Auteur/autrice : IoULeeM0n

  • L’hindouisme, le bouddhisme et le jaïnisme comme religions thérapeutiques

    Ce qu’on appelle un « gourou » est en fait dans les religions indiennes le maître spirituel qui fait littéralement office de « psychonaute ». Il suit les états d’âme des gens, rassure, a suffisamment de finesse pour repérer les tensions, les anxiétés et les angoisses, les tournures de l’esprit et les affres psychologiques.

    C’est une personne avec donc beaucoup de bienveillance et capable d’une immense empathie, pour prendre sur lui les angoisses des autres.

    On a la même chose dans les confréries soufies dans l’Islam. La fonction de ces « maîtres » est grosso modo la même que celle des chamanes, dans la mesure où le guide spirituel doit sortir l’élève de sa torpeur, de sa faiblesse psychologique, pour le « renforcer ».

    Naturellement, on parle ici de la base de ces phénomènes : avec le temps, on a affaire à de l’escroquerie, de la manipulation mentale, etc.

    Il faut ici bien distinguer le moteur humain du processus et sa transformation en raison de la situation historique dans laquelle se trouve l’humanité. Le Bouddha historique, Jésus, Mahomet, Moïse, Orphée, Zarathoustra… étaient indéniablement des personnes profondément humaines, capables de lire les gens, de se tourner réellement vers eux.

    Les suites religieuses témoignent de comment on s’est éloigné de la sensibilité de ces personnages par définition attachants et terriblement marquants à leur époque.

    Nanak enseignant à des ascètes, entre 1828 et 1830

    Et il est flagrant que, de toutes façons, les religions ne se séparent jamais de la psychologie. Les catholicismes espagnol, mexicain, russe et grec, pour ne prendre que des exemples connus, font immédiatement penser à un certain état d’esprit, une certaine mentalité, une certaine approche des choses, au point que les sociétés des pays concernés sont incompréhensibles sans saisir le poids historique culturel de ces religions.

    C’est vrai, de toutes façons, pour chaque pays, même si de manière moins pittoresque, encore que ce soit discutable ; il suffit de penser à d’autres exemples : l’Angleterre anglicane, l’Italie catholique, l’Indonésie musulmane, le Japon shintoïste-bouddhiste.

    De fait, l’humanité ne se sort pas de cette dimension psychologique : en Europe au début du 21e siècle, il est beaucoup parlé de « développement personnel » : c’est en pratique un direct équivalent de la mission de ces « maîtres ».

    Et l’Église de scientologie, qui a un succès si grand aux États-Unis, n’est rien d’autre qu’une religion entièrement axée sur le développement personnel, le passage de « paliers » pour surmonter les angoisses formalisées en « peurs » contrôlables (comme l’illustrent par exemple les films After Earth avec Will Smith et Battlefield Earth avec John Travolta).

    Il est intéressant de voir d’ailleurs ici que la psychologie peut être l’aspect principal d’une religion, et la théologie seulement un arrière-plan. C’est en fait en réalité la norme dans la pratique et même dans la théorie bien souvent. Il suffit de se tourner vers l’Orient pour cela.

    Le Bouddha, dans le style gréco-bouddhiste typique de la région du Gandhara, actuellement au Pakistan, 1er ou 2e siècle de notre ère

    Si l’Islam a conjugué les deux aspects en ne sachant jamais quel aspect doit prévaloir, l’Inde et la Chine ont vu les religions assumer l’aspect psychologique comme principal.

    Le bouddhisme qui a prévalu en Chine vise avant tout au perfectionnement de l’être humain, tout comme les conceptions mystiques locales, prétendument dans le rapport au cosmos (avec l’astrologie, les « ondes » positives et négatives, etc.).

    La littérature concernant le mental, l’esprit, la psychologie est immense en Inde, dans l’hindouisme et le jaïnisme, mais également le bouddhisme qui y est né.

    Et il n’y a pas de conceptions dominantes par ailleurs, les écoles s’ajoutant les unes aux autres, les aspects psychologiques et les méthodes s’emboîtant les unes dans les autres comme autant d’écoles de psychologie.

    Si l’on choisit de vénérer Shiva ou Krishna, ce n’est pas tant pour des raisons théologiques, que pour une certaine lecture de la voie psychologique à suivre : tantrisme pour les uns, ascétisme pour les autres, et bien sûr le yoga.

    Représentation au 18e siècle de Kalki, la dernière forme de Vishnou sur terre intervenant pour faire cesser le Kali Yuga, le dernier âge, et faire recommencer les cycles cosmiques depuis de le départ

    C’est pour cela que l’ouvrage indien le plus connu est un résumé de la quête du bien-être mental, fournissant les clefs dans le contrôle de soi en général, la Bhagavat-Gita.

    Dans cet ouvrage, au-delà de la mentalité « combattante » enseignée dans la mesure où il faut agir avec distanciation envers toute chose, dans une indifférence au résultat qu’il soit positif ou négatif, on trouve en même temps la célébration de la dévotion, de la bhakti.

    L’être humain trouve ici la solution à toutes les peines en considérant l’univers comme ayant une seule source, Krishna, et en célébrant tous les aspects positifs de la vie. On lit dans la Gita :

    « Celui qui Me voit partout, et voit toutes choses en Moi, celui-là Je ne l’abandonne jamais, et jamais il ne M’abandonne.

    Celui qui, s’étant fixé dans l’unité, M’adore, Moi qui habite dans tous les êtres, ce yogin-là habite en Moi, quelle que soit sa manière de vivre. »

    La pratique du yoga plus directement a quant à elle principalement comme base le Yoga Sutra, recueil de phrases explicatives écrit par Patañjali il y a au moins 1500 ans. Cela donne des choses comme :

    « La maladie, l’abattement, le doute, le déséquilibre mental, la paresse, l’intempérance, l’erreur de jugement, le fait de ne pas réaliser ce qu’on a projeté ou de changer trop souvent de projet, tels sont les obstacles qui dispersent la conscience. »

    « La souffrance, l’angoisse, la nervosité, une respiration accélérée, sont les compagnons de cette dispersion mentale. »

    « L’arrêt des pensées automatiques s’obtient par une pratique intense dans un esprit de lâcher- prise. »

    « Le non-attachement est induit par un état de conscience totale qui libère du désir face au monde qui nous entoure. »

    « L’amitié, la compassion, la gaieté clarifient et apaisent le mental ; ce comportement doit s’exercer indifféremment dans le bonheur et le malheur, vis-à-vis de ce qui nous fait du bien comme vis-à-vis de ce qui nous fait mal. »

    Une autre sentence est très parlante quant au rôle du maître, du mentor :

    « On peut aussi stabiliser le mental en le mettant en relation avec un être qui connaît l’état sans désir. »

    Et si on y pense bien, les prêtres ont joué exactement le même rôle pendant des siècles. En ce qui concerne le yoga, plus spécifiquement, l’objectif est de parvenir à un état de conscience au-delà de la veille, du rêve et du sommeil profond. Le théologien adorant Shiva au 9e siècle Vasugupta présente la chose ainsi :

    « Il y a, cependant, un quatrième état de la conscience, appelé turiya. C’est la conscience du soi central ou Siva dans chaque individu. Ceci est un témoignage de la conscience auquel l’individu n’est normalement pas sensible.

    Le turiya est chidananda-conscience pure et béatitude. L’esprit de l’individu est conditionné par les énergies (Vasana) de vies antérieures.

    Lorsque les pratiques de yoga le libèrent alors qu’il est encore en vie, son esprit devient déconditionné, puis il atteint la conscience Turiya, et devient un Jivanmukta [yogi libéré des réincarnations]. »

    Un autre découpage appelle à monter en gamme suivant la logique suivante : d’abord, il y a le corps physique, ensuite le corps avec l’énergie vitale, puis le mental et le sensoriel. Suit le bloc de l’intellect et de l’intuition, et le point le plus haut : la félicité.

    Dans le bouddhisme, on a le but immédiat de la « pacification mentale », en mettant de côté le désir sensuel, la colère, la torpeur, l’agitation et le doute. Sur cette base, on peut atteindre une « vue profonde ».

    On est là dans le sentiment, pas dans le raisonnement ni l’épanouissement. On est dans une fonction thérapeutique seulement, car il s’agit de se couper des choses mauvaises, pas de se développer. Aucune religion ne permet de progresser, c’est toujours uniquement un contrepoison.

    La « vue profonde » bouddhiste n’est donc ni connaissance, ni tranquillité, ni joie, ni bien-être, ni détermination, ni énergie, ni plaisir, ni imperturbabilité, ni avertissement.

    Ce qu’on peut constater, avec la « vue profonde », ce sont uniquement les manques, les soucis, les problèmes, dont on doit se détacher en portant un regard qui se veut extérieur.

    Même ce regard extérieur est défini négativement. La « vue profonde » est une sorte de noyade contemplative dans la souffrance, l’aversion, le détachement, l’impermanence, l’impersonnalité, du renoncement, l’extinction, la disparition, le déclin, la transformation, l’absence de désir, la vacuité, l’inconditionné, un regard détaché sur les phénomènes, un regard qui traverserait la réalité, le détachement de la réalité, la contemplation elle-même…

    Cela a abouti au fait qu’en occident, il est courant de considérer que le bouddhisme n’est pas une religion. En réalité, c’est bien par sa dimension thérapeutique que le bouddhisme est une religion, et toutes les religions captivent à grande échelle à travers le monde justement par leur dimension « soignante », si on omet l’infime minorité qui s’intéresse réellement à la théologie.

    Il suffit de discuter avec des gens religieux pour voir le confort mental qu’ils trouvent dans la religion, à rebours de connaissances réellement solides sur le plan théologique.

    La religion s’intéresse avant tout aux maladies de l’esprit, c’est soigner l’angoisse de l’humanité sortie de la Nature qui leur permettent d’avoir un rôle historique.

    => Retour au dossier La naissance de la religion comme thérapie mentale

  • Le véritable sens de l’allégorie de la caverne

    L’allégorie de la caverne de Platon obtient désormais une interprétation fondamentalement différente. Ce n’est pas une allégorie de la vérité que les gens ne veulent pas voir, de toutes façons cela est évident pour qui est sérieux.

    C’est déjà, avec certitude, une allégorie de la constitution du monde par la matière façonnée par le dieu créateur sur la base d’idées, agencées de manière mathématique. Le monde matériel est une illusion, la réalité étant les modèles de ce qui existe : les idées, pures et parfaites.

    Et ces idées, par une logique mathématique, ont modelé la matière.

    Cependant, on obtient maintenant la clef de la psychologie de Platon, qui est fondamentalement religieux. Et cela éclaire tous les discours de son maître Socrate sur la nature de l’âme.

    Rappelons ce qui est dit dans l’allégorie de la caverne. On a des esclaves enchaînés, qui ne peuvent regarder que dans une seule direction. Quelqu’un se libère et comprend que tout est illusion de ce qu’ils voyaient : c’était simplement des ombres sur un mur, alors que des marionnettistes agitaient des figures devant un feu.

    Il y a ensuite la découverte, à l’extérieur de la caverne, du soleil, de la « vraie » réalité. Et au retour, celui qui s’est libéré ne s’y retrouve plus dans l’obscurité, et il ne parvient pas à convaincre ceux restés prisonnier, qui croient qu’il divague.

    L’allégorie de la caverne est en fait, en plus de la question du monde des idées qui va avec, une présentation de la thérapie psychonaute. On a en effet le manuel de celui qui s’est arraché à l’infra-monde, qui a découvert le monde réel et cherche à libérer ceux encore prisonniers.

    Il est dit que cela sera difficile, qu’il faut totalement se déconnecter du « faux » monde pour y arriver, etc. C’est littéralement un guide initiatique, une allégorie.

    Buste de Platon. Marbre, copie romaine d’un original grec du dernier quart du 4 siècle avant notre ère

    Voici, pour avoir un aperçu plus approfondi, le texte de Platon lui-même, qu’on retrouve au livre VII de La République, une œuvre idéaliste, ultra-réactionnaire, à prétention élitiste.

    « Maintenant, repris-je, pour avoir une idée de la conduite de l’homme par rapport à la science et à l’ignorance, figure-toi la situation que je vais te décrire.

    Imagine un antre souterrain, très ouvert dans toute sa profondeur du côté de la lumière du jour ; et dans cet antre des hommes retenus, depuis leur enfance, par des chaînes qui leur assujettissent tellement les jambes et le cou, qu’ils ne peuvent ni changer de place ni tourner la tête, et ne voient que ce qu’ils ont en face.

    La lumière leur vient d’un feu allumé à une certaine distance en haut derrière eux. Entre ce feu et les captifs s’élève un chemin, le long duquel imagine un petit mur semblable à ces cloisons que les charlatans mettent entre eux et les spectateurs, et au-dessus desquelles apparaissent les merveilles qu’ils montrent.

    – Je vois cela.

    – Figure-toi encore qu’il passe le long de ce mur, des hommes portant des objets de toute sorte qui paraissent ainsi au-dessus du mur, des figures d’hommes et d’animaux en bois ou en pierre, et de mille formes différentes ; et naturellement parmi ceux qui passent, les uns se parlent entre eux, d’autres ne disent rien.

    – Voilà un étrange tableau et d’étranges prisonniers.

    – Voilà pourtant ce que nous sommes. Et d’abord, crois-tu que dans cette situation ils verront autre chose d’eux-mêmes et de ceux qui sont à leurs côtés, que les ombres qui vont se retracer, à la lueur du feu, sur le côté de la caverne exposé à leurs regards ?

    – Non, puisqu’ils sont forcés de rester toute leur vie la tête immobile.

    – Et les objets qui passent derrière eux, de même aussi n’en verront-ils pas seulement l’ombre ?

    – Sans contredit.

    – Or, s’ils pouvaient converser ensemble, ne crois-tu pas qu’ils s’aviseraient de désigner comme les choses mêmes les ombres qu’ils voient passer ?

    – Nécessairement.

    – Et, si la prison avait un écho, toutes les fois qu’un des passants viendrait à parler, ne s’imagineraient-ils pas entendre parler l’ombre même qui passe sous leurs yeux ?

    Oui.

    – Enfin, ces captifs n’attribueront absolument de réalité qu’aux ombres.

    – Cela est inévitable.

    – Supposons maintenant qu’on les délivre de leurs chaînes et qu’on les guérisse de leur erreur : vois ce qui résulterait naturellement de la situation nouvelle où nous allons les placer.

    Qu’on détache un de ces captifs ; qu’on le force sur-le-champ de se lever, de tourner la tête, de marcher et de regarder du côté de la lumière : il ne pourra faire tout cela sans souffrir, et l’éblouissement l’empêchera de discerner les objets dont il voyait auparavant les ombres.

    Je te demande ce qu’il pourra dire, si quelqu’un vient lui déclarer que jusqu’alors il n’a vu que des fantômes ; qu’à présent plus près de la réalité, et tourné vers des objets plus réels, il voit plus juste ; si enfin, lui montrant chaque objet à mesure qu’il passe, on l’oblige, à force de questions, à dire ce que c’est ; ne penses-tu pas qu’il sera fort embarrassé, et que ce qu’il voyait auparavant lui paraîtra plus vrai que ce qu’on lui montre ?

    – Sans doute.

    Et si on le contraint de regarder le feu, sa vue n’en sera-t-elle pas blessée ? N’en détournera-t-il pas les regards pour les porter sur ces ombres qu’il considère sans effort ? Ne jugera-t-il pas que ces ombres sont réellement plus visibles que les objets qu’on lui montre ?

    – Assurément.

    – Si maintenant on l’arrache de sa caverne malgré lui, et qu’on le traîne, par le sentier rude et escarpé, jusqu’à la clarté du soleil, cette violence n’excitera-t-elle pas ses plaintes et sa colère ?

    Et lorsqu’il sera parvenu au grand jour, accablé de sa splendeur, pourra-t-il distinguer aucun des objets que nous appelons des êtres réels ?

    – Il ne le pourra pas d’abord.

    – Ce n’est que peu à peu que ses yeux pourront s’accoutumer à cette région supérieure.

    Ce qu’il discernera plus facilement, ce sera d’abord les ombres, puis les images des hommes et des autres objets qui se peignent sur la surface des eaux, ensuite les objets eux-mêmes.

    De là il portera ses regards vers le ciel, dont il soutiendra plus facilement la vue, quand il contemplera pendant la nuit la lune et les étoiles, qu’il ne pourrait le faire, pendant que le soleil éclaire l’horizon.

    – Je le crois.

    – A la fin il pourra, je pense, non-seulement voir le soleil dans les eaux et partout où son image se réfléchit, mais le contempler en lui-même à sa véritable place. Certainement.

    Après cela, se mettant à raisonner, il en viendra à conclure que c’est le soleil qui fait les saisons et les années, qui gouverne tout dans le monde visible, et qui est en quelque sorte le principe de tout ce que nos gens voyaient là-bas dans la caverne.

    Il est évident que c’est par tous ces degrés qu’il arrivera à cette conclusion.

