Auteur/autrice : IoULeeM0n

  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et les problèmes de l’appareil du Parti

    L’un des aspects essentiels du XIXe congrès est une critique récurrente de l’appareil du Parti. Il y a ici deux types de critiques. La première, c’est qu’il y a un vrai problème avec la critique et l’autocritique. Il s’agit de revenir au principe de Staline comme quoi une critique, même si elle n’est valable qu’à 5 ou 10 %, doit être pris en compte, considérée comme recevable au moins partiellement et ainsi étudiée avec soin.

    Il y a de fait dans le Parti une tentative de contournement de cet aspect, et cela d’autant plus que les années d’immédiates après-guerre ont exigé une implication concrète décisive mettant de côté la focalisation sur la dimension idéologique.

    Il y a donc un formalisme dans les réunions, les assemblées, les conférences, etc. La vigilance s’estompe d’autant plus.

    La seconde critique revenant lors du XIXe congrès est donc qu’il y a justement des comportements incorrects se manifestant de manière parfois dangereuse. Il y a un conformisme et une insouciance de la part des cadres, et même des secrets de l’État ou du Parti qui se voient divulgués.

    Il y a ainsi une situation qui se produit où la sélection des postes se fait de manière arbitraire, perdant donc toute caractère politique correct et permettant la formation d’espaces pour les opportunistes.

    Les orateurs du congrès sont lourdement revenus sur ces deux critiques à l’appareil du Parti.

    Un autre aspect est mentionné, mais sans qu’il se voit reconnu une importance fondamentale : l’énorme agrandissement du Parti.

    Le PCUS(b), au premier octobre 1952, avait 6 013 259 membres et 868 886 candidats au statut de membre. En termes de nombre, la différence avec le congrès précédent, treize ans plus tôt, est très marquée. En 1938, le PCUS(b) avait en effet 1 588 852 membres et 888 814 candidats au statut de membre.

    Il y a eu donc un véritable saut quantitatif, qui ne doit pas masquer un aspect fondamental : une partie significative des meilleurs membres du Parti sont morts en raison de la Seconde Guerre mondiale. Il y a ici une véritable tentative par le PCUS(b) de compenser la perte qualitative par un mélange nombre + dynamique.

    L’ouverture du Parti a une nouvelle génération, associée à un élan dans la construction d’une étape nouvelle, devait être la clef pour la continuité. Tel était l’espoir de Staline.

    Or, il va qu’un tel accroissement implique une perte de niveau, et cela d’autant plus qu’il y a eu une mortalité massive chez les meilleurs éléments qui ont été en première ligne face à l’envahisseur hitlérien. Staline a ici effectué un choix unilatéral : tenter de forcer la continuité du Parti en s’appuyant sur la dynamique du renforcement du pays dans l’après-guerre et dans ce qui était considéré, à tort, comme une nouvelle étape.

    Deux autres aspects essentiels s’ajoutent à cela, jouant précisément sur cette question qualitative qui plus est. Ainsi, parmi les délégués, il n’y a que 147 femmes, soit 12,3% du nombre total. C’est la preuve d’un véritable problème de fond dans le Parti et on devine que la question de la guerre a joué à l’arrière-plan, en plus du travail devant être à parcourir initialement sur cette question.

    Il y a ici un problème fondamental dans le PCUS(b).

    Un autre problème est la prépondérance de certains centres. Les délégués de Moscou, bastion du Parti, sont 129, soit plus de 10 % de l’ensemble. Cela forme un poids écrasant dans la vie du Parti, déformant forcément la vie démocratique interne, et cela d’autant plus dans un pays de la dimension de l’URSS.

    Il faut se rappeler ici que le Parti à Leningrad – qui a 60 délégués au congrès – a dû être littéralement décapité après-guerre en raison de la formation d’une fraction appelant à former une mini-république semi-autonome.

    Les autres villes russes suivent loin derrière : Gorki a 25 délégués, Sverdlovsk 23, Rostov 18, Saratov 18, Khabarovsk 18, Krasnodar 17, Voronej 17, la région de Primorye (avec Vladivostok) 17, Chelyabinsk 16, Kouibyshev 16, Bachkir 15, etc.

    Il en va de même pour les villes ukrainiennes : Kiev a 20 délégués, Kharkov 16 ans, Stalino (devenue Donetsk en 1961) 15, Dnepropetrovsk 12, etc.

    La délégation kazakh a 42 délégués, la géorgienne 32, la biélorusse 28, l’ouzbek 25, l’azerbaïdjanaise 23.

    Cela signifie que le Parti a son centre de gravité, le plus grand nombre de membres, à Moscou et qu’il y a là-bas une dynamique particulière, inévitablement. C’est là ouvrir un espace pour les opportunistes.

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  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et le changement d’organisation du Parti

    Les changements annoncés par Nikita Khrouchtchev, secrétaire général du Comité Central du PCUS(b), peuvent être résumés par un simple principe : il n’y a plus de direction centralisée qui serve de guide.

    La modification des statuts – dans l’esprit désormais de la bonne gestion pour l’édification du communisme, le socialisme étant atteint – est l’aspect secondaire de la clef qui est la disparition de la centralisation politique.

    Staline n’est ainsi plus secrétaire général du Parti : ce poste est aboli. Il est désormais simplement membre du Comité Central, au même titre que d’autres.

    Le Bureau Politique disparaît. Il consistait en un Comité Central réduit, prenant les décisions lorsque celui-ci ne se tenait pas. Il est désormais remplacé par un « présidium du Comité Central ».

    Nikita Khrouchtchev prétendit au XIXe congrès que ce n’était qu’un changement de dénomination, que le terme reflétait mieux le rôle joué par le Bureau Politique. En réalité, on passe désormais à un système collégial, qui va être de rigueur désormais en URSS jusqu’à son effondrement.

    Le Bureau Politique avait 9 membres et 2 suppléants au précédent congrès, le Présidium nouvellement fondé a 25 membres et 11 suppléants. C’est une hausse parallèle à celle décidée pour le Comité Central, qui a dorénavant 125 membres et 110 suppléants, pour 71 et 68 respectivement auparavant.

    On devine déjà le jeu des chaises musicales qui va se dérouler., rendant d’ailleurs profondément instable pour la période 1953-1964 la direction du Parti devenu révisionniste.

    Un autre aspect est la disparition du Bureau d’organisation et du Secrétariat du Comité Central. Le Bureau d’organisation s’occupait de gérer les postes clefs du Parti, en choisissant les membres adéquats, ainsi que de superviser toutes les structures du Parti sur le plan de l’organisation.

    Le Secrétariat du Comité Central était une institution quant à elle ancrée dans l’organisation depuis le VIIIe congrès du Parti Communiste de Russie (bolchevik), en 1919. Son rôle était la vie courante du Parti, soit la formation des cadres, l’instruction des membres du Parti et leur organisation, la propagande et l’agitation, mais également l’ensemble des activités où le Parti était impliqué, ce qui signifiait de très nombreux aspects pour l’URSS, justement guidé par le Parti.

    Le XIXe congrès forme une sorte de super « secrétariat », combinant les tâches du Bureau d’organisation et du Secrétariat du Comité Central. Cela signifie dans les faits une super centralisation, censée être justifiée par le caractère collégial du Présidium du Comité Central.

    Le nombre de membres est d’ailleurs très restreint. Alors que le Bureau d’organisation disposait de 9 membres et le Secrétariat du Comité Central quatre membres, le nouveau « super » secrétariat n’a que dix membres.

    En pratique, cela sera un sas pour la bataille pour le pouvoir au sein de l’URSS révisionniste. Les dix membres appartiennent forcément au Comité Central et les secrétaires les plus « expérimentés » du secrétariat appartiennent en même temps au « super » secrétariat et au présidium, cette double appartenance étant un sas pour la direction (ce fut la norme pour tous les dirigeants de l’URSS à partir de Nikita Khrouchtchev).

    Un autre point, très important, consiste en les organes de contrôle. Il y a ici tous les ingrédients pour le coup d’État qui va avoir lieu par la suite.

    Initialement, il y avait à partir de 1920 une Inspection ouvrière et paysanne, chargée de surveiller les organes d’État, les administrations locales et les entreprises. Ses fonctions passèrent, au XVIIe congrès du PCUS(b) en 1934, à une Commission Populaire de Contrôle auprès du Conseil des commissaires du peuple.

    Une Commission Centrale de Contrôle auprès du Comité Central fut mis en place également, pour se charger de son côté de surveiller la discipline des membres du PCUS, prenant le relais d’une autre structure ayant ce rôle.

    Les changements furent les suivants :

    a) En mars 1946, les commissaires du peuple devinrent des ministres, les commissariats du peuple des ministères. La Commission Populaire de Contrôle auprès du Conseil des commissaires du peuple devint un ministère. Il en resta ainsi au XIXe congrès.

    b) La Commission Centrale de Contrôle du Parti fut radicalement modifiée au XIXe congrès du PCUS(b), devenant un Comité auprès du Comité Central. Il y a dorénavant des « chargés de pouvoir » représentant le Comité pouvant être envoyés n’importe où dans le pays, représentant en tant que tel la direction.

    Cette subordination de la Commission Centrale de Contrôle du Parti s’accompagne également du caractère désormais intouchable du Comité Central.

    En effet, si c’est toujours le congrès qui décide de tout, celui-ci ne se réunit que tous les quatre ans et le XIXe congrès supprime la réunion, à l’appel du Comité Central, au minimum une fois par an, d’une conférence des organisations locales du Parti. Cette conférence avait le droit de modifier le cinquième des membres du Comité Central.

    On a donc un Comité Central intouchable, avec en son sein dix personnes formant le « super » secrétariat et ayant donc la main sur l’appareil au niveau de l’autorité, tandis que les choix politiques étaient décidées de manière collégiale par le Comité Central, le présidium plus restreint menant la politique proprement dite, avec un noyau dur de dirigeants à la fois membres du présidium et du « super » secrétariat façonnant le Parti à sa guise.

    On a là tout le dispositif de l’équilibre à la fois stable et conflictuel entre factions bourgeoises au sein du PCUS devenu révisionniste. Ce mode d’organisation n’est en rien conforme aux exigences communistes.

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  • Nikita Khrouchtchev et le changement d’organisation du Parti au XIXe congrès du PCUS(b)

    C’est Nikita Khrouchtchev qui, en tant que secrétaire du Comité central du PCUS (B), présente la modification des statuts du Parti, ainsi que le changement d’organisation.

    Le justificatif est le passage à une nouvelle période, celle de l’édification du communisme.

    Voici une partie de son argumentaire, d’autant plus intéressant qu’il va être lui-même à la pointe de la « déstalinisation » quatre ans plus tard :

    « Sous la direction du Parti communiste, le peuple soviétique a défendu les grandes avancées socialistes et remporté des victoires d’importance historique mondiale grâce à sa lutte héroïque dans la guerre patriotique.

    Dans l’après-guerre, les travailleurs de notre pays, grâce à leur travail créatif et désintéressé, ont assuré la mise en œuvre du quatrième plan quinquennal de construction économique pacifique et ont réalisé les plus grandes réalisations dans tous les domaines de l’économie, de la science et de la culture.

    Parallèlement à la croissance de l’économie, le bien-être matériel et le niveau culturel des masses ne cessent d’augmenter.

