Les peintres-photographes naturalistes: Pascal Dagnan-Bouveret

Proche de Jules Bastien-Lepage, Pascal Dagnan-Bouveret (1852-1929) est également un peintre qui témoigne de comment le naturalisme se détache du réalisme, tout en en retrouvant le chemin par moments.

La peinture intitulée Un accident, de 1879, est ainsi réaliste. Le chat se couche sous le lit, l’attention des adultes est complète, pleine de gravité devant le médecin sûr de lui, bandant le jeune blessé qui a perdu du sang au point que son visage a blêmi.

L’adulte à droite, le père indubitablement, se sent coupable et sent le terrible poids de son impuissance par rapport au savoir du médecin, alors que le petit frère à ses côtés observe une scène qui l’impressionne.

Le portrait des différents objets, de la disposition de la salle, fait que l’œuvre est typique.

Un accident

Par contre, ce portrait de 1880 montrant son ami Gustave Courtois dans son atelier n’a par contre rien de typique, c’est pratiquement une allégorie symboliste se masquant derrière le masque d’une expérimentation naturaliste.

Bouderie (Gustave Courtois dans son atelier)

Le tableau intitulé Bénédiction des jeunes mariés a quant à lui une construction réaliste, mais la facture est résolument marquée par l’impressionnisme, avec une impression de clarté qui tente de compenser la faiblesse technique de l’oeuvre.

Bénédiction des jeunes mariés

De la même manière, Le Pardon en Bretagne de 1886, Les Bretonnes au Pardon de 1887 sont des constructions naturalistes, des photographies qui visent à expérimenter une situation pour la montrer, et Pascal Dagnan-Bouveret a pris justement des photographies pour ensuite en profiter lors de son travail en atelier.

Il n’y a pas d’âme, la dignité du réel est comme absente, absorbée par le pittoresque.

Le Pardon en Bretagne
Les Bretonnes au Pardon

Le Pardon en Bretagne est issu d’ailleurs d’un travail photographique en amont. Pascal Dagnan-Bouveret a pris des photographies à Rumengol en 1886, puis a ensuite mis des paysans en scène à Ormoy en Franche-Comté en 1887, afin de visualiser l’assemblée peinte. 

Ici, on peut voir le peintre dessinant des travaux préparatoires pour le tableau en question.

De même, les Chevaux à l’abreuvoir, de 1884, sont issus de photographies préliminaires et il s’agit nullement de chevaux de trait, la mise en scène étant ici totale.

Chevaux à l’abreuvoir

Il y a davantage d’âme dans Une noce chez le photographe, qui date de la même année que la peinture Un accident ; on notera que la scène se déroule à Vesoul. On pourrait presque dire qu’il s’agit d’une œuvre à mi-chemin du réalisme et du naturalisme.

Le fait que la petite fille regarde le peintre, comme une mise en abîme par rapport au photographe avec les photographiés, rappelle toutefois l’orientation résolument « photographique » des peintres commençant à utiliser les clichés photographiques afin de prévoir leurs peintures.

La présence d’un grand miroir, avec un reflet de quelques personnages, témoigne également de ce jeu de reflet qui, incontestablement, tend davantage au stéréotype qu’au portrait typique.

Une noce chez le photographe

Les conscrits, de 1889, est également un excellent exemple d’une telle tendance au stéréotype, de déformation de la réalité de manière subjectiviste.

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