? La réponse fut la stupeur de leur part et depuis une haine farouche à notre égard.
Tel autre groupe dénonce le PCF (MLM) comme une petite secte uniquement composée de personnes juives. Cela ne l’empêche pas de pratiquer, lui aussi, la démarche de la copie conforme dans l’apparence. Citons un de ses documents, datant du 1er septembre 2019. On y trouve des concepts empruntés au PCF (MLM) : écocide, biosphère, démocratie populaire, ainsi que le principe de la vie comme richesse la plus précieuse de la nature.
« Les régimes socialistes n’ont pas toujours su poser avec discernement la question de l’écologie, prisonniers qu’ils étaient entre des clés de compréhension primitives des écosystèmes et d’un impératif de tenir le rythme imposé par les agresseurs capitalistes.
Cela n’enlève en rien le fait qu’ils ont été les premiers à poser la question de la biosphère et d’un développement harmonieux de l’économie par rapport à la nature. Celle-ci n’était plus considérée comme une marchandise, mais comme une source de richesses, dont la vie était la plus précieuse.
En dépit des failles qu’on put connaître ces régimes pionniers ils forment la « voie étroite vers la survie ». Une véritable économie de guerre contre l’écocide et la dévastation de l’environnement.
Soyons unitaires sur cette question en dépit de nos divergences :
Il existe une quantité de questions sur la production industrielle, alimentaire, sur les perspectives pour l’ensemble de l’espèce humaine et de la planète. Les perceptions diffèrent en fonction des individus, des groupes politiques et sociaux, des idéologies. Nous ne pensons pas que notre organisation doit, de manière autoritaire, imposer un point de vue sur cette question, qui relève de la démocratie populaire. »
On ne peut qu’être estomaqué d’un tel pillage. Mais telle est la démarche arrogante de vagues régulières de gens voyant la lumière, mais n’assumant pas tel ou tel aspect. Cela produit des démarches prétentieuses s’imaginant pouvoir contourner le problème et vaincre, en mettant sous le tapis ce qui « dérange ».
L’incapacité à assumer Staline et le matérialisme dialectique
Le fond du problème des faux maoïstes est qu’ils utilisent Mao Zedong comme prétexte à un syndicalisme révolutionnaire de type économiste ou bien à un spontanéisme de type anarchiste.
Les faux maoïstes, c’est un Mao Zedong imaginaire, sans Staline, sans Lénine, sans Engels, sans Marx. C’est un fantasme emprunté au folklore des années 1960. C’est le vide culturel et idéologique, le comble quand on pense que le maoïsme, c’est la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne.
Citons ici une critique faite à notre encontre en janvier 2012, témoignant de l’incompréhension complète de l’idéologie de l’URSS de Staline et de la Chine populaire de Mao Zedong :
« Le p « c » « mlm » prétend détenir la vérité dans tous les domaines, être le parti de la science.
Il avance la thèse de l’inéluctable marche vers le communisme de l’Univers et d’autres déclarations délirantes du même acabit. »
Comment peut-on dire qu’on est maoïste et balayer d’un revers hautain, pétri par l’arrogance, le noyau même du matérialisme dialectique, du maoïsme ?
Un opportunisme régressif
Les faux maoïstes sont un phénomène consistant en un opportunisme régressif. C’est soit un néo-anarchisme, soit un néo-syndicalisme révolutionnaire. C’est soit de l’aventurisme sans lendemain, soit de l’économisme ennuyeux et sans valeur.
Car on n’avance pas en faisant du suivisme à tout ce qui bouge et en cherchant, comme les trotskistes, à se présenter comme la faction la plus radicale. On n’avance pas non plus en cherchant à tout prix une reconnaissance par les réseaux sociaux, les médias ou bien par des regroupements révolutionnaires étrangers plus ou moins importants.
Tel groupe a, par exemple, changé maintes fois de nom, pour chercher successivement une reconnaissance par le Mouvement Révolutionnaire Internationaliste regroupant différentes structures maoïstes, puis les maoïstes du Pérou, ensuite du Népal, enfin de Turquie et d’Italie. Cela fait beaucoup.
Tels autres groupes cherchent une reconnaissance par le MLPD, un équivalent « marxiste-léniniste » de Lutte Ouvrière en Allemagne. C’est là chercher à contourner les questions de fond.
Les caractéristiques du maoïsme authentique
Le maoïsme authentique produit des analyses matérialistes historiques de la société française. Il a une fidélité intellectuelle et culturelle aux classiques du communisme : MARX, ENGELS, LÉNINE, STALINE, MAO ZEDONG. Il assume l’intervention révolutionnaire en la calibrant en fonction de ces analyses.
Le maoïsme authentique est porté par des personnes assumant la rupture avec les valeurs du vieux monde et brûlant d’envie de transformer la réalité, par besoin existentiel d’affirmer le Communisme.
Le maoïsme authentique soutient que la matière éternelle va au Communisme, de par la nature dialectique de son mouvement.
Le maoïsme authentique affirme par conséquent l’optimisme révolutionnaire le plus résolu, forgé dans la certitude de la victoire !
Parti Communiste de France (Marxiste-Léniniste-Maoïste)
Septembre 2019