    Les victoires et les succès ont été le résultat de la politique correcte du Parti communiste, de la direction avisée du Comité central Léninien-Stalinen, de notre dirigeant et enseignant bien-aimé, le camarade Staline (…).

    Les discours du camarade Staline, la compilation formant le livre « De la grande guerre patriotique de l’Union soviétique », les travaux du camarade Staline sur « Le marxisme et les problèmes de linguistique », les décisions du Comité central sur les questions idéologiques revêtent une grande importance pour le travail idéologique et éducatif de notre pays.

    Le camarade Staline, avec « Les problèmes économiques du socialisme en URSS », apporte une nouvelle contribution inestimable à la théorie du marxisme-léninisme. Le camarade Staline, qui développe de manière créative la science marxiste-léniniste, arme le parti et le peuple soviétique de la doctrine de la nature des lois économiques du capitalisme moderne et du socialisme, ainsi que des conditions pour préparer la transition du socialisme au communisme.

    Le travail du camarade Staline sur les questions économiques, à l’instar de ses autres travaux, revêt une importance capitale pour la construction d’une société communiste, l’éducation des membres du parti et de tous les travailleurs dans l’esprit des idées immortelles du léninisme.

    Maintenant, alors que le peuple soviétique lance une nouvelle lutte énergique pour mettre en œuvre le grand programme de travail visant à édifier une société communiste, le rôle dirigeant et organisateur du Parti communiste et l’importance de son travail organisationnel, idéologique et éducatif augmentent.

    Le camarade Staline enseigne qu’après que la ligne correcte ait été donnée, que la solution correcte ait été donnée, le succès de la question dépend du travail organisationnel, de l’organisation de la lutte pour mettre en œuvre la ligne du parti (…).

    Premièrement, le nom du parti «Parti communiste de l’Union soviétique» est plus exact. Ce nom du parti, qui est le parti au pouvoir dans notre pays, correspondra davantage aux noms des organes de l’Union soviétique; deuxièmement, il n’est pas nécessaire à l’heure actuelle de conserver le double nom du parti – communiste et bolchevique, car les mots «communiste» et «bolchévique» expriment le même contenu (…).

    Toutes les activités du Parti communiste sont subordonnées au grand objectif d’édifier le communisme dans notre pays en créant les conditions préalables nécessaires à une transition radicale de l’économie du socialisme à une autre, une économie supérieure, à l’économie du communisme.

    Construire une société communiste est devenu la tâche pratique des peuples de l’Union soviétique. Les tâches assignées par le Parti communiste incitent le peuple soviétique à se battre pour que le cinquième plan quinquennal soit dépassé, pour que de nouvelles victoires soient remportées dans la construction du communisme (…).

    Le projet de statut modifié propose de transformer le Politburo en présidium du Comité central du parti, organisé pour guider les travaux du Comité central entre les plénums.

    Une telle transformation est recommandée car le nom de « Présidium » est plus cohérent avec les fonctions actuellement assumées par le Politburo.

    La pratique a montré qu’il est conseillé de concentrer les travaux d’organisation actuels du Comité central au sein d’un seul organe – le Secrétariat – et qu’il n’existe donc pas de bureau d’organisation du Comité central à l’avenir (…).

    La Charte du parti adoptée par le Congrès est un document d’un pouvoir d’organisation et de mobilisation extrêmement puissant. Ce sera un moyen important de renforcer l’éducation idéologique des communistes, des cadres de parti et d’État dans l’esprit du léninisme, ainsi que le développement de la démocratie, de la critique et de l’autocritique internes au parti. La charte élèvera le travail organisationnel du parti à un niveau supérieur.

    Armé de l’enseignement conquérant du marxisme-léninisme, le Parti communiste rallie encore plus étroitement les millions de travailleurs et travailleuses de notre pays sous la grande bannière de Lénine et Staline. (Applaudissements tempétueux).

    Vive le puissant Parti Communiste, conduisant avec confiance le peuple soviétique à de nouvelles victoires, au triomphe du communisme! (Applaudissements prolongés)

    Vive le sage dirigeant du parti et du peuple, l’inspirateur et l’organisateur de toutes nos victoires, le camarade Staline! (Applaudissements prolongés et tempétueux, se transformant en une ovation debout. Tout le monde se lève) »

    Nikita Khrouchtchev célèbre Staline qu’il dénoncera quelques années plus tard. Mais il est surtout au cœur du processus de transformation du Parti, qui va perdre son noyau dur : le principe de direction centralisée servant de guide.

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  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et le changement de nom du Parti

    Puisque la définition du Parti a changé et qu’il est considéré que le socialisme a gagné, qu’on passe au communisme, alors le nom du Parti ne peut que changer. Cela ne s’est pas vraiment remarqué hors d’URSS en raison d’un choix pragmatique fait pour les traductions.

    Dans un souci de clarté, il est en effet parlé du Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) – PCUS(b). Cependant, en réalité, son nom était Parti Communiste Panunioniste (des bolcheviks), soit VKP(b) [Всесоюзная коммунистическая партия (большевиков) – ВКП(б)].

    Avec le XIXe congrès, le VKP(b) devient le PCUS (Коммунистическая партия Советского Союза – КПСС).

    Du point de vue occidental, il y a seulement eu le (b) qui a été enlevé, mais du point de vue soviétique, le changement est beaucoup plus grand que cela.

    C’est que le nom choisi en 1925 correspond à une unité de différents pays à la suite de la guerre civile, faisant de l’identité du Parti celui de la bataille pour le socialisme, tandis que le nom choisi en 1952 établit bien plus symboliquement le rapport à un régime déjà établi.

    Voici le texte de la résolution sur le changement de nom de parti, qui a été adoptée à l’unanimité le 13 octobre 1952, lors du congrès :

    « Le double nom de notre parti, « communiste » – « bolchevik », formé historiquement à la suite de la lutte contre les mencheviks, visait à s’isoler du menchévisme.

    Le parti menchevik ayant depuis longtemps quitté la scène en URSS, le double nom du parti a perdu sa signification, ce d’autant plus que le concept de « communiste » exprime plus précisément le contenu marxiste des tâches du parti, tandis que le concept de « bolchevik » n’exprime qu’un fait historique qui a depuis longtemps perdu sa signification.

    Lors du deuxième congrès du parti en 1903, les léninistes obtinrent la majorité des voix; c’est pourquoi on les appela « bolcheviks », la partie opportuniste demeura dans la minorité et reçut le nom de « mencheviks ». »

    À cet égard, le XIXe Congrès du parti décide:

    Le Parti communiste unifié des bolcheviks (VKP / b /) sera dorénavant appelé le « Parti communiste de l’Union soviétique » (PCUS).

    Cette transformation reflète une profonde erreur d’interprétation, allant de pair avec la modification de la définition même du Parti, qui n’est plus avant-garde de la classe ouvrière, mais une libre union de combat des communistes venant de la classe ouvrière, de la paysannerie et de l’intelligentsia laborieuse.

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  • La transformation de la définition du Parti au XIXe congrès du PCUS(b)

    Le XIXe congrès du PCUS(b) entérine un changement fondamental dans la définition du Parti. Auparavant, celui-ci était défini comme étant :

    « l’avant-garde organisée de la classe ouvrière de l’U.R.S.S., la forme suprême de son organisation »

    Or, il y a désormais la considération que le socialisme a définitivement triomphé en Union Soviétique. La Constitution de 1936 posait d’ailleurs déjà l’égalité de vote entre ouvriers et paysans – alors qu’auparavant les villes avaient davantage d’élus – ainsi que d’ailleurs un droit de vote désormais général et anonyme, sans assemblées populaires ni liste importante de couches sociales exclues (anciens bourgeois, réactionnaires, etc.). 

    Cette lecture unilatérale selon laquelle le socialisme serait généralisé en tant que tel atteint la définition même du Parti. Le XIXe congrès lui accorde la définition suivante désormais :

    « une libre union de combat des communistes, animés d’un même idéal, qui groupe les hommes de la classe ouvrière, de la paysannerie et de l’intelligentsia laborieuse »

    Il y a bien entendu la conception, à l’arrière-plan, comme quoi la différenciation entre ouvriers, paysans et intellectuels irait en s’amenuisant. Le XIXe congrès mentionne d’ailleurs la volonté de renforcer la dimension polytechnique de l’enseignement, afin que les citoyens soviétiques puissent ne pas se voir toute leur vie limitée à un seul type d’emploi.

    Et dans Les problèmes économiques du socialisme en URSS, publié juste avant le congrès, il y a justement un chapitre intitulé : (manque les guillemets)

    « De la suppression de l’opposition entre la ville et la campagne,entre le travail intellectuel et le travail manuel, et de la liquidation des différences entre eux »

    On y lit notamment :

    « Tout cela signifie que le terrain propice à l’opposition entre la ville et la campagne, entre l’industrie et l’agriculture est d’ores et déjà liquidé par notre régime socialiste actuel.

    Cela ne veut point dire, bien entendu, que la suppression de l’opposition entre la ville et la campagne doive amener la mort des grandes villes (voir Engels : Anti-Dühring).

    Non seulement les grandes villes ne périront pas, mais il en surgira encore de nouvelles, qui seront des centres de grande culture intellectuelle, centres non seulement de la grande industrie, mais aussi de la transformation des produits agricoles et d’un puissant développement de toutes les branches de l’industrie alimentaire.

    C’est ce qui contribuera à l’épanouissement culturel du pays et conduira au nivellement des conditions d’existence dans les villes et les campagnes. Il en va de même de la suppression de l’opposition entre le travail intellectuel et manuel. C’est là aussi un problème connu, depuis longtemps posé par Marx et Engels. »

    Or, le souci est que ces grandes villes n’existent pas encore et que l’agriculture est encore arriérée, même si les forces productives vont en se développant. Il y a ici une profonde surestimation de la situation, une anticipation unilatérale de ce qui va arriver, au sens où il est considéré que la tendance est irrépressible et que cela étant, on peut partir du principe que c’est acquis.

    Cela est d’autant plus étrange que dans le même ouvrage, on trouve une critique de Staline exposant justement le danger de heurts dans le développement des forces productives dans le socialisme, jusqu’à l’antagonisme :

    « Le camarade Iarochenko se trompe quand il soutient que sous le socialisme il n’existe aucune contradiction entre les rapports de production et les forces productives de la société.

    Certes, nos rapports de production connaissent actuellement une période où ils correspondent pleinement à la croissance des forces productives et les fait progresser à pas de géant.

    Mais ce serait une erreur de se tranquilliser et de croire qu’il n’existe aucune contradiction entre nos forces productives et les rapports de production.

    Des contradictions, il y en a et il y en aura certainement, puisque le développement des rapports de production retarde et retardera sur le développement des forces productives.

    Si les organismes dirigeants appliquent une politique juste, ces contradictions ne peuvent dégénérer en antagonisme, et elles n’aboutiront pas à un conflit entre les rapports de production et les forces productives de la société.

    Il en ira autrement si nous faisons une politique erronée comme celle que recommande le camarade Iarochenko. Un conflit sera alors inévitable, et nos rapports de production peuvent devenir une très sérieuse entrave au développement des forces productives. »

    Le souci est ici que Staline considère qu’il s’agit simplement d’une question de gestion adéquate. Les forces productives l’emportant sur les rapports de production, il suffit de résorber l’espace entre les deux. Or, c’est là oublier la contradiction entre les forces productives et le communisme, ce dernier exigeant un haut niveau des premières.