    Se rappelant, alors sa première demeure et ce qu’on y appelait sagesse et ses compagnons de captivité, ne se trouvera-t-il pas heureux de son changement et ne plaindra-t-il pas les autres ?

    – Tout-à-fait.

    – Et s’il y avait là-bas des honneurs, des éloges, des récompenses publiques établies entre eux pour celui qui observe le mieux les ombres à leur passage, qui se rappelle le mieux en quel ordre elles ont coutume de précéder, de suivre ou de paraître ensemble, et qui par là est le plus habile à deviner leur apparition ; penses-tu que l’homme dont nous parlons fût encore bien jaloux de ces distinctions, et qu’il portât envie à ceux qui sont les plus honorés et les plus puissants dans ce souterrain ?

    Ou bien ne sera-t-il pas comme le héros d’Homère, et ne préfèrera-t-il pas mille fois n’être qu’un valet de charrue, au service d’un pauvre laboureur, et souffrir tout au monde plutôt que de revenir à sa première illusion et de vivre comme il vivait ?

    – Je ne doute pas qu’il ne soit disposé à tout souffrir plutôt que de vivre de la sorte.

    – Imagine encore que cet homme redescende dans la caverne et qu’il aille s’asseoir à son ancienne place; dans ce passage subit du grand jour à l’obscurité, ses yeux ne seront-ils pas comme aveuglés ?

    – Oui vraiment.

    – Et si tandis que sa vue est encore confuse, et avant que ses yeux se soient remis et accoutumés à l’obscurité, ce qui demande un temps assez long, il lui faut donner son avis sur ces ombres et entrer en dispute à ce sujet avec ses compagnons qui n’ont pas quitté leurs chaînes, n’apprêtera-t-il pas à rire à ses dépens ?

    Ne diront-ils pas que pour être monté là-haut, il a perdu la vue ; que ce n’est pas la peine d’essayer de sortir du lieu où ils sont, et que si quelqu’un s’avise de vouloir les en tirer et les conduire en haut, il faut le saisir et le tuer, s’il est possible.

    – Cela est fort probable.

    – Voilà précisément, cher Glaucon, l’image de notre condition.

    L’antre souterrain, c’est ce monde visible : le feu qui l’éclaire, c’est la lumière du soleil : ce captif qui monte à la région supérieure et la contemple, c’est l’âme qui s’élève dans l’espace intelligible. Voilà du moins quelle est ma pensée, puisque tu veux la savoir : Dieu sait si elle est vraie.

    Quant à moi, la chose me paraît telle que je vais dire.

    Aux dernières limites du monde intellectuel, est l’idée du bien qu’on aperçoit avec peine, mais qu’on ne peut apercevoir sans conclure qu’elle est la cause de tout ce qu’il y a de beau et de bon ; que dans le monde visible, elle produit la lumière et l’astre de qui elle vient directement ; que dans le monde invisible, c’est elle qui produit directement la vérité et l’intelligence ; qu’il faut enfin avoir les yeux sur cette idée pour se conduire avec sagesse dans la vie privée ou publique. »

    La caverne, c’est en fait l’infra-monde, et l’allégorie de la caverne présente comment on est surtout prisonnier de l’infra-monde. Il faut mettre cela en parallèle avec le discours de Socrate lorsqu’il accepte de boire le poison lorsqu’il est condamné, qu’il explique que le monde réel est ailleurs.

    On est déjà dans la tendance qui fait passer de l’esprit à l’âme, de la psychologie brute relative au traumatisme de la condition humaine à la psychologie raffinée d’une humanité déjà en place.

    Autrement dit, le chamanisme est lié à une humanité anxieuse, le monothéisme à une humanité angoissée.

    Ce que dit donc l’allégorie de la caverne, c’est que les esprits sont attirés vers l’infra-monde, vers la dépression, qu’en définitive ils restent liés à cela. Par conséquent, il faut supprimer le monde matériel, car c’est lui qui nous « plombe ».

    C’est étonnant, car on pourrait penser que c’est l’âme qui plombe l’humanité, dans la mesure où les choses vécues sont comprises. Sauf que c’est justement là le terrain de la naissance de la philosophie.

    Ce qu’on appelle philosophie, l’amour de la sagesse, c’est le travail de la conscience sur elle-même pour prendre les choses avec distance, pour mesurer ce qui se passe. C’est le pendant de la religion : la religion soigne, elle a une fonction thérapeutique, la philosophie a une démarche intellectuelle et éducative.

    Naturellement, les deux sont liés. Et ici, si on sait que le texte de Platon qu’on lit était un texte à vocation allégorique, dont le sens réel n’est pas montré, car relevant d’une initiation à côté de manière secrète… Alors on peut comprendre que ce qui est enseigné par Platon, c’est une manière pour arracher l’âme à la pesanteur menant à l’infra-monde.

    Il faut ici, pour conclure, rappeler que la Grèce n’était pas tant « européenne » qu’orientale, que Platon a toujours souligné que les réelles connaissances venaient de l’Orient, de l’Égypte notamment, mais également de l’Inde.

    Et en Inde justement, la fonction thérapeutique psychonaute des religions est ouvertement assumé. L’hindouisme et le bouddhisme prétendent soigner l’âme, stopper l’affrontement du ciel et de l’enfer, de la lumière et de l’obscurité, en insistant entièrement sur la question du mental.

    => Retour au dossier La naissance de la religion comme thérapie mentale

  • Orphée aux enfers de la psychologie

    L’être humain sortant de l’animalité a développé sa conscience, mais les découvertes qui vont avec ont été un immense traumatisme. Il n’y avait plus de distance abstraite avec les joies et les peines, le bonheur et la paix, la douleur et la mort.

    L’animal humain dénaturé était stupéfait, ne comprenant pas ce qui lui arrive, attribuant ce qu’il ressentait à des influences venant d’au-delà de lui-même.

    Et plus l’être humain développait de nouvelles activités, liées principalement à son action et non plus à celle de la Nature elle-même directement, plus il faisait des découvertes touchant son esprit.

    La chaleur d’un abri était une sensation nouvelle, formant un contentement nouveau, dans une situation vue comme une bénédiction.

    Une maladie inconnue, apparue en raison d’une action humaine nouvelle, provoquait une onde de choc, à l’échelle de la petite communauté humaine touchée.

    En travaillant la terre, on peut être contaminé par la bactérie donnant le tétanos, par exemple, et voici les symptômes tels que décrits par l’Organisation Mondiale de la Santé :

    • crampes au niveau des mâchoires ou incapacité à ouvrir la bouche ;
    • spasmes musculaires souvent dans le dos, l’abdomen et les extrémités ;
    • spasmes musculaires soudains et douloureux, souvent déclenchés par des bruits soudains ;
    • difficultés à avaler ;
    • convulsions ;
    • maux de tête ;
    • fièvre et transpiration ;
    • modification de la tension artérielle ou accélération du rythme cardiaque.

    Pour les êtres humains découvrant ces réactions physiques, sans avoir jamais vu rien de pareil ni les moyens de le conceptualiser, cela ne pouvait être qu’une malédiction.

    Ainsi, ce qui était bien était considéré comme un cadeau, comme une intervention extérieure bienveillante apportant quelque chose de « nouveau », de positif.

    Inversement, la dépression, la souffrance, l’effondrement physique en raison de la faim, des carences, du froid des maladies… étaient considérés comme le produit d’une agression des forces obscures, souterraines, malveillantes.

    Enluminure du Codex Gigas avec le diable, 13e siècle, Bohême

    Cela implique un fétichisme des forces bienveillantes et malveillantes, qu’il fallait toujours surveiller, combler, gâter, satisfaire. Le dualisme des premières sociétés humaines est la norme, c’est un sous-produit de la réalité dialectique de l’humanité nouvelle découvrant les aspects positifs et négatifs de sa nature dénaturée.

    Il n’y a pas de dieux dans les cieux sans qu’il n’y en ait dans l’infra-monde, dans le monde souterrain.

    Et ce processus de développement de la conscience a duré pendant des millénaires, des dizaines, des centaines de milliers d’années. Cela a été une expérience éprouvante, d’autant plus traumatisante qu’incomprise.

    La religion est née précisément comme réponse à ce traumatisme, comme thérapie. Les psychologues de l’époque étaient des mystiques, des chamanes, qui pensaient agir et interagir avec les forces divines et maléfiques, du ciel, lumineux, et de l’infra-monde, souterrain.

    Mais il ne s’agit pas seulement de maladies directement physiques, comme on peut le penser. Car l’humanité était en modification ininterrompue, elle se transformait. Mentalement, la première humanité est heurtée par ses découvertes, elle est bouleversée par son vécu.

    En ce sens, les chamanes agissaient comme des « psychonautes », plongeant la psyché, exactement comme un prêtre catholique, au 19e siècle en France, affrontait des cas de possession.

    Chamane toungouse, photo prise en Sibérie vers 1883

    Il ne s’agissait pas seulement de guérir le corps. Ce qui était également en jeu, c’était l’esprit, un esprit tourmenté, ne comprenant pas ce qui lui arrive dans le processus même de la prise de conscience de son existence.

    Et ce processus ne s’arrête pas historiquement, même s’il change de forme. La religion est bien du baume au cœur, et une protestation contre le réel, comme Karl Marx l’avait bien vu. Mais c’est aussi, ce qui avec, une expression du décalage de l’être humain avec lui-même, sur la base de la contradiction entre sa base naturelle et sa réalité sociale.

    Tant que l’être humain ne sera pas retourné à la Nature, comme composante de la Biosphère ayant eu un parcours propre, il restera fracturé, aliéné, blessé et la religion sera présente.

    La religion des origines se focalise, par conséquent, tout d’abord sur le traumatisme lui-même, puis sur la réalité modifiée par ce traumatisme. C’est le chemin menant du chamanisme au monothéisme, avec comme socle la généralisation de l’agriculture et de la domestication des animaux (et des êtres humains).

    Et, naturellement, tout le discours du monothéisme sur l’âme suit chronologiquement la démarche du chamanisme, qui est quant à elle tournée vers l’esprit. L’âme, c’est une construction idéologique sur un esprit relativement stabilisé.

    Un exemple particulièrement connu de la démarche « chamanique » est l’aventure d’Orphée. On a ici d’ailleurs la résolution d’une grande question, à savoir de ce qu’était l’orphisme, une religion dite à mystères, dont on n’a jamais pu entrevoir le sens. Ici, tout devient évident.

    Dans la mythologie grecque, Orphée, est le fils du roi de Thrace Œagre et de Calliope, muse de la poésie épique. Œagre est lui-même de nature divine, dans la mesure où son père est Arès, le dieu de la guerre, mais ce qui compte surtout est qu’il fut initié aux secrets du dieu Dionysos, dieu du vin et de la fête, symbolisant la Nature « sauvage » c’est-à-dire pré-domestique telle qu’idéalisée par une Humanité tourmentée.

    Mosaïque romaine avec Orphée,
    2e siècle de notre ère

    Selon le poète grec du cinquième siècle Nonnos de Panopolis (aujourd’hui en Égypte), Œagre aurait même accompagné Dionysos en Inde, forcément comme on s’en doute pour acquérir des « secrets », la connaissance de « mystères ».

    Bref, on est dans un contexte mystique et Orphée manie la lyre de manière admirable, charmant les animaux, émouvant les êtres inanimés, arrivant à faire une contre-mélodie pour les sirènes lorsqu’il va avec les argonautes chercher la toison d’or, etc.

    Il parvient même à charmer Hadès et Perséphone pour qu’ils laissent sa femme Eurydice quitter le monde des morts. La légende connue veut qu’il y avait comme condition qu’Orphée ne se retourne pas avant d’être sorti des Enfers : près de la sortie, inquiet de ne pas entendre Eurydice derrière lui, il se retourne et celle-ci est happée vers l’infra-monde.

    La clef de cette histoire est à chercher dans la psychologie. Il ne faut pas considérer qu’on a ici une histoire matérielle où Orphée va vraiment aux enfers, soit sous terre. C’est une interprétation erronée.

    En réalité, pour l’humanité alors, et la légende d’Orphée date d’au moins du 7e siècle avant notre ère, quand on est en dépression, on est happé par l’infra-monde, tout comme on est lié au ciel lorsque le bonheur est là.

    On devine bien évidemment ici que le processus de déification de certains hommes vient de là : s’ils ont triomphé, c’est qu’ils étaient liés au divin, donc des dieux.

    Pour le cas concret d’Eurydice, il faut considérer qu’Orphée a fait office de « psychonaute », de thérapeute psychologique. Il a réussi à guérir Eurydice, du moins presque, car elle n’est pas parvenue à sa pleine indépendance, au dernier moment elle a reculé, ayant été trop porté par Orphée, alors que cela lui aurait dû venir d’elle-même.

    C’est pourquoi cette légende devait être la base de l’enseignement des « mystères » de la religion « orphique » dont on ne sait rien. Le thérapeute devait accompagner le patient, mais toujours avoir en tête qu’en définitive, c’est au patient de faire le geste fondamental pour sortir de sa dépression.

    Un autre enseignement « voilé » derrière l’allégorie, c’est l’histoire de la caverne comptée par Platon, qui annonce déjà la question de « l’âme ».

    => Retour au dossier La naissance de la religion comme thérapie mentale

  • Le XXIe siècle comme déploiement révolutionnaire de l’unité dialectique bourgeoisie / prolétariat

    Lorsque l’on prend du recul, on comprend qu’il a été plus aisé d’assumer la « révolution sociale » au cours du XIXe siècle et au XXe siècle jusqu’aux années 1960, car l’unité dialectique bourgeoisie/prolétariat n’était en fait pas pleinement réalisée. On a ce phénomène historique qui apparaît de manière étrange : le socialisme émerge comme cause prolétarienne contre le capitalisme de la bourgeoisie, alors même que leur mise en relation dialectique n’est pas encore achevée. Comment cela est-il possible ? Quel est le sens de tout cela ?

    Il faut avoir en tête que la prise de conscience de la révolution sociale ne fut pas simplement le fruit du prolétariat, mais aussi du rapport entre le prolétariat et sa base historique en cours de dissolution, à savoir les classes corporatives d’ancien régime – production paysanne familiale, artisans, ouvriers domestiques, etc. Il y a une triple relation entre la bourgeoisie, le prolétariat et la paysannerie, trois dimensions sociales formant des contradictions dont les aspects forment des moteurs différenciés (« principal », « secondaire », etc.) du mouvement historique.

    La paysannerie en cours de prolétarisation exprime cette mise en forme de l’unité dialectique bourgeoisie/prolétariat, tout en appuyant principalement sur l’aspect d’être opposé à la bourgeoisie, car elle en subit négativement la domination, au sens où elle disparaît dans le prolétariat. Dans le creux du processus, il est plus aisé pour le prolétariat naissant de « prendre conscience » des modalités de l’accumulation capitaliste car celle-ci, par nature chaotique et désordonnée, produit le paupérisme absolu.

    Les images connues de l’« exode rural » en sont l’illustration historique et cela formera une hantise pour la bourgeoisie elle-même, générant même ce qu’il a été appelé « la question sociale ». Avoir des centaines de milliers de paysans en décadence qui deviennent des prolétaires, sans perspectives de logement stable, confrontés à une discipline d’usine auparavant inconnue… le tout dans un contexte de forces productives n’ayant pas encore atteint le niveau de l’« abondance », forme le terrain pour la conscience du socialisme, du moins dans sa version utopique.

    Et ce qu’il faut constater, c’est que dans ce processus, la « révolution sociale » apparaît surtout comme la capacité de la paysannerie d’entrer dans le prolétariat de manière stable, sans les conséquences anti-sociales générées par les modalités capitalistes. Plus généralement, il s’agit d’établir un rapport de développement harmonieux entre la ville et la campagne, mot d’ordre qui sera encore celui de contestataires de Mai-68 en dehors de Paris (« vivre et travailler aux pays »).

    Dans cette période 1860-1960, lever le drapeau rouge correspond à aller vers le futur sur la base d’une stabilité paysanne en cours de dissolution pour aller vers une nouvelle stabilité, un nouvel ordre, prolétarien, socialiste.

    C’est ainsi qu’il faut comprendre les expériences socialistes du XXe siècle : transformer la paysannerie issue du féodalisme en force prolétarienne de manière coordonnée, stable, planifiée, pour aller ensuite vers le communisme. Cette perspective a, comme on le sait, pleinement réussi, et c’est la seconde étape qui s’est heurté à ses propres contradictions qui n’ont pas été correctement saisies, faisant basculer le processus dans le révisionnisme, puis la restauration capitaliste.

    Entre 1860-1960, on assistait en réalité à la naissance du prolétariat, devenu pleinement prolétariat car mis en forme par la bourgeoisie. C’est ce que Karl Marx a voulu expliquer avec le concept de « subsomption réelle », base à l’idée du « mode de production capitaliste sui generis » ou « réellement capitaliste ».

    La subsomption réelle de la force de travail, c’est la contradiction bourgeoisie/prolétariat qui peut exprimer son propre mouvement, sur sa propre base. Dit autrement, la contradiction bourgeoisie/prolétariat n’est plus reliée à d’autres étagements des contradictions historiques, celles mues dans le cadre d’anciens modes de production avec un capitalisme qui formerait seulement une « tendance principale ».

