Paul Boccara défend ni plus ni moins que les thèses d’Eugen Varga ; toutes ses positions suintent le vargisme par tous les pores. Lui-même pense par contre avoir une pensée originale, ne comprenant rien à son utilisation historique comme vecteur du révisionnisme.
Il prétend même avoir développé l’analyse de Karl Marx. C’est là une constante chez Paul Boccara : Karl Marx serait daté. Son œuvre serait théorique qui plus est ; seule une analyse actualisée des tendances du capitalisme – c’est d’ailleurs la thèse d’Eugen Varga – permet de saisir le capitalisme dans ce qu’il est réellement.
Et Paul Boccara aurait même compris ce qui manquait chez Karl Marx :
« Nous prétendons que la théorie de la suraccumulation – dévalorisation du capital, ébauchée seulement en tant que telle dans le livre III du « Capital », permet l’intégration systématique de tout l’apport du « Capital » de Max pour se rendre de la réalité capitaliste dans ses aspects phénoménaux comme son évolution historique toute entière.
Elle permet de pousser plus avant les analyses inachevées des livres II et III du « Capital » et de fournir la solution des oppositions apparentes que certains penseurs avaient pu suggérer entre elles.
La théorie économique marxiste du capitalisme débouche, à notre avis, sur la théorie de la suraccumulation – dévalorisation. »
Karl Marx débouche donc sur Paul Boccara ! Pourquoi cela ? En quoi consiste cette théorie de la suraccumulation – dévalorisation ?
En juin 1975, les Editions Sociales liées au PCF publient Le capital ; c’est bien évidemment Paul Boccara qui en rédigea la longue introduction.
Les dernières pages exposent bien entendu la théorie du Capitalisme Monopoliste d’État et de la suraccumulation – dévalorisation, Paul Boccara se prétendant donc le successeur de Karl Marx (au début en passant par Lénine, puis à partir de 1989 directement depuis Karl Marx).
Voici ce que cela donne :
« C’est à partir de la théorie de la suraccumulation exposée par Marx dans Le Capital que nous expliquons aujourd’hui le Capitalisme Monopoliste d’État, ainsi que sa crise, phase cruciale ouverte depuis quelques années de la crise générale du capitalisme (…).
Suraccumulation signifie excès d’accumulation, ou capital accumulé en quantité excédentaire, car la plus-value, malgré son accroissement, est devenue insuffisante pour rémunérer avec le même taux de profit le capital total et lui permettre de fonctionner normalement.
C’est, en effet, dans la section du livre III du Capital intitulée « Loi de la tendance à la baisse du taux de profit » que la suraccumulation est analysée. »
Or, le problème est très simple : l’hypothèse de Karl Marx d’une surproduction de capital n’est pas présentée par ce dernier comme une crise de surproduction absolue.
Karl Marx considère qu’une crise de surproduction absolue est à la fois une crise de surproduction de capital et une crise de surproduction de marchandises. Ce second aspect est totalement nié par Paul Boccara.
Qui plus est, il va modifier l’approche de Karl Marx. Dans son hypothèse d’une suraccumulation de capital, – que Paul Boccara transforme en fait -, Karl Marx parle de destruction du capital en trop, et non pas comme Paul Boccara d’une « dévalorisation »
Chez Karl Marx en effet, la crise de surproduction du capital allie mise en sommeil du capital en trop voire disparition par l’écrasement par la concurrence (une entreprise fait faillite et son usine reste à l’abandon, par exemple).
Paul Boccara nie cette concurrence, ce capitalisme impliquant toujours concurrence même s’il existe une superstructure impérialiste, et bascule dans la thèse d’Euge Varga, comme quoi le capitalisme pense et s’allie à l’État.
On a alors l’État qui assume une partie de la production pour… empêcher que des capitalistes le fassent et que des profits y soient faits. L’objectif est ici selon Paul Boccara de maintenir les profits des monopoles en empêchant le capital non monopoliste de trouver une place dans l’économie.
Il formule cela ainsi :
« Le relèvement du taux de profit des entreprises monopolistes est permis, dans la limite du mouvement du taux moyen, par une certaine réduction de la valorisation des capitaux non monopolistes (…).
Si des fonds publics sont donnés en subvention, ou prêtés sans intérêt ou à de faibles taux, une partie du capital en fonction ne réclame plus une mise en valeur aussi importante que celle des capitaux privés de l’entreprise (monopoliste) bénéficiaire, dont le taux de profit peut être relevé d’autant. »
Pour résumer : il y a suraccumulation de capital et le capital monopoliste, pour préserver ses profits et empêcher de se voir concurrencer, appuie l’existence d’un grand secteur d’État, pour paralyser une partie de l’économie et y empêcher des investissements capitalistes.