    De fait, l’erreur de Staline est de considérer que le socialisme est une étape terminée. La thèse du socialisme dans un seul pays était juste ; la thèse du communisme dans un seul pays connaissant les conditions d’alors de l’URSS ne l’était pas.

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  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et le passage au communisme

    Pour que la thèse fondamentale du XIXe congrès – l’existence de deux camps, dont un, celui qui est démocratique, est en expansion continue, alors que l’autre se ratatine – ait un véritable sens politique, il faut que le PCUS(b) modifie sa perception de lui-même.

    S’il ne le fait pas, alors il reste le Parti de la construction du socialisme, dans une situation contradictoire par rapport au capitalisme, même si son propre camp se voit considérablement, formidablement agrandi depuis 1945 et 1949. Il est alors un Parti combattant, luttant pour le socialisme en URSS et épaulant les communistes des autres pays.

    S’il le fait, alors l’affirmation du camp « autre » que le capitalisme devient une fin en soi et c’est précisément ce qui va se passer. En effet, une erreur fondamentale va être commise ici par Staline, à savoir la considération que la construction du socialisme est terminée.

    La thèse du XIXe congrès est en effet que l’URSS passe à l’édification du communisme.

    Lazare Kaganovitch explique au congrès la chose suivante :

    « Le XIXe Congrès du parti établit que, depuis le VIIIe Congrès du parti (1919), année de l’adoption du programme du parti, des changements fondamentaux se sont produits tant dans le domaine des relations internationales que dans celui de la construction du socialisme en URSS, à la suite desquels un certain nombre de dispositions du programme et les tâches du parti qui y sont énoncées, puisqu’elles ont déjà été mises en œuvre au cours de cette période, ne correspondent plus aux conditions modernes et aux nouvelles tâches du parti.

    Sur cette base, le congrès décide:

    1. Considérer qu’il est nécessaire et opportun de réviser le programme du Parti existant.

    2. Lors du traitement du programme, se laisser guider par les principales dispositions des travaux du camarade Staline, « Les problèmes économiques du socialisme en URSS ».

    3. Le traitement du programme du Parti devrait être confié à la Commission comme suit: Camarade Staline – Président de la Commission (Applaudissements tempétueux se transformant en une ovation debout). Membres de la Commission: les camarades Beria, Kaganovich, Kouusinen, Malenkov, Molotov, Pospelov, Rumyantsev, Sabourov, Chesnokov, Youdin.

    4. Le projet de programme révisé du Parti est à soumettre au prochain congrès du Parti communiste de l’Union soviétique. (Applaudissements tempétueux, tout le monde se lève ) »

    A quoi est-il fait référence ? Au fait que le XIXe congrès marque la considération que l’URSS a déjà complété l’étape socialiste et qu’elle va donc désormais au communisme. Les statuts modifiés précisent ainsi :

    « Aujourd’hui, le Parti communiste d’Union soviétique a pour tâche principale de construire une société communiste en passant progressivement du socialisme au communisme, d’améliorer constamment le niveau matériel et culturel de la société, d’éduquer les membres de la société à l’esprit de l’internationalisme, d’établir des liens fraternels avec les travailleurs de tous les pays et de renforcer par tous les moyens la défense active de la Patrie soviétique des actions agressives de ses ennemis »

    Kliment Vorochilov, dans son discours pour la clôture du congrès, formule cela de la manière suivante :

    « L’histoire a confié au Parti de Lénine – Staline une grande et noble mission : assurer la construction d’une société communiste dans notre pays et paver ainsi la voie au communisme pour l’humanité tout entière. (Applaudissements prolongés)

    Nous savons que pas seulement les joies des victoires nous attendent – les difficultés sont inévitables, mais nous savons également que le Parti de Lénine et Staline, sous la direction d’un chef brillant, surmontera toutes les difficultés et remportera une victoire complète. »

    Staline et Kliment Vorochilov, 1935

    On a donc l’URSS formant une sorte d’îlot socialiste, au sein d’un camp démocratique très vaste la protégeant, alors que le camp du capitalisme va à l’effondrement. Il suffirait, en toute logique, par conséquent de pousser le communisme dans le noyau dur pour entraîner le reste. C’est cela précisément qui forme l’espace permettant la projection politique du révisionnisme.

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  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et le camp de la paix

    La contre-tendance à la guerre au sein des pays capitalistes ne peut être saisie que si l’on voit la définition qu’accorde le XIXe congrès au camp démocratique, au camp de la paix.

    Le Rapport du Comité central du PCUS (B) effectué par Gueorgui Malenkov expose les choses suivantes :

    « Les États-Unis et l’Angleterre avec la France, ayant soumis l’URSS, la Chine et les pays démocratiques populaires européens à un « blocus » économique, ont pensé les étrangler.

    En réalité, il ne s’agit pas d’une strangulation, mais du renforcement d’un nouveau marché démocratique mondial.

    Ainsi, les impérialistes portèrent gravement atteinte à leurs propres exportations et intensifièrent encore la contradiction entre les capacités de production de leur industrie et les possibilités de commercialisation de ses produits (…).

    En poursuivant sa politique de paix, l’Union soviétique est totalement unanime avec les autres États démocratiques épris de paix représentés par la République populaire de Chine, la Pologne, la Roumanie, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Bulgarie, l’Albanie, la République démocratique allemande, la République populaire démocratique de Corée et la République populaire mongole.

    Les relations de l’URSS avec ces pays sont un exemple de relations complètement nouvelles entre des États, jamais rencontrées auparavant.

    Elle sont construites sur la base de l’égalité, de la coopération économique et du respect de l’indépendance nationale. Fidèle aux accords d’assistance mutuelle, l’URSS continuera d’apporter son aide et son appui au renforcement et au développement de ces pays. (Applaudissements tempétueux).

    Nous sommes confiants que dans une compétition pacifique avec le capitalisme, le système économique socialiste démontrera de plus en plus clairement sa supériorité sur le système économique capitaliste.

    Mais nous n’allons pas imposer notre idéologie ou notre système économique à qui que ce soit.

    « L’exportation de la révolution est un non-sens. Chaque pays, s’il le souhaite, fera sa propre révolution et s’il ne le souhaite pas, il n’y aura pas de révolution », déclare le camarade Staline.

    L’Union soviétique, qui poursuit constamment sa politique de coopération pacifique avec tous les pays, prend en même temps en compte la menace d’une nouvelle agression de la part des présumés incendiaires de la guerre. Par conséquent, il renforce et renforcera ses défenses (…).

    On ne peut pas ignorer les faits du passé. Mais ces faits indiquent qu’à la suite de la Première Guerre mondiale, la Russie s’est retirée du système capitaliste et que, à la suite de la Seconde Guerre mondiale, un certain nombre de pays d’Europe et d’Asie se sont éloignés du système capitaliste.

    Il y a tout lieu de croire que la troisième guerre mondiale provoquera l’effondrement du système capitaliste mondial. (Applaudissements prolongés)

    C’est, pour ainsi dire, la perspective d’une guerre et ses conséquences, si elle est imposée aux peuples par les incendiaires de la guerre, par les agresseurs.

    Mais il existe une autre perspective, la perspective du maintien de la paix, la perspective de la paix entre les nations.

    Cette perspective nécessite une interdiction de la propagande de guerre selon le décret des Nations unies, une interdiction des armes atomiques et bactériologiques, une réduction conséquente des forces armées des grandes puissances, la conclusion d’un pacte de paix entre les puissances, l’expansion du commerce entre pays, la restauration d’un marché international unique et d’autres événements similaires dans un esprit de consolidation de la paix.

    L’application de ces mesures renforcera la paix, débarrassera les peuples de la peur de la menace de guerre, mettra un terme aux dépenses inouïes en ressources matérielles pour les armes et préparera une guerre d’extermination, et permettra de les transformer au profit des peuples.

    L’Union soviétique est favorable à la mise en œuvre de ces mesures, à la perspective de la paix entre les peuples. »

    On a exactement le même système d’équilibre entre deux thèses que pour l’évaluation des pays capitalistes. D’un côté il y a une tendance à la guerre – que Staline considère comme inéluctable, dans Les problèmes économiques du socialisme, ouvrage paru justement à l’occasion du XIX congrès. De l’autre, il y a la tendance prenant en compte un capitalisme qui serait « rationnel » et qu’on pourrait pousser dans le bon sens, ce qui est la thèse d’Eugen Varga, qui a provoqué la grande crise idéologique de l’après-guerre.

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  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et la guerre impérialiste

    La thèse des deux camps, clef du XIXe congrès, ne peut pas être interprétée correctement sans voir quelle analyse est faite de l’impérialisme. Dans Les problèmes économiques du socialisme en URSS, Staline démonte clairement les thèses d’Eugen Varga au sujet d’un capitalisme qui serait organisé, capitalisme monopoliste d’État, et rappelle que le capitalisme implique la guerre.

    Que dit le Rapport du Comité central du PCUS (B) effectué par Gueorgui Malenkov ?

    Il est déjà souligné que l’impérialisme américain est dorénavant le chef de file des pays impérialistes, qu’il écrase même les autres pays capitalistes :

    « L’impérialisme américain apparaît maintenant non seulement comme un exploiteur et un esclavagiste international de peuples, mais aussi comme une force désorganisant les économies d’autres pays capitalistes.

    Profitant de l’affaiblissement de ses concurrents, le capital monopoliste américain s’est emparé après la guerre d’une part importante du marché capitaliste mondial.

    Il détruit les liens économiques multilatéraux historiquement établis entre les pays capitalistes et les remplace par les liens unilatéraux de ces pays avec les États-Unis.

    Imposant leurs exportations par le biais du dumping le plus éhonté et en protégeant leur marché intérieur des importations de biens étrangers, le peuple américain suffoquant des prix élevés, les monopoles américains bouleversent de plus en plus le marché capitaliste mondial.

    Une telle politique économique de l’impérialisme américain ne pouvait qu’aggraver les contradictions entre les États-Unis et les autres États capitalistes. Les principales sont les contradictions entre les États-Unis et l’Angleterre (…).

    Les cercles dirigeants de la France, de l’Italie, de l’Angleterre, de l’Allemagne de l’Ouest et du Japon se sont attachés au char de l’impérialisme américain, abandonnant leur politique étrangère nationale et indépendante. »

    Le bellicisme américain est cependant contrecarré par les forces soutenant le camp démocratique dans les pays capitalistes eux-mêmes :

    « Face à la menace croissante de la guerre, un mouvement national de défense de la paix se développe, une coalition anti-guerre de différentes classes et couches sociales est créée dans le but de mettre fin aux tensions internationales et de prévenir une nouvelle guerre mondiale.

    Les incendiaires ne sont pas en mesure de faire de ce mouvement non partisan, pacifique et démocratique un parti soi-disant communiste.

    Le fait que 500 millions de signatures aient été faites dans le cadre de l’appel de Stockholm et que plus de 600 millions de personnes aient réclamé la conclusion d’un pacte de paix entre les cinq grandes puissances constitue la meilleure réfutation de cette déclaration des incendiaires bellicistes et est une indication de l’ampleur colossale de ce mouvement démocratique et non partisan de défense de la paix.