    Pour que la contradiction bourgeoisie/prolétariat s’élance sur sa propre base, le mode de production capitaliste se doit d’être entièrement développé à tous les échelons de la société. Karl Marx fournit une clef pour repérer ce moment :

    « C’est ainsi que la production capitaliste tend à conquérir toutes les branches d’industrie où elle ne domine pas encore et où ne règne qu’une soumission formelle. Dès qu’elle s’est emparée de l’agriculture, de l’industrie extractive, des principales branches textiles, etc., elle gagne les secteurs où sa soumission est purement formelle, voire où subsistent encore des travailleurs indépendants. »

    Le mode de production capitaliste ne devient véritablement lui-même qu’au moment où il s’est emparé entièrement de l’agriculture. Une appropriation non pas formelle donc, comme faire travailler des paysans pour le compte du capital, mais réelle : c’est ce qu’on appelle l’industrie agroalimentaire, c’est-à-dire la mise en forme de bout en bout par le capital de la production agricole.

    On remarquera encore une fois ici comment le socialisme au XXe siècle a été la réponse positive, rationnelle, à cette problématique de l’industrialisation de l’agriculture.

    À partir de ce phénomène, on ne peut que constater que le mode de production capitaliste s’installe définitivement dans un pays comme la France dans la seconde partie du XXe siècle : ce n’est qu’à partir de cette période, soit les années 1970-1980 que l’on peut affirmer que la contradiction bourgeoisie/prolétariat peut s’élancer sur la base de son propre mouvement dialectique.

    Dans la période 1860-1960, le prolétariat se mouvait parce qu’il naissait sur le terrain de l’enchevêtrement de contradictions multi-faces issues de la dissolution de l’ancienne contradiction féodale.

    Ce mouvement a généré des acquis idéologiques qui se sont frayés en chemin jusqu’à aujourd’hui, mais qui forment aujourd’hui une page qui se doit d’être tournée, sans pour autant nier le fait qu’elle fait partie du livre du socialisme et constitue en tant que tel un héritage.

    D’où l’affirmation du Parti matérialiste dialectique comme prise de conscience que le mouvement prolétarien au XXIe siècle se réalise sur la base des contradictions multi-faces déterminées de bout en bout par son rapport à la société de consommation issue du mode de production réellement capitaliste.

    Ainsi, en apparence, dans les sociétés capitalistes développées, le prolétariat n’existerait plus. Ce serait une simple expression de type « classe moyenne » marquée par l’individualisme et l’accès au confort moderne. Cette thèse est le masque d’une bourgeoisie qui vise à appuyer sur le caractère unitaire de la contradiction, pour en faire un absolu et ainsi figer le mouvement une bonne fois pour toutes.

    En réalité, on a l’expression aiguisée de la contradiction bourgeoisie/prolétariat, avec un prolétariat qui est mis en forme, entièrement subsumé par la bourgeoisie. C’est l’aspect unitaire, de la liaison des deux pôles de la contradiction. La généralisation de la conscience petite-bourgeoise dans le prolétariat forme l’apogée de ce caractère unitaire.

    Et en même temps, c’est parce qu’il y a subsomption réelle que le prolétariat peut faire la révolution comme pôle opposé de l’unité : la bourgeoisie se doit d’assurer la survie de son édifice social pour que le prolétariat suive la bourgeoisie dans son mode de vie voiture-pavillon-consommation sans risquer de décrocher de son hégémonie.

    Cependant, il y a l’endettement colossal des capitalismes mondiaux et les conséquences anti-naturelles de sa société de consommation. Et cela se déroule sur fond du déploiement d’une nouvelle guerre de repartage impérialiste forment les trois dimensions tangibles à l’effondrement de l’édifice bourgeois avec pour revers nécessaire le décrochage du prolétariat.

    La seconde crise générale du capitalisme ouvert par la pandémie de Covid-19 a inscrit à l’ordre du jour cette perspective, qui va s’exprimer sur le temps long, tout comme la première vague de la révolution mondiale s’est étendue dialectiquement sur la période 1860-1960.

    L’ancienne période issue de la première crise générale, qui a mis en avant le caractère opposé de l’unité dialectique de part le rapport paysannerie/prolétariat, a buté sur l’aspect de la liaison avec la bourgeoisie au seuil des années 1960. Cela a été la question de l’orientation des forces productives pour aller vers le communisme, alors portée par les communistes chinois face au révisionnisme soviétique.

    Le XXIe siècle, marquée par la seconde crise générale, ouvre par contre la voie de la victoire du prolétariat pour le communisme, car ce qui prime dorénavant est sa liaison entière avec la bourgeoisie au travers de la société de consommation, et par conséquent sa rupture entière et totale avec celle-ci dans le contexte de forces productives baignant dans l’abondance.

    => retour à la revue Connexions

  • Le PMD se construit comme forteresse, comme phare

    Au 19e et au 20e siècles, les révolutionnaires considéraient-ils que la stabilité était l’ennemie ? C’est une question importante. Trop souvent, on se dit qu’être révolutionnaire, c’est vouloir une agitation profonde, afin d’ébranler les fondements de la société, de provoquer des troubles profonds, des remises en cause.

    C’est seulement alors, dans un tel contexte, que le discours révolutionnaire aurait enfin un écho, que les révolutionnaires se verraient rejoints par de plus en plus de gens, jusqu’à la possibilité de s’attaquer à l’État lui-même. Le mot-clef, qui résume toute cette approche, c’est celui de subversion. Cependant, c’est une lecture unilatérale. Il ne faut pas considérer que la révolution est le mouvement et que la contre-révolution, c’est le conservatisme. C’est là figer des contraires.

    Dialectiquement, la contre-révolution est en mouvement également, dans la mesure où elle s’agite vainement, s’éparpille, se dissout, alors que la révolution dispose d’une stabilité toujours plus grande. C’est, si l’on veut, la contradiction entre la quantité et la qualité.

    Pour bien saisir cela, regardons les deux conceptions de la subversion qui se sont combattus tout au long des 19e et 20e siècles.

    La « minorité agissante »

    Ici, on a l’idée d’un Comité révolutionnaire, qui fonctionne de manière secrète. Ce Comité cherche à manipuler les esprits et les actions de contestation, afin qu’un désordre s’installe qui soit favorable à la Cause. Cette démarche peut s’élargir jusqu’à la mise en place d’un groupe activiste qui cherche en permanence la provocation, afin de jouer le rôle de détonateur.

    L’idée à l’arrière-plan, c’est celle de servir de « foyer », de mise à feu de la contestation, et de pôle organisé à la pointe de la lutte. Les masses doivent suivre la minorité agissante, s’engouffrer dans la brèche.

    Les figures liées à cette démarche élitiste sont Blanqui et Bakounine, mais aussi le Français Georges Sorel ou encore Ernesto « Che » Guevara. Néanmoins, on trouve également une variante contemporaine, avec la théorie des « 1 % » : en mobilisant 1 % de la population, on provoquerait un basculement de la société. Dans tous les cas, la société est considérée comme une sorte de vaste Bourse où les idées sont comme des actions, et où la politique se réduit à un marketing efficace.

    L’avant-garde

    Le marxisme s’est toujours opposé au principe de la minorité agissante, considérant qu’il fallait une avant-garde porteuse du futur, sur la base d’une lecture des événements historiques.

    Puisque l’Histoire est l’Histoire de la lutte des classes, posséder une compréhension de celle-ci permet d’avoir une grille de lecture, de lire ce qui va se passer et de se positionner de manière adéquate pour faire avancer les choses. La saisie du parcours historique est l’outil pour poser les bons mots d’ordre, pour agir de la bonne manière au bon moment.

    Mao Zedong a résumé cette ligne par la formule : « Les masses font l’Histoire, le Parti les dirige ». Le Parti est l’état-major, la grande synthèse politico-idéologique du prolétariat.
    Mais ce n’est pas tout. La subversion ne vise pas ici seulement à détruire l’État. Ce serait une conception unilatérale, limitée.

    La subversion a également comme objectif, dialectiquement, de construire un nouvel État. La construction et la destruction se répondent dialectiquement.

    Subversion et Nouvel Ordre

    Ainsi, le Parti Matérialiste Dialectique ne doit pas avoir simplement comme démarche de promouvoir le négatif, la destruction, la démolition, la subversion. Dialectiquement, il doit présenter le positif, la production, la construction, le Nouvel Ordre. Il ne peut jamais y avoir d’affirmation du négatif sans le positif, et inversement. Ce qui n’est pas forcément facile. Il y a ainsi les socialistes qui se sont opposés aux communistes, en affirmant que ceux-ci insistent trop sur le négatif.

    Puis, les révisionnistes ont insisté uniquement sur le positif, pour se débarrasser du négatif. Ce sont là des déviations droitières. Enfin, il y a régulièrement eu des courants « gauchistes » qui mettaient de côté le positif, pour n’insister que sur le négatif. Dans les deux cas, il y a liquidation d’un aspect, un refus de la dialectique.

    Et les victoires acquises l’ont toujours été lorsque le rapport entre positif et négatif a été bien compris. La révolution russe est un renversement de l’ancien Ordre, mais avec une insistance immense sur la construction du Socialisme. Les succès dans la mise en place des démocraties populaires dans les années 1940, contre le fascisme, profitaient d’une excellente compréhension du lien entre Front populaire et antifascisme.

    La révolution chinoise combinait adéquatement lutte anti-japonaise (puis lutte anti-féodaux alliés à l’impérialisme américain) et affirmation de la République populaire. Enfin la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne posait directement l’affrontement entre l’ancien et le nouveau, dans tous les domaines, conformément à la lutte entre deux lignes.

    La lutte entre deux lignes

    Dans les principes du PMD, il est justement dit que :

    « 9. Le PMD a comme démarche la lutte des deux lignes, dans tous les domaines : la constatation de la contradiction, l’affirmation de la ligne rouge face à la ligne noire, le renforcement de la ligne rouge jusqu’à la victoire de celle-ci. »

    C’est de là qu’il faut partir pour suivre la contradiction entre construction et destruction, entre subversion et Nouvel Ordre. On ne peut pas poser abstraitement, au préalable, la subversion ou le Nouvel Ordre. Il faut suivre le mouvement historique. Cela signifie que le Parti doit être une forteresse, imprenable et ayant un vaste aperçu de la situation, pour toujours être en mesure de poser des jalons.

    Et c’est alors qu’il joue le rôle de phare, car il diffuse les bonnes conceptions, les points de vue justes, les actions conformes aux exigences historiques. Car on ne peut pas aller plus vite que la musique de l’Histoire, on est obligé de suivre le rythme de la lutte des classes. La lutte entre deux lignes ne se décrète pas, elle correspond à des situations historiques.

    C’est depuis la forteresse qu’on peut les comprendre, c’est par le phare qu’on agit sur elle. Le Parti n’obéit pas aux principes de la minorité agissante, il se définit par son statut d’avant-garde : il est l’expression de l’avenir dans un présent en transformation, en train d’abandonner le passé.

    C’est bien là la clef de tout : c’est l’idéologie qui est au poste de commandement et c’est la politique qui décide de tout. Peu importe la durée du processus, les détours de l’Histoire. Ce qui compte, c’est le maintien de la forteresse et l’activité du phare.

    => retour à la revue Connexions

  • La faillite de l’universalisme capitaliste, porte d’entrée pour la révolution mondiale

    Si l’on regarde les cycles d’accumulation du capital, on peut voir qu’il y a une succession de poussées d’accumulation, puis stagnation, voire recul. Dans les moments d’élargissement, le mode de production capitaliste participe d’une élévation des forces productives qui entraîne une amélioration de la vie quotidienne.

    Cette amélioration s’exprime par une meilleure coordination des choses, un approfondissement des liaisons entre les êtres humains. Karl Marx et Friedrich Engels sont aussi le produit de l’époque de la machine à vapeur qui a permis le développement du train, de la même manière que Lénine est également celui de l’aéronautique, dont il était un grand amateur.

    Ces moyens de transport ont engendré un accroissement important des liaisons, des connexions pour l’Humanité, tout en permettant une vie meilleure, plus simple. La complexité engendre la simplicité. Mais on pourrait citer les moyens de communication, comme le poste TSF, le télégraphe, la téléphonie, et plus tard internet, ce grand bond en avant vers l’universalisation de l’Humanité.

    La contradiction que représente le mode de production capitaliste réside dans le fait bien connu depuis la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne que l’élévation des forces productives ne tombe pas du ciel, tel un fruit mûr, mais qu’elle est conditionnée par les besoins du capital.

    Ainsi s’il y a bien approfondissement des liaisons, de l’interrelation entre les êtres humains, cela se fait dans un cadre capitaliste, sur un mode bourgeois. Ici, on peut toucher du doigt le basculement de la bourgeoisie mondiale dans un style de vie « nouveau » assumé dans les années 1970-1980 avec la généralisation à l’ensemble du globe de la voiture comme mode de mobilité principale.

    Le mode de production capitaliste a besoin du marché mondial pour s’élargir, mais en même temps il le fait sur la base d’une bourgeoisie née sur le terrain national et de l’idéologie contractualiste et individualiste. Il y a bien une « mondialisation » mais elle est tronquée, déformée.

    Karl Marx et Friedrich Engels nous précisent adéquatement cela dans le Manifeste Communiste. Ils disent la chose suivante :

    « Par l’exploitation du marché mondial, la bourgeoisie donne un caractère cosmopolite à la production et à la consommation de tous les pays (…).

    Par le rapide perfectionnement des instruments de production et l’amélioration infinie des moyens de communication, la bourgeoisie entraîne dans le courant de la civilisation jusqu’aux nations les plus barbares. Le bon marché de ses produits est la grosse artillerie qui bat en brèche toutes les murailles de Chine et contraint à la capitulation les barbares les plus opiniâtrement hostiles aux étrangers.

    Sous peine de mort, elle force toutes les nations à adopter le mode bourgeois de production ; elle les force à introduire chez elle la prétendue civilisation, c’est-à-dire à devenir bourgeoises.

    En un mot, elle se façonne un monde à son image. »

    La « civilisation de la voiture » représente en ce sens cette contradiction : lorsque le capitalisme atteint le stade de la subsomption réelle, c’est-à-dire qu’il est en mesure d’orienter de bout en bout les objectifs de la science et la technologie, sa perspective « mondiale », universelle ne peut que se réaliser en appuyant sur le particulier, l’individuel.

    Mais c’est vrai aussi pour le mode de vie pavillonnaire, la consommation de viande, voir de fast-food, les séries, les réseaux sociaux, etc. Des tas de phénomènes qui sont généralisés à l’ensemble des pays du globe, mais se fondent sur une approche de la réalité qui est nécessairement mutilée, découpée en séries.

    Autrement dit, l’universalisme capitaliste ne peut exister qu’en généralisant des modes de consommation en série individuelle fondée sur l’éphémère. Il y a généralisation de consommations standardisées, dans lesquelles entre le particulier et le général, c’est le particulier qui l’emporte sur la base de sa généralisation et non l’inverse. On peut avoir une photographie qui permet bien de voir la différence entre le capitalisme et le socialisme : le capitalisme particularise le général quand le socialisme généralise le particulier, l’un fait primer le particulier, l’autre fait primer le général.

    L’alimentation végétale est un bon exemple de ce phénomène. Les monopoles de la viande s’empressent de proposer des alternatives végétales comme une niche alimentaire pour mieux continuer à développer leurs produits d’origine animale. L’alimentation végétale se voit élever au rang de consommation générale, tout en restant une particularité. Au point de vue de la connexion universelle des choses, il est pourtant évident que l’alimentation végétale est un cap à franchir, car elle est l’expression d’un rapport améliorée à la matière vivante, qu’elle réalise la connexion pacifique entre les espèces.

    C’est l’affranchissement universel de l’exploitation et de la destruction d’une partie de la matière vivante, ce qui représente un grand pas en avant pour l’Humanité et sa reproduction comme espèce vivante en harmonie avec la Biosphère.
    Mais le capitalisme est incapable de généraliser le particulier : il porte bien l’universel, mais reste bloqué par ses objectifs immédiats, celui d’obtenir un taux de profit élevé, entreprises par entreprises.

    Dans ce cadre, il est impossible pour ce mode de production de se passer des produits d’origine animale à tous les échelons de la production, tant il est apparu comme la marchandise « magique » pour contrer justement la chute tendancielle du taux de profit.

    Cette caractéristique du mode de production capitaliste est en réalité sa force et en même temps sa faiblesse. Sa force, car il apparaît comme un mode de production relativement plastique, en mesure de répondre aux besoins individuels, ayant l’apparence de développer les facultés individuelles des masses mondiales. Sa faiblesse, car son élargissement universel se heurte tôt ou tard à son propre mur, celui du « retour » au particulier pour se relancer.

    Ce « retour » au particulier, c’est évidemment la guerre de repartage impérialiste.

