Katsushika Hokusai (1760-1849) est le titan de l’art national japonais émergeant dans la période de domination du clan Tokugawa, dans une société patriarcale-féodale figée dont la capitale est Edo. Il représente la charge esthétique des temps nouveaux, porté par la bourgeoisie commençant à s’arracher du carcan idéologique du régime.
Ce fut d’ailleurs tout un processus. Katsushika Hokusai est initialement partie prenante de l’idéologie dominante et ce n’est qu’à un âge avancé qu’il se produit un tournant. Initialement, sa formation relève de ce qui est alors encore hégémonique, avec les courtisanes, les acteurs, les estampes bon marché en général, etc.
Ce qui est ici intéressant, c’est qu’il connaît plusieurs étapes, utilisant à chaque fois un nouveau pseudonyme, avec des ruptures claires ; il décide par exemple en 1785 de ne plus représenter d’acteurs. Au total, il aura utilisé plus d’une cinquantaine de pseudonymes.
Le tournant le plus marquant est la parution en 1814 d’un carnet de croquis, de 23 x 16 cm, appelé Hokusai Manga, avec dessins représentant le vie réelle, en monochrome, exprimant un effort de synthèse dans le cadre d’une vie entière de labeur au service de l’art du dessin.
Le succès au rendez-vous et l’effort fut prolongé : le carnet se vit ajouter une seconde et une troisième partie en 1815, une quatrième et une cinquième partie en 1816, une sixième, septième, huitième et neuvième partie en 1817, et enfin une dixième partie en 1819. La onzième et la douzième parties furent ajoutées en 1834. Trois volumes furent ensuite produits après la mort de Hokusai, le dernier étant considéré comme ne relevant pas vraiment de lui, bien qu’on puisse faire le choix de considérer qu’il y a bien des œuvres de lui en faisant partie, ou relevant au moins de sa perspective.
La dimension à la fois empiriste et encyclopédique saute bien entendu aux yeux ; on est ici dans une perspective, démocratique, matérialiste. Il y a bien des éléments surnaturels parfois, mais ils sont clairement alignés dans la perspective d’une étude populaire, de surnaturel tel qu’imaginé par le peuple.
L’oeuvre obtint une reconnaissance immense, notamment à l’international ; l’oeuvre, déjà diffusée à Paris en 1856, est exposée par le Japon lui-même lors de l’Exposition universelle d’art et d’industrie de 1867.
Et ce qu’il est essentiel de noter, c’est la reconnaissance du peuple et de son travail qu’on y trouve. On a ici un peuple transformateur, les masses laborieuses.
Il y a une véritable attention portée à l’humanité dans ses activités relevant d’une notion méprisée alors par le régime, et dont la reconnaissance ne peut être faite alors que par une bourgeoisie émergente assumant la transformation de la matière. La présentation de la mine qu’on a ici est exemplaire d’une approche synthétique.
Les masses laborieuses sont saisies dans leur réalité, mais également et surtout de manière typique. On est ici ainsi dans le réalisme et l’oeuvre de Hokusai est d’un haut niveau synthétique, on voit bien sa capacité à porter son attention sur les travailleurs, ainsi que sa volonté de parvenir à le représenter sur le plan technique.
Hokusai témoigne de l’activité foisonnante des masses, mais également de la multiplicité des situations, des mouvements, des actions. Il trouve la perspective juste pour le présenter.
La présence du travail, porté par des masses transformatrices, dans l’oeuvre de Hokusai, reflète parfaitement sa nature historique, porteuse de réalisme et des temps nouveaux.
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