    Ce mouvement pacifique ne poursuit pas l’objectif de l’élimination du capitalisme, car il n’est pas socialiste, mais un mouvement démocratique de centaines de millions de personnes.

    Les partisans de la paix ont formulé de telles demandes et propositions qui devraient contribuer à préserver la paix et à prévenir une nouvelle guerre. Atteindre cet objectif serait, dans les conditions historiques modernes, une grande victoire pour la cause de la démocratie et de la paix (…).

    Il s’agit maintenant d’augmenter encore l’activité des masses, de renforcer l’organisation des partisans de la paix, de dénoncer inlassablement les incendiaires de la guerre et de les empêcher de mentir aux nations.

    C’est la tâche principale de toute l’humanité progressiste et pacifique que de réprimer et d’isoler les aventuriers du camp des agresseurs impérialistes qui cherchent à entraîner les peuples dans un massacre sanglant pour en tirer profit. »

    Il est très clair que cette thèse est un compromis entre les partisans de la thèse de Staline sur le caractère inéluctable des guerres dans le capitalisme et les partisans d’Eugen Varga comme quoi le capitalisme a désormais atteint un stade organisé, rationnel.

    D’un côté, il est expliqué que l’impérialisme américain est belliciste, de l’autre qu’il existe une contre-tendance suffisamment puissante. On est dans la présentation d’un équilibre qui, par manque d’analyse prospective, laisse beaucoup d’espace aux interprétations. Cela est d’autant plus vrai que cela s’accompagne d’une lecture particulière du camp de la paix et de l’URSS elle-même.

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  • La thèse fondamentale du XIXe congrès du PCUS(b)

    Le contexte était le suivant, selon le XIXe congrès du PCUS(b). 13 années s’étaient déroulées depuis le dernier congrès et la période entre les deux congrès a été celle la plus mouvementée dans l’histoire mondiale. Les points mentionnés dans les matériaux pour le congrès sont les suivants :

    – la construction du socialisme, avec le développement de l’économie et des capacités de défense ;

    – la victoire dans la grande guerre patriotique ;

    – l’agrandissement du territoire de l’URSS ;

    – l’émergence du système socialiste mondial ;

    – le caractère ancré et légal de partis communistes et ouvriers dans de nombreux pays du monde ;

    – le début de l’effondrement du système colonial ;

    – l’intégration de l’URSS au Conseil de sécurité de l’ONU ;

    – l’acquisition de l’arme atomique par l’URSS.

    Cela signifie que la thèse fondamentale du PCUS(b) est la suivante : l’URSS est devenue une forteresse inébranlable. Elle a une base suffisamment forte pour être le noyau d’un développement autonome au capitalisme et ce à grande échelle.

    Dans le Rapport du Comité central du PCUS (B), Gueorgui Malenkov expose comme suit ce qui est à considérer comme la thèse fondamentale du XIXe congrès :

    « Le résultat économique de la formation de deux camps opposés, comme le souligne le camarade Staline, est qu’un marché mondial complet et unique s’est effondré et que deux marchés mondiaux parallèles se sont formés : le marché des pays d’un camp démocratique pacifique et le marché des pays d’un camp impérialiste agressif.

    L’effondrement du marché mondial unique est le résultat économique le plus important de la Seconde Guerre mondiale et ses conséquences économiques.

    Deux marchés mondiaux se développent dans des directions opposées.

    Le nouveau marché mondial démocratique ignore les difficultés des ventes, car sa capacité augmente d’année en année, ce qui correspond à une croissance de la production sans crise dans les pays du camp de la démocratie, car la croissance continue de la production dans tous les pays du camp de la démocratie accroît la capacité du marché démocratique.

    D’autre part, nous avons un autre marché impérialiste mondial, sans lien avec l’URSS ni avec d’autres pays démocratiques, qui s’est rétréci à cause de cela et qui souffre de difficultés de vente dues aux interruptions et aux crises de production, dues au chômage et à l’appauvrissement des masses, dues à la séparation des pays démocratiques. »

    Gueorgui Malenkov

    Il y a deux camps. Il suffit donc de pousser le développement et, par définition, le camp démocratique l’emportera sans coup férir, le camp réactionnaire s’effondrant sous le poids de ses contradictions, de ses faiblesses.

    Cette thèse est dans le prolongement direct de celle de l’Internationale Communiste. Il est simplement considéré que, désormais, le bloc dont relève l’URSS est beaucoup plus massif.

    Cette thèse est également commune à l’ensemble du PCUS(b), c’est-à-dire donc aux deux tendances de l’immense bataille idéologique qui s’est tenu dans l’immédiate après-guerre. La première tendance, c’est celle de Staline, qui considère que les impérialistes restent agressifs.

    La seconde tendance, c’est celle d’Eugen Varga soutenu par une partie significative du Parti, qui considère que désormais c’est un « capitalisme monopoliste d’État » qui prédomine dans les pays capitalistes, c’est-à-dire un capitalisme rationalisé, exigeant une participation légale aux institutions pour prendre les commandes d’un État censé devenu neutre et arbitre du capitalisme.

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  • Le XIXe congrès du PCUS(b) et la victoire sur l’Allemagne nazie

    Nikolaï Boulganine, dans un discours lors du congrès, expose le point de vue du Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) concernant la grande guerre patriotique face à l’Allemagne nazie.

    Nikolaï Boulganine

    En voici les principaux extraits :

    « L’attaque soudaine et perfide des envahisseurs fascistes a immédiatement et radicalement changé la situation.

    Des millions de citoyens soviétiques ont été contraints d’abandonner le travail pacifique et de prendre les armes pour défendre les grands acquis socialistes et débarrasser leur pays des menaces de l’esclavage fasciste.

    Dans la Grande Guerre patriotique, il s’agissait de la vie et de la mort de notre État.

    La question, comme vous le savez, était la suivante: ou l’Union soviétique maintenait son indépendance et les peuples de notre pays resteront libres, ou l’Union soviétique se transformait en une colonie et les peuples qui y vivront deviendront les esclaves des impérialistes allemands.

    Il ne pouvait y avoir d’autre issue.

    La Grande guerre patriotique n’était pas seulement une guerre entre deux armées, mais aussi une guerre de tout le peuple soviétique contre des envahisseurs étrangers.

    C’était une guerre qui visait non seulement à éliminer le monstrueux danger qui guettait notre mère patrie, mais également à aider les peuples d’Europe languissant sous le joug du fascisme allemand.

    C’était la plus dure de toutes les guerres de notre État et, par conséquent, elle exigeait des efforts incroyables de la part du peuple soviétique, de grandes difficultés et de lourdes pertes.

    Il n’est pas nécessaire de parler en détail des difficultés exceptionnelles rencontrées par notre pays durant les années de guerre. Les épreuves difficiles de la guerre sont fraîches dans nos mémoires.

    Il est important de noter encore une chose: si un État bourgeois avait rencontré de telles difficultés, il n’aurait pas pu résister au coup que les nazis ont infligé à notre pays. Seul l’État socialiste soviétique pouvait se tenir dans ces conditions, survivre à des difficultés sans précédent et remporter la victoire. (Applaudissements prolongés)

    Qu’est-ce qui nous a aidé à surmonter l’assaut de l’ennemi et à remporter ensuite la plus grande victoire de l’histoire?

    Le camarade Staline enseigne que la guerre moderne est un test complet de toutes les forces matérielles et spirituelles de chaque nation.

    Seuls les États qui résistent à cette épreuve sont plus puissants que leur adversaire dans le développement et l’organisation de l’économie, dans l’expérience, le talent et le moral de leurs troupes, dans l’endurance et dans l’unité de la population tout au long de la guerre.

    En bref, l’issue de la guerre dépend des capacités économiques, morales et militaires des parties belligérantes.

    Dans tout cela, notre État soviétique s’est révélé beaucoup plus puissant que son adversaire – l’Allemagne nazie, bien que cette dernière, au moment de l’attaque contre notre pays, disposait de ressources économiques et humaines non seulement sur son territoire, mais aussi en France, en Tchécoslovaquie, en Autriche, en Belgique et en Hollande, en Hongrie, en Roumanie, en Espagne et dans plusieurs autres pays.

    Au cours de la période d’avant-guerre, comme aujourd’hui, les principaux efforts de notre peuple visaient la construction pacifique.

    L’Union soviétique a fermement et systématiquement poursuivi une politique étrangère pacifique.

    En même temps, notre Parti n’a jamais oublié la menace de guerre, les machinations des impérialistes et, sous la sage direction stalinienne, a préparé le pays et l’armée à la défense active.

    La préparation consistait tout d’abord à créer des capacités matérielles qui, en cas de guerre, pourraient assurer l’organisation rapide de la production militaire et la fourniture ininterrompue de produits alimentaires et industriels à l’armée et à la population, ainsi que des matières premières.

    Notre Parti a résolu cette tâche difficile à l’aide d’une politique d’industrialisation du pays et de collectivisation de l’agriculture au cours des trois plans quinquennaux antérieurs. C’est pendant ces années que la transformation historique a eu lieu (…).

    Le transfert de notre industrie vers la production militaire, qui a débuté dès les premiers jours de la guerre, a été pratiquement achevé en trois ou quatre mois et la restructuration complète de l’économie sur le plan militaire a duré environ un an.

    Il convient de garder à l’esprit que la restructuration s’est déroulée dans des conditions incroyablement difficiles, alors qu’une partie importante de notre territoire était soumise à l’occupation ennemie et qu’un grand nombre d’entreprises devaient être déplacées à l’Est (…).

    La parole du Parti, la parole du grand Staline, a armé le peuple soviétique avec des armes d’un pouvoir extraordinaire – une foi profonde dans le triomphe de notre juste cause.

    Souvenez-vous, camarades, des jours difficiles de l’automne 1941, lorsque les nazis ont approché la capitale de notre pays, Moscou. Les ennemis se sont réjouis et étaient sur le point de célébrer la victoire (…).

    Et en ces jours difficiles, le camarade Staline a rendu un rapport le 24 novembre sur le 24e anniversaire de la Grande Révolution d’Octobre et, le lendemain, il a prononcé un discours lors d’un défilé devant la tribune du mausolée de Lénine.

    Malgré la situation critique qui régnait pour le pays et l’armée à cette époque, le camarade Staline a déclaré qu’il ne pouvait y avoir aucun doute sur notre victoire et a ouvert une telle perspective dans la guerre qui, par son audace, était inattendue pour beaucoup.

    Il a déclaré que l’armée soviétique était capable non seulement de détruire les hordes prédatrices d’envahisseurs fascistes, mais aussi de libérer les peuples asservis de l’Europe (…).

    À la suite des victoires historiques de l’Union soviétique pendant les années de guerre et des réalisations exceptionnelles de l’après-guerre, un tel renforcement de notre pays est survenu tel que nous n’avons jamais eu.

    Sans aucune exagération, on peut affirmer qu’une situation interne aussi solide et inébranlable telle qu’elle existe actuellement en Union soviétique n’existe et ne peut exister dans aucun État bourgeois. (Applaudissements)

    L’Union soviétique est aujourd’hui un État socialiste bien coordonné, doté d’une industrie de premier ordre, de transports bien développés et d’une agriculture très productive.