    Le commerce mondial pacifique se retourne en bellicisme et agressivités douanières, les organismes internationaux deviennent des chambres d’enregistrement des conflits entre grands puissances, le cosmopolitisme bourgeois devient chauvinisme et nationalisme.

    La hausse générale des forces de production au service du quotidien se transforme en engloutissement des richesses dans le militarisme et la mort.

    Bref, la civilisation universelle voit sa course arrêtée par les besoins des monopoles de se repartager le monde. Des monopoles qui ont, dans la période d’élargissement de leurs capitaux, participé à cette universalisation en deviennent l’obstacle. On retrouve là les périodes 1880-1914, 1920-1939 ou bien encore 1989-2020. Les masses mondiales qui ont bénéficié d’une plus grande interconnexion se doivent alors de généraliser ce processus pour l’arracher à la tendance à la guerre impérialiste, ce brusque retour au particularisme assassin.

    C’est la révolution. L’humanité doit être réunifiée, dans une seule République mondiale, sans qu’une partie – comme le tiers-monde actuel qui forme la majorité de la population mondiale – ne soit exploitée. Dans la production elle-même, il ne doit plus y avoir le capitalisme, cette forme du passé caractérisée par l’exploitation de l’Homme par l’Homme.

    => retour à la revue Connexions

  • L’effondrement du capitalisme a-t-il comme modèle la chute de l’empire romain ?

    Il n’est nul besoin ici de connaître dans les détails le parcours historique de Rome. Les grandes lignes sont connues : on passe d’une Cité – État à une République élargissant son territoire, puis enfin à un empire. À chaque fois, Rome transporte ses armées, mais également son mode de vie.

    Le parallèle qu’on peut dresser ici, c’est alors celui de la fondation des États-Unis d’Amérique, suivi d’un élargissement de sa puissance (entre 1914 et 1945) et enfin d’un empire avec le capitalisme mondial qui lui est subordonné de 1945 à 2020. À chaque fois, les États-Unis d’Amérique transportent pareillement ses armées et son mode de vie.

    Comparaison n’est toutefois pas raison, répondra-t-on avec justesse. On ne saurait rapprocher un mode de production esclavagiste avec un mode de production capitaliste.

    Sauf que, justement, ce qui se joue ici, c’est qu’il existe plusieurs modes de production esclavagiste, et un seul mode de production capitaliste. Bien entendu, le mode de production esclavagiste est ce qu’il est. Néanmoins, il existe de grandes différences entre l’esclavagisme dans l’Islam et celui mis en place par les Européens, entre celui de l’Égypte antique et celui des Mayas. Par contre, le mode de production capitaliste est universel. D’une part, il existe des nuances, mais cela ne va pas jusqu’à des différences ; d’autre part, le capitalisme s’étale, s’approfondit, s’élargit, autant qu’il le peut, ne laissant jamais rien intact tant qu’il n’a pas été intégré dans la démarche d’accumulation du capital.

    C’est cette contradiction entre un mode de production esclavagiste replié sur lui-même et le mode de production capitaliste qui permet justement de rapprocher Rome et le capitalisme à l’échelle mondiale dominé par la superpuissance américaine. Pourquoi ? Parce que Rome s’est effondrée en raison d’une contraction, alors que le capitalisme mondial va s’effondrer en raison d’une expansion.

    Rome s’est effondrée face aux coups de boutoirs de la plèbe appauvrie, des esclaves révoltés et des peuples barbares conquérants. La contradiction est interne, de toutes façons, mais cela s’est déroulé comme contraction, comme repli sur soi-même, jusqu’à ne plus tenir. On sait comment le christianisme est né d’une telle contraction. Malgré les apparences, le christianisme n’est pas né contre Rome, mais avec Rome, d’où le grand malentendu entre Jésus et les autorités romaines.

    Dans le capitalisme, il n’y a rien d’extérieur par contre, même sur le plan interne. Tout est intégré dans le dispositif capitaliste. Certains disent que la révolution est impossible, car le prolétariat est intégré au capitalisme. En réalité, c’est bien pour cela justement que la révolution devient possible. C’est que le capitalisme a gagné, donc il a perdu. Il n’y a plus que lui et plus il s’étend, plus il est en expansion, plus il procède à son auto-dissolution.

    Revenons à Rome. Rome se disloque plus qu’elle ne s’effondre, puisque la base de sa dislocation est le morcellement du pouvoir central et de ses satellites urbains, et la re-concentration du pouvoir dans les campagnes. Les seigneurs qui vont s’imposer partent des infrastructures rurales de Rome et de son aristocratie foncière pour mieux dissoudre le pouvoir central romain. Cela signifie qu’il y avait une place à l’intérieur de son développement pour ce qu’on peut appeler une « continuité oppositionnelle ».

    De la même manière que le mode de production féodal connaît un processus de désarticulation du pouvoir de sa classe dominante face à l’émergence des bourgs, puis des villes fondées sur des réalités productives de plus en plus « opposées » à la base productive féodale rurale.

    Le mode de production capitaliste est quant à lui en expansion universelle, tel un rouleau compresseur qui a tout englouti, et pour cela il n’a pas de continuité oppositionnelle. Sa perspective n’est pas un émiettement, un morcellement dû à une puissance « opposée », « extérieure » à lui-même.

    Naturellement, il y a eu beaucoup de romantismes imaginant une telle opposition « extérieure ».

    Il y a eu par exemple en France les « syndicalistes révolutionnaires », qui projetaient leurs fantasmes sur les prolétaires, qu’ils imaginaient totalement « extérieur » au capitalisme et à ses mœurs.

    En réalité, le mode de production capitaliste va vers son effondrement, et non pas sa dislocation, car il n’y a pas d’espace-temps qui lui soit extérieur.

    À ce titre, si l’on regarde les modalités de la première vague de la révolution mondiale, commencée en octobre 1917, il apparaît assez nettement que le mode de production capitaliste n’avait pas atteint sa maturité complète, connaissant précisément un processus d’émiettement inégal. La révolution chinoise développera comme on le sait également de son côté l’idée d’une guerre populaire sur la base de conquête de bases d’appui, grignotant le pouvoir de l’intérieur.

    En ce sens, le marteau et la faucille a été l’emblème de ce processus par lequel la force d’avant-garde, la classe ouvrière, se devait d’arrimer et de diriger la force de « continuité oppositionnelle » qu’était la paysannerie pauvre en cours de prolétarisation, et donc de mise sous hégémonie de la bourgeoisie.

    C’est dans le creux de cette prolétarisation de la paysannerie pauvre que les révolutions russes et chinoises se sont imposées et ont assumé le processus d’industrialisation sur une base socialiste dans un espace-temps où le capitalisme s’était disloqué, replié. Elles ont toutefois buté sur l’expansion, c’est-à-dire sur l’affirmation de leur propre perspective historique.

    Le socialisme du XXe siècle a été un point de résistance à l’expansion du capitalisme, mais il n’a pas réussi à conquérir, ensuite, sa propre expansion sans être déformé, puis nié par le capitalisme lui-même. Le souci, c’est à l’arrière-plan des forces productives pas assez développées.

    Le XXIe siècle tel qu’il se déploie exprime par contre la situation dans laquelle le mode de production capitaliste va vers son effondrement général, sans aucune poche d’opposition extérieure. Il n’y a pas de place pour quelconque théorie du « point de résistance ».

    Le mode de production capitaliste a façonné le monde entier, son style de vie, ses mœurs, son état d’esprit, etc., et même l’existence de comportements et de traits d’esprit relevant du féodalisme sont entièrement liés au capitalisme mondial, d’où son caractère partiel, semi-féodal, car contribuant sans cesse à alimenter son expansion.

    De fait, la tendance à la guerre impérialiste en cours qui place la Chine et les États-Unis en face en face, deux superpuissances motrices du capitalisme mondial, illustre que l’expansion va inéluctablement vers l’effondrement général. En plaçant des milliards d’êtres humains dans sa perspective tout en les ayant « universalisé » sur les plans sociaux et culturels, la guerre de repartage du XXIe siècle ne peut que provoquer l’effondrement.

    Mais ici la contradiction n’est pas tant dans un point de résistance spatial en vue de conquérir la temporalité future, ou disons entre deux particularités qui s’opposent (bourgeoisie / prolétariat, capitalisme / socialisme) mais directement entre l’universalisation générée par le capitalisme et ce même universalisme vécu et porté par les masses mondiales.

    La qualité et le développement approfondis des forces productives depuis les années 1980 suffisent de prouver que les masses mondiales ont atteint un tel degré de connexion que la guerre de puissances, ce résidu du particularisme et de dislocation, apparaît caduc, absurde.

    L’effondrement du capitalisme s’exprime car il est allé trop loin dans l’universalisation des choses, sans pouvoir en assumer les conséquences et la révolution surgit non plus comme expression de la dislocation, mais comme reflet de l’universalisation du monde.

    => retour à la revue Connexions

  • Rupture et confrontation : faire face à la guerre impérialiste que la France veut mener

    La Crise dans laquelle s’engage toujours plus le capitalisme de notre époque déboussole inévitablement les consciences dans des sociétés aussi décadentes et pourrissantes que celles de la France de notre époque, déformée par plusieurs décennies de la lessiveuse du 24h/24 de la société de consommation.

    D’un côté, les gens ont vécu avec plus d’aisance matérielle, davantage d’accès à la culture, des possibilités plus grandes de développer leur existence. La vie est devenue plus facile. De l’autre, cela s’est fait aux dépens du tiers-monde, et par un travail toujours plus harassant sur le plan nerveux, à travers un asséchement de la sensibilité.

    Le panorama est alors forcément accablant lorsque la machine s’enraye comme elle l’a fait à partir de 2020. Le masque du capitalisme à visage humain tombe. La violence se généralise dans les rapports sociaux, et la société civile vacille, l’irrationnel triomphe sous mille et une formes toujours recommencées, alimentant les ressentiments, les paranoïas, zombifiant des secteurs entiers des masses, qui dérivent d’une hystérie hallucinatoire à une autre ou s’enferment dans la fatalité.

    Et encore cela n’est-il que le début. À mesure que l’économie de guerre qui est en train d’être mise en place imposera la dictature des monopoles et de l’État bourgeois, à mesure que se multiplieront les feux dans les pays de la zone de tempêtes qu’est le tiers-monde, la France sera polarisée par la superpuissance impérialiste américaine et jetée avec elle dans les flammes de sa grande confrontation historique avec l’expansionnisme de la Chine sociale-fasciste.

    Alors, au fur et à mesure que les exigences insoutenables de la fuite en avant impérialiste imposeront la mobilisation croissante des masses dans un sens militaire, une nasse d’acier s’abattra sur la France. C’est inévitable, sauf si une rupture révolutionnaire brise cette fatalité.

    Ce qui se joue à l’arrière-plan, c’est la question de la rupture et de la confrontation.

    Quelle rupture, quelle confrontation ?

    Rupture et confrontation avec l’État bourgeois en France, rupture et confrontation avec l’Union européenne et l’Otan, rupture et confrontation avec les agents de la superpuissance américaine, rupture et confrontation avec la lessiveuse du 24h/24 du capitalisme, avec son libéralisme-libertaire décadent et tous ses « discours » atomisant et aliénant les masses.

    Rupture et confrontation avec l’économie de guerre et toutes les compromissions sociales-souverainistes ou syndicales pensant pouvoir geler ou ralentir significativement la fuite en avant du capitalisme français ou alors tirer son épingle du jeu en magouillant quelques accords en mettant à genoux les masses de notre pays et en mettant les mains de la classe ouvrière au service de la bourgeoisie impérialiste pour assouplir la laisse que cette dernière lui mettra au cou.

    Rupture et confrontation totale donc. Et cela en commençant par rejeter le narratif que l’État bourgeois et ses agents dans les institutions tentent de construire.

    Nous avons depuis le début eu raison sur la guerre en Ukraine, et depuis le début de l’année 2024, les choses s’accélèrent, s’empirent. Les milliards pleuvent pour la guerre, les dettes s’accumulent, le souffre, le nitrate de potassium et les matières fissibles remplissent des milliers et de milliers d’obus et de missiles, alors que des machines, ou bien toujours plus sophistiquées ou bien d’une simplicité perverse, sont mises au point.

    Détournée, l’intelligence humaine est déroutée de sa fin naturelle, symbiotique et pacifique, pour servir les appétits d’un monde aliéné et inhumain, ayant perdu toute capacité de fraternité et d’harmonie.

    Le début de l’année 2024 est ainsi bien un tournant historique, avec le gouvernement de l’État bourgeois en France qui a clairement et ouvertement choisi d’assumer la fuite en avant.

    S’étant dressée contre la Turquie en Méditerranée et dans le Caucase, appuyant la puissance américaine dans le Golfe persique, au Moyen-Orient et dans l’Indo-Pacifique, la France s’est positionnée très vite dans le cadre du conflit en Ukraine en satellisant la Roumanie. Le retrait relatif de la puissance américaine sur le terrain opérationnel pousse maintenant en avant la France et le Royaume-Uni, décidés à mettre en coupe réglée l’Europe orientale et de s’y constituer une zone d’influence.

    De fait, l’Ukraine est balkanisée et ne peut plus que se faire avaler par le syndicat des appétits impérialistes des États capitalistes d’Europe de l’Ouest qu’est l’Union européenne. Et au-delà même de l’Europe orientale satellisée et de l’Ukraine toujours plus avalée par les puissances occidentales, c’est la Russie que l’impérialisme occidental entend mettre en flamme et dépecer.

    Dans ce processus infernal, il faut identifier, dénoncer et s’opposer de toutes les forces et par tous les moyens possibles aux éléments suivants du narratif de la fuite en avant impérialiste dans laquelle la bourgeoisie dirigeant notre pays nous entraîne :

    • L’européisme et la promotion d’une prétendue nécessité « géopolitique » de construire une « puissance européenne » et d’unifier les États bourgeois dans un syndicat commun pour les renforcer les uns avec les autres afin de faire bloc.
    • La restructuration économique pour alimenter l’économie de guerre française et l’appareil militaro-industriel français.
    • La promotion du militarisme sous toutes ses formes, notamment auprès de la jeunesse (SNU, uniforme, etc…), et de l’obéissance aux institutions de l’État bourgeois, internes ou externes.
    • La promotion sous toutes ses formes des États-Unis d’Amérique comme puissance alliée/concurrente, y compris dans la culture, dans le style et les modes de vie.
    • La promotion du complexe militaro-industriel français, dans toutes ses dimensions, et particulièrement dans ce qui relève de sa filière nucléaire. Il ne faut toutefois négliger aucun autre aspect, et ils sont nombreux (télécommunication, balistique, aéronavale, aérospatiale, marine, etc.), et bien prendre en compte qu’il n’y a pas de distinction civil/militaire tenable dans le ciblage des activités de ce complexe.
    • La promotion de la souveraineté de la France comme moyen d’appuyer la légitimité de la défense de ses intérêts expansionnistes, que ce soit dans le cadre de l’Union européenne, ou de toute autre instance internationale émanant des États bourgeois, des zones internationales sous son contrôle (collectivités dites d’Outre-mer, ZEE, bases militaires).

    À ce narratif de l’État bourgeois, il faut aussi prendre en compte la nécessité idéologique de se confronter aux discours des organes politiques de la bourgeoisie en France, diffusés notamment par ses médias et par ses partis politiques institutionnels.

    Nous tenons ici à marquer les jalons établissant la Ligne Rouge que nous entendons tracer au service des masses de notre pays et de la perspective de la rupture salutaire que nous appelons :

    • Sans rejeter la nécessité stratégique de constituer un Front Populaire rassemblant sous l’hégémonie effective du Parti révolutionnaire, les forces politiques, syndicales et civiles de la Gauche portée à la Démocratie Populaire, il y a lieu de dénoncer et de rejeter les discours des forces politiques générées au sein de la société française capitaliste sous l’hégémonie de la bourgeoisie.
    • La Droite nationaliste ou souverainiste est bien sûr sous ce rapport un ennemi mortel dont la seule perspective doit être l’écrasement total et complet. Dès lors, ainsi que nous l’avons sans cesse martelé, toute posture, stratégie ou narratif populiste sont pour toute force de Gauche une dangereuse et funeste aventure relevant de la trahison pure et simple.
    • De même, il ne peut être toléré aucun espace à tout narratif de la Gauche post-moderne, libérale-libertaire ou sociale-libertaire, américanisée dans son lexique et son idéologie, relativisant au besoin toutes les pires horreurs réactionnaires en se donnant des airs de « radicalité » ultra-démocratique, et épouvantable base de la Ligne Noire préparant par la compromission avec telle ou telle faction de la bourgeoisie, telle ou telle institution de l’État bourgeois le détour ou l’échec de la Révolution.

    En ce premier mai 2024, alors que le capitalisme amène à nouveau le monde au bord de l’abîme, 110 ans après la Grande Guerre Impérialiste de 1914, nous affirmons donc la nécessité de relire l’avant-garde de cette époque, Lénine, Clara Zetkin, Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg, et de méditer cette leçon si juste de William Pieck, écrite en 1935 alors que la confrontation impérialiste allait reprendre son atroce bain de sang :

    « Rien ne saurait être plus dangereux que l’illusion qu’on peut ajourner la lutte contre la guerre impérialiste jusqu’au moment où les impérialistes déclaraient leur guerre criminelle. »

    Organisez-vous, entrez dans la rupture et dans l’Histoire.

