Comme nous traitons de la question de savoir comment le révisionnisme chinois a rompu avec le principe maoïste de la divisibilité de la matière, nous allons porter un regard approfondi quant à la conception de la science chez Deng Xiaoping.
C’est cette conception qui a été le principal outil pour promouvoir et faire triompher le révisionnisme. Cette arme idéologique réactionnaire doit être comprise, de sorte de ne pas arriver au même révisionnisme qui consiste à voir le marxisme comme une « méthode ».
Deng Xiaoping ne doit pas être considéré comme un « individu » qui a trahi, mais comme le porteur d’une vision du monde toute entière. Après la mort de Mao Zedong, il avait une façon bourgeoise de « comprendre » le maoïsme, afin de réorganiser l’Etat suivant les besoins de la bourgeoisie.
Cette voie bourgeoise consiste principalement en une compréhension particulière de la science, nous allons voir de quelles positions il s’agissait … ou il s’agit, vu qu’il y a encore des « maoïstes » qui sont en fait des dengistes cachés.
La thèse de la neutralité de la recherche et les décisions d’en haut
Selon le matérialisme dialectique, la pensée est le reflet du
mouvement de la matière, les communistes luttent pour que cette
pensée soit conforme à la réalité.
Une fois le mouvement
éternel de la matière rejeté, il n’y a pas de place pour une telle
conception. Il n’y aurait pas de pensée, mais seulement une bataille
et une construction. Le marxisme serait une « méthode »
et de ce fait, ce qui est nécessaire n’est pas un cadre
révolutionnaire à chaque niveau, mais un « expert ».
C’est pourquoi Deng Xiaoping pourrait promouvoir le socialisme « par en haut », comme quand il dit:
« Il convient de sélectionner quelques milliers de sujets d’élite dans les milieux scientifiques et techniques, pour lesquels on créera les conditions nécessaires afin qu’ils puissent se consacrer entièrement à leurs travaux de recherche. »
Respecter les connaissances et les hommes de talent, 14 mai 1977
Cette approche voit la « science » comme neutre dans son contenu et son développement. Dans un autre document, Deng Xiaoping dit :
« Que l’on fasse du travail manuel ou intellectuel, on est un travailleur dans la société socialiste (…).
En déformant la notion de la division du travail – manuel et intellectuel – existant aujourd’hui dans notre société, pour la présenter comme un antagonisme de classes, la bande des Quatre cherchait en fait à attaquer et à persécuter les intellectuels, à miner l’alliance des ouvriers et des paysans avec les intellectuels, à détruire les forces productives sociales et à saper notre révolution et notre édification socialistes.
La science et la technologie sont une partie des forces productives. »
Discours à la conférence nationale sur les sciences, 18 mars 1978
Deng Xiaoping contre la GRCP
La Grande Révolution Culturelle Prolétarienne (GRCP) affirmait exactement le contraire. Ce n’était pas seulement une tentative de bloquer une restauration réactionnaire ; la GRCP était un moyen de progresser dans les domaines du matérialisme dialectique.
Dans la GRCP, la science et la technologie étaient considérées comme une manière d’approcher la réalité, et de cette façon elles ne sont pas des « forces productives », mais des choix idéologiques, qui reflètent un caractère de classe. Les communes populaires n’ont rien à voir avec la Chine capitaliste des années 2000.
Deng Xiaoping était bien conscient de cela, comme il était le principal ennemi de la GRCP. Mais s’il a réussi à prendre la tête de la Chine après la mort de Mao, c’est parce qu’il a réussi à prendre un aspect du maoïsme – le développement du pays – mais pour le transformer dans le sens d’un développement pragmatique.
C’est pourquoi le révisionnisme pouvait réussir: il est apparu comme une amélioration de la situation, la réorganisation apparente de l’économie, mais en fait pour la transformer. Voici comment Deng Xiaoping explique son point de vue:
« La « révolution culturelle » a certainement été une grave erreur, mais notre Parti a brisé les cliques contre-révolutionnaires de Lin Piao et des Quatre, et mis fin à cette « révolution culturelle », ce qui nous a permis d’arriver où nous en sommes (…).
Quand nous disons « rétablir le cours normal des choses », nous entendons justement réparer les ravages causés par Lin Piao et les Quatre, critiquer les erreurs commises par le camarade Mao Zedong dans les dernières années de sa vie, et ramener toutes les activités dans la juste voie de la pensée Mao Zedong. »
(Entretien du 25 octobre 1980 avec des camarades responsables du Comité central)
Deng Xiaoping à propos de la science et de la production
L’astuce tactique de Deng Xiaoping était ainsi d’assimiler la science et de la production. C’est très proche du révisionnisme soviétique: comme les forces productives croissantes sont la preuve du développement du socialisme, alors tout ce qui aide est « socialiste ».
Ce qui compte n’est pas le choix de comment et de savoir ce qui doit être produit, mais la production en elle-même. Il s’agit d’une conception bourgeoise mécanique, visant seulement à satisfaire le besoin du capital à se développer.
Voici comment Deng Xiaoping explique cela :
« Il faut comprendre que la science et la technique constituent une force productive. La bande des Quatre a fait beaucoup de tapage autour de cette question, inversant la vérité et jetant la confusion dans les esprits.
Le marxisme a toujours considéré que la science et la technique font partie des forces productives. Il y a un peu plus d’un siècle déjà, Marx avait dit que l’essor de la production mécanisée impliquait l’application consciente des sciences de la nature. Et d’ajouter que « les forces productives comprennent aussi la science. »
Le progrès de la science et de la technique modernes resserre chaque jour davantage les liens entre la science et la production. Le rôle considérable de la science et de la technique en tant que forces productives s’affirme avec toujours plus d’évidence. »
Discours à la conférence nationale sur les sciences, 18 mars 1978
La conception de Deng Xiaoping n’a servi que le capital.