    La vie économique de notre pays est déterminée par le plan économique national de l’État, qui vise à accroître la richesse sociale, à élever régulièrement le niveau matériel et culturel des travailleurs, à renforcer l’indépendance et à renforcer les capacités de défense de l’Union soviétique (…).

    Les tâches définies dans le nouveau plan quinquennal imposent de lourdes contraintes aux organisations des partis, de l’Union soviétique, de l’économie, des syndicats, du Komsomol [la jeunesse communiste] et les obligent à mobiliser la masse des travailleurs pour mener à bien et surpasser le nouveau plan quinquennal.

    « Il serait insensé de penser, dit le camarade Staline, que le plan de production se résume à une liste de chiffres et de tâches. En fait, le plan de production est une activité vivante et pratique de millions de personnes. La réalité de notre plan de production est que des millions de travailleurs créent une nouvelle vie. »

    Dans le passé, le peuple soviétique a montré à plusieurs reprises sa ferme détermination non seulement à mettre en œuvre ses plans économiques nationaux, mais aussi à les remplir, ce qui a permis de les réaliser plus tôt que prévu.

    Une telle détermination de notre peuple s’explique par le fait que, dans ses plans économiques, il reflète ses intérêts vitaux et voit de ses propres yeux que la réalisation de ces plans renforce notre État soviétique, augmente notre richesse sociale, améliore la vie de son peuple et rapproche notre pays à chaque nouvelle année, tous les cinq ans. de l’objectif chéri – le communisme. »

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  • Le discours d’ouverture de Molotov au XIXe congrès du PCUS(b)

    C’est Viatcheslav Molotov qui fut chargé de faire le discours d’ouverture du XIXe congrès du Parti Communiste d’Union Soviétique (Bolchevik). Il y traça les traits généraux de la situation telle qu’elle était alors considérée.

    L’URSS est passée par l’épreuve de feu en étant victorieuse de l’Allemagne nazie ; il y a deux camps désormais dans le monde, en partant du principe que le camp de la paix, de la démocratie, est désormais particulièrement puissant.

    Viatcheslav Molotov

    Voici les points principaux de son discours :

    « Camarades!

    Au nom du Comité central du parti, je souhaite la bienvenue aux délégués du XIXe Congrès du parti, ainsi qu’à nos chers invités représentant les Partis Communistes étrangers et les autres partis frères de la classe ouvrière. (Applaudissements prolongés et tempétueux)

    Notre première parole aujourd’hui devrait être consacrée à ceux qui, pendant les années de guerre contre l’Allemand et d’autres agresseurs, ont défendu héroïquement notre patrie soviétique et ont donné leur vie pour notre juste cause. Honorons le souvenir glorieux de ceux qui sont morts dans cette guerre, qui ont donné leur vie dans la lutte contre le fascisme, pour la cause de la liberté et de l’indépendance de l’Union soviétique. (Tout le monde se lève) (…)

    Comme vous le savez, le travail pacifique de notre peuple a été violé par l’attaque perfide du fascisme allemand contre l’Union soviétique.

    Nous avons été obligés d’interrompre les travaux du troisième plan quinquennal. Nous avons dû nous réorganiser complètement sur le pied de guerre, en subordonnant tout à l’intérêt de vaincre l’ennemi envahissant notre territoire.

    La Seconde Guerre mondiale fut le plus grand test pour le jeune État multinational soviétique.

    En même temps, c’était une vérification complète de la justesse de la politique de notre Parti. Pendant la guerre, le peuple soviétique a survécu à de nombreux jours difficiles et a consenti de lourds sacrifices.

    Mais sous le feu de ces événements, l’Union soviétique ne s’est pas affaiblie et n’a pas hésité. Sous la direction de notre parti, elle s’est encore endurcie et renforcée, en tant qu’État socialiste, encore plus confiante dans ses capacités, dans l’invincibilité de sa grande cause.

    La Seconde Guerre mondiale s’est terminée par la défaite des agresseurs fascistes, qui ont déchaîné à de nombreux égards les forces du mouvement de libération nationale en Europe et en Asie.

    Dans les nouvelles conditions qui sont apparues, en particulier compte tenu du rôle décisif de l’Union soviétique dans cette guerre, l’après-guerre a vu un certain nombre de pays passer de la voie du développement capitaliste à une nouvelle voie, la voie de la création et du développement d’États démocratiques et populaires.

    Cela a marqué le début d’une nouvelle étape dans le développement du socialisme international.

    Tout cela explique pourquoi, de nos jours, l’influence idéologique dominante de notre Parti sur tous les aspects de la vie du pays a tellement augmenté, et l’amour de notre peuple pour son Parti – l’amour du Parti de Lénine et Staline – est si grand (…).

    Nous n’oublions pas, bien sûr, que l’Union soviétique vit dans « un système d’États », qu’il existe un camp impérialiste qui a des projets aventuristes, qui s’arme de plus en plus, gonfle de toutes les manières possibles l’hystérie militaire et se prépare à déclencher une nouvelle guerre mondiale.

    Ce camp agressif et antidémocratique est dirigé par les milieux réactionnaires au pouvoir aux États-Unis d’Amérique, conformément à la volonté des monopoles capitalistes, qui, dans la quête insatiable de profits croissants, cherchent à établir leur domination mondiale par la force.

    Ce sont les milieux dirigeants des États-Unis qui assument la responsabilité principale de la guerre criminelle en Corée, de la capture de l’île chinoise de Taïwan, de la transformation de l’Allemagne de l’Ouest et du Japon en États dépendants, ainsi que de la création d’alliances militaires agressives à l’Ouest et à l’Est, comme le bloc de l’Atlantique Nord.

    Rien ne peut masquer le grave affaiblissement du système capitaliste mondial survenu ces dernières années, en particulier après le retrait d’un certain nombre d’États comptant une population totale de 600 millions d’habitants au cours de la période d’après-guerre.

    Rien ne cache l’incapacité des pays capitalistes à faire face au danger croissant d’une nouvelle crise économique et d’une nouvelle augmentation du chômage de masse, ce qui entraîne en même temps une augmentation des contradictions et des frictions entre ces États et une aggravation inévitable de la lutte de classe dans ces pays.

    Aucun effort des incendiaires de guerre et de leurs employés de la presse, essayant de revêtir un masque de paix et en même temps d’enivrer les lecteurs de la presse bourgeoise en répandant des calomnies sur l’agressivité de l’Union soviétique, ne pourra occulter le fait que c’est précisément du côté des cercles d’agression du camp impérialiste que se posent de nouvelles menaces contre la liberté et l’indépendance nationale des peuples, toutes les nouvelles menaces contre la violation de la paix et de la sécurité internationales.

    Plus sont révélée la précarité et l’insécurité des perspectives futures et les faiblesses internes du capitalisme moderne, qui est au stade de la crise générale et a intensifié son glissement vers le régime fasciste, plus les principales puissances du camp impérialiste et leur propagande perverse d’une nouvelle guerre sont agressives.

    Un autre camp, le camp international de défense de la paix et de la démocratie, s’oppose au camp de la réaction et de l’agression (…).

    Notre Parti est venu au 19e congrès aussi puissant et uni que jamais. (Applaudissements prolongés)

    La bannière de notre Parti, couverte de batailles glorieuses et de nombreuses victoires, a été élevée et appelle notre peuple à la victoire du communisme. (Applaudissements prolongés)

    Le nom du chef de notre parti, le nom de Staline, exprime les meilleurs espoirs et les aspirations de toute l’humanité progressiste (…).

    Au nom du Comité central, je déclare le congrès du Parti ouvert. (Tout le monde se lève. Applaudissements tempétueux et prolongés. Les délégués du Congrès chantent l’hymne du parti L’Internationale). »

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  • La tenue du XIXe congrès du PCUS(b)

    Le XIXe congrès se tint du 5 au 14 octobre 1952, dans le grand palais de la forteresse du Kremlin. Étaient présents 1359 délégués : 1192 avec un droit de vote, 167 avec un vote consultatif seulement.

    Cinq questions étaient inscrites à l’ordre du jour :

    Le rapport du Comité central ;

    Le rapport de la Commission centrale de vérification des comptes ;

    Le plan quinquennal ;

    Les nouveaux statuts du parti ;

    Les élections des organes centraux du parti

    Le Rapport du Comité central du PCUS (B) fut, pour la première fois depuis la mort de Lénine, lu par quelqu’un d’autre que Staline. C’est Gueorgui Malenkov qui a pris sa place. Voici le plan de ce rapport :

    I. La situation internationale de l’Union soviétique

    1. Nouvel affaiblissement du système capitaliste mondial et de la situation économique dans les pays du capitalisme

    2. Aggravation de la situation internationale. La menace d’une nouvelle guerre du bloc agressif américano-anglais. La lutte des peuples pour la paix.

    3. L’Union soviétique dans la lutte pour la préservation et la consolidation de la paix

    II. La situation interne de l’Union soviétique

    1. Nouvelle progression de l’économie nationale de l’URSS

    A. Industrie

    B. agriculture

    C. Chiffre d’affaires, transport, communications

    D. Le régime économique est le levier le plus important pour la poursuite de la croissance de l’économie nationale

    2. L’augmentation continue du bien-être matériel, des soins de santé et du niveau de vie culturel de la population

    3. Renforcement du système social et étatique soviétique

    III. Le Parti

    Le rapport de la Commission centrale de vérification des comptes fut effectué par Piotr Gueorguievitch Moskatov. Le plan quinquennal et ses directives furent présentés par Maksim Saburov, le responsable du Gosplan. On notera ici qu’on allait déjà à la troisième année du plan en question. La question des nouveaux statuts du parti fut présentée par Nikita Khrouchtchev.

    Joseph Staline tint un bref discours, à la fin, le 14 octobre 1952. Il a ensuite tenu un discours sans aucune note, bien plus long, lors du plénum du Comité Central du PCUS, deux jours plus tard. Il n’existe pas de retranscription de ce dernier discours.

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  • L’organisation du XIXe congrès du PCUS(b)

    Au moment du nouveau congrès, les communistes de l’URSS s’appuient sur 15 Partis Communistes, 8 organisations régionales, 167 organisations régionales, 36 organisations de districts, 511 organisations de villes et 4 886 organisations de sous-districts. L’URSS compte également quatre républiques socialistes de plus : celles de Lituanie, de Moldavie, de Lettonie et d’Estonie.

    En tout, il y a au congrès des délégués de 37 nationalités, les principales étant les suivantes : russe, ukrainienne, biélorusse, azérie, géorgienne, arménienne, kazakh, ouzbek, turkmène, kirghize, tadjik, karélienne, lituanienne, lettone, estonienne moldave, tatar, oudmourte, ossète, yakoute, etc.

    Cette grande dimension joue un rôle d’autant plus important que le précédent congrès avait eu lieu plus d’une décennie auparavant. Le XVIIIe congrès du Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) s’était déroulé en effet en mars 1939 et le XIXe congrès ne se tient qu’en octobre 1952 : c’est toute une longue période, particulièrement intense historiquement, qui les sépare.

    Cela signifie que les membres et candidats du Comité Central ont été cooptés pour beaucoup d’entre eux, car il n’y a pas eu de congrès pour les nommer comme c’est normalement le cas.