    Qu’apparaisse un printemps historique qui voit s’épanouir de nos racines solidement plantées dans l’héritage de la Gauche révolutionnaire, des centaines, des milliers de fleurs s’élançant à l’assaut du ciel dans les chants colorés d’une nouvelle Humanité qui s’annonce !

    => retour à la revue Connexions

  • La guerre contre la Russie et la révolution en France

    Nous présentons ici notre vision des choses, qu’on peut résumer facilement en les points suivants.

    1. La France capitaliste prend la tête de la coalition occidentale contre la Russie, elle se place comme fer de lance de l’intervention militaire directe.

    2.Elle le fait forcée par sa propre situation, car elle est en perte totale de vitesse et elle y voit une manière de regagner des points impérialistes.

    3.Cela implique un changement d’orientation dans la société française, un tournant militariste, pour satisfaire aux exigences d’une armée en expansion en termes d’hommes et de matériel.

    4.L’entreprise réussira au départ, car les gens sont obnubilés par leur mode de vie dans le cadre de la société de consommation. Les masses françaises sont politiquement aveugles, passives, corrompues par l’impérialisme.

    5.Elle échouera pourtant immanquablement ensuite, car le niveau de conscience historique mondiale est trop élevé, les richesses matérielles trop développées pour qu’on accepte de mourir pour des ambitions impérialistes incompréhensibles, surtout du côté de la jeunesse.

    6.Les points 4 et 5 forment une contradiction qui est celle de toute l’époque au niveau mondial : d’un côté l’expansion capitaliste a développé les forces productives, de l’autre plus rien ne tient moralement, économiquement, culturellement, sur le plan écologique, dans le rapport aux animaux, pour les femmes dans leur quotidien.

    7.Entre la réussite initiale et l’échec ensuite, il y aura un processus sinueux, horrible sans doute, où la révolution émergera lentement comme contre-projet à l’aventurisme militaire et ses implications.

    8.La révolution n’existera et ne triomphera qu’avec un parti d’avant-garde armé du matérialisme dialectique comme guide historique pour arriver à une humanité unifiée reconnaissant la planète comme Biosphère, dont elle est une composante pleine de responsabilités pour la protéger.

    La France à la tête de la coalition contre la Russie

    Nous vivons un tournant historique, où la bourgeoisie française, satisfaite d’elle-même, tranquillement arc-boutée sur Paris comme haut lieu de la mondialisation, est obligée d’adopter une posture belliciste. Finie, du moins de manière relative, la mise en valeur du mode de vie français, censé être si exemplaire, et place à l’agrandissement de l’armée française face à la « menace » russe, à l’économie de guerre, afin d’être « prêt ».

    C’est le sens de la grande réunion de soutien militaire au régime ukrainien, organisée par le président français Emmanuel Macron le 26 février 2024 à Paris, en présence de représentants au plus haut niveau, voire des chefs de gouvernement, des États-Unis, du Royaume-Uni, du Canada, de la Suède, de l’Allemagne, de la Pologne, de la Roumanie, de l’Espagne, de la Finlande, de la Grèce, de la Lettonie, de la Lituanie, du Luxembourg, de la Norvège, du Portugal, du Danemark, de la République tchèque, de l’Estonie, de la Croatie.

    Emmanuel Macron y a prétendu que la Russie entendait attaquer, d’ici quelques années, les pays de l’Union européenne. Ce mensonge relève du discours accompagnant le soutien élargi au régime ukrainien, afin de voir celui-ci triompher militairement de la Russie.

    Il a également parlé de la possibilité d’envoyer des troupes occidentales sur le terrain, aux côtés de l’armée ukrainienne. En cas de défaite de l’armée ukrainienne, ce serait le cas. Il a en ce sens ouvert la boîte de Pandore de l’affrontement militaire inter-impérialiste ouvert.

    Nous sommes donc arrivés à un point de non-retour. Nous vivons une situation semblable à avant 1914 et à avant 1939, avec des contradictions majeures et la guerre comme inéluctable expression de celles-ci. C’est la bataille pour le repartage du monde et elle est ouvertement assumée.

    Cette situation n’est pas une surprise pour qui a compris qu’en 2020 s’est ouverte la seconde crise générale du capitalisme. La guerre est le produit direct de cette crise. Cela fait néanmoins froid dans le dos de voir un tel cynisme et une telle folie, un tel irrationalisme et un tel bellicisme. Le monde se précipite dans l’abîme.

    Un changement de situation historique

    Classe décadente, la bourgeoisie française ne procède toutefois pas à un retour au style gaulliste, à une approche agressive visant à marquer sa présence impérialiste par tous les moyens.

    Elle se met simplement à la remorque des exigences de la superpuissance impérialiste américaine, qui non seulement entend conserver son hégémonie mondiale, mais cherche en plus à régler ses comptes avec la superpuissance impérialiste chinoise avant que celle-ci ne devienne trop forte.

    Pendant deux années, à partir de février 2022, la superpuissance impérialiste américaine a vigoureusement soutenu le régime ukrainien dans son affrontement militaire contre la Russie. C’était considéré comme un moyen facile d’affaiblir la Russie, voire d’y provoquer un changement de régime. Le régime ukrainien était d’ailleurs déjà dans l’orbite américaine et commençait à se surarmer, à se moderniser dans le cadre d’une future adhésion à l’Otan, à développer une ligne expansionniste aux dépens de la Russie qui devait être réduite à une petite « Moscovie ».

    Le prolongement du conflit a toutefois nécessité un changement de ligne, en raison de la colère d’une partie significative de la haute bourgeoisie américaine, représentée politiquement par Donald Trump.

    Cette fraction considère, en effet, que la priorité n’est pas la gestion de l’ordre mondial tel qu’il existe, même s’il y a une hégémonie américaine. Ce n’est pas suffisant, à leurs yeux, puisque la superpuissance impérialiste chinoise est considérée comme la menace principale pour les cinquante ans à venir, et que par conséquent tous les efforts américains devraient porter dans cette direction.

    Le conflit en Ukraine doit par conséquent être mis de côté du côté américain, et c’est la raison pour laquelle, à partir de début 2024, c’est l’Union européenne qui est censée prendre le relais, avec le Royaume-Uni. La France est partie prenante de ce passage de témoin, et compte bien être aux premières loges. C’est cela qui ouvre la période nouvelle, où la révolution devient possible.

    La France capitaliste à quitte ou double

    Pourquoi la révolution devient-elle possible justement par la nouvelle situation ? Parce que l’État modifie la base de son existence et de sa légitimité, il bouleverse le consensus obtenu jusque-là, il est obligé de se lancer dans une aventure dont il n’est nullement obligé de sortir victorieux.

    Ce qui se présente historiquement, c’est une contradiction explosive, avec d’un côté la France se lançant dans la guerre contre la Russie avec l’espoir de la victoire et de gains significatifs, et de l’autre côté la révolution comme expression de l’échec d’une telle entreprise. Ce sont les deux pôles de ce qui forme l’aspect principal de la période.

    Autrement dit, si la bourgeoisie a réussi à battre politiquement, idéologiquement, culturellement le prolétariat en France de manière ininterrompue tout au long du 20e siècle, tous les acquis bourgeois concernant un consensus général dans la société peuvent être remis en cause si la France échoue dans son option militariste contre la Russie.

    Si l’État français vacille, si les rapports entre les classes se mettent à tanguer, alors il y a la possibilité historique de recomposer le prolétariat et, à travers l’effondrement de la domination bourgeoise, d’affirmer le Nouveau Pouvoir. Un État en remplace un autre – c’est cela, la révolution.

    La bourgeoisie française veut se relancer aux côtés de la superpuissance américaine, en se plaçant comme petit soldat contre la Russie. Plus elle échoue, plus il y a un espace révolutionnaire qui peut se former !

    Il n’y a bien sûr rien de mécanique là-dedans, car un échec français peut aboutir à une longue décomposition, avant un redémarrage de la lutte des classes. Lorsque l’URSS s’est effondrée, la Russie des années 1990 est devenue en partie le Far-West, sans aucune révolution pour autant.

    Ce dont il s’agit, c’est d’une possibilité, celle de l’instauration de conditions favorables à la révolution, après des décennies de capitalisme triomphant, dans le cadre d’une consommation de masse généralisée jusqu’au 24 heures sur 24.

    Les masses sont corrompues par le capitalisme

    Naturellement, il eut été préférable que la révolution ne soit pas passive, une simple réponse à une guerre. On ne choisit cependant pas son cadre historique. Les larges masses populaires de notre pays ont, tout simplement, été corrompues par l’expansion du capitalisme au niveau mondial et par les avantages matériels de vivre dans l’un des pays les plus riches au monde.

    Elles n’ont aucune conception communiste du monde, même si certains secteurs y tendent, disons de manière idéaliste ou sentimentale. Le modèle à suivre, pour les masses, reste la petite propriété, idéalement le pavillon avec un bout de terrain. L’idéal de l’argent facile est également très largement présent et la reproduction des valeurs est une constante dans les familles.

    Plus les villes sont grandes, plus les valeurs du consumérisme libéral libertaire y priment. Les campagnes sont, elles, annexées par le capitalisme, comme arrière-pays toujours plus vidé de son sens.

    Le triomphe annuel du Salon de l’agriculture est emblématique de ce dernier aspect. Le rapport aux animaux, en France, est d’ailleurs absolument catastrophique, et toute défense de la Nature est considérée dans notre pays comme une lubie anti-rationaliste.

    Il n’y a tout simplement pas le fond idéologique et culturel en France pour l’initiative révolutionnaire. Les Français ne dépassent pas les protestations bruyantes et les revendications syndicales. Le prolétariat doit se recomposer et il n’y a rien encore qui aille en ce sens.

    La bourgeoisie française a donc toute latitude pour agir comme bon lui semble. Elle a affaire à des masses passives, ce qui la dérange pour mobiliser, mais en même temps elle n’a pas de soucis dans la mise en place de ses choix, de ses orientations.

    Le champ est totalement libre pour l’armée française, pour l’industrie militaire, pour les agitateurs militaristes, pour les soutiens de la superpuissance impérialiste américaine, pour les tenants de l’idéologie de l’Union européenne.

    La Russie comme objectif de la bourgeoisie française

    Tous les partis politiques français participant aux élections sont de toutes façons déjà alignés sur l’Otan et sur un soutien « sans faille » au régime ukrainien depuis 2022, même s’il existe bien entendu parfois des nuances et de la démagogie au sujet du risque d’escalade.

    C’est que le tournant du début de l’année 2024, où l’Union européenne se voit chargée de prendre le relais de la superpuissance impérialiste américaine pour le soutien au régime ukrainien, a été parfaitement compris à tous les niveaux, même s’il peut inquiéter.

    On connaît un matraquage médiatique et politique immense en faveur du régime ukrainien et on est même passé à un fanatisme où tous les soucis d’Europe occidentale sont attribués à la Russie, afin de pouvoir mobiliser contre elle et de lancer l’escalade.

    L’accusation bourgeoise d’une Russie « coupable » de tout est ridicule, bien entendu, mais elle a un sens caché. Aux yeux des bourgeois, qui n’ont rien compris à l’ampleur de la crise commencée en 2020, c’est l’intervention militaire russe en Ukraine qui a fait vaciller l’ordre mondial, qui provoque des grands troubles à l’intérieur des différents pays.

    En réalité, la contradiction est toujours interne et la Russie n’y est pour rien en soi. Son initiative en Ukraine est d’ailleurs elle-même une conséquence de la crise du capitalisme ouverte en 2020 avec la pandémie.

    La bourgeoisie toutefois ne comprend pas la dialectique et par conséquent, du point de vue occidental, la Russie serait coupable de tout. Un argument bourgeois revenant de manière récurrente est que la Russie serait même une dictature « communiste », semant le désordre et voulant tout remettre en cause dans la tradition de Lénine. C’est là simplement une manière déformée, de la part de la bourgeoisie, d’exprimer sa peur de la révolution.

    De manière plus pragmatique, les pays d’Europe occidentale s’imaginent également que, en agissant de manière relativement unifiée, ils sont en moyen de fournir suffisamment d’aides à l’Ukraine pour qu’elle fasse vaciller la Russie.

    Il y a en ce sens une série d’accords bilatéraux signés par le régime ukrainien, comme avec la France en février 2024, ainsi que l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Danemark et l’Italie. Il y a une vague de militarisation des différents pays, afin d’être en mesure de participer au conflit.

    Nous ne voulons pas dresser la liste du développement effectif des armées et de la production militaire, ce n’est pas le lieu et il ne s’agit pas de se focaliser sur des détails ou des chiffres. Il s’agit d’une tendance historique, où d’ici 5, 10, 15 ans, les pays occidentaux, ainsi que la Pologne, se veulent en possession d’une armée capable de mener une guerre de haute intensité. Cela veut dire la guerre.

    Un processus inexorable

    Du point de vue bourgeois, une telle militarisation n’est pas considérée comme agressive, cela serait pour se protéger d’une (prétendue) invasion russe. Aucun pays occidental ne se présente comme voulant la guerre et, même, sur le plan subjectif, les dirigeants occidentaux ne s’imaginent pas du tout être des bellicistes.

    La guerre n’est vue que comme une possibilité parmi d’autres, du moins si on omet la Pologne et la Finlande, deux pays dont le nationalisme forcené formant l’arrière-plan idéologique national les « force » littéralement à chercher la guerre. Si la Pologne aime ici à se présenter comme un pays martyr, en réalité elle vit dans la nostalgie du grand empire qu’elle a été avant le 18e siècle, avec même l’occupation militaire de Moscou en 1610.

    Néanmoins, du point de vue du matérialisme dialectique, ce qui se met en place, c’est une guerre impérialiste de repartage du monde, même si leurs protagonistes n’en ont pas conscience.

    C’est un processus inexorable, indépendant de la volonté des différents acteurs. La bourgeoisie française ne s’imagine pas mettre en place la guerre, et pourtant elle le fait tout de même, tout comme les autres bourgeoisies, de manière plus ou moins agressive.

    Le matérialisme dialectique affirme que, dans le cadre d’une crise capitaliste générale, la guerre est le seul moyen pour trouver une issue, en procédant à un repartage du monde.

    L’impérialisme, qui prend fondamentalement le dessus sur la base capitaliste, entraîne alors tous les phénomènes sociaux, culturels, idéologiques, politiques, militaires… dans son sillage. La haute bourgeoisie prend les commandes et la bourgeoisie est forcée de suivre dans son ensemble.

    On va alors à la guerre, afin de ré-impulser le capitalisme et d’élever son potentiel, en arrachant à « l’ennemi » des territoires et des ressources, de la population et des moyens de production, que ce soit de manière ouverte (par les conquêtes) ou masquée (de manière semi-coloniale).

    On en est là, du moins la perspective est toute tracée. Les hautes bourgeoisies américaine et chinoise ont pris le dessus de manière assez significative pour que le processus soit enclenché, et dans chaque pays une vraie mécanique se lance à tous les niveaux, afin de s’aligner sur l’une ou l’autre.

    C’est ce qui explique la généralisation toujours plus grande des tensions, des frictions et affrontements de nature militaire dans le monde, dans un processus quantitatif grandissant, jusqu’à la troisième guerre mondiale de repartage du monde.

    La France, maillon faible d’une chaîne américaine

    Ce dont il faut prendre conscience ici, c’est en fait la perte relative de l’indépendance nationale française. La France, comme composante de l’Union européenne et élément de l’Otan, est obligée de s’aligner sur les changements sociaux, « sociétaux », politiques, militaires, idéologiques, culturels exigés par la superpuissance impérialiste américaine.

    Et la grande chance qu’on a ici, c’est que les nationalistes sont eux-mêmes vendus à la superpuissance impérialiste américaine, ce qui bloque pour une très grande part l’émergence d’une tentative néo-gaulliste d’aventure en solitaire. C’est un aspect très important pour la possibilité d’une révolution dans notre pays !

    Cela veut dire, pourtant, que la révolution sera passive, qu’elle consistera en une réponse à la guerre impérialiste. Il n’y a pas les moyens historiques pour une opposition populaire à la guerre, c’est un fait facile à constater.

    C’est terrible comme idée et cela laisse présager une lutte extrêmement difficile, dans un contexte cauchemardesque. Mais il fallait bien que les choses avancent et puisque le prolétariat n’a pas su, de lui-même, précipiter les choses, les contradictions s’expriment d’elles-mêmes, tel un volcan.

    C’est dans l’effondrement de la bourgeoisie comme classe dominante, à travers la décomposition de son État, que l’État nouveau, démocratique et populaire, socialiste, va se générer historiquement.