    Parallèlement à cela, les effectifs du Parti ont été multipliés par quatre. Cela signifie que le XIXe congrès est pour eux littéralement le premier où ils sont en tant que tel impliqués.

    Il était donc d’autant plus important de ne pas se rater et cela fait que la mise en place du XIXe congrès fut très particulière. Celui-ci fut annoncé le 20 août 1952 comme devant se tenir le 5 octobre. C’est un délai d’autant plus court que le PCUS(b) parlait de ce congrès depuis 1949, sans le mettre en place pour autant.

    Cela implique d’autant plus d’intensité. Voici ce qu’on lit dans la Pravda du 26 août 1952 :

    « De la rédaction de la Pravda

    Le Comité central du Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) a décidé d’appeler toutes les organisations dirigeantes du Parti à entamer des discussions sur les projets concernant le nouveau plan quinquennal et la charte du parti dans les principales organisations du Parti.

    Tous les membres et candidats du parti devraient être impliqués dans la discussion, en garantissant une totale liberté de critique. La presse du parti doit fournir ses pages pour la publication d’articles à la fois positifs et critiques.

    Le Comité central a ordonné au comité de rédaction de la Pravda de créer une section spéciale dans les pages de la Pravda sous la rubrique Matériel du XIXe Congrès du Parti, où les articles et les commentaires de camarades devraient être imprimés sur des questions à l’ordre du jour.

    Le comité de rédaction de la Pravda appelle l’organisation du Parti et les camarades individuellement à prendre part à la discussion des questions du congrès et à envoyer les articles et commentaires correspondants à la Pravda. »

    C’est encore plus quelque chose de très particulier quand on voit que Staline, le 2 octobre, publia dans l’organe théorique Bolchevik son très important document concernant Les problèmes économiques du socialisme en URSS.

    Le numéro de Bolchevik – tiré normalement à 500 000 exemplaires – connut une impression additionnelle de 300 000 copies. Dès les 3 et 4 octobre, la Pravda en fit une version ouvragée tirée à 1,5 million d’exemplaires. Au 1er janvier 1953, l’ouvrage avait été publié à 20 millions d’exemplaires.

    Des cadres du Parti – pas moins de 200 000 rien que pour Moscou – organisèrent des discussions dans les usines, les écoles et les bureaux, pendant tout le mois d’octobre 1952.

    L’ouvrage avait comme mission d’encadrer idéologiquement le XIXe congrès.

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  • La signification historique du XIXe congrès du PCUS(b)

    Le XIXe congrès du PCUS(b) a été un événement historique de la plus haute importance et cependant, jusqu’à présent, il n’y avait pas d’analyse profonde de sa signification. C’est un fait étrange quand on sait que le XXe congrès du PCUS établit la « déstalinisation ». Il est de fait d’autant plus essentiel de porter le regard sur le congrès précédent.

    De fait, l’analyse matérialiste historique de celui-ci apporte un approfondissement de la plus haute valeur à l’interprétation correcte du révisionnisme en URSS, aboutissant à la formation du social-impérialisme soviétique.

    On sait à quel point il était difficile de saisir comment des communistes éprouvés, en URSS et dans les autres pays, ont pu accepter la « déstalinisation » tout en se prétendant dans la continuité historique du Mouvement Communiste International.

    On a compris leur nature opportuniste, leur louvoiement, leurs faiblesses idéologiques et culturelles, mais il manquait la saisie de ce qui les projetait historiquement. L’analyse matérialiste historique du XIXe congrès résout ce problème fondamental.

    Il en découle, d’ailleurs, une correction nécessaire à la date avec laquelle on doit considérer que le révisionnisme a triomphé en URSS. L’usage voulait qu’on choisisse l’année 1953, à la suite directe de la mort de Staline. Il est en fait nécessaire de choisir 1952 et plus précisément le XIXe congrès.

    En effet, c’est à ce congrès que des figures aussi importantes que Nikita Khrouchtchev, Léonid Brejnev et Mikhail Souslov accèdent aux plus hauts postes, parmi bien d’autres encore par ailleurs.

    C’est à ce congrès que le Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) modifie son nom et son identité, puisque l’organisation de sa direction est entièrement revue. Il n’y a notamment plus ni poste de secrétaire général du Parti, ni Bureau Politique du Comité Central.

    C’est également à ce congrès que l’URSS change de perspective, et donc de nature, puisqu’il est désormais considéré qu’est commencée la construction du communisme, que le socialisme a été complété. La définition même du Parti est d’ailleurs modifiée, passant de celui de la classe ouvrière à celui des ouvriers, des paysans et des intellectuels, ce qui est fondamentalement erroné.

    C’est exactement cette base idéologique – et de fait également économique, culturelle, politique, militaire, puisque le Parti est dirigeant en URSS – qui va permettre aux forces révisionnistes d’enclencher une séquence où ils apparaissent et qui les projettent dans l’histoire.

    Il y a, dans le XIXe congrès, les principaux éléments qui seront ceux du révisionnisme par la suite. Naturellement, tel n’était pas du tout le projet de Staline, qui avait strictement encadré la définition du XIXe congrès par l’intermédiaire d’un ouvrage sorti au même moment, servant d’outil de protection essentielle du matérialisme historique et dialectique : Les problèmes économiques du socialisme en URSS.

    Toutefois, le calibrage de cette séquence contenait trop d’éléments unilatéraux et métaphysiques – pour reprendre la critique des communistes de Chine – pour être à même de permettre une réussite.

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  • Conclusion du Précis d’histoire du Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchévik)

    Quels sont les enseignements essentiels à tirer de l’œuvre historique accomplie par le Parti bolchévik ?

    Que nous apprend l’histoire du Parti communiste de l’U.R.S.S. ?

    1. L’histoire du Parti nous apprend, tout d’abord, que la victoire de la révolution prolétarienne, la victoire de la dictature du prolétariat est impossible sans un parti révolutionnaire du prolétariat, exempt d’opportunisme, intransigeant vis-à-vis des con­ciliateurs et des capitulards, révolutionnaire vis-à-vis de la bour­geoisie et de son pouvoir d’État.

    L’histoire du Parti nous apprend que laisser le prolétariat privé d’un tel parti équivaut à le laisser sans direction révolutionnaire ; or, le laisser sans direction révolutionnaire, c’est ruiner la cause de la révolution prolétarienne.

    L’histoire du Parti nous apprend que ce parti/ne peut être un parti social-démocrate ordinaire, du type de ceux de l’Europe occidentale, qui ont été éduqués dans les conditions de la paix civile, se traînent à la remorque des opportunistes, rêvent de « réformes sociales » et ont peur de la révolution sociale.

    L’histoire du Parti nous apprend que ce parti ne peut être qu’un parti de type nouveau, un parti marxiste-léniniste, un parti de révolution sociale, capable de préparer le prolétariat aux combats décisifs contre la bourgeoisie et d’organiser la victoire de la révolution prolétarienne.

    Ce parti, en U.R.S.S., est le Parti bolchévik.

    « Dans la période pré-révolutionnaire, dit le camarade Staline, dans la période de développement plus ou moins paisible, où les partis de la IIe Internationale étaient la force dominante dans le mouvement ouvrier, et où les formes par­lementaires de lutte étaient considérées comme les principales, — dans ces circonstances, le Parti n’avait pas et ne pouvait pas avoir l’importance sérieuse et décisive qu’il a acquise par la suite au cours des batailles révolutionnaires ouvertes.

    Dans sa défense de la IIe Internationale contre les attaques dont elle est l’objet, Kautsky dit que les partis de la IIe Internatio­nale sont un instrument de paix, et non de guerre ; que pré­cisément pour cette raison, ils n’ont pas’ été à même d’entre­prendre quoi que ce fût de sérieux pendant la guerre, dans la période des actions révolutionnaires du prolétariat.

    C’est tout à fait exact. Mais qu’est-ce que cela signifie ? Cela signi­fie que les partis de la IIe Internationale ne sont pas bons pour la lutte révolutionnaire du prolétariat ; qu’ils ne sont pas des partis de combat du prolétariat, menant les ouvriers à la conquête du pouvoir, mais un appareil électoral, approprié aux élections parlementaires et à la lutte parlementaire.

    Voilà ce qui explique justement le fait que, dans la période de domina­tion des opportunistes de la IIe Internationale, l’organisation politique fondamentale du prolétariat n’était pas le parti, mais la fraction parlementaire.

    On sait qu’à cette époque, le parti était en fait un appendice de la fraction parlementaire et un élément destiné à la servir. Il est à peine besoin de démontrer que, dans ces conditions, avec un tel parti à la tête, il ne pou­vait être même question de préparer le prolétariat à la révolution. Mais la situation a radicalement changé avec l’avènement de la nouvelle période.

    La nouvelle période est celle des colli­sions ouvertes entre les classes, la période des actions révolu­tionnaires du prolétariat, la période de la révolution proléta­rienne et de la préparation directe des forces au renversement de l’impérialisme, à la prise du pouvoir par le prolétariat.

    Cette période pose devant le prolétariat des tâches nouvelles : réorganisation de l’ensemble du travail du Parti selon un mode nouveau, révolutionnaire ; éducation des ouvriers dans l’esprit de la lutte révolutionnaire pour le pouvoir ; préparation et rassemblement des réserves ; alliance avec les prolétaires des pays voisins ; établissement de liens solides avec le mouvement de libération des colonies et des pays dépendants, etc., etc.

    Croire que ces nouvelles tâches peuvent être accomplies avec les forces des vieux partis social-démocrates, éduqués dans les conditions paisibles du parlementarisme, c’est se vouer à un désespoir sans fond, à une défaite inévitable. Demeurer avec de telles tâches sur les bras, avec les vieux partis en tête, c’est demeurer en état de désarmement complet. Il est à peine besoin de démontrer que le prolétariat ne pouvait admettre une pareille situation.

    De là, la nécessité d’un nouveau parti, d’un parti combatif, révolutionnaire, suffisamment courageux pour mener les prolétaires à la lutte pour le pouvoir, suffisamment expéri­menté pour se retrouver dans les conditions complexes d’une situation révolutionnaire et suffisamment souple pour contour­ner les écueils de toute sorte sur le chemin conduisant au but.

    Sans un tel parti, on ne saurait même songer à renverser l’impérialisme, à conquérir la dictature du prolétariat. Ce nouveau parti, c’est le Parti du léninisme. » (Staline : Des principes du léninisme.)

    2. L’histoire du Parti nous apprend encore que le parti de la classe ouvrière ne peut pas remplir le rôle de dirigeant de sa classe, ne peut pas remplir le rôle d’organisateur et de dirigeant de la révolution prolétarienne, s’il ne s’est pas assimilé la théorie d’avant-garde du mouvement ouvrier, s’il ne s’est pas assimilé la théorie marxiste-léniniste.

    Ce qui fait la force de la théorie marxiste-léniniste, c’est qu’elle permet au Parti de s’orienter dans une situation donnée, de com­prendre la liaison interne des événements au milieu desquels il se trouve, de prévoir la marche des événements et de discerner non seulement de quelle façon et dans quelle direction les événements évoluent aujourd’hui, mais aussi comment et de quel côté ils doivent évoluer demain.

    Seul le parti qui s’est assimilé la théorie marxiste-léniniste peut avancer d’un pas assuré et conduire en avant la classe ouvrière. Et inversement, le parti qui ne s’est pas assimilé la théorie marxiste-léniniste, est obligé d’errer à tâtons ; il perd toute assuran­ce dans son action, il est incapable de conduire en avant la classe ouvrière.

    Il peut sembler que s’assimiler la théorie marxiste-léniniste, c’est apprendre scrupuleusement par cœur certaines conclusions et thèses qui se trouvent dans les œuvres de Marx, d’Engels, de Lénine ; c’est apprendre à les citer en bonne place, et en rester là, dans l’espoir que les conclusions et les thèses apprises par cœur conviendront à toutes les situations, à toutes les occasions de la vie.

    Mais une telle façon de concevoir la théorie marxiste-léniniste est absolument fausse.

    On ne peut considérer la théorie mar­xiste-léniniste comme un recueil de dogmes, comme un catéchisme, comme un Credo, et les marxistes comme des pédants farcis de textes. La théorie marxiste-léniniste est la science du dévelop­pement de la société, la science du mouvement ouvrier, la science de ta révolution prolétarienne, la science de la construction de la société communiste.

    En tant que science, elle ne reste pas et ne peut pas rester à un point mort ; elle se développe et se perfec­tionne.

    On comprend bien que dans Je cours de son développement, elle s’enrichit forcément de l’expérience nouvelle, des connaissan­ces nouvelles et telles de ses thèses et de ses conclusions changent forcément avec le temps, sont forcément remplacées par des con­clusions et des thèses nouvelles, conformes aux conditions his­toriques nouvelles.

    S’assimiler la théorie marxiste-léniniste, ce n’est nullement en apprendre par cœur toutes les formules et toutes les conclu­sions, et se cramponner à chaque lettre de ces formules et de ces conclusions. Pour s’assimiler la théorie marxiste-léniniste, il faut avant tout apprendre à distinguer entre la lettre et le fond.

    S’assimiler la théorie marxiste-léniniste, c’est s’approprier la substance de cette théorie et apprendre à en tirer parti quand il s’agit de résoudre les problèmes pratiques du mouvement révo­lutionnaire dans les diverses conditions de la lutte de classe du prolétariat.

    S’assimiler la théorie marxiste-léniniste, c’est savoir enrichir cette théorie de la nouvelle expérience du mouvement révolution­naire ; c’est savoir l’enrichir de thèses et de conclusions nouvelles ; c’est savoir la développer et la faire progresser, sans hésiter — en s’inspirant de la substance de la théorie — à remplacer certaines de ses thèses et de ses conclusions qui ont désormais vieilli, par des thèses et des conclusions nouvelles conformes à la situation historique nouvelle.

    La théorie marxiste-léniniste n’est pas un dogme, mais un gui­de pour l’action.

    Avant la deuxième révolution russe (février 1917), les mar­xistes de tous les pays partaient du point de vue que la républi­que démocratique parlementaire est la forme la plus indiquée pour l’organisation politique de la société en période de transition du capitalisme au socialisme.

    Il est vrai que Marx avait signalé, dans les années 1870, que ce n’est pas la république parlementaire, mais l’organisation politique du type de la Commune de Paris qui est la forme la plus indiquée pour la dictature du prolétariat.

    Mais mal­heureusement, cette indication de Marx n’avait pas été développée plus avant dans ses travaux, et elle était vouée à l’oubli. D’autre part, la déclaration autorisée faite par Engels dans sa critique au projet de programme d’Erfurt, en 1891, et disant que « la républi­que démocratique… est… une forme spécifique pour la dicta­ture du prolétariat », ne permettait pas de douter que les mar­xistes continuaient à considérer la république démocratique comme une forme politique pour la dictature du prolétariat.

    Cette thè­se d’Engels devint par la suite un principe directeur pour tous les marxistes, y compris Lénine. Mais la révolution russe de 1905, et surtout la révolution de février 1917, mirent en avant une nou­velle forme d’organisation politique de la société, les Soviets des députés ouvriers et paysans.

    Après une étude approfondie de l’ex­périence des deux révolutions russes, Lénine, s’inspirait de la théorie du marxisme, fut amené à conclure que la meilleure forme politique de dictature du prolétariat est, non pas la républi­que démocratique parlementaire, mais la République des Soviets.

    C’est sur cette base que Lénine formula en avril 1917, lors du passage de la révolution bourgeoise à la révolution socialiste, le mot d’ordre d organisation de la République des Soviets, comme étant la meilleure forme politique de dictature du prolétariat. Et les opportunistes de tous les pays de se cramponner à la répu­blique parlementaire, en accusant Lénine de s’écarter du marxisme, de détruire la démocratie !

    Mais le vrai marxiste, celui qui s’était assimilé la théorie du marxisme, c’était évidemment Lénine, et non les opportunistes, puisque Lénine faisait progresser la théorie marxiste, en l’enrichissant de la nouvelle expérience acquise, tandis que les opportunistes la faisaient rétrograder, en transfor­mant une de ses thèses en dogme.

    Que serait-il advenu du Parti, de notre révolution, du mar­xisme, si Lénine s’était incliné devant la lettre du marxisme et ne s’était pas décidé à substituer à l’une des vieilles thèses du marxisme, formulée par Engels, la nouvelle thèse de la Républi­que des Soviets, conforme à la nouvelle situation historique ? Le Parti aurait erré dans les ténèbres, 1es Soviets auraient été désor­ganisés, nous n’aurions pas le pouvoir des Soviets, la théorie mar­xiste aurait subi un sérieux préjudice. Le prolétariat y aurait perdu, les ennemis du prolétariat y auraient gagné.

    Dans leur étude du capitalisme préimpérialiste, Engels et Marx en étaient arrivés à la conclusion que la révolution socialiste ne pouvait vaincre dans un seul pays pris à part ; qu’elle ne pou­vait vaincre que si l’explosion se produisait simultanément dans tous les pays, ou dans la plupart des pays civilisés.

    C’était au milieu du XIXe siècle, cette conclusion devint plus tard un principe directeur pour tous les marxistes. Cependant, vers le début du XXesiècle, le capitalisme préimpérialiste s’est transformé en capitalis­me impérialiste, le capitalisme ascendant s’est transformé en ca­pitalisme agonisant. Après une étude approfondie du capitalisme impérialiste, Lénine, — s’inspirant de la théorie marxiste, — a été amené à conclure que l’ancienne formule d’Engels et de Marx ne correspondait plus à la nouvelle situation historique ; que la révolution socialiste pouvait parfaitement triompher dans un seul pays pris à part.

    Et les opportunistes de tous les pays de se cram­ponner à l’ancienne formule d’Engels et de Marx, en accusant Lénine de s’écarter du marxisme ! Mais le vrai marxiste, celui qui s’était assimilé la théorie du marxisme, c’était évidemment Lénine et non les opportunistes, puisque Lénine faisait progresser la théo­rie marxiste, en l’enrichissant de la nouvelle expérience acquise, tandis que les opportunistes la faisaient rétrograder en la momi­fiant.

    Que serait-il advenu du Parti, de notre révolution, du mar­xisme si Lénine s’était incliné devant la lettre du marxisme, s’il n’avait pas eu le courage théorique de rejeter une des vieilles con­clusions du marxisme en la remplaçant par une conclusion nou­velle, sur la possibilité de la victoire du socialisme dans un seul pays pris à part, conclusion conforme à la nouvelle situation his­torique ?

    Le Parti aurait erré dans les ténèbres, la révolution prolétarienne aurait été privée de direction, la théorie marxiste se serait mise à dépérir. Le prolétariat y aurait perdu, les enne­mis du prolétariat y auraient gagné.

    L’opportunisme ne signifie pas toujours la négation directe de la théorie marxiste ou de certaines de ses thèses et conclusions. L’opportunisme se manifeste parfois dans des tentatives pour se cramponner à telles thèses du marxisme, désormais vieillies, et les convertir en dogmes, en vue de freiner par là le développement ultérieur du marxisme, et, partant, de freiner aussi le progrès du mouvement révolutionnaire du prolétariat.

    On peut dire sans exagération, que depuis la mort d’Engels, le plus grand théoricien Lénine, et après Lénine, Staline et les autres disciples de Lénine, ont été les seuls marxistes qui aient fait progresser la théorie marxiste et l’aient enrichie de la nou­velle expérience acquise dans les nouvelles conditions de la lutte de classe du prolétariat.

    C’est précisément parce que Lénine et les léninistes ont fait progresser la théorie marxiste que le léninisme est le développe­ment continu du marxisme ; il est le marxisme dans les nouvelles conditions de la lutte de classe du prolétariat, le marxisme de l’époque de l’impérialisme et des révolutions prolétariennes, le marxisme de l’époque de la victoire du socialisme sur un sixième du globe.

    Le Parti bolchévik n’aurait pas pu vaincre en octobre 1917, si ses cadres d’avant-garde ne s’étaient pas assimilé la théorie du marxisme, s’ils n’avaient pas appris à regarder cette théorie comme un guide pour l’action, s’ils n’avaient pas appris à faire progresser la théorie marxiste en l’enrichissant de la nouvelle expérience acquise dans la lutte de classe du prolétariat.

    Dans sa critique des marxistes allemands d’Amérique, qui avaient pris sur eux de diriger le mouvement ouvrier américain, Engels a écrit :

    « Les Allemands n’ont pas su faire de leur théorie le levier qui eût mis en mouvement les masses américaines ; cette théo­rie, ils ne la comprennent pas eux-mêmes la plupart du temps, et ils la traitent de façon doctrinaire et dogmatique, comme quelque chose que l’on doit apprendre par cœur et qui, dès lors, pourvoit à tous les besoins.

    C’est pour eux un Credo, et non un guide pour l’action. » (Engels an Sorge, Marx-Engels, Ausgew. Briefe, Moscou 1934, p. 357.)

    Dans sa critique de Kaménev et de certains vieux bolche­viks qui, en avril 1917, se cramponnaient à la vieille formule de dictature démocratique révolutionnaire du prolétariat et de la paysannerie, alors que le mouvement révolutionnaire avait marché de l’avant et exigeait que l’on passât à la révolution socialiste, Lénine a écrit :

    « Notre doctrine n’est pas un dogme, mais un guide pour l’action, ont toujours dit Marx et Engels, se moquant à juste titre des « formules » apprises par cœur et répétées telles quelles, formules susceptibles dans le meilleur des cas d’indiquer, tout au plus, les tâches générales que modifie nécessaire­ment la situation économique et politique concrète à chaque phase particulière du processus historique…

    Il faut s’assimi­ler celte vérité incontestable que le marxiste doit tenir compte de la vie même, des faits précis de la réalité, au lieu de conti­nuer à se cramponner à la théorie de la veille… » (Lénine, t. XX, pp. 100-101, éd. russe.)

    3. L’histoire du Parti nous apprend encore que, si l’on n’écra­se pas les partis petits-bourgeois qui travaillent au sein de la classe ouvrière, qui poussent ses couches arriérées dans les bras de la bourgeoisie et détruisent de la sorte l’unité de in classe ouvrière, la victoire de la révolution prolétarienne est impossible.