    La République comme obstacle

    Ce qui facilite jusqu’à présent les succès de la bourgeoisie, c’est l’idéologie de la « République » comme forme qui serait au-delà des classes. Non seulement la droite de l’échiquier politique est « républicaine », mais également le centre et les traditions franc-maçonnes, et aussi l’ensemble de la gauche à la suite des analyses fondamentalement erronées de Jean Jaurès.

    Pour la gauche, historiquement, dans notre pays, le Socialisme serait une « République » devenue sociale. C’est une vision des choses totalement étrangère au matérialisme dialectique et c’est pourquoi il est essentiel d’avoir une solide connaissance du parcours historique de la France, du rapport entre la bourgeoisie et le prolétariat. Au style politique bourgeois, il faut opposer la science matérialiste dialectique de l’Histoire.

    On ne saurait assez se méfier de l’intelligence politique de la bourgeoisie française, qui utilise de manière pragmatique les leviers centralisés de l’État, à la suite de Louis XIV, de la Révolution française, de Napoléon, de la IIIe République.

    Mentionnons ici l’exemple marquant que fut l’entrée au Panthéon, avec sa femme Mélinée, d’une figure de la résistance communiste, Missak Manouchian, 80 années après son exécution par les nazis, en février 1944. Le président Emmanuel Macron, dans son discours, n’a pas éludé l’idéologie communiste de Missak Manouchian, y voyant un engagement plein de fraternité et présentant l’idéal communiste comme une sorte de prolongement de la Révolution française.

    C’est une manière de renforcer l’idéologie de la « République française », de nier la domination de la bourgeoisie, de maintenir la fiction d’un État au-dessus des classes.

    Il est vrai que tout cela n’aurait jamais été possible sans la trahison du Parti communiste français dirigé par Maurice Thorez, et sa soumission aux institutions « républicaines », même lors du coup d’État gaulliste de 1958 et l’instauration d’une sorte de monarchie républicaine.

    Cela n’en reste pas moins une opération idéologique très subtile de la part de la bourgeoisie. Aux yeux des Français, la « République » est au-delà de toute critique possible, et c’est là un verrou idéologique très important. Et, justement, la tradition française de se focaliser sur le président, au lieu de faire de la politique, est une grande arme de la bourgeoisie.

    La haine à l’égard du président, ou bien au contraire les appels qui lui sont faits… Son image d’une figure au-delà de la politique, comme incarnation de la nation… Tout cela a une dimension monarchique bien pratique pour la bourgeoisie française.

    Contrairement à la monarchie, la dimension temporaire de la présidence permet précisément de renouveler les espoirs, la focalisation, les attentes, la déception, le dégoût, la haine… avant de relancer un nouveau cycle avec une nouvelle figure « présidentielle ». C’est là une machinerie bien rodée.

    Périodiquement, la colère sociale s’exprime, y compris dans le bruit et la casse, sans que l’État n’intervienne réellement par la répression. Puis, c’est le reflux, et de toutes façons le cul-de-sac politique. L’État français est vraiment passé maître dans la neutralisation des conflits, c’est un point essentiel à comprendre.

    La guerre modifie le rapport entre les classes

    La guerre contre la Russie, sous supervision américaine, ne peut cependant que faire vaciller le dispositif « républicain ». Le soutien militaire au régime ukrainien peut passer comme une lettre à la poste, en présentant cela comme une initiative républicaine, le soutien à un pays « démocratique », dans le cadre de l’Union européenne.

    Cela n’amène évidemment aucun engouement de masse, et seulement quelques milliers de personnes ont manifesté dans quelques villes en France pour davantage de soutien militaire, à l’occasion des deux années du conflit le 24 févier 2024. Et cela malgré l’appel de tous les syndicats à être présent ! Mais la passivité générale est ce qui compte ici pour la bourgeoisie, qui compte agir dans l’indifférence des masses.

    Par contre, se lancer dans un affrontement militaire ouvert, c’est quelque chose de tout à fait différent. Un soutien lointain est une chose, une implication militaire directe en est une autre. L’envoi de troupes françaises, voire d’une mobilisation, ou en tout cas la mise en place d’une économie de guerre, voilà qui changerait entièrement la donne.

    La bourgeoisie française a en effet besoin, pour la guerre, de mobilisations de masse afin d’épauler son projet. Il faut des soldats, une production de guerre, le silence dans les rangs. Or, le seul levier dont elle dispose dans une société de consommation particulièrement développée, c’est l’idéologie républicaine. L’opération avait réussi en 1914, car le pays était largement composé de paysans alors. Au début du 21e siècle, c’est totalement différent et la bourgeoisie doit faire face à une situation bien différente.

    Là, la République se démasquerait comme une idéologie permettant d’entraîner les masses là où la bourgeoisie le veut, et la soumission à la superpuissance impérialiste américaine se révélerait au grand jour. Le rapport entre les classes se verrait modifier à absolument tous les niveaux.

    C’est à ce niveau que se joue la possibilité historique de réaffirmer l’option révolutionnaire.

    Révolution démocratique, puis Socialisme

    Une révolution dans un pays, c’est un phénomène particulier, mais il y a une dimension relevant de l’universel, car toute l’époque est concernée. Il faut donc être en mesure de relier les possibilités historiques d’une révolution dans le cadre d’un pays avec les exigences universelles du Socialisme au niveau mondial.

    Pour cette raison, la révolution en France qui devient possible comme moyen de renverser la guerre impérialiste ne peut pas être socialiste, et en même temps elle le devient par la force des choses.

    La révolution contre la guerre sera de nature démocratique : contre l’armée française, contre les monopoles, contre les forces militaristes alignées sur la guerre, contre la domination de la superpuissance impérialiste américaine. Ce sera une unité populaire sur une base démocratique, pour enrayer la machine de guerre.

    En même temps, c’est de là qu’émergera le Socialisme, dont les masses sont encore extrêmement loin sur le plan des valeurs, de la culture, de l’idéologie. Car, sur le plan historique, le monde est mûr pour le Socialisme, et ne pas aller dans un sens permet d’aller dans l’autre sens – c’est la dialectique.

    Une France décrochant de la guerre impérialiste, rompant avec la chaîne militaire américaine, ne peut que basculer dans le Socialisme.

    Rompre avec les valeurs impérialistes

    Nous parlons donc de révolution en deux temps et chaque temps entraîne l’autre, de manière dialectique – le second temps n’est pas une « conséquence » du premier. Ce n’est pas seulement parce que la révolution sera démocratique que le Socialisme suivra, c’est aussi parce que le Socialisme suivra que la révolution démocratique aura lieu.

    C’est en effet le Socialisme qui appelle historiquement, depuis l’avenir, et la révolution démocratique ne peut exister qu’en tendant vers lui. La révolution ne dépend pas que du passé, de la guerre. Elle dépend de l’avenir également, de la capacité à se mettre à la hauteur des exigences de l’époque.

    Or, comme dit, il n’y a en France, en 2024, absolument aucune possibilité de situation où l’impérialisme soit abattu directement. Le peuple est inorganisé politiquement, et désorganisé par un capitalisme riche et puissant. La bourgeoisie est décadente, mais elle maintient un certain cap et profite de se placer dans l’orbite américaine pour se laisser porter.

    Comment alors trouver les cadres disponibles pour mener la lutte contre la guerre impérialiste ? Nous sommes ici très pessimistes et considérons que nous sommes en apparence davantage dans la situation de Rosa Luxembourg en Allemagne, avec un camp anti-guerre isolé et réprimé, que dans celle de Lénine en Russie avec une organisation très solide.

    Mais par la dialectique, il est possible de transformer les faiblesses en force, et tout peut aller très vite. Cela exige d’être à la hauteur sur le plan de l’idéologie, de la culture, de l’organisation pour que le matérialisme dialectique puisse être saisi, assimilé, diffusé, synthétisé, appliqué.

    Une révolution des mentalités, c’est-à-dire une révolution culturelle est impérative pour qu’un réel mouvement anti-guerre se produise. La rupture avec les valeurs impérialistes est immanquablement nécessaire pour être en mesure de s’opposer à la guerre impérialiste.

    C’est la jeunesse, née dans le 24 heures sur 24 du capitalisme, produite dans le cadre de forces productives développées, qui fera effacer les frontières nationales et abolira les classes, pour faire vivre le Communisme à l’échelle mondiale. C’est l’aboutissement d’un processus historique.

    Le prolétariat en rupture et la société de consommation

    La bourgeoisie, tout comme le prolétariat, sont deux classes antagonistes mais liées l’une à l’autre, nées de manière contradictoire dans le sillage de la dissolution du mode de production féodal au cours de la période allant de la fin du 14e siècle au 19e siècle.

    Chaque prolétaire est lié à la bourgeoisie dans le cadre du salariat, qui est un rapport fondé sur le contrat présumé libre. En apparence, il n’y a pas de liens forcés comme dans l’esclavage ou le servage, mais en réalité, il y a soumission du prolétariat.

    Et ce qu’on remarque d’emblée, c’est que la base du lien bourgeoisie-prolétariat est à la fois plus complexe et plus simple que celui entre patriciens-esclaves, seigneurs-paysans. Plus complexe, car le lien de dépendance est plus sophistiqué, plus simple car chacun vient à l’autre en apparence de manière « naturelle ».

    L’esclave est approprié par la force, quand le prolétaire semble venir par sa « libre volonté ». Par contre, le prolétaire n’est plus rien sans le salariat, car il n’a rien que sa capacité physiologique et intellectuelle, quand l’esclave bénéficie d’une vie assurée dans sa dépendance en tant que « meuble » de son maître.

    Entre le 19e siècle et le milieu du 20e siècle, le rapport entre bourgeoisie et le prolétariat avait comme expression la paupérisation absolue de l’un au détriment de l’enrichissement relatif de l’autre. Avec l’essor des forces productives dans la période 1950-1970, puis 1990-2000, il y a eu dans les foyers capitalistes initiaux un recul majeur de la paupérisation absolu.

    On peut considérer alors que la dépendance du prolétariat à la bourgeoisie s’est approfondie et que son opposition s’est amoindrie, quand, durant la période précédant les années 1950, c’était l’inverse – une dépendance faible pour une opposition forte.

    C’est ce que nous appelons, pour résumer, la société de consommation. Et ce qui va jouer dans la lutte contre la guerre impérialiste, c’est la recomposition du prolétariat et sa rupture avec la société de consommation.

    Nous ne parlons pas d’un retour en arrière au niveau des richesses matérielles, mais du remplacement d’une consommation effrénée, forcenée, chaotique, laide, aliénée, par une consommation choisie, esthétique, pleine de sens, harmonieuse dialectiquement avec la production.

    Il faut un très haut niveau culturel pour ça, il faut une conscience communiste, il faut maîtriser les fondamentaux du matérialisme dialectique. C’est cela, en définitive, l’arme ultime contre la guerre impérialiste. La lutte contre la guerre est un combat d’une époque contre une autre, de l’avenir contre le passé.

    Soyons au présent à la hauteur de cette contradiction. Voyons les choses, toutes les choses, à travers le prisme de cette bataille historique !

    Parti Matérialiste Dialectique

    1er mars 2024

    => retour à la revue Connexions

  • Le Parti matérialiste dialectique (PMD) – principes

    1. Le matérialisme dialectique est l’affirmation du caractère inépuisable de la matière éternelle qui obéit à la loi de la contradiction.

    2. « La philosophie marxiste considère que la loi de l’unité des contraires est la loi fondamentale de l’univers. Cette loi agit universellement aussi bien dans la nature que dans la société humaine et dans la pensée des hommes. Entre les aspects opposés de la contradiction, il y a à la fois unité et lutte, c’est cela même qui pousse les choses et les phénomènes à se mouvoir et à changer. » (Mao Zedong, De la contradiction)

    3. Le PMD a comme raison d’être la systématisation du matérialisme dialectique dans tous les domaines, au niveau personnel et à l’échelle de toute la société, dans une humanité unifiée vivant en harmonie avec la planète Terre reconnue comme Biosphère.

    4. Le matérialisme dialectique est porté par le prolétariat, classe transformatrice de la réalité et unificatrice de l’humanité, génératrice du mode de production socialiste abolissant toute exploitation et toute oppression.

    5. Le PMD représente l’avant-garde du prolétariat et son activité a comme aspect principal de générer et diriger les luttes de classe pour le renversement de la bourgeoisie et l’instauration de la classe ouvrière comme classe dirigeante, systématisant la vision matérialiste dialectique du monde.

    6. Les principales références théoriques du PMD sont les ouvrages Matérialisme dialectique et matérialisme historique de Staline et De la contradiction de Mao Zedong.

    7. Les principales références historiques du PMD sont l’existence historique de l’URSS depuis la révolution d’Octobre 1917 jusqu’à 1952, celle de la République populaire de Chine depuis sa fondation en 1949 à 1976 (avec principalement la Grande révolution culturelle prolétarienne),

    celle du Parti Communiste du Pérou de 1980 à 1992 (avec l’affirmation du marxisme-léninisme-maoïsme).

    8. Le PMD souligne que les débuts de l’humanité, avec l’agriculture et l’élevage, ont instauré un rapport inégal avec la Nature ainsi que placé les femmes dans une situation d’infériorité : cela implique des révolutions culturelles pour libérer la psyché féminine et corriger les rapports à la Nature, notamment ceux avec les animaux.

    9. Le PMD a comme démarche la lutte des deux lignes, dans tous les domaines : la constatation de la contradiction, l’affirmation de la ligne rouge face à la ligne noire, le renforcement de la ligne rouge jusqu’à la victoire de celle-ci.

    10. Le PMD souligne l’importance de l’optimisme collectif, de l’enthousiasme historique, de l’abnégation personnelle, du romantisme révolutionnaire ; il combat le pessimisme, l’isolement anti-social, la vanité égoïste, l’indifférence insensible.

    11. Le PMD est une organisation révolutionnaire ; on l’intègre par cooptation d’au moins trois de ses membres. La compartimentation de ses structures est la règle, le secret de l’organisation le principe. Être membre de l’organisation signifie être actif dans une organisation du PMD, appliquer les résolutions prises, observer la discipline qui lui est propre.

    12. Le PMD fonctionne selon la dialectique de la centralisation et de la démocratie. Ce centralisme démocratique implique que les organes de direction à tous les échelons sont élus par voie de consultation démocratique lors des congrès et qu’entre les congrès, le membre du PMD doit se soumettre à l’organisation, la minorité à la majorité, l’échelon inférieur à l’échelon supérieur et l’ensemble du Parti au Comité central.

    13. Si un membre commet une infraction à la discipline du Parti, l’organisation du Parti de l’échelon intéressé, dans les limites de ses attributions et selon le cas considéré, lui appliquera l’une des sanctions suivantes : avertissement, blâme, destitution des fonctions au sein du Parti, mise en observation, exclusion du Parti.

    => retour à la revue Connexions

  • The French spirit and the revolution

    France is a country with its own historical trajectory, and the revolution will necessarily be the fruit of this specific trajectory. This is why it is necessary to have a thorough understanding of the French national trajectory, the evolution of society and of modes of production, all of which provide a framework in which contradictions are expressed and the future is seen as the fruit of the past.

    France was born in the 16th century, when the unification achieved by the monarchy, principally with François I, made it possible to establish a framework of sufficient scope for the French language, a territory benefiting from relative homogeneity in terms of unification, an economy that was at least significantly common, and a culture that was active enough to establish a psychic formation. However, nascent France was facing the wars of religion that were to traumatize it, and its continued existence depended on the existence of a centralized state apparatus put in place by the ‘Politicians’. Their watchword was ‘scepticism’ in order to maintain a certain rationalism.

    Their philosopher was Montaigne, who was at the forefront of supporting Henri IV. Henri IV changed religion six times in his life, the last time to become King of France. Even in the 17th century, when rationalism as such triumphed with the classical spirit, thinkers and writers were busy taking a sceptical look at human nature and morals, in the hope of correcting them (Molière, Racine, La Fontaine, La Rochefoucauld, La Bruyère, etc.).

    Subsequently, the Enlightenment came to be seen above all as a generalized scepticism of the dominant ideology, absolute monarchy and Catholicism; the approach remained mainly at the level of a critical eye, of biting criticism, of which Voltaire is the greatest exponent. Although there was indeed a French materialism (Diderot, d’Holbach, Helvétius, La Mettrie), of which the Encyclopédie is the sum, it never achieved a synthesis and never became a general system of thought. For this reason, once the French Revolution was over, it quickly withered away.

    In France, then, Protestantism failed in the 16th century, 17th-century classicism never composed a theoretical monument, and the Enlightenment vision of the 18th century never established itself as a complete system either. The same is true of the 19th century. None of the movements that left their deepest mark on it established a doctrine: neither Freemasonry, nor the royalism of the Action Française, nor Republican radicalism, nor the labour movement (whether socialist or trade unionist).

    Scepticism remains the underlying substance of the French spirit, and if we look closely, we can see that its counterpart is legitimism. Since the French mind claims to be rationalist, it considers that as long as things are, there will be a way of extending them in one way or another. For there to be a new craze, a new legitimacy must first have been established.

    For this reason, the Enlightenment was not a mass movement in France; it was a movement to gain legitimacy for new ideas, opening the door to a transformation of French scepticism, from scepticism about the new to scepticism about the old. Similarly, the Front Populaire and the Résistance were not mass movements: it was only after they had been established, and because of a ‘blocked’ historical situation, that the masses, recognizing their legitimacy, rushed to follow them.

    This question of legitimacy explains the complete defeat of May-1968, whose sudden eruption failed to take hold in French society, except through François Mitterrand and the long work of legitimacy carried out since 1945 by the ‘second left’; it also helps us to understand the complete triumph of General de Gaulle’s coup d’état in 1958, carried by the legitimacy of his action in response to the defeat of 1940.

    While the question of new legitimacy always plays a fundamental role in the establishment of a new regime, it is important to understand how it works in relation to the sceptical, rationalist French mindset. This is a stumbling block that cannot be avoided and that must be faced as the great test for achieving revolution in France.

    => documents in English

  • The PMD, a revolutionary fortress at the heart of the nexus of the first and second general crises

    In the revolutionary process, we know that there are phases, whose dynamics were clearly illustrated by Mao Zedong through the schema of strategic defense, strategic balance and then strategic offensive. In this scheme, there is a dialectical dynamic through the offensive, then counter-defence, counter-offensive, etc., in a spiral path that continues uninterrupted until Communism.

    When we look back at the experience of the First General Crisis, which began in 1917 and ended in 1989, we need to highlight an important ideological element for our times.

    At each historical interval that presented itself as ‘strategic defense’, specific theoretical work was carried out, not for the immediate tasks of the revolution, but for its universal consolidation. This formed the proletarian counter-offensive to the bourgeois counter-offensive, a kind of counter-counter-offensive.

    When Friedrich Engels published his analysis of the ‘Dialectics of Nature’ in 1883, it took place in a rather unfavorable historical context. We were in the ashes of the failure of the Paris Commune, the First International had collapsed and the Second had not yet been founded, and the political conditions of the struggle in Germany had been particularly hardened by Bismarck’s anti-socialist laws of 1878.

    With such an emphasis on ideology, the retreat of the Revolution became relative, as it continued its momentum by consolidating its foundations, in a movement of reflection with practice. Indeed, the ‘Dialectics of Nature’ corresponds to a context of repression, but at the same time to the stabilization of a social-democratic centre whose political core is consolidated.

    Similarly, when Lenin published ‘Materialism and Empirio-criticism’ in 1908, the Revolution in Russia was confronted with the ‘Stolypinian reaction’, but also with the solidification of the majority faction of the Russian Social Democratic Party. Here too, the retreat of the revolution became relative, because this work shattered the idealistic wanderings and other ideological opportunisms present even in the social-democratic camp.

    So it is no coincidence that ‘Materialism and Empirio-criticism’ is historically placed in continuity with Engels’ “Dialectics of Nature”, which was unknown to Lenin. It had in fact been recuperated by the revisionists of German social democracy, who had been careful to put it aside. It was not until 1925 that it was republished by the Russian Communists.

    In reality, there is a process of enrichment, like a staircase with steps that are compiled to reach ever greater heights of vision. This is why we read in the famous ‘History of the Communist Party of the Soviet Union (Bolshevik) – short course’, published in 1938, that:

    “In order to appreciate the tremendous part played by Lenin’s book in the history of our Party and to realize what theoretical treasure Lenin safeguarded from the motley crowd of revisionists and renegades of the period of the Stolypin reaction, we must acquaint ourselves, if only briefly, with the fundamentals of dialectical and historical materialism.

    This is all the more necessary because dialectical and historical materialism constitute the theoretical basis of Communism, the theoretical foundations of the Marxist party, and it is the duty of every active member of our Party to know these principles and hence to study them.

    What, then, is

    1) Dialectical materialism?

    2) Historical materialism?”

    This was followed in the short course by the great classic ‘Dialectical Materialism and Historical Materialism’, written by Stalin especially for the occasion. It was at the same time, in 1937, that Mao wrote ‘On Contradiction’, a classic which, in addition to protecting and defending the gains made, would also become a new beacon illuminating and deepening the dialectical materialist understanding of the world.

    During this period, the World Revolution also had to contend with the strengthening of the counter-revolution in the fascist regimes, and its objective ally in the revolutionary camp – Trotskyism – but also with the stabilization of the first socialist state, the USSR.

    When the Revolution knows moments on the defensive, then idealistic, mechanical and regressive conceptions are inevitably reflected at the very heart of the revolutionary camp. This led to apathy and demoralization, as the 1938 short course noted:

    “The defeat of the Revolution of 1905 started a process of disintegration and degeneration in the ranks of the fellow-travelers of the revolution. Degenerate and decadent tendencies grew particularly marked among the intelligentsia.

    The fellow-travelers who came from the bourgeois camp to join the movement during the upsurge of the revolution deserted the Party in the days of reaction (…).

    The offensive of the counter-revolution was waged on the ideological front as well.

    There appeared a whole horde of fashionable writers who « criticized » Marxism, and « demolished » it, mocked and scoffed at the revolution, extolled treachery, and lauded sexual depravity under the guise of the « cult of individuality. »

    In the realm of philosophy increasing attempts were made to « criticize » and revise Marxism; there also appeared all sorts of religious trends camouflaged by pseudo-scientific theories.”

    This is why the four classics cited above form, albeit at different times, one and the same truth: that of the reaffirmation of the ideological foundations of the Revolution in a context marked by the subjective depletion of its forces.

    This makes it possible to temporize the strategic defense in the sense that the universal, scientific principle underlying the Revolution is affirmed, and consequently to safeguard revolutionary subjectivity.

    And we know to what extent revolutionary subjectivity is the driving force behind the Revolution itself.

    There is an extension and enrichment of ‘Dialectics of Nature’ (1883) to ‘Dialectical Materialism and Historical Materialism’ (1938), via ‘Materialism and Empirio-critism’ (1908) and ‘On Contradiction’ (1937). The last ‘inverted’ word in the revolutionary counter-counter-offensive is naturally to be found in the writings of the Great Proletarian Cultural Revolution in China.

    Between 1883 and 1938 (but also up to 1966), we are at the heart of the first spiral movements of the revolution (offensive, defensive, counter-offensive, etc.) in the context of the first general crisis of capitalism: the texts cited here affirm and stabilize theoretical elements taken for granted by previous practice.

    What we have here is a work of synthesis. If we understand precisely this, we can see that the emphasis on the Dialectical Materialist Party (DMP) corresponds to an obvious historical situation: that of the nexus between the first general crisis and the second general crisis.

    To put it another way: the Revolution is in strategic defense in relation to past dynamics, but tends to be on the offensive in relation to the future.

    It is a question of corresponding to this situation on a general level, in the ideological affirmation itself, in order to counter despondency and demoralization, and to affirm the general offensive and optimism.

    There is a need to re-impulse revolutionary subjectivity in a context of the crushing of the Revolution, not merely conjunctural like the Bismarckian, Stolypinian, Hitlerian repressions, etc., but in a general way.

    We are talking here about a situation marked by the general crushing of the first wave of the World Revolution and the creation of the conditions for the deployment of the second wave.

    The DMP signifies precisely this reading of things, and stands at the heart of the nexus as guardian of the temple (that of the achievements of the previous century) and vanguard of the future revolutionary movement.

    This is the meaning of the DMP’s affirmation, because it appears in such a historical context that there is a need to affirm the world view not just as a ‘theoretical basis’ for practical revolutionary commitment, but as revolutionary commitment itself, its very subjective substance. The times now make this possible.

    We are not simply affirming the continuity of the classical texts mentioned above, in the idea of a cumulative heritage, but rather their universal synthesis, or rather their universalization in a synthetic way.

    This is not a new step in the staircase, as the previous theoretical elements were, but the arrival on a landing before the ascent of a new staircase.

    This is materialized by a new cerebral, synaptic connection with a subjectivity developing a total vision of the world, that of dialectical materialism.

    The DMP is the revolutionary expression in the nexus itself, and by this very fact it must protect and systematize the dialectical materialist worldview while at the same time extending it, because the revolution can only take a relative step backwards.

    Anyone who does not understand this is immediately on the outside of the world revolution that is about to take place.

    => documents in English

  • Dialectical materialism and the nexus of contradiction as the transition point of spiral movement and its cycles

    The question of transition is extremely difficult in dialectical materialism. Indeed, since movement and stasis are dialectically opposed, how can we consider that they establish a ‘constructive’, ‘productive’ relationship, to enable us to cross a threshold?

    The difficulty is such that it has served revisionism well, claiming to have solved the problem by asserting that, in ‘creative’ moments, it is not one that becomes two, but two that become one. There would be a ‘unification’ of opposites in order to move things and phenomena forward.

    When things move forward, it is because they have ‘united’ their forces. Differences would be cancelled out so that there would be enough energy, enough support, to move forward. This is, of course, an anti-dialectical trap, which, behind the slogan ‘union is strength’, serves to erase nuances and differences, and to neutralize contradictions, all in the name of a hypothetical intermediate period which is ‘productive’, useful, necessary, etc.

    In contrast to revisionism, which falsifies the communist vision of the world, dialectical materialism does not conceive of a ‘transition’ as a ‘reconciliation’ of two contradictory poles. It sees transition as the expression of a contradiction, and therefore as a separation.

    Strictly speaking, transition is only one aspect of the confrontation between the new and the old. It occurs at a particular level, which is of essential importance, which establishes the main aspect for the whole thing, the whole phenomenon. It is in this sense that we can speak of ‘transition’. But there is no such thing as transition as an airlock, an isolated and separate moment. In this sense, the famous words of the Italian intellectual Antonio Gramsci, a major figure in Italian communism, are totally erroneous and anti-dialectical: “The old world is dying, and the new world struggles to be born: now is the time of monsters.”

    This is the hypothesis of a ‘transition’ as a moment of annulment of contradictions, as we find among all those who reject dialectical materialism and therefore don’t know how to ‘read’ contradictions. This is the same conception that proposes ‘transitions’ from capitalism to socialism based on ‘magic’ means such as education, elections, trade unionism, strikes, etc.

    How should we see things? What is this contradiction that expresses what a transition really is? Let’s put things in perspective. A movement is by definition both continuous and non-continuous, in other words there is no precise, static, unilateral ‘moment’ when we know that we are moving from one thing to another, from one stage to another.

    But there is transformation: the transformation of a sexual relationship between a man and a woman into an unborn child, the transformation of capitalism into socialism, the transformation of food into the chemical elements that make our bodies function, and so on.

    We can arbitrarily define a key moment to announce a passage from one stage to another, but this would only be descriptive. There’s a very important point to be made here: such an arbitrary approach is the basis of what we call perversion.

    Someone who eats, but immediately makes himself vomit so as not to gain weight, has in his imagination the fetish that, since the food is eaten, it has been assimilated in order to live, and that it is therefore possible to get rid of it by ‘cheating’.

    Men who are fascinated by teenagers have a fetish for the transformation into an adult, seen as a ‘potential’, a realization achieved but not yet realized. In this sense, a society where children and teenagers dress like adults contributes to confusion and tends to leave the door open to fetishes.

    Any failure to adopt a dialectical materialist understanding of things and phenomena inevitably leads to fetishes, to ‘static’ readings, to a narrow-minded conception. To avoid such an error, we must turn to spiral movement.

    It is well known that dialectical materialism emphasizes spiral movement, but what exactly is meant by this? Here, the concept is mainly descriptive, to indicate that things do not move in a straight line.

    Lenin uses the concept of the spiral in the following way, in 1915, in his notes on the question of dialectics. He says that if we look at things with an ‘immediate’ vision, we imagine that things progress in a straight line. But in reality, progress comes in leaps and bounds, with breaks and setbacks. So it’s better to talk about a spiral.

    It is those who have a vested interest in a narrow vision of things who insist on the concept of the ‘straight line’, in order to give rise to fetishes to which we must cling, so that nothing changes, so that everything remains the same.

    “Human knowledge is not (or does not follow) a straight line, but a curve, which endlessly approximates a series of circles, a spiral.

    Any fragment, segment, section of this curve can be transformed (transformed one-sidedly) into an independent, complete straight line, which then (if one does not see the wood for the trees) leads into the quagmire, into clerical obscurantism (where it is anchored by the class interests of the ruling classes).

    Rectilinearity and one-sidedness, woodenness and petrification, subjectivism and subjective blindness—voila the epistemological roots of idealism.

    And clerical obscurantism (=philosophical idealism), of course, has epistemological roots, it is not groundless; it is a sterile flower undoubtedly, but a sterile flower that grows on the living tree of living, fertile, genuine, powerful, omnipotent, objective, absolute human knowledge. »

    Let’s take a look at the concept of the spiral and see how it can be used to great effect. A spiral is a curve that wraps around an axis. However, a spiral can also be a curve that wraps around an axis… moving away from or towards that axis, ad infinitum.

    In the latter case, a spiral is a curved movement that moves ever closer to or further away from a fixed point, an axis, to infinity.

    Here is a representation drawn by the engraver Jost Amman and designed by the German humanist goldsmith Wenzel Jamnitzer, for the 1568 work Perspectiva corporum regularium (Perspective of regular bodies).

    The representation here has just one problem: the three-dimensional spiral reaches one end. This end has to be removed, otherwise there would be an end, and we would need a beginning, which would run counter to the principle of infinity and lead us back to the ‘bounded’.

    Why is this spiral movement correct, in principle, to represent movement?

    There are a series of very complex points.

    1. The spiral movement shows a difference in degrees between the different levels of curves.

    The further you go, the ‘smaller’ and more compressed the curves become. This is consistent with quantitative evolution. It becomes heavier, faster, deeper and so on.

    The opposite is true: curves that become wider and larger represent dilation, spreading out, development, etc.

    This is the contradiction between quality and quality.

    2. The spiral movement is evidence of an ongoing process.

    When we move towards or away from the axis, we do it gradually.

    This “gradually” is was what we call time ; time is produced by space, by infinite matter, which is everywhere, which is everything, and which transforms itself.

    The notation of this transformation, by contrast of one transformation with respect to another, is what we call time.

    3. Spiral movement tends around a fixed point, without ever reaching it.

    On the one hand, it conforms to the movement of each phenomenon, which is on one side fixed (like the point), on the other in movement (like the spiral). Opposites always interpenetrate; there is never “reconciliation”.

    Nothing is ever static, united, unified, unique, there is never any possible assimilation of the curve and the static point. Movement always takes precedence over the static dimension – and the static dimension is the skeleton of reality, without which nothing would exist, dispersing into movement. It is matter that is dialectical, not dialectic that is material.

    How do these points covered help with the question of transition?

    Well, if we reason without the spiral movement, we will clearly grasp the two poles of a contradiction. However, there is a major risk: that of falling into duality and not dialectics.

    This is precisely where lies the mistake not to be made. This is ultimately the opposite error of revisionism. Revisionism says that two become one, that there is reconciliation of opposites. Duality is the error that fetishizes the two opposites in their pure opposition.

    Duality results, all in all, in conceiving that opposites cannot be converted into one another. The reproach that Mao Zedong ultimately made of Stalin was precisely that he sometimes replaced dialectics with duality, and arrived at mechanistic or administrative solutions. This is where it will help to better understand what a transition is.

    If we start from the principle that opposites can be converted into each other, then, due to unequal development, there will necessarily be one aspect which will become principal, in relation to the other aspects which are secondary.

    Let us recall here that uneven development does not at all designate the opposite of linear movement; to make such an error would demonstrate a complete misunderstanding of dialectical materialism. Uneven development always concerns several things, several aspects, several phenomena.

    We cannot therefore say of something that it is experiencing “uneven development”. What it knows is non-linear movement.

    It is within it that uneven development takes place, with its different aspects. It is also in the relationship to other things that there is a situation of unequal development.

    This is very important here, because otherwise we would deny the principle of difference. Uneven development is the expression of nuance, of difference. It is a relationship between things – and that is not what we are looking for here, since we want to know the transition, which is posed as a “non-relation” between things, an intermediate period.

    In other words, what we are looking for here is how to determine a transition within movement, a movement that dialectical materialism analyses as uninterrupted and infinite.

    How then can we find the finite in the infinite, the static in movement? And it must be a finite that goes to infinity, the static that goes to movement, because the transition leads to the next thing by coming from the previous thing.

    We must put it as follows. In contradiction, opposites are at times converted into each other.

    What we can then call a ‘nexus’ is the place where this conversion is expressed in the most marked way, where it plays the most advanced role.

    It is the nexus which, in a transformation, is the expression of the transition.

    And this nexus is the ‘static’ point of spiral movement, which spiral movement never reaches.

    Or, to put it another way: the nexus is the aspect of a contradiction where, at one and the same time, we move further away from and closer to both the old and the new.

    Let’s look at a few examples to clarify things.

    a) A man and a woman meet and develop feelings for each other. They become a couple. The transition from being single with feelings to being a couple is their first kiss.

    The tension of this transition in the first kiss is a perfect illustration of the nexus, where there is a contradictory movement away from and towards both the past and the future.

    Going towards the other person is a negation of the self, because you have to change, and at the same time an affirmation, because you are going towards the person you are going to be from now on.

    But the movement of love is also based on self-affirmation, since it is the old self that is experiencing a lack, which leads to negation, since we are going to deny the lack by making it disappear by being with the loved one.

    b) Hunger is the expression of a nutritional need, which is expressed by bodily discomfort. We eat to respond to this contradiction, which is need versus lack.

    When we eat, we fill the gap. The spiral movement tends to satisfy the need. But it can never fill it, because even when the need is satisfied, it returns to being lack. Once we have eaten, we will be obliged to eat again later. Opposites are converted into each other.

    We eat to keep hunger at bay, but by eating we keep the body functioning and at the same time we get closer to hunger.

    And this contradiction is the nexus of the entire human biological system.

    Without food, all the rest of the functioning cannot take place. The transition between the different moments of the human being is marked by the meal. This explains the historical importance of this particular moment.

    It’s also worth noting that this is where we discover the concept of cycles. Each feeding cycle repeats itself, but there are nuances and differences; we do not eat in the same way as a baby, a child, an adolescent, an adult or as an elder.

    c) A human being moves from adolescence to adulthood. If we take the spiral movement, we can’t really see a boundary, a mark of separation.

    Through the contradictions, however, we can see the fundamental contours: we reach a certain maturity, bodily growth has ceased and all the biological factors (particularly hormonal) have stabilised.

    In this bundle of contradictions, there is a point that will become the nexus, because it is at this point that the conversion of opposites into each other is most marked.

    What are these two opposites? Well, on the one hand it’s the completed look at oneself and on the other the recognition of the rest of the society that one is integrating. It is through the integration of the whole person into adult society that the transition is completed: that is the nexus.

    A citizenship ceremony seems inevitable as recognition of the process; in France, it was traditionally the baccalaureate that played this role in the second half of the 20th century.

    d) There are usually four seasons, with spring followed by summer and autumn followed by winter. Of course, there is no such mechanical succession, but rather a contradiction between the colder and warmer seasons.

    And how do you see the transition from one to the other? By the length of the days.

    They are short in winter and long in summer. This is how vegetation generally knows how to behave, because it interprets the length of the sunshine.

    However, the change is not linear, but in a spiral way of expression. If the sun formally ‘sets’ later on a certain day than on the previous day, it may well be that on that day the clouds are blocking out the light, whereas on the previous day the weather was fine, so the day was genuinely longer.

    However, there is a general movement from more daylight to less daylight, and then vice versa from less daylight to more daylight. Obviously, the nexus, the transition, occurs around the 21th of June for summer and the 21th of December for winter.

    This is the moment when the transition is concentrated, going from one movement to another, transforming itself into its opposite. The nexus is very easy to see in the calendar, with a real sense of ‘static’ fixation and reversal.

    This explains the major place given by humanity, in different parts of the world, over and above different paths, to the summer and winter solstices.

    e) A sprained ankle is an injury. At the heart of the contradiction between the ankle and the accident causing the injury, the nexus is the inflammatory process: it is the moment of transition between the injured ankle and its healing, the expression of the repair phase.

    Inflammation is the way in which the human body brings to a specific area the nutrients it needs to repair itself. It is the recognition of the injury, in order to move away from it; we move towards and away from the injury at the same time.

    Here we can see that prescribing anti-inflammatories does not correspond to an understanding of the dialectical process of injury, since they aim to combat a phenomenon internal to the contradiction at the very root of repair.

    It is far more appropriate to use ice to help the blood circulation, initially accompanying the supply of nutrients taken up by the inflammation.

    f) The Great Proletarian Cultural Revolution represents a grasp of the question of transition, because it is based on the understanding that the general articulation of the elements making up tradition is based on one main aspect.

    All the phases of the GPCR have to do with battles over this nexus, which varies from moment to moment and which must be found in order to act wisely. The GPCR began with a theatrical critique, then moved on to universities, the division of labour, cosmology, mathematics, the alleged cult of genius, and so on.

    Its successes lay in identifying the nexus and calibrating its work at that level.

    g) When the capitalist mode of production took off in Western Europe, the feudal worldview was shaken to its foundations. The bourgeoisie began a struggle to the death with feudalism and the aristocracy that supported it, and therefore with the feudal worldview, of which the Roman Catholic religion was the most successful expression.

    But in France, because of the failure of Calvinism, the transformation took a diversion, through absolute monarchy, the rationalism of the Enlightenment and the adaptation of Catholicism (Augustinian dissidence, also known as Jansenism, social Catholicism, etc.).

    The historical paradox is that neither the aristocracy nor the Catholic Church were really eliminated, with their survival beyond the historical period when their role was central. This has played a significant role, through the perversion of certain elements in the direction of bourgeois progress.

    Hence the impression sometimes given of a confused era in which we don’t know where the decadent elements are and where the progressive ones are. A Catholic cleric may have appeared very avant-garde for his time, while an Enlightenment thinker may have appeared totally decadent on certain points in particular.

    In other words, because historically, the trend was towards the crushing of feudalism and therefore of the forces behind it, but at the same time, each of the elements of French society at the time was each moment in the nexus more or less aligned with this trend, which inevitably led to the Revolution.

    The tension between the implacability of the historical movement on a material level and the extreme diversity of the elements making up human society and the instability of their trajectory, due to differences in the development of consciousness, makes it possible to understand the process as both tendentially clear-cut, but circumstantially bushy and almost unreadable in appearance.

    All these examples clearly show that it is the question of worldview that is central here. It follows fundamentally from the assimilation of this notion of nexus, in the sense that the worldview is produced by the nexus and makes it possible to grasp the next.

    Dialectical materialism achieves an absolutely fundamental transition, a step towards aligning one’s consciousness with the Cosmos as eternal matter in motion.

    Paradoxically, this understanding clashes precisely with human consciousness in its very movement within matter. Human consciousness is finite, as opposed to the universe, which is infinite.

    It is what we call History that is here turned upside down in a fascinating and even vertiginous way: it opens up nothing less than the question of the relative relationship of human consciousness to time, in terms of sensitive perception.

    The bourgeois understanding of history, now outmoded, focuses on the abundance of circumstantial events, in an attempt to put forward a pseudo unpredictable aspect of history, in which the human will would have a space, expressed by actors more or less aware of their role. Bourgeois understanding of history is thus logically reduced to a series of explanations of well-circumstantiated problems.

    On the contrary, the proletarian understanding of history sets understanding to face explanation itself, by affirming the centrality of transformation. Dialectical materialism focuses on the general tendency, before tackling the particular declension.

    At the same time, it affirms that in the particular declension there is an affirmation of the general tendency – but it does not make a fetish of it, being aware of the uneven development of things, of phenomena within a general process.

    The nexuses in the historical development of Humanity may in fact be more or less long, more or less dense, more or less localized or circumscribed, and thus form part of a more or less striking sequence, echoing the relationship to the nexus itself and determining the capacity to perceive it. This is where the avant-garde is formed.

    In the same way, in all the sciences in general, understanding the nexus is fundamental to grasping the confrontation between the old and the new, their junction and their confrontation, their combination and their separation.

    In this sense, we can say that the Revolution is the updating, or rather the education in the strict sense of elevation, that Humanity undertakes to realign itself with material reality and its movement.

    To understand the nexus is to grasp the transition as the closest and furthest point between the old and the new; this is where the contradiction expresses its greatest tension.

    This explains the traumatic situation of humanity today, deeply engaged in the nexus that must realign the History of Humanity with the movement of the Cosmos, and yet still without an understanding of historical necessities, whereas what we are experiencing is the end of the History of Humanity and the beginning of the Understanding of the Cosmos, as an active component of it.

    => documents in English

  • The Dawn of the New Humanity through the dialectical nexus

    In the course of our analysis of the crisis of capitalism in our time, we have discovered and formalized the concept of the nexus, as a key element in understanding the spiral development of matter.

    This concept is a highly valuable standard that we use to oppose head-on and significantly the enemies of dialectical materialism, who mask their idealism or dualism behind an erroneous understanding of materialism (at best). It is a decisive criterion of differentiation that makes it possible to identify our organisation.

    You could say that it separates us from all those people or organizations who unthinkingly endorse the famous words of Antonio Gramsci (1891-1937), a famous figure of Italian communism who has been quoted over and over again: “The old world is dying, and the new world struggles to be born: now is the time of monsters.”

    Many people see this as a summary of their way of seeing things, which is true. But it is precisely their whole way of looking at things that is incorrect.

    In fact, this erroneous assertion confuses the concept of ‘transition’, understood in the sense given here as the moment of a supposedly revolutionary unification, amalgamating on the one hand the old world into a waste tending towards monstrosity, while in the same movement there would symmetrically take place the unification of elements formally opposed to the old world, hitherto separate, even contrary, whose unification would make it possible to give impetus, a dynamic.

    We summarize this inaccurate approach by saying that it says that two become one, to which we oppose the correct principle: one becomes two, making it possible to grasp the transition in the revolutionary sense as being a nexus.

    This correct understanding is a total attack on the cultural level of the bourgeois conception of the world, and in particular an overcoming of the very conception of History in the bourgeois sense.

    For us, this is the red line we are drawing in order to affirm as precisely and completely as possible the revolutionary break with the old world.

    The struggle we intend to wage is in fact a total struggle, opposing the bourgeoisie and its vision of the world to the dialectical materialism of the proletariat as a revolutionary class.

    The concept of nexus allows us to take the effective measure of the scale of our revolutionary break, to understand that this break, in the context of the process of class struggle in our country, is a complete overthrow of the bourgeois order, from top to bottom, heralding a wave of universal transformation.

    The concept of nexus allows us to take the effective measure of the scale of our revolutionary break, to understand that this break, in the context of the process of class struggle in our country, is a complete overthrow of the bourgeois order, from top to bottom, heralding a wave of universal transformation.

    Our break with the past is the affirmation of a new stage in the development of humanity as thinking matter within the biosphere, an elevation of culture that is both part of the long march of humanity in its understanding of the cosmos and new in its blossoming.

    As an avant-garde organization, it’s our entire itinerary that has enabled us to grasp all these aspects as clearly as possible, first and so completely. As an extension of the gigantic historical legacy that has enabled humanity to formalize historical materialism, we have the best possible understanding of what the period we are entering means.

    Humanity is now in a position to understand not only the historic need to move beyond Capitalism as a world view, but also, since the concept of the Anthropocene has been expressed with humanity’s modification of the planet, the need to establish in a conscious and scientific way the symbiosis between the cultural development that Humanity has achieved and its harmonious existence as a species, as thinking matter, within our biosphere.

    Reaching a full understanding of this dizzying and decisive stage took years and years of productive organization. At the turn of the twenty-first century, we knew that we were right to take the strategic step back necessary to gather and formalize the foundations of a new thought-guide, to put our energy into a vast work of compilation and ideological elaboration, adjusting our practice within our environment, to our theory, with exacting standards and by imposing a strict and prolonged discipline.

    Our organization has thus existed on this basis, generating and gathering the energy of people adjusting to our vision of the world, which is becoming ever more refined and complex.

    This ideological work has been unique and unparalleled in the revolutionary organizations, or those claiming to be revolutionary, in France, to the point where we can say very openly today: we are the real base of dialectical materialism in France.

    We are sitting on top of a production of hundreds and hundreds of articles, covering a wide range of fields, reflecting the depth of our understanding of French society, within our epoch, as an element of the collective History of Humanity and as a component of the evolution of our biosphere, within the gigantic movements of an eternal Cosmos.

    At this stage, we have all managed to grasp the totality and complexity of these layers and their dynamics, which has given us, in the context of the reviews we have produced to analyze the second general crisis of the capitalist mode of production in which we are engaged, and in particular our organ Crise, prospective analyses validated by the facts in a relentlessly verified way.

    This work has enabled us to collectively stimulate our consciousness, to unite internationally, and particularly in Belgium, with comrades who have undertaken the same productive work, and to project ourselves enthusiastically into the future, certain that we are the biological material of a vast transformation of our species, of which we are the prototypes in our time.

    We are heartbeats and we must align ourselves with the rhythm of History!

    On the strength of this collective energy and our alignment with both the historical movement of the development of our species and its place in the Cosmos within our Biosphere, we are developing an ever more symbiotic commitment to the Party we are generating, from which each of our members can draw in return unfailing moral support, expressed by an enthusiasm that gives way to neither gloom nor nihilism and a spirit of ever greater rupture with bourgeois society in its decadence, its institutions and above all its vision of the world. For

    “The socialist system will eventually replace the capitalist system; this is an objective law independent of man’s will. However much the reactionaries try to hold back the wheel of history, sooner or later revolution will take place and will inevitably triumph” (Mao Zedong).

    Certain that we are the vanguard of the new Humanity, heralding the establishment of a new order in keeping with the evolution of our species, we proudly display the heritage of our History and turn our eyes towards the infinite and eternal Cosmos, towards which the gold star illuminating the red flag that our hearts are waving in the sky is pointing.

    Let this be a signal to all the consciences for whom our call will resound to come and work in the service of Culture and Humanity, through the prolonged struggle without capitulation against the bourgeoisie, to install the proletariat in power, in the service of the masses, through the ever-deepening triumph of its ideology: dialectical materialism.

    => documents in English

  • Dialectical materialism and the onion-shaped universe as a contradiction of uneven development and difference

    Every contrast is a difference, every difference a contradiction. If things do not develop simultaneously, then there is already difference.

    This is also true if things already exist in different ways: different things developing in different ways go hand in hand with the existence of contradictions between these things, by virtue of their difference.

    One mistake that has been made in the past is this:

    – since there is difference, there is independence of the contradiction of a thing, because it is different ;

    – if there is independence of contradiction, then its development is its own;

    – if it has its own development, then it is particular;

    – if it is particular, then there is negation of negation within that particular;

    – if there is a negation of the negation within this particular, then we can force the existence of this negation of the negation because it is itself particular.

    This is the mistake that was made in the USSR in the early 1950s, and which allowed the revisionists to gain the upper hand.

    A well-known error was that of Trofim Lyssenko, who believed that he could modify the development of agriculture by ‘forcing’ changes in the reaction of plants, for example by planting several seeds in the same hole.

    This was an idealistic reading in terms of isolated things, based on the ‘negation of negation’ applied to one thing in particular; the exact counterpart of this approach is the reading of the genetic whole which, similarly, takes things in isolation by fixing them unilaterally on the basis of DNA. In agriculture and for living organisms in general, this is particularly true of Genetically Modified Organisms.

    What we have here is a misunderstanding of the relationship between the particular and the general, a reduction of the process of movement to an isolated thing, based on a ‘negation of negation’.

    Another well-known example is the campaign against the ‘four pests’ in People’s China, targeting rats, flies, mosquitoes and sparrows. This campaign, which began in 1958, was stopped in 1960, because it was clear that the ecological imbalances caused by the campaign were leading us into a corner.

    It is easy to understand why the Great Proletarian Cultural Revolution produced intense research into cosmology, into the links between the different layers of the universe, while Mao Zedong rejected the concept of negation of negation.

    Mao Zedong praised the efforts of Japanese physicist Shoichi Sakata, who sought to formulate the links between the different ‘layers’ of matter, which can be summed up in the image of an onion-shaped universe.

    Shoichi Sakata wrote in Theoretical Physics and the Dialectics of Nature, in June 1947:

    “Current science has found that in nature there exist qualitatively different “levels » — the form of motion — for example, a series of the levels such as elementary particles — nuclei — atoms — molecules — masses — heavenly bodies — nebulae.

    These levels form various nodal points which restrict the various qualitative modes of existence of matter in general.

    And thus they are not merely related in a straightforward manner as described above.

    The “levels” are also connected in a direction such as molecules — colloids — cells — organs — individuals — societies. Even in the same masses, there exist “levels” of states corresponding to solids – liquids – gases.

    Metaphorically speaking, these circumstances may be described as having a sort of multi-dimensional structure of the fish net type, or it may be better to say that they have the onion-like structure of successive phases.

    These levels are by no means mutually isolated and independent, but they are mutually connected, dependent and constantly “transformed” into each other.

    For example, an atom is constructed from elementary particles and a molecule is constructed from atoms, and conversely the decompositions of a molecule into atoms, an atom into elementary particles can be made.

    These kinds of transformations occur constantly, with the creation of new quality and the destruction of others in ceaseless changes.”

    There are, of course, two aspects here.

    The first is the uneven development that characterizes all movement and implies differences within this onion-shaped universe.

    The second is difference, because each layer is different, which is already a contradiction. So we have a contradiction both within the movement and between the layers of the movement.

    The Covid-19 crisis is thus the product of a contradiction between two layers, humanity and the Biosphere; to give an example of the uneven development of the movement, we can take the emergence of sexuality in adolescents, which appears as a qualitative break/jump in the movement of personal development.

    Ultimately, all this appears to be a contradiction between the general and the particular.

    This contradiction is universal, it requires us to grasp the differences between the layers of the universe, and it appears as the contradiction of unequal development and difference.

    => documents in English