    L’histoire de notre Parti est l’histoire de la lutte et de l’écrase­ment des partis petits-bourgeois : socialistes-révolutionnaires, menchéviks, anarchistes, nationalistes. Sans avoir triomphé de ces partis, sans les avoir chassés du sein de la classe ouvrière, il eût été impossible de réaliser l’unité de la classe ouvrière ; or, sans l’uni­té de la classe ouvrière, il eût été impossible de faire triompher la révolution prolétarienne.

    Sans avoir écrasé ces partis qui, d’abord, étaient pour le main­tien du capitalisme, et puis, après la Révolution d’Octobre, pour la restauration du capitalisme, il eût été impossible de sauvegarder la dictature du prolétariat, de vaincre l’intervention militaire de l’étranger, de construire le socialisme.

    On ne saurait considérer comme un hasard le fait que tous les partis petits-bourgeois qui, pour tromper le peuple, s’intitulaient partis « révolutionnaires » et « socialistes » — socialistes-révolu­tionnaires, menchéviks, anarchistes, nationalistes,—sont devenus des partis contre-révolutionnaires avant même la Révolution so­cialiste d’Octobre, et plus tard, les agents des services de rensei­gnements de la bourgeoisie étrangère, une bande d’espions, de saboteurs, d’auteurs de diversions, d’assassins, de traîtres à la patrie.

    « L’unité du prolétariat, dit Lénine, à l’époque de la ré­volution sociale, ne peut être réalisée que par le parti révo­lutionnaire extrême, le parti du marxisme, que par une lutte implacable contre tous les autres partis. » (Lénine, t. XXVI, p. 50, éd. russe.)

    4. L’histoire du Parti nous apprend encore que sans une lutte intransigeante contre les opportunistes dans ses propres rangs, sans écraser les capitulards dans son propre milieu, le parti de la classe ouvrière ne peut pas sauvegarder l’unité et la discipline dans ses rangs, ne peut pas remplir son rôle d’organisateur et de dirigeant de la révolution prolétarienne, ne peut pas remplir son rôle de bâtisseur de la nouvelle société socialiste.

    L’histoire du développement de la vie intérieure de notre Parti est l’histoire de la lutte et de l’écrasement des groupes opportunis­tes à l’intérieur du Parti, « économistes », menchéviks, trotskistes, boukhariniens, fauteurs des déviations nationalistes.

    L’histoire du Parti nous apprend que tous les groupes de ca­pitulards ont été, au fond, les agents du menchévisme à l’intérieur de notre Parti, son appendice, son prolongement De même que le menchévisme, ils ont servi de véhicule à l’influence bourgeoise dans la classe ouvrière et dans le Parti. C’est pour­quoi la lutte pour la liquidation de ces groupes dans le Parti a été le prolongement de la lutte pour la liquidation du menché­visme.

    Si nous n’avions pas battu les « économistes » et les menché­viks, nous n’aurions pas pu construire le Parti et conduire la clas­se ouvrière à la révolution prolétarienne. Si nous n’avions pas battu les trotskistes et les boukhariniens, nous n’aurions pas pu préparer les conditions requises pour cons­truire le socialisme.

    Si nous n’avions pas battu les fauteurs des déviations natio­nalistes de tout genre et de tout acabit, nous n’aurions pas pu éduquer le peuple dans l’esprit de l’internationalisme, nous n’aurions pas pu sauvegarder le drapeau de la grande amitié des peuples de l’U.R.S.S., nous n’aurions pas pu bâtir l’Union des Républiques socialistes soviétiques.

    Il peut sembler que les bolchéviks aient accordé trop de temps à la lutte contre les éléments opportunistes dans le Parti, qu’ils en aient surestimé l’importance. Mais cela est absolument faux.

    On ne saurait pas plus tolérer l’opportunisme chez soi qu’on ne saurait tolérer un ulcère dans un organisme sain. Le Parti est le détachement dirigeant de la classe ouvrière, sa citadelle avancée, son état-major de combat. On ne saurait admettre qu’il y ait à l’état-major dirigeant de la classe ouvrière des sceptiques, des op­portunistes, des capitulards, des traîtres.

    Mener une lutte à mort contre la bourgeoisie avec des capitulards et des traîtres dans son propre état-major, dans sa propre citadelle, c’est tomber dans la situation d’hommes pris entré deux feux.

    Il n’est pas difficile de comprendre que dans ces conditions, la lutte ne peut aboutir qu’à la défaite. C’est de l’intérieur que les forteresses s’enlèvent le plus facilement.

    Pour obtenir la victoire, il faut avant toute chose épurer le parti de la classe ouvrière, — son état-major dirigeant, sa citadelle avancée, — dès capitulards, des déserteurs, des félons et des traîtres.

    On ne peut considérer comme un hasard le fait que les trots­kistes, les boukhariniens, les fauteurs des déviations nationalistes, en luttant contre Lénine, contre le Parti, ont fini comme avaient fini les partis menchévik et socialiste-révolutionnaire : ils sont devenus agents des services de renseignements fascistes, espions, saboteurs, assassins, auteurs de diversions, traîtres à la patrie.

    « Si l’on compte dans ses rangs des réformistes, des menchéviks, dit Lénine, on ne saurait faire triompher la révolution prolétarienne, on ne saurait la sauvegarder. C’est un principe évident. L’expérience de la Russie et de la Hongrie l’a confirmé nettement…

    En Russie, maintes fois se sont pré­sentées des situations difficiles dans lesquelles le régime sovié­tique eût certainement été renversé, si les menchéviks, les ré­formistes, les démocrates petits-bourgeois étaient demeurés dans notre Parti. .. » (Lénine, t. XXV, pp. 462-463, éd. russe.)

    « Si notre Parti, dit le camarade Staline, a réussi à cons­tituer son unité intérieure et la cohésion sans précédent qui règne dans ses rangs, c’est avant tout parce qu’il a su se pu­rifier à temps de la souillure de l’opportunisme, parce qu’il a su chasser du Parti les liquidateurs et les menchéviks.

    La voie du développement et du renforcement des partis prolé­tariens passe par leur épuration des opportunistes et des réfor­mistes, des social-impérialistes et des social-chauvins, des social-patriotes et des social-pacifistes. Le Parti se fortifie en s’épurant des éléments opportunistes. » (Staline : Des principes du léninisme.)

    5. L’histoire du Parti nous apprend encore que le Parti ne peut remplir son rôle de dirigeant de la classe ouvrière si, grisé par ses succès, il se laisse aller à la présomption, s’il cesse de re­marquer les insuffisances de son travail, s’il craint de reconnaître ses erreurs, s’il craint de les corriger à temps, ouvertement et hon­nêtement.

    Le Parti est invincible s’il ne craint pas la critique et l’auto­critique, s’il ne voile pas les erreurs et les insuffisances de son travail, s’il instruit et éduque les cadres en les éclairant sur les erreurs commises dans le travail, s’il sait corriger ces erreurs à temps.

    Le Parti périt s’il cache ses erreurs, escamote les questions névralgiques, dissimule ses déficiences sous de fausses apparences de santé, s’il ne souffre pas la critique ni l’autocritique, s’il se pénètre d’un sentiment de suffisance, s’adonne au culte de soi-même et s’endort sur ses lauriers.

    « L’attitude d’un parti politique en face de ses erreurs, dit Lénine, est un des critériums les plus importants et les plus sûrs pour juger si ce parti est sérieux et s’il remplit réel­lement ses obligations envers sa classe et envers les masses laborieuses.

    Reconnaître ouvertement son erreur, en découvrir les causes, analyser la situation qui lui a donné naissance, exa­miner attentivement les moyens de corriger celte erreur, voilà la marque d’un parti sérieux, voilà ce qui s’appelle, pour lui, remplir ses obligations, éduquer et instruire la classe, et puis les masses. » (Lénine, Œuvres choisies, t. II, p. 725.)

    Et plus loin :

    « Tous les partis révolutionnaires qui ont péri jusqu’ici, ont péri parce qu’ils se laissaient aller à la présomption, ne savaient pas voir ce qui faisait leur force, et craignaient de parler de leurs faiblesses. Mais nous, nous ne périrons pas, parce que nous ne craignons pas de parler de nos faiblesses, parce que nous apprendrons à les surmonter. » (Lénine, t. XXVII, pp. 260-261, éd. russe.)

    6. Enfin l’histoire du Parti nous apprend que faute d’avoir d’amples liaisons avec les masses, faute de raffermir constam­ment ces liaisons, faute de savoir écouter la voix des masses et comprendre leurs besoins poignants, faute d’avoir la volonté non seulement d’instruire les masses, mais aussi de s’instruire auprès d’elles, le parti de la classe ouvrière ne peut pas être un véritable parti de masse, capable d’entraîner, avec leurs millions d’hom­mes, la classe ouvrière et l’ensemble des travailleurs.

    Le Parti est invincible, s’il sait, comme dit Lénine, « se lier, se rapprocher et, si vous voulez, se fondre jusqu’à un certain point avec la masse des travailleurs la plus large, au premier chef avec la masse prolétarienne, mais aussi avec la masse des travailleurs non prolétarienne ». (Lénine, t. XXV, p. 174, éd. russe.)

    Le Parti périt s’il se confine étroitement dans sa propre coquil­le, s’il se détache des masses, s’il se couvre d’un enduit de bureaucratisme.

    « On peut reconnaître pour règle générale, dit le camarade Staline, qu’aussi longtemps que les bolchéviks conserveront leur liaison avec les grandes masses du peuple, ils seront in­vincibles.

    Et au contraire, il suffit que les bolchéviks se dé­tachent des masses et rompent leur liaison avec elles, il suffit qu’ils se couvrent de la rouille bureaucratique, pour qu’ils per­dent toute leur force et se transforment en une nullité.

    La mythologie des Grecs de l’antiquité comptait un héros célèbre, Antée, qui était, selon la mythologie, le fils de Po­séidon, dieu de la mer, et de Gê, déesse de la terre.

    Il était particulièrement attaché à sa mère, qui lui avait donné le jour, qui l’avait nourri et élevé. Il n’y avait point de héros qu’Antée ne pût vaincre. Il passait pour un héros invincible. Qu’est-ce qui faisait sa force ? C’était que chaque fois qu’en combattant un adversaire il était en difficulté, il touchait la terre, sa mè­re, qui lui avait donné le jour et l’avait nourri, et il reprenait des forces.

    Mais il avait pourtant un point faible : c’était le danger d’être d’une façon ou de l’autre détaché de la terre. Ses ennemis tenaient compte de cette faiblesse et guettaient Antée.

    Et il se trouva un ennemi qui profita de cette faiblesse et vainquit Antée. Ce fut Hercule. Mais comment réussit-il à le vaincre ? Il l’arracha de terre, le souleva en l’air, et l’em­pêchant de prendre contact avec le sol, il l’étouffa.

    Je pense que les bolchéviks nous rappellent le héros de la mythologie grecque, Antée. De même qu’Antée, ils sont forts parce qu’ils sont liés à leur mère, aux masses qui leur ont donné naissance, les ont nourris et les ont éduqués.

    Et aussi longtemps qu’ils restent attachés à leur mère, au peuple, ils ont toutes les chances de rester invincibles. Là est le secret de l’invincibilité de la direction bolchevi­que. » (Staline : Des insuffisances du travail du Parti, éd. russe.)

    Tels sont les enseignements essentiels de l’œuvre historique accomplie par le Parti bolchévik.

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    Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchévik)