Auteur/autrice : IoULeeM0n

  • Le PCF et la question de la guerre de partisans

    L’absence d’envergure de masse et la pratique hyper-activiste des FTP ont rendu impossible par la suite un aperçu réel de la résistance mise en place par le Parti Communiste Français.

    L’absence de stratégie a renforcé les courants centrifuges et a abouti dès l’après-guerre à des déchirures internes très grandes au sein de la nouvelle génération « combattante » arrivée au Parti.

    Il est très important de comprendre cela, sinon on ne peut pas saisir pourquoi la résistance armée s’efface du jour au lendemain en 1945, ni même comment il y a eu un alignement pur et simple sur les FFI à la fin 1943.

    On a ici un bon exemple avec la Brigade rouge internationale, qui a agi dans la seconde partie de 1944 en Haute-Savoie. Ses multiples actions sont passées inaperçus du point de vue historique pendant plusieurs décennies, car ce groupe initialement FTP a refusé de rejoindre les FFI.

    Un autre exemple, lui très connu, est le maquis du Limousin, mis en place dès avril 1941 par Georges Guingouin, signant ses documents le « Préfet du Maquis ».

    On a ici quelqu’un qui a immédiatement compris le principe de la clandestinité et était passé dans la lutte armée avec facilité et un grand succès, dès août 1940.

    La Haute-Vienne a ainsi été le département comptant le plus de résistants en armes : 8 000 ; le maquis a multiplié les actions armées, ainsi que les raids pour obtenir des fonds, du ravitaillement, des armes, des explosifs.

    Il a joué un rôle important lors du débarquement en retardant l’envoi en Normandie de la division blindée SS « Das Reich », qui commit à ce moment le massacre d’Oradour-sur-Glane ; par la suite, son maquis a encerclé Limoges, amenant la capitulation allemande.

    Guingouin était considéré par la direction locale des communistes comme un « fou dans les bois » en raison de sa politique menée de manière clairement indépendante par rapport au Parti Communiste Français. Dès l’après-guerre, il y aura un acharnement impitoyable pour le mettre de côté et l’exclure.

    C’est très paradoxal : d’un côté, Georges Guingouin a mené le plus ce qui correspond à une guerre de partisans ; son implantation populaire et régionale était brillante. Le Parti Communiste Français aurait dû trouver cela exemplaire.

    De l’autre côté, Georges Guingouin lui-même n’a jamais prôné l’insurrection armée, s’est toujours aligné sur de Gaulle et est ainsi passé ouvertement dans le réformisme après-guerre. C’est d’ailleurs la même dynamique qui a prévalu pour les anciens membres dirigeants de la Brigade rouge internationale.

    Il y a ici quelque chose d’incompréhensible si on ne comprend pas que la situation de 1940 a permis, comme en 1934, à toute une génération de s’engager dans l’hyper-activisme à travers le Parti Communiste Français, mais sans les fondamentaux idéologiques communistes.

    On n’a donc rien que ce qui se rapproche d’une réflexion de la guerre des partisans comme il y en avait une au même moment en Chine, en Grèce, en Albanie ou en Yougoslavie.

    La guerre des partisans est dans le cadre français réduite à un levier. L’appel du Front National de Juillet 1942 le reflète très bien : on est dans la généralisation des oppositions, pas dans une stratégie.

    « 1. empêcher que les ressources de la France servent à la machine de guerre allemande ;

    2. empêcher les usines françaises de travailler pour Hitler, en soutenant les luttes revendicatrices des ouvriers, qui, en défendant leur pain et celui de leurs enfants, suivent la cause de la France ;

    3. empêcher que nos chemins de fer transportent en Allemagne nos richesses nationales et les produits de notre industrie ;

    4. organiser la résistance des paysans à la livraison des produits agricoles aux oppresseurs de la Patrie ;

    5. organiser la lutte contre la répression hitléro-vichyssoise, chaque militant du Front National, qu’il soit athée ou croyant, radical ou communiste, devant bénéficier de la solidarité de tous ;

    6. diffuser les écrits, appels ou documents du Front National et dénoncer systématiquement les mensonges de l’ennemi ;

    7. propager et exalter, face à l’envahisseur et à ses séides, les sentiments patriotiques, la volonté de lutte pour libérer la France. »

    Ce qui est proposé, c’est la contribution à la mise sous pression générale de l’occupant nazi et du régime de Vichy. C’est le sens du slogan des FTP lancé en février 1943 « s’unir, s’armer, se battre ».

    Et L’Humanité du 15 avril 1943 souligne que les militants doivent s’appliquer avec « courage, un vigoureux esprit offensif et une discipline de fer ».

    Le Parti Communiste Français se voit comme le fer de lance de l’union des Français, comme en 1937.

    Si la démarche est ainsi celle d’un appel à la violence, on en reste sur le plan tactique, à l’instar de ce qu’on lit dans L’Humanité début de 1943 :

    « Agissez, agissez et agissez !

    Luttez contre la déportation des ouvriers en Allemagne, par la manifestation, par la grève, par la dislocation des convois. Répondez par la force à la violence de la police et de la Gestapo.

    Sabotez, sabotez, détériorez les machines, les locomotives, les camions, les chalands.

    Faites sauter les voies ferrées, les ponts et les écluses ; mettez le feu aux entreprises. Paralysez l’industrie de guerre des hitlériens et leurs moyens de transport.

    Organisez la lutte des paysans pour briser par la force le système des réquisitions hitlériennes Organisez des manifestations de femmes contre ceux qui nous condamnent à la famine.

    Exigez 500 grammes de pain par jour, du charbon, du bois. Formez dans chaque usine, dans chaque gare, dans chaque dépôt des chemins de fer, des groupes de saboteurs, de dynamiteurs.

    Organisez de nouveaux détachements de francs-tireurs: enrôlez les ouvriers menacés de déportation en Allemagne ; appelez, pour instruire les Francs-Tireurs, les officiers, les sous-officiers licenciés et les anciens combattants.

    Que chaque patriote considère comme un devoir sacré la lutte armée contre l’ennemi affaibli et obligé de disperser ses forces.

    Français, Françaises ! Agissez, agissez, agissez !

    Ce n’est que de la sorte que nous pourrons préparer l’insurrection nationale, accélérer l’ouverture du deuxième front en Europe et rapprocher l’heure de notre libération. »

    Du 1er octobre au 31 décembre 1943, les FTP ont mené au moins 338 actions contre les voies ferrées ou les trains chargés de troupes et de matériel allemands, tuant dans 246 attaques armées 750 officiers, sous-officiers ou soldats et en blessant 1780. 1200 traîtres furent exécutés.

    Les FTP ont également fait sauter 21 écluses ainsi que 3 sous-stations électriques, 15 transformateurs, une génératrice d’usine et endommagé deux usines électriques, mené 15 opérations contre des canaux, coulant ou sabotant de manière importante 42 péniches.

    65 attaques ont été menées contre des détachements, des patrouilles et des casernements, abattant 215 officiers ou soldats et en blessant 340 ; il faut y ajouter l’incendie de dépôts de blés et de fourrage réquisitionnés.

    Rien qu’en février 1944, les FTP abattent 57 miliciens et agents de la Gestapo ; le journal collabo Je suis partout parle lui de 1200 « attentats » dans le département de la Seine et de 500 à Lyon.

    On ne soulignera jamais assez l’abnégation des communistes, qui firent face à une répression sanglante, notamment en région parisienne par les forces de répression.

    En mai 1940 est crée la Brigade spéciale (B.S) chargée de la lutte contre les communistes, suppléée par une seconde B.S en 1941. Ce sont elles qui pratiqueront les pires sévices sur les militants communistes et de rudes coups à l’organisation, avec par exemple plus de 1000 personnes arrêtées en décembre 1942.

    À cela s’ajoute un contexte très difficile, avec une brigade du métro qui sillonne les couloirs, ou encore la police municipale qui peut à tout moment bloquer une rue et procéder au contrôle de tous les passants pendant 30 minutes, surveillant tout particulièrement toute attitude « suspecte » (comme changer de direction, entrer dans un immeuble, etc.)

    L’un des symboles les plus marquants du début de cette terreur reste l’exécution des « 27 » à Châteaubriant (en même temps que 22 à Nantes et 50 à Bordeaux), dont le jeune Guy Môquet.

    Il faut rappeler ici que Jean-Pierre Timbaud, le secrétaire CGT des métallos, est mort fusillé en criant « Vive le Parti Communiste allemand » (bien qu’il faille noter que le KPD est officiellement, de manière conforme à l’Internationale Communiste, le Parti communiste d’Allemagne et certainement pas « allemand »).

    Voici la dernière lettre à sa femme et sa fille (il faut savoir ici que Jean-Pierre Timbaud n’a quasiment pas été scolarisé) : 

    « Toute ma vie jais combattue pour une humanité mailleure jais le grandes confiance que vous verait realise mon rêve ma mort aura servie a quelque choses mai dernière pensée serront tout d abord a vous deux mes deux amours de ma vie et puis au gran  ideau de ma vie. Au revoire me deux chere amours de ma vi du courage vous me le juré vive la France vive le proletariat international. »

    On trouve également Pierre Sémard, secrétaire général de la Fédération des cheminots depuis 1935, dont la dernière lettre contient les mots suivants :

    « Dans quelques instants je serai fusillé. J’attends la mort avec calme.

    Ma dernière pensée est avec vous, camarades de lutte, avec tous les membres de notre grand Parti, avec tous les Français patriotes, avec les héroïques combattants de l’Armée Rouge et son chef, le grand Staline.

    Je meurs avec la certitude de la libération de la France.

    Dites à mes amis les cheminots que ma dernière volonté est qu’ils ne fassent rien qui puisse aider les nazis. Les cheminots me comprendront ; ils m’entendront, ils agiront et j’en suis convaincu.

    Adieu, mes chers amis. L’heure de mourir approche. Mais je sais que les nazis qui vont me fusiller sont déjà vaincus. Vive l’Union soviétique et ses alliés ! Vive la France ! »

    On notera que la fusillade des otages fut systématisée par l’Allemagne nazie, et même élargie en juillet 1942 par l’application de la responsabilité pénale aux familles mêmes des résistants. 30 000 otages furent fusillés sous l’occupation.

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • Les Francs-tireurs et partisans

    Quelle est la ligne des Francs-tireurs et partisans, organisation désormais parallèle au Front national ? Elle se retrouve bien dans les mots d’ordre « Unissez-vous, refusez de servir le fascisme », « A chacun son boche », « S’unir, s’armer, combattre ».

    En ce sens, les Francs-tireurs et partisans ne sont pas sur la ligne de de Gaulle, qui le 23 octobre 1941 affirme encore par exemple que :

    « La guerre des Français doit être conduite par ceux qui en ont la charge… Actuellement, la consigne que je donne pour le territoire occupé, c’est de ne pas y tuer d’Allemands. »

    Quant aux groupes trotskistes, ils réfutent la résistance armée face aux nazis. Le Parti Communiste Français est seul en première ligne.

    On chercherait malheureusement en vain une stratégie de révolution démocratique : le poids de la ligne opportuniste de droite est immense. Façonné dans le syndicalisme révolutionnaire, adapté sur le mode du Parti syndicaliste avec Maurice Thorez, le Parti Communiste Français se veut le « meilleur élève », et ce en permanence.

    Il faut donc chercher agressivement les affrontements : « Il faut tenir tête à la police, reconquérir la rue », comme le formule L’Humanité du 1er mai 1942. Pour ce faire, chaque instance du Parti Communiste Français doit fournir 10 % de ses membres aux FTP ; c’est très peu, mais suffisamment justement pour disposer d’un levier qu’on peut qualifier de propagandiste armé.

    On lit dans la revue des FTP, France d’abord, qui a comme exergue Chasser l’envahisseur ! :

    « Que chaque cri se fasse balle. La lutte armée doit devenir le devoir de toute la Résistance.

    Chaque ennemi sera ainsi visé. Car combien sont-ils donc, et combien sommes-nous, si nous sommes un peuple allié de ses alliés ?

    La victoire ne sera obtenue que par la destruction de l’armée hitlérienne dont la puissance initiale a été forgée, avant la guerre, à l’abri des divers ‘attentismes’ de la non-intervention et de Munich.

    De ces données découle une stratégie commune à tous les peuples unis dans la volonté d’en finir le plus tôt possible avec l’hitlérisme.

    Cependant, si les Russes restent seuls à détruire la puissante armée nazie, les Français devront supporter un autre hiver de guerre, au cours duquel Hitler pourra réaliser au moins ce qui fut le premier article de son programme insensé de domination du monde : détruire la France, berceau de la liberté.

    Donc, aucun Français de France n’a intérêt à laisser durer une guerre atroce, alors qu’il est possible de l’abréger.

    Hitler a en France 250.000 hommes pour faire face au second front.

    Les forces d’occupation sont si réduites que Hitler les double de policiers, gendarmes, légionnaires et autres mercenaires que Pétain et Laval transforment en soldats boches pour aider à occuper, piller, à saigner la France.

    Mais les Français en état de se battre sont dix fois plus nombreux que l’ennemi.

    Un boche isolé est un prisonnier. L’ennemi n’occupe militairement le terrain que là où ses unités peuvent agir en tant qu’unités. Et tous les transports, voies de communication, transports publics, ne sont assurés que par des mains de Français.

    En dehors d’une force d’occupation réduite, il ne reste qu’une occupation politique exercée par des traîtres.

    Dans ce rapport des forces, la terreur nazie n’est opérante que pour ceux qui l’acceptent ou bien l’encouragent en exagérant sa puissance pour mieux masquer leur lâcheté.

    Attendre, faire la guerre avec la peau des Russes, partir en Allemagne pour travailler pour l’ennemi, laisser guillotiner les Français pour crime de patriotisme, c’est reculer l’heure du second front en désertant le front de France !

    Le front de France ? Il est partout où il y a un boche, une de ses armes ou un wagon, un camion, de l’essence ou du blé destiné aux boches, un terrain d’aviation, un dépôt d’armes, un chien de Laval.

    Nos armes ? Elles sont partout où un peu de courage donne le loisir d’en prendre.

    Chaque ennemi désarmé doit servir à armer un chef de groupe, autour duquel s’armeront d’autres patriotes d’armes improvisées.

    Pour la forme de guerre qui nous incombe, contre les forces d’occupation, le nombre doit suppléer à la qualité du matériel. Et nous sommes dix contre un…

    Comme vous le recommande le Front National, dans vos usines, vos quartiers, groupez-vous en Comités populaires de la France combattante pour coordonner toutes les formes d’action politique et économique contre l’ennemi ; arrêtez toute production pour les boches et empêchez tout départ pour l’Allemagne. En même temps, organisez et menez l’action armée.

    « La Libération nationale, a dit le général de Gaulle, ne peut se séparer de l’insurrection nationale… ».

    L’insurrection nationale ne saurait être le produit d’un miracle, une génération spontanée à l’heure H.

    Il n’existe pas d’autres moyens d’organiser une armée de patriotes pour la Libération que le combat quotidien, qui forge la discipline et les chefs, procure les armes et permet d’organiser en agissant, d’agir en organisant.

    Laisser croire le contraire serait préparer à notre peuple des désillusions que nous voulons épargner. Chacun à son poste, chacun à son arme.

    Que sans attendre, tout ce qui appartient à l’armée d’occupation soit cerné de haine, attaqué, frappé, exterminé.

    Et que, sur le Front National de la Libération, retentisse le cri de guerre contre tous ceux qui veulent détruire notre patrie : TOUS DEBOUT ET CHACUN SON BOCHE. »

    Le sous-titre de France d’abord va refléter l’échec du projet initial et le passage du Parti Communiste Français dans le giron gaulliste.

    On passe ainsi d’abord de « organe d’information sur le mouvement des patriotes français pour la libération du territoire » au sous-titre « organe d’information, de liaison et de combat des détachements de FTP qui forment sur le sol de la patrie l’avant-garde armée de la France combattante ».

    Cela change ensuite de nouveau, pour devenir « organe d’information, de liaison et de combat des détachements de Francs-Tireurs et Partisans adhérant aux Forces Françaises de l’Intérieur (FFI), puis enfin organe d’information, de liaison et de combat des unités de Francs-Tireurs et Partisans, membres de l’Armée régulière des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI) ».

    Initialement, il s’agissait de représenter toutes les forces, puis les FTP comme meilleur élève, après cela comme élève reconnaissant, enfin comme élève reconnu.

    Il est bien connu ici que ce sont les FTP-MOI de la région parisienne qui ont été les plus actifs en termes d’action de choc. L’affiche rouge de la propagande nazie dénonçant le « Groupe Manouchian-Boczov-Rayman » est très connue.

    Voici leur composition, avec entre parenthèses le nombre d’actions armées pour les six premiers mois de 1943 :

    – le « détachement roumain », avec une trentaine de roumains sous la direction d’Edmond Hirsch (mort en camp en 1943) qui est un ancien combattant des Brigades internationales (18) ;

    – le « détachement juif », avec une quarantaine de juifs polonais sous la direction de Sevek Kirshenbaum (32) ;

    – le « détachement italien » avec une quarantaine d’italiens, sous la direction de Marino Mazetti (31) ;

    – le « détachement des dérailleurs », avec des activistes de plusieurs nationalités des pays de l’Est ainsi que d’Espagne, sous la direction de Joseph Boczov (fusillé au fort du Mont-Valérien en 1944) (11).

    Les FTP ne devinrent cependant jamais un réel mouvement de masse, même s’il fut d’envergure ; on peut considérer qu’ils disposaient de 25 000 membres avant le tournant de 1944, ce qui est un chiffre extrêmement faible.

    En décembre 1943, ils fusionnèrent avec l’Armée secrète (d’orientation gaulliste, regroupant les mouvements Combat, Libération-Sud, Franc-Tireur) et l’Organisation de résistance de l’armée (lié au général Henri Giraud, rival de De Gaulle). Cela donna les Forces françaises de l’intérieur (FFI).

    Les effectifs de celles-ci furent pour l’année 1944 de 100 000 en janvier, de 200 000 en juin et de 400 000 en octobre.

    La Résistance française n’acquit une réelle importance d’envergure que dans la foulée de l’instauration pour des centaines de milliers de Français du « Service du Travail Obligatoire » les envoyant en Allemagne, de la défaite nazie à Stalingrad et du débarquement.

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • Le Front National mis en place par le PCF en 1941

    En mai 1941, le Parti Communiste Français tente de mettre en place un mouvement de libération nationale ; son appel-programme s’intitule Pour la formation d’un Front national de l’indépendance de la France.

    Le texte est extrêmement mauvais pour deux raisons : la première, flagrante, est qu’il s’agit d’une longue réflexion, difficile à appréhender dans la lecture, en particulier en comparaison avec l’appel du général de Gaulle depuis Londres, en 1940.

    Ensuite, il est dit que le Front national soutiendra « tout gouvernement français, toute organisation et tous hommes dont les efforts seront orientés dans le sens d’une lutte véritable contre l’oppression nationale subie par la France et contre les traîtres au service de l’envahisseur ».

    Or, un véritable Front national est censé porter un tel gouvernement, unifiant toutes les forces de résistance.

    C’était bien pourtant, en théorie, le but, puisque sont mis en place des structures nombreuses en ce sens : le Front National des avocats, le Front National des médecins, le Front National des commerçants, le Front National des paysans, les Fronts Nationaux d’usines, etc.

    Mais on reconnaît ici dans l’appel l’opportunisme de la ligne de Maurice Thorez, avec sa perpétuelle quête de « légitimité ». Le résultat sera, comme on le sait, l’intégration très rapide du Parti Communiste Français dans le dispositif gaulliste, à la grande joie de Maurice Thorez.

    « Pour la formation d’un Front national de lutte pour l’indépendance de la France

    Le Parti communiste français s’adresse à tous ceux qui pensent français et veulent agir en Français

    Français ! Françaises ! M. Darlan qui a récolté ses étoiles d’amiral dans les bureaux de la rue Royale, sous la protection des politiciens les plus pourris de la IIIe République, a été reçu par Hitler, le 11 mai dernier à Berchtesgaden.

    Cet amiral félon que l’opinion publique désigne sous l’appellation de « Laval en uniforme » s’est bien gardé de mettre le peuple de France au courant des détails de ce qui fut maquignonné au cours de cette entrevue.

    L’amiral politicien sait bien que les Français le suspectent et le méprisent, c’est pourquoi il a jugé utile de bredouiller au micro un discours hypocrite d’où il ressort que le Führer ne lui aurait pas demandé la marine française, mais ce que Darlan n’a pas dit c’est que les marins français et les aviateurs français ne seraient, en aucun cas, envoyés à la mort pour le compte du IIIe Reich.

    Darlan, le profiteur de la défaite, est même allé jusqu’à louanger la « magnanimité » de l’envahisseur, osant dire sans honte que si Hitler l’avait voulu la France pouvait être rayée de la carte du monde, comme s’il était au pouvoir de tyrans de passage de faire disparaître des nations constituées au cours de longs siècles d’histoire.

    Ainsi le vice-président du conseil vichyssois, ce militaire sans honneur pour qui le patriotisme n’a jamais comporté que des profits, se montre sous son véritable jour de naufrageur de la patrie.

    Mais cet amiral traître n’agit pas seul, il est couvert par le maréchal Pétain qui est prêt lui aussi à faire couler le sang français pour Hitler, car c’est au nom du maréchal que l’espion de Brinon déclara le 9 mai : « La France a toujours une marine de guerre importante qui est prête à entrer en action. »

    C’est ainsi qu’au lieu de laisser notre pays en dehors de la guerre de rapine que se livrent les impérialismes de l’axe et leurs rivaux anglo-saxons, les gouvernants de Vichy, obéissant aux ordres des impérialistes allemands, s’engagent à nouveau sur les chemins de la guerre sans songer un seul instant à ce que leur politique criminelle coûtera de ruines et de deuils au peuple de France.

    Déjà les aérodromes de Syrie sont livrés par Pétain et Darlan à la Luftwaffe de Goering qui mène en Irak la guerre du pétrole contre l’Angleterre, et en mettant à la disposition du IIIe Reich les possessions africaines de la France ainsi que la marine de guerre française, l’équipe Pétain-Darlan fait prendre ouvertement à notre malheureux pays figure de nation belligérante, or on sait ce que cela va représenter pour nos populations.

    La France étant ainsi jetée à nouveau dans la guerre, nos villes, nos usines, nos campagnes vont être livrées aux bombardements de l’aviation et le peuple paiera, une fois de plus, de son sang et de ses larmes, la criminelle politique de gouvernants indignes et traîtres à la Nation.

    Sans doute, les Bazaine [allusion au maréchale François Achille Bazaine qui tenta lors de la guerre franco-allemande de 1870 de jouer sur plusieurs tableaux et fut accusé d’avoir fait perdre la guerre à la France] 1941, les maîtres provisoires de la France, font-ils étalage du rapatriement projeté de 100.000 prisonniers de guerre (soit 1 sur 20) mais le peuple de France ne se contente pas deçà ; il veut qu’on lui rendre tousses prisonniers.

    Sans doute aussi les gouvernants traîtres de Vichy font-ils grand bruit autour des prétendues mesures d’assouplissement de la ligne de démarcation, mais le peuple de France ne se contente pas de ça : ce qu’il veut, c’est la suppression de la ligne de démarcation.

    Pétain et Darlan, militaires déconsidérés symbolisant à eux deux la faiblesse et la corruption, voudraient que les Français crient d’enthousiastes « merci » au Führer allemand, mais ils n’y parviendront point. Un peuple opprimé ne lèche jamais les bottes de l’oppresseur. Seuls les dirigeants corrompus peuvent se dégrader à ce point.

    Les gouvernants de Vichy veulent lier le destin de notre pays au destin des maîtres du IIIe Reich, mais le peuple de France ne marche pas, car il n’oublie pas et il n’oubliera pas ce que ces messieurs ont fait.

    Les impérialistes hitlériens qui tiennent l’Europe en esclavage et qui depuis un an font peser l’oppression la plus odieuse sur la terre de France savent bien que les capitulards et les traîtres de Vichy, dont ils se servent, ne représentent en rien la pensée et les sentiments de notre peuple.

    Mais il ne suffit pas de maudire les trahisons des dirigeants d’aujourd’hui faisant suite aux trahisons d’hier ; il est indispensable que la Nation française se dresse frémissante face à ses oppresseurs pour dire ce qu’elle pense, pour dire ce qu’elle veut.

    Depuis un an notre pays est occupé, humilié, pillé, soumis à une odieuse dictature et la population française qui étouffe sous le poids de l’oppression nationale aspire à sa libération.

    Les matières premières dont disposait l’industrie française ont été prises par l’envahisseur qui s’en sert pour continuer sa guerre.

    Les récoltes de notre terroir, le bétail de chez nous, toutes les richesses de notre sol et de notre sous-sol sont accaparés par l’envahisseur qui plonge notre pays dans la disette et sous la menace de la famine.

    Les travailleurs français transformés en esclaves sont envoyés de force en Allemagne ou dans les régions bombardées du littoral pour être enrôlés dans la machine de guerre des nazis.

    Deux millions de nos compatriotes sont prisonniers de guerre et odieusement exploités par les impérialistes allemands. Les hitlériens ont libéré le général fasciste Bridoux pour en faire le collaborateur du traître de Brinon ; ils ont libéré des journalistes vendus de « Je Suis Partout » et de la presse doriotiste ainsi que d’autres agents de la trahison.

    Par contre, les Français honnêtes, les fils du peuple sont maintenus, loin des leurs, dans les camps de prisonniers et le gouvernement de la trahison ne veut pas qu’ils reviennent en bloc car il a peur d’eux.

    Notre pays est dépecé ; la ligne de démarcation constitue, en pleine France, une véritable frontière, tandis que les départements du Nord et du Nord-Est situés dans la « zone interdite » sont coupés du reste du pays.

    Le peuple de France sait combien sont dérisoires les fameuses décisions d’assouplissement de cette odieuse ligne de démarcation, expression maudite de l’oppression nationale subie par la France.

    Depuis un an, notre pays, saigné à blanc, paie 400 millions par jour à l’envahisseur qui, avec ce scandaleux tribut de guerre, a vidé notre France des produits indispensables à nos populations, ce qui constitue la forme moderne du pillage.

    Sous la botte de l’envahisseur qui fait directement la loi en zone occupée et indirectement en zone « libre », la liberté d’opinion est supprimée ; seuls ont le droit d’écrire et de parler ceux qui chantent les louanges de l’oppresseur, et les prisons et les camps de concentration sont peuplés des meilleurs fils de France.

    Pendant ce temps, le magnat du Comité des forges, de Wendel, vend à l’envahisseur, pour la somme de 63 milliards, ses intérêts dans les industries lorraines tandis que le banquier et industriel Lehideux fait des affaires avec les banquiers et industriels allemands et italiens. C’est ça, c’est cet odieux régime que les traîtres au service de l’envahisseur baptisent « ordre nouveau ».

    Ces misérables qui insultent bassement le peuple français et se félicitent sans vergogne de la situation terrible imposée à la France se font ainsi les agents de la monstrueuse entreprise de domination impérialiste des maîtres du IIIe Reich.

    La lutte contre l’oppression nationale. Ainsi l’impérialisme allemand fait subir à la France un régime d’oppression bien pire que le régime de Versailles imposé au peuple allemand au lendemain de la guerre de 1914-1918.

    Le traité de Versailles plongea, en effet, le peuple allemand dans une misère atroce pour le plus grand profit de ploutocrates à la de Wendel qui sont aujourd’hui les bénéficiaires de la défaite française comme ils furent hier les bénéficiaires de la défaite de l’Allemagne.

    Le Parti communiste français revendique l’honneur d’avoir lutté à la tête du peuple français contre l’oppression nationale imposée au peuple allemand.

    A cette époque, Hitler s’en prenait dans son livre « Mein Kampf » non pas aux capitalistes français qu’il comble maintenant d’avantages ; non, il s’en prenait à la France, à son peuple qu’il insulte et contre qui il prononça des paroles de haine et de mépris gravées dans les mémoires.

    Victime, aujourd’hui, d’une odieuse oppression allemande, le peuple de France ne prononcera pas des paroles de haine à l’égard de la Nation allemande qu’il ne confond pas avec ses maîtres du moment.

    Et, de même que des Français se levèrent pour protester et agir contre le traité de Versailles imposé au peuple allemand, de même, nous en avons la certitude, se lèveront des Allemands pour protester et agir contre un nouveau Versailles imposé au peuple français par les dirigeants nazis et fascistes qui ont commencé par opprimer férocement leurs peuples pour pouvoir mieux opprimer les autres peuples. Mais l’envahisseur ne se contente pas de tout cela.

    Il veut entraîner la France dans sa guerre ; il veut se servir de la marine de guerre française, des ports français, des colonies françaises ce qui attirerait sur nos cités la rage des bombardements anglais qui, déjà, ravagent les côtes de l’Atlantique et de la Manche parce qu’elles sont utilisées pour la guerre.

    Les traîtres à la solde de l’envahisseur parlent de paix, mais leur « paix » ne signifie rien d’autre qu’une tentative criminelle de lancer à nouveau notre pays dans la guerre en le maintenant sous la domination des impérialistes allemands.

    C’est pourquoi la lutte pour la paix ne peut se séparer de la lutte contre l’oppression nationale, pour l’indépendance de notre pays.

    Le peuple de France ne veut pas la paix du cimetière et de la prison, la paix de la servitude et de l’oppression il veut la paix dans la liberté et l’indépendance du pays et le premier objectif que nous devons, nous Français, nous assigner dans cette lutte pour la paix est le suivant : Il ne faut pas permettre que le peuple de France, les ressources de notre pays et notre territoire soient utilisés dans la guerre entre l’Allemagne et l’Angleterre.

    Non, il ne faut pas que nos ouvriers et nos usines soient utilisés pour la guerre, alors que nos populations manquent de tout.

    Non, il ne faut pas que nos matières premières, nos ressources alimentaires et autres soient utilisées pour la guerre, par nos oppresseurs impérialistes.

    Non, il ne faut pas que notre territoire serve de champ de bataille aux impérialistes dont la cause et les intérêts ne sont pas et ne peuvent pas être ceux du peuple français.

    Voilà ce que pensent, ce que désirent des millions de Français, mais ils se demandent si cela peut sortir du domaine des aspirations pour entrer dans celui des réalités.

    Oui, cela se peut, mais à deux conditions :

    1° Il faut réaliser l’unité de toute la nation à l’exception des traîtres et des capitulards faisant la besogne ou le jeu de l’envahisseur ; il faut constituer un large front national de lutte pour l’indépendance de la France.

    2° Ce Front national de l’indépendance, pour pouvoir remplir sa mission libératrice, doit être constitué avec, comme force fondamentale, la classe ouvrière de France, avec le Parti communiste à la tête.

    Indiscutablement, la lutte pour la libération nationale de la France exige, afin d’être menée à bien, la formation d’un gouvernement du peuple qui avec une main de fer et s’appuyant sur les masses populaires serait capable d’épurer la France de tous les éléments traîtres et capitulards en même temps qu’il serait capable de créer les conditions indispensables au relèvement de la France dans la liberté et l’indépendance.

    La France a besoin pour se sauver d’un gouvernement populaire. L’intérêt supérieur de la France exige la formation d’un tel gouvernement populaire qui serait vraiment l’expression de la Nation unie dans une même volonté de libération contre l’envahisseur et contre les traîtres qui sont à son service.

    La lutte pour la libération nationale qui constitue la grande tâche du peuple de France, en ces heures sombres où notre pays est cruellement opprimé, ne peut point se séparer de la lutte pour la défense des intérêts immédiats des masses laborieuses de la ville et des campagnes.

    C’est pourquoi l’union de la nation française peut et doit se faire sur un programme d’action correspondant aux besoins pressants de nos populations, à leur profond désir de justice et de liberté ainsi qu ’aux intérêts réels de la France.

    L’unité de la Nation peut et doit se faire.

    Le Front national de l’indépendance de la France peut et doit se faire en vue de mener la lutte qui permettra d’exiger avec force et d’obtenir :

    1. Pour libérer la France et les Français.

    a) La suppression de la ligne de démarcation et l’évacuation du territoire.

    b) Le retour de tous nos prisonniers de guerre honteusement détenus, un an après la signature de l’armistice.

    c) La suppression de l’indemnité de guerre de 400 millions de francs par jour payée par la France à l’envahisseur depuis un an.

    2. Pour assurer la subsistance de la population.

    a) La mise à la disposition du peuple de France de toutes les ressources du pays et la mise en activité des usines françaises pour des fabrications correspondant aux besoins de la population de notre pays.

    b) L’organisation du ravitaillement sous le contrôle des comités populaires composés d’ouvriers, de paysans, de petits commerçants, de ménagères, afin de donner à chacun ce qui lui revient, afin de supprimer le favoritisme, afin de mettre un terme aux sinistres exploits d’intendants incapables et de hauts fonctionnaires prévaricateurs qui, de connivence avec les autorités d’occupation, organisent le « Marché Noir », affament le peuple et pillent le pays.

    c) L’achat de blé à l’Union Soviétique.

    3. Pour défendre les travailleurs contre leurs exploiteurs.

    a) L’augmentation générale des salaires, traitements et pensions à un taux correspondant au coût de la vie.

    Il faut mettre un terme à la politique antifrançaise des envahisseurs et de leurs valets qui imposent des salaires de famine, pour détruire, à force de privations, les populations ouvrières de France.

    b) Le rétablissement des libertés syndicales pour tous les travailleurs de l’industrie, du commerce, de l’agriculture et pour les fonctionnaires. Liberté de presse, droit de réunion, élection des délégués-ouvriers, congés payés, application de la semaine de 40 heures, le nombre d’heures de travail ne pouvant être éventuellement augmenté dans telle ou telle branche de la production que s’il n’y a pas de chômeurs parmi les ouvriers de cette branche.

    4. Pour la défense des paysans de France.

    a) La fixation des prix des produits agricoles à la production pour assurer au paysan une juste rémunération de son travail. Le rétablissement de la liberté de vente directe des produits agricoles pour les paysans. Le paiement des dommages de guerre et des sommes encore dues au titre des réquisitions. La création d’une caisse nationale d’assurances contre les calamités agricoles et la mortalité du bétail. La distribution aux paysans sinistrés et victimes des réquisitions de bétail, de machines agricoles, de carburant et d’engrais. Le bénéfice pour tous les paysans des allocations familiales et de la prime de la mère au foyer.

    b) L’annulation des dettes contractées par les paysans, fermiers, métayers et ouvriers agricoles à l’égard des gros propriétaires fonciers, banquiers et usuriers. L’application des lois sociales à la campagne (repos hebdomadaire, limitation du temps de travail, droit à l’allocation de chômage, conventions collectives, etc.). L’augmentation des salaires des ouvriers agricoles.

    5. Pour assurer un foyer à toutes les familles et du pain aux vieux.

    a) La réquisition des hôtels particuliers et des grands immeubles en vue d’y loger les familles privées d’un logement convenable. Construction de logements sains, aérés, spacieux dans les villes et les villages. Destruction des taudis, foyers de tuberculose et de cancer.

    b) Le paiement d’une retraite suffisante à tous les vieux (ouvriers, paysans, artisans, commerçants, professions libérales) à partir de 60 ans.

    6. Pour la jeunesse de France.

    a) La suppression des camps et « chantiers » de la Jeunesse établis en France sous l’inspiration de l’envahisseur et dont le but tend à plonger notre Jeunesse dans l’ignorance et dans la soumission à un esclavage dégradant.

    b) La création d’un vaste réseau d’écoles d’apprentissage pour jeunes gens et jeunes filles. La construction de stades, terrains de sport, piscines, crèches, colonies enfantines, etc.

    7. Pour les victimes et sinistrés de la guerre.

    a) L’octroi aux mutilés, malades, veuves, ascendants et orphelins de la guerre 1939-1940 des droits à pension dont bénéficient les victimes de la guerre 1914-1918. Rajustement des pensions d’invalidité et des allocations de veuves, ascendants et orphelins au coût de la vie. Augmentation de l’allocation versée aux femmes de prisonniers de guerre.

    b) Le paiement des dommages correspondant aux pertes subies aux petits et moyens propriétaires,sinistrés de guerre et aux locataires d’immeubles détruits ou endommagés par la guerre.

    8. Pour dégrever les pauvres et faire payer les riches.

    a) L’exonération des impôts pour les chômeurs, pour les familles disposant d’un faible revenu, pour les petits commerçants et annulation des dettes contractées à l’égard de banquiers et d’usuriers.

    b) La confiscation des 100 milliards de bénéfices de guerre volés à la Nation. Confiscation des 63 milliards que de Wendel a reçu de l’envahisseur. Établissement d’un cadastre des fortunes en vue de procéder à un prélèvement sur les grosses fortunes. Nationalisation sans indemnité des banques, compagnies d’assurances, mines, chemins de fer et grandes sociétés capitalistes

    9. Pour que la France soit la France et non une colonie nazie.

    a) Le rétablissement des libertés démocratiques (droits du suffrage universel, liberté de réunion, d’association, de presse). L’amnistie générale pour les milliers d’hommes et de femmes du peuple jetés dans les prisons et les camps de concentration de France et d’Afrique par ordre de l’envahisseur et de ses valets. Le châtiment de tous les traîtres au service de l’envahisseur. Le rétablissement dans leurs fonctions des municipalités et destitution des délégations spéciales et municipalités nommées par le gouvernement de Vichy. L’abrogation de toutes les mesures racistes appliquées en France par ordre de l’envahisseur et des gouvernants à ses ordres.

    b) Le rétablissement dans leurs fonctions des fonctionnaires révoqués, déplacés ou déclassés pour délit d’opinion. L’abrogation de toutes les mesures portant atteinte à la liberté de conscience, aux principes de la laïcité et aux droits du peuple.

    Le Parti communiste, le seul Parti qui, face à l’envahisseur, a le courage de poursuivre son combat pour la libération de la France, pense que, sur ce programme de lutte pour l’indépendance de la patrie, l’unité de la Nation française peut et doit se réaliser. Nous tendons une main fraternelle à tous les Français de bonne volonté.

    Le Parti Communiste Français, qui paie de persécutions féroces sa clairvoyance et son courage politiques, ce Parti qui représente l’amitié de la France avec l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques de Lénine et Staline, avec le grand et puissant pays du Socialisme où règnent la liberté, l’égalité et la fraternité des peuples, entend tout mettre en œuvre pour Unir les Français dans la lutte commune pour la libération nationale de la France et contre les traîtres et les capitulards au service de l’envahisseur. Les Darlan, Déat, Laval, Deloncle, Doriot, Dumoulin, Scapini et consorts se sont classés en tête des traîtres qui livrent notre pays aux oppresseurs du IIIe Reich.

    Ces hommes flétris et méprisés aujourd’hui, seront châtiés demain par tout un peuple jaloux de son indépendance, par tout un peuple digne et fier qui ne pardonnera jamais aux agents de la trahison, aux valets de l’oppresseur. La domination des tyrans s’effondre toujours devant la résistance des peuples.

    C’est ce que nous enseigne l’histoire, et les impérialistes hitlériens qui étendent leur domination insolente et brutale sur la plupart des pays de l’Europe, apprendront demain, à leurs dépens, que la roche tarpéienne est près du Capitole, comme d’autres impérialistes apprendront aussi à leurs dépens ce qu’il en coûte de vouloir maintenir sous l’esclavage colonial des peuples qui aspirent à la liberté.

    Le Parti communiste français convaincu que la France recouvrera demain son indépendance grâce à l’union de tout son peuple, lance un vibrant appel à tous ceux qui pensent français et veulent agir en Français ; il tend une main fraternelle à tous les Français quels qu’ils soient, qui ne voyant que les malheurs et l’intérêt du pays veulent s’unir pour mettre fin à l’oppression nationale qui rend irrespirable l’air de notre France que nous aimons.

    Le Parti communiste est qualifié pour prendre la tête du rassemblement de tous les Français sous le drapeau de l’indépendance du pays et, ce faisant, il est fidèle à sa politique de toujours.

    Avant la guerre, le Parti communiste a combattu la politique pro-hitlérienne suivie, par haine du peuple et de l’Union soviétique, par les capitalistes franco-britanniques qui se firent les complices de l’assassinat de la République espagnole et de la destruction de la Tchécoslovaquie.

    Dès le début de la guerre, le Parti communiste combattit pour une paix honorable, juste, durable et exclusive de toute hégémonie ; cette paix que demandaient les députés communistes était possible et pouvait être réalisée avec la participation de l’U.R.S.S., ce qui aurait épargné bien des malheurs à la France.

    Mais pour avoir fait preuve ainsi de courage et de clairvoyance politiques, les députés communistes ont été jetés dans les prisons et les camps de concentration.

    Depuis la guerre, le Parti communiste a combattu les gouvernants comme Daladier et Reynaud qui concentrèrent leurs efforts, non pas contre Hitler, mais contre la classe ouvrière et contre l’U.R.S.S.

    Aussitôt après l’armistice, le Parti communiste poursuivant sa lutte malgré les persécutions, a souligné devant le pays que la défaite était le résultat de la trahison des oligarchies capitalistes.

    Et tandis que tout le monde se taisait devant l’envahisseur, tandis que les gouvernants de Vichy s’inclinaient soumis devant les maîtres du IIIe Reich qui annexaient l’Alsace-Lorraine sans la moindre consultation populaire, le Parti communiste revendiquait pour la France le droit à l’indépendance et pour le peuple alsacien-lorrain le droit à disposer librement de son sort.

    Dans son programme qu’il a publié clandestinement sous le titre « Pour le salut du peuple de France », le Parti communiste en préconisant la formation d’un « gouvernement du peuple, expression de la volonté nationale » indique parmi les buts de politique extérieure à atteindre « la libération du territoire national et des prisonniers de guerre ».

    « La conclusion d’un pacte d’amitié et d’un traité commercial avec l’URSS ». « La poursuite résolue d’une politique de paix destinée à tenir la France hors du conflit. »

    L’indépendance et la paix, voilà ce que voulait hier et ce que veut aujourd’hui, pour la France, le Parti communiste français.

    Et maintenant que notre pays se trouve placé devant le double danger de devenir une sorte de colonie nazie et d’être entraîné à nouveau dans la guerre impérialiste, les communistes, les plus courageux et les meilleurs fils de France, qui, par dizaines de milliers, ont payé de leur liberté leur défense des intérêts supérieurs de la Nation, appellent tous les Français de bonne volonté à l’union, à la lutte commune.

    Le Parti communiste ne veut écarter personne, si ce n’est les capitulards et les traîtres, de l’unité de la nation, du Front national de l’indépendance de la France ; il lance un pressant appel aux hommes et aux femmes qui quelles que soient leurs convictions ou leurs croyances, veulent, selon leurs possibilités, prendre part à la lutte pour la libération de la France.

    C’est dans la masse du peuple que résident les forces de libération nationale du pays et plus le Front national de lutte pour l’indépendance de la France sera vaste, puissant, plus il soulèvera de sympathies agissantes parmi les peuples de tous les pays, y compris dans les rangs du peuple allemand.

    A ce peuple, nous devons faire comprendre qu’un peuple qui en opprime un autre ne peut pas être libre ; nous devons lui faire comprendre que nous, Français, qui n’avons pas oublié le mot d’ordre de la Grande Révolution : « Guerre aux tyrans et paix aux peuples », nous ne voulons pas être les esclaves du « nouvel ordre européen », cette formule ne servant qu’à recouvrir le monstrueux plan d’asservissement de l’Europe poursuivi par les chefs nazis.

    Certains Français et certaines Françaises qui souffrent de voir notre pays opprimé par l’envahisseur placent à tort leurs espérances dans le mouvement de Gaulle.

    A ces compatriotes, nous disons que ce n’est pas derrière un tel mouvement d’inspiration réactionnaire et colonialiste, à l’image de l’impérialisme britannique, que peut se réaliser l’unité de la Nation française pour la libération nationale.

    Français et Françaises doivent s’unir entre eux, en toute indépendance, et constituer, face à l’envahisseur, face aux traîtres à sa solde, le front national de lutte contre l’oppression nationale.

    Ainsi le peuple de France peut et doit donner à tous les peuples opprimés l’exemple de la lutte pour l’indépendance, ce qui affaiblira d’autant les forces d’oppression qui pèsent sur nous.

    Voilà ce que propose le Parti communiste à tous les Français, à toutes les Françaises de bonne volonté sans écarter aucun concours, sans jeter la moindre exclusive, étant bien entendu que les traîtres au service de l’envahisseur s’excluent d’eux-mêmes de la collectivité nationale.

    Ce qu’il faut aujourd’hui, c’est, avant tout, éviter que la France demeure écrasée, humiliée, mutilée, soumise à l’impérialisme oppresseur et, pour cela, tous les Français dignes de ce nom doivent être rassemblés pour lutter en commun contre l’oppression nationale.

    Guidé par le souci exclusif de réaliser l’unité de la Nation pour la cause, sacrée entre toutes, de l’indépendance nationale, le Parti communiste mettant au-dessus de tout l’intérêt du pays déclare solennellement qu’en vue d’aboutir à la création d’un large Front de libération nationale, il est prêt à soutenir tout gouvernement français, toute organisation et tous hommes dont les efforts seront orientés dans le sens d’une lutte véritable contre l’oppression nationale subie par la France et contre les traîtres au service de l’envahisseur.

    Français, Françaises de toutes conditions, de toutes opinions, de toutes croyances, répondez « présent » à l’appel que vous lance le Parti Communiste Français !

    Unissez-vous dans chaque ville et dans chaque village pour que la France reste la France, pour qu’elle puisse vivre libre et indépendante, délivrée du joug de l’oppression nationale qui pèse sur elle.

    Vive le Front national de lutte pour l’indépendance de la France !

    Vive la France libre et indépendante !

    15 Mai 1941

    Le Parti communiste français (S.F.l.C.) »

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • L’importance du Nord-Pas-de-Calais et l’hyper-activisme de la résistance armée du PCF

    Le Parti Communiste Français a organisé partout sa résistance clandestine, il est une zone qui va toutefois jouer un rôle décisif : le bassin minier du Nord et du Pas-de-Calais.

    La raison est que cette partie de la France a été déclarée « zone interdite » et dépend de l’administration militaire allemande de la Belgique et du Nord de la France.

    L’objectif de l’Allemagne nazie est double : d’un côté, il s’agit de mettre en place la colonisation allemande de la région ; de l’autre, il s’agit de pressuriser au maximum les mineurs afin de renforcer la production de charbon.

    Dans ce contexte, 100 000 mineurs belges mènent une grande grève du 12 au 19 mai 1941, exigeant 500 grammes de pain par jour pour toute la population ; la distribution effective des 15 kilos de pommes de terre prévus mensuellement ; 500 grammes de beurre, 1 kilo de féculents, 2 kilos de sucre par mois ; 50 grammes de viande par jour ; la distribution de lait pour les malades et les pensionnés sans échange des timbres de beurre ; l’ajournement du paiement de la taxe de crise pour 1939 jusqu’à la fin de la guerre ; 25 % d’augmentation de salaires.

    Le succès de la « grève des 100 000 » trouve écho en Nord-Pas-de-Calais, où la grève dure du 27 mai au 9 juin 1941, portée par 100 000 mineurs (sur 143 000), le plus souvent d’origine polonaise.

    Des centaines de grévistes sont arrêtés, des dizaines d’autres sont amenés à passer dans la clandestinité, alors que l’Allemagne nazie procède à des déportations et fusille par centaines. Cependant, en pratique, jusqu’en 1944, la production de charbon baissera d’un tiers en raison des sabotages, dans un climat généralisé de résistance.

    Le Nord-Pas-de-Calais apparaît ici comme l’exemple de l’action, y compris de l’action armée, car l’initiative a ici commencé dès 1940. Les trois figures dirigeantes sont ici Rudolf Larysz, Stefan Franciszczak et Jan Rutkowski.

    On notera ici que, de 1945 à 1949, 62 000 Polonais de France sont retournés dans leur pays d’origine à l’appel de leur pays devenu une démocratie populaire ; ils serviront souvent de cadres pour le nouvel État.

    La lutte armée a commencé par le rassemblement d’armes dès 1940, rapidement suivi de sabotages, dont le plus connu est l’incendie d’une dizaine de véhicules militaires allemands à Vimy en septembre de la même année.

    De juillet à septembre, les nazis considèrent qu’il y a eu dans la région 61 sabotages téléphoniques, 47 sabotages ferroviaires et 3 attentats.

    Il faut dans ce cadre mentionner les noms de trois acteurs essentiels : Michel Brulé, Charles Debarge et Julien Hapiot, assassinés par les nazis respectivement en 1941, en 1942 et en 1943.

    On peut attribuer à Charles « Charlie » Debarge, surnommé « l’insaisissable » par les collabos, la mise en œuvre d’une trentaine de sabotages contre des voies ferrées, de deux attaques de poudrières et de 18 attaques de mairie avec récupération des cartes de ravitaillement et de machines à écrire, de quatre attaques à la grenade de locaux occupés par les Allemands, de l’attaque du poste de garde du Pont Césarine à Lens (avril 1942), où il succombera par ailleurs à ses blessures.

    Et là est bien le problème. Si le Parti Communiste Français a réussi à se reconstituer, la lutte armée offensive qu’il initie repose sur une poignée d’activistes d’un grand courage et prêts au sacrifice.

    Sur le plan défensif, on reste dans une dimension de masse. L’Organisation Spéciale a comme tâche de trouver des armes, de protéger les militants lors d’une action d’agitation ou de propagande, de défendre les grèves, de collecter des informations et du matériel, de susciter des appuis, soutenir militairement les actions de sabotage, trouver des médecins et des infirmières, ou encore liquider les traîtres.

    C’est par exemple un commando cycliste issu de l’Organisation spéciale qui liquide le collaborateur et ex-membre du PCF, Marcel Gitton, le 4 septembre 1941.

    L’Organisation Spéciale intervient aussi lors des nombreuses manifestations de femmes à propos du ravitaillement, notamment en banlieue parisienne (Rueil-Malmaison, Ivry, Bagnolet…).

    Ici, deux actions connues à Paris même sont celles de la rue de Buci le 31 mai 1942 et de la rue Daguerre le 1er août 1942. La consigne du Parti aux femmes de l’organisation était alors « d’organiser des manifestations contre le rationnement, d’envahir en masse les restaurants et épiceries de luxe et de partager les vivres. »

    Sur le plan offensif, cependant, on est dans des actions en mode tête brûlée. Il n’y a pas de plan d’action stratégique ; il y a une démarche pragmatique-machiavélique où des gens en armes sont à la recherche d’opportunités, avec la logique d’aider l’URSS et d’essayer de parvenir à faire boule de neige.

    L’exemple le plus connu de la démarche tient en août 1941 à l’exécution d’un officier allemand dans le métro parisien par Pierre Georges, le futur colonel Fabien qui sera un héros de la Résistance. Il y a aussi l’exécution de Karl Hotz, Feldkommandant à Nantes, le 22 octobre 1941, qui fut une opération totalement hasardeuse, bien que triomphante.

    Ce que cela reflète ici, c’est l’incapacité à formuler une stratégie de prise de pouvoir. On aura la preuve de cela à la fin de la Seconde Guerre mondiale, lorsque ni la direction du Parti Communiste Français, ni les chefs sur le terrain de la résistance armée ne sauront quoi faire du patrimoine accumulé.

    La lutte armée est assumée héroïquement, tout en étant conçue comme une anomalie, comme fruit d’un problème temporaire à résoudre. Voilà pourquoi les Cahiers du bolchévisme, en 1942, présentent la ligne de manière simple, finalement :

    « Dans les conditions de la guerre réactionnaire d’agression hitlérienne contre les Peuples en vue de leur asservissement total, l’action des patriotes de chaque pays, organisés en partisans, porte en elle l’embryon d’une armée populaire nationale à qui incombe la tâche historique de reconquérir et de garantir l’indépendance dans chaque pays agressé. »

    L’hyper-activisme a donc un objectif quantitatif, et quantitatif seulement. C’est très précisément l’origine du choix du nom de l’organisation de lutte armée : « Francs-Tireurs Partisans », avec les Francs-Tireurs Partisans Français (FTPF) et des Francs-Tireurs Partisans – Main d’œuvre Immigrée (FTP-MOI).

    Le terme a d’ailleurs comme origine la guerre franco-prussienne de 1870, où des corps de volontaires se sont mis en place, justement sous le nom de francs-tireurs. C’est le reflet de la dérive droitière entamée pendant l’époque du Front Populaire en 1935-1937.

    La notion d’organisation, de front, d’unité politique n’est pas soulignée ; ce qui compte, c’est le côté franc-tireur, le partisan menant des actions de guérilla pour perturber l’ennemi. Il n’y a pas de stratégie de la guerre mise en place.

    La naissance des FTP est d’ailleurs simplement l’expression directe d’une unification technique. Sont ainsi rassemblés l’Organisation spéciale, les Bataillons de la jeunesse et les secteurs armés de la Main-d’œuvre immigrée.

    Au départ, l’Organisation spéciale est chargée de pratiquer des actions chocs pour entraîner les FTP, dans une sorte d’émulation ; lorsqu’ils naissent en octobre 1941, les FTP sont considérés comme un simple levier.

    Car le Parti Communiste Français a une ligne définie par Maurice Thorez et cette Ligne Opportuniste de Droite appelle, depuis 1937, à l’union des Français.

    C’est pourquoi les FTP ne sont qu’un aspect bien secondaire par rapport au « Front national » mis en place le 15 mai 1941 avec l’appel Pour la formation d’un Front national de l’indépendance de la France.

    Il faut saisir le glissement qui s’est produit. Les premiers groupes armés du Parti Communiste Français sont portés par une logique de confrontation, et leur souci immédiat est d’appuyer des initiatives contestataires, notamment à travers des revendications concernant la vie quotidienne : le ravitaillement, les salaires, etc. D’où leur dimension éparpillée.

    En unifiant tous les groupes, le Parti Communiste Français tente d’appuyer son appel à un Front national, en cherchant à présenter l’unification des groupes (en fait que le produit direct de l’appareil militaire du Parti) comme relevant de la mise en place d’une armée de libération nationale dont la dimension est « quantitative » seulement.

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • La plongée dans la clandestinité du Parti Communiste Français

    Ce qu’on lit dans La vie du Parti en avril 1941 est riche d’enseignements. C’est un rappel des conditions de la lutte et comme c’est en quelque sorte un manuel de la clandestinité, on y retrouve un excellent portrait de la situation des communistes.

    « Il faut en finir avec le « crétinisme légaliste »

    Notre Parti travaille dans les conditions de l’illégalité. La bourgeoisie n’hésitant pas un instant à violer sa propre légalité fait arrêter par la police, sans l’ombre du moindre prétexte, des personnes soupçonnées de pouvoir être communistes.

    Cela chaque communiste le sait et il est donc clair qu’un militant quelque peu connu avant guerre ne peut songer à participer au travail illégal du Parti sans prendre d’indispensables mesures de précaution.

    La première des choses à faire est de ne plus aller sous aucun prétexte à son domicile connu de la police et sûrement surveillé.

    C’est là une précaution élémentaire que chacun devrait comprendre sans avoir besoin de beaucoup d’explications, et pourtant il n’en est rien.

    Il y a des camarades qui se croient encore dans la période légale d’avant-guerre et qui font preuve de ce l’on peut appeler un « crétinisme légaliste ».

    On a pu voir des militants à qui on demandait s’ils avaient bien quitté leur domicile, s’ils prenaient des précautions, répondre avec une naïveté désarmante : « Je ne couche pas chez moi, je n’y vais qu’à midi pour déjeuner ».

    Notre Parti a payé de l’arrestation de plusieurs de ses cadres de telles méthodes qui sont empreintes d’un opportunisme intolérable et doivent être condamnées de la façon la plus nette.

    Être un bon communiste dans les circonstances actuelles, c’est avant tout appliquer scrupuleusement les règles du travail illégal ; c’est comprendre que chaque défaillance dans ce domaine constitue un danger pour le Parti et un véritable crime contre la classe ouvrière.

    C’est pourquoi nous voulons rappeler aux membres du Parti des règles fondamentales qu’on ne doit laisser transgresser en aucune manière par qui que ce soit.

    Le « crétinisme légaliste » et l’organisation

    La sous-estimation de la répression capitaliste, le « crétinisme légaliste » dont certains camarades font preuve dans le domaine de l’organisation constituent un péril pour le Parti.

    L’intérêt de la classe ouvrière, l’intérêt de notre pays que nous voulons libérer de l’exploitation capitaliste, de la misère, de la famine et de l’oppression nationale, l’intérêt du Parti exigent que tous les responsables, quels qu’ils soient, qui se livrent à des bavardages, font preuve de légèreté et d’esprit d’irresponsabilité soient implacablement éliminés de leurs responsabilités.

    « L’ennemi de classe » est aux aguets, il dispose de moyens formidables et il y a des camarades qui, sans tenir compte de cette réalité, se comportent d’une façon scandaleuse.

    Là ce sont des militants ayant été un peu connus avant-guerre qui au lieu de conserver l’incognito le plus strict auprès des personnes avec lesquelles ils sont en contact, se font connaître agissant ainsi comme des petits-bourgeois prétentieux et irresponsables.

    Là ce sont des militants qui stupidement établissent des listes de militants susceptibles de tomber entre les mains de la police, alors que l’établissement de listes de ce genre est rigoureusement interdit par le Parti et doit être considéré comme une provocation.

    Ailleurs ce sont d’anciens exclus du Parti qu’on utilise pour de toutes petites tâches et puis on trouve que ces éléments sont « dévoués », on élargit le champ des prétendus services rendus par ces individus à qui on permet de se mettre au courant de beaucoup de choses jusqu’au jour où ces messieurs livrent tout à la police. Une telle naïveté n’est-elle pas criminelle ?

    Ailleurs encore, ce sont des responsables qui avec une légèreté indigne de communistes confient des tâches importantes à des membres du Parti qui ont mal travaillé et nui à la sécurité du Parti.

    Ce sont des domiciles illégaux de camarades que connaissent un tas de personnes.

    Ce sont des liaisons nombreuses effectuées par la même personne sans aucune coupure, ce qui met en danger tout le système de liaison.

    Ce sont des renégats qui peuvent livrer à la police, s’ils sont arrêtés, toute une série de noms qu’ils n’auraient pas dû connaître.

    Ce sont des responsables qui avec une légèreté incroyable organisent des réunions d’une dizaine de militants.

    Ce sont des filatures, des surveillances policières qu’on néglige, faisant preuve ainsi d’une quiétude criminelle, au lieu de combattre l’ennemi avec vigilance, au lieu de tout changer dès qu’on s’est aperçu de la surveillance policière qui ne peut pas ne pas être rapidement observée si chaque militant a sans cesse l’esprit en éveil.

    On a pu voir des responsables qui avec une cécité politique incroyable ont laissé la police préparer un grand coup pendant des semaines sans s’apercevoir de quoi que ce soit.

    Ce sont aussi dans de trop nombreux cas des militants qui, oubliant que la police traque notre Parti, vont chez les uns, chez les autres comme si nous étions en période légale et qui un beau jour sont tous pris bêtement sans avoir rendu le moindre service à la classe ouvrière.

    Ce sont des bavards qui par vanité petite-bourgeoise disent ou laissent entendre qu’ils font un travail important sans penser que cela peut aider l’ennemi.

    Et puis, c’est aussi le libéralisme pourri à l’égard des lâches, des traîtres, la tendance à plaindre ou à excuser ceux qui, tombés entre les mains de la police, ont livré leurs camarades alors qu’ils doivent être dénoncés comme traîtres dans leur localité. Cela fera réfléchir ceux qui seraient tentés de les imiter.

    De tout cela se dégagent pour notre Parti des règles sévères :

    1. Tout membre du Parti qui, soit par négligence, soit par ses bavardages, soit en livrant ce qu’il sait à la police s’il est arrêté aura permis à l’ennemi de classe de découvrir ne serait-ce qu’une petite partie de l’organisation fera l’objet d’une enquête minutieuse et ses agissements nuisibles au Parti seront dénoncés publiquement devant les masses laborieuses.

    2. Tout membre du Parti qui essaiera d’apprendre quoi que ce soit de l’organisation du Parti en dehors de ce qu’il sait de son propre travail et de sa propre organisation doit être considéré comme suspect et son cas doit être soumis à l’organisme supérieur en vue des mesures et sanctions à prendre.

    3. Toute tentative pour un groupe de base de trois membres d’entrer en contact avec un groupe similaire sera considérée comme suspecte et des sanctions en conséquence seront prises. Les liaisons entre organisations d’un même échelon sont absolument interdites.

    (Les groupes de base de trois ne doivent pas se connaître entre eux, les cellules ne doivent pas se connaître entre elles ; il ne doit pas y avoir de liaisons horizontales).

    4. Aucune réunion de plus de trois camarades ne doit être tenue.
    Les groupes de trois constituent la base d’organisation de la cellule du Parti et toute tentative de faire constituer des groupes de plus de trois membres doit être considéré comme une violation de la discipline du Parti.

    Sur la base de ces règles d’action correspondant aux exigences de notre travail illégal une lutte implacable doit être menée contre le laisser-aller, le laisser-faire, contre l’esprit de « copinerie », contre le libéralisme pourri à l’égard de ceux qui transgressent les directives du Parti.

    Et c’est dans la mesure où ils seront capables d’appliquer, dans les conditions actuelles, la politique du Parti avec esprit de responsabilité, avec fermeté, avec dévouement et esprit de sacrifice, faisant en toutes circonstances passer le Parti avant tout, que les camarades doivent être appelés aux fonctions responsables.

    Il faut cloisonner hermétiquement l’organisation du Parti

    Chacun sait que la sécurité d’un navire de guerre est assurée par la multiplication de compartiments isolés hermétiquement les uns des autres, mais tous reliés à la direction unique du navire.

    Qu’un projectile ennemi traverse la cuirasse du bateau, l’eau s’engouffre dans le compartiment touché mais s’arrête aux cloisons étanches.

    Plus le compartiment est petit, moins il contient de marins ou d’armements, plus les dégâts sont réduits et plus le navire de guerre conserve de moyens d’action pour continuer le combat jusqu’à son issue victorieuse.

    L’adversaire a porté un coup, soit, mais il n’a pu atteindre son objectif qui est la mise totale hors de combat du vaisseau.

    Ce principe de compartimentage doit être appliqué au Parti dans tous les cas. Le groupe de trois doit être le compartiment de base du Parti. Les groupes de trois doivent être isolés hermétiquement les uns des autres.

    Les camarades d’un groupe de trois ne doivent connaître exclusivement que leur propre travail. Les groupes comprenant plus de trois adhérents doivent être immédiatement décentralisés.

    L’objection souvent formulée pour différer cette décentralisation si nécessaire est le « manque de cadres ».

    Cette objection ne tient pas, au contraire la décentralisation en multipliant les groupes de trois permettra de faire accéder à des responsabilités des dizaines, des centaines de militants qui à la tête d’un groupe de trois feront leurs premières armes de dirigeants politiques.

    Comment doit être organisée une section du Parti

    Afin de mieux faire comprendre à tous nos membres comment doit être organisé le Parti, nous allons prendre l’exemple d’une section, la section de …

    A la tête de la section, il y a trois camarades ayant été désignés par l’échelon supérieur.
    La localité est divisée en quatre quartiers.

    A la tête de chaque quartier, il y a une direction de trois camarades désignés et contrôlés par la direction de la section (après vérification).

    Dans chacun des trois premiers quartiers, il y a trois cellules locales et dans le quatrième il n’y en a que deux pour le moment.

    Il y a, en outre, deux organisations du Parti dans deux importantes usines de la localité.
    Voyons comment fonctionne cette section.

    A la direction de la section, la répartition du travail est ainsi établie :

    1. Le responsable politique chargé de l’application de la ligne du Parti par les organisations et la presse du Parti. En outre, il s’occupe des questions de la Jeunesse, des Femmes et de la lutte contre la répression capitaliste.

    2. Le responsable de l’organisation chargé de l’organisation du Parti sur la base de l’entreprise, et sur la base locale. Il a la charge de l’organisation matérielle de la propagande (impression et diffusion), et s’occupe aussi des divers mouvements de masse : paysans, classes moyennes, vieux travailleurs, comités populaires locaux.

    3. Le responsable du travail syndical chargé du travail des communistes dans les syndicats, des comités populaires d’entreprises et des chômeurs.

    Dans cette direction, comme dans toutes les directions du Parti à tous les échelons les décisions doivent être prises collectivement, les tâches pour chacun des membres de la direction doivent être fixées et les responsabilités doivent être personnelles.

    La direction de l’organisation du quartier est constituée d’après les mêmes principes de répartition du travail.

    A la tête de chaque cellule, il y a également une direction de trois camarades et trois groupes de base de trois, soit en tout douze camarades.

    Du fait de cette organisation compartimentée, la direction de la section connaît et est en liaison avec quatre directions de quartiers et deux directions d’organisations d’entreprises.

    La direction d’un quartier ignorant tout de l’organisation dans les autres quartiers est en liaison, d’une part, avec la direction de la section, et d’autre part avec les trois cellules du quartier.

    La direction d’une cellule est en liaison avec la direction du quartier et avec les trois groupes de trois qui la composent.

    Quant au groupe de base de trois, il a à sa tête un responsable qui, seul, est en liaison avec la direction de la cellule, ce qui fait que dans le groupe de trois, deux camarades ne connaissent personne en dehors de leur groupe et le responsable connaît un dirigeant de la cellule car les trois dirigeants de la cellule établissent chacun la liaison avec un groupe de base et toujours le même.

    Sur la base des organisations existantes, le territoire de la localité est partagé ; la direction du quartier a assigné à chaque cellule le groupe de rues qui constituent son ressort territorial et chaque groupe de trois a aussi un secteur déterminé à travailler, soit un bloc de maisons soit une ou plusieurs rues.

    (Ajoutons qu’avec raison la direction de la section que nous citons en exemple a délimité les quartiers à sa manière, sans tenir compte des divisions officielles).

    Ainsi un groupe de trois sachant où il doit travailler peut jouer un rôle considérable dans l’évolution des sentiments de la masse qui l’entoure. Ces trois hommes que personne ne connaît comme communistes, s’ils savent être à la fois prudents et attentifs à ce qui se passe autour d’eux, ont d’immenses possibilités d’action à leur disposition.

    C’est ainsi qu’un groupe de trois ayant appris que dans son secteur territorial la femme d’un prisonnier de guerre, chargée de famille, était laissée à l’abandon et vivait dans la misère, fit à la polycopie des papillons et des tracts qui, glissés sous les portes, laissés dans des endroits où les ménagères, en descendant au marché, sont amenées à les prendre, escaliers, rebords de fenêtres, etc., est parvenu, ces temps derniers, à provoquer une émotion telle, des commentaires d’une véhémence telle que la mairie dut accorder un secours immédiat à cette malheureuse femme.

    Parce qu’il avait traduit la pensée intime des masses dans une situation déterminée, le groupe de base de notre Parti était parvenu à faire exprimer notre politique de défense des malheureux par des travailleurs qui, à la faveur de ces circonstances, ont acquis une plus grande confiance dans notre Parti qu’ils ont senti présent, qu’ils sentent présent autour d’eux quoique les membres du Parti ne soient pas identifiés.

    Ceci nous amène à souligner combien il est indispensable que chaque groupe de base du Parti, c’est-à-dire chaque groupe de trois, puisse polycopier des textes et faire pénétrer notre propagande partout, non seulement en diffusant le matériel de propagande central, régional ou local, mais en intervenant directement dans son petit coin sur le plan des questions qui préoccupent la population (ravitaillement, injustices, passe-droits, etc.) au moyen de tracts, inscriptions, etc., etc.).

    Avec des dizaines de milliers de groupes de trois agissant à travers tout le pays, rien ne pourra empêcher l’établissement de contacts étroits entre notre Parti et le peuple de France. D’ailleurs, plus il y a de groupes de trois et plus petite est pour chacun d’eux la portion de territoire à travailler.

    Au surplus, dans un groupe de trois, les camarades se connaissent, le travail de chacun d’eux est facilement et immédiatement contrôlable.

    Si par exemple le groupe de trois a décidé de faire des inscriptions tel jour on sait tout de suite si chaque camarade a rempli sa tâche et pour si peu que l’esprit de vigilance règne dans le groupe, il est impossible à un provocateur de faire sa besogne criminelle sans se faire rapidement repérer, après quoi des mesures appropriées peuvent très rapidement chasser cet ennemi et le mettre hors d’état de nuire.

    C’est donc dans une ambiance de confiance mutuelle que peuvent travailler les groupes de trois et ce résultat serait plus difficilement obtenu dans un groupe large où le contrôle de l’activité de chacun des membres serait beaucoup moins commode à effectuer (…).

    On remarquera que cette organisation du Parti, fortement décentralisée, en même temps que soumise à une direction unique transmet tant les directives du Comité central, exige un grand nombre de cadres et c’est pourquoi dans les circonstances actuelles le travail de formation de cadres doit être au premier plan des préoccupations du Parti.

    Nous pouvons et nous devons former des milliers de cadres capables de diriger le mouvement ouvrier aux divers échelons.

    Le choix et le contrôle des cadres

    Nous avons indiqué plus haut que les cadres doivent être désignés par les échelons supérieurs, après une vérification minutieuse et certains camarades se demandent ce que devient dans tout cela le principe de l’électivité inscrit dans les statuts de notre Parti.

    Il est à peine besoin d’indiquer qu’un Parti vivant et travaillant dans l’illégalité ne peut agir comme il le faisait dans la période légale. »

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • L’appel à l’action du Parti Communiste Français en 1940

    Le Parti Communiste Français dispose d’une base assez remuante pour renverser la pression de son interdiction, dans un contexte où de toutes façons tout a changé, puisque désormais c’est l’occupant allemand qui décide, ou bien le régime fasciste de Pétain.

    Un excellent exemple est la réaction à l’arrestation du physicien antifasciste (et futur communiste) Paul Langevin par la Gestapo : le Quartier Latin à Paris est en état de siège le 8 novembre 1940 ; la manifestation patriotique du 11 novembre est également massive et est réprimée militairement par l’armée allemande, avec 11 morts.

    Le 13 novembre les nazis fermèrent en conséquence six établissements secondaires et supérieurs et, le 17, toutes les facultés de Paris, Dijon et Besançon ; ils ne rouvriront qu’en décembre.

    Quel est l’état d’esprit des communistes ? Voici ce qu’on lit dans l’appel du 10 juillet 1940, tiré clandestinement à 600 000 exemplaires.

    « Notre pays connaît maintenant les terribles conséquences de la politique criminelle suivie par des gouvernements indignes, responsables de la guerre, de la défaite, de l’occupation.

    Des milliers et des milliers de jeunes gens et de pères de famille sont tombés, des milliers et des milliers d’évacués chassés de leurs foyers ont connu le plus lamentable des exodes sur les routes de France, de nombreuses villes, de nombreux villages ont été détruits, des malades et des blessés souffrent dans les hôpitaux, des centaines de milliers de prisonniers se morfondent loin de leurs familles, des veuves, des vieux parents, des orphelins pleurent leurs disparus.

    La France meurtrie, douloureuse, trahie par ses dirigeants subit la rançon de la défaite.

    Voilà où nous ont conduits les politiciens à la Daladier, à la Reynaud, qui soutenus par un parlement de valets et de corrompus, ont poussé la France à la guerre pour servir les intérêts des ploutocrates, pour supprimer les libertés publiques, pour faire régner la terreur, écraser le peuple et porter les armes contre l’URSS, pays du socialisme (envoi de matériel de guerre aux gardes blancs finlandais et constitution de l’armée Weygand en Syrie).

    Les faits sont là qui montrent à quel point cette politique a fait faillite, à quel point elle a été néfaste. L’heure est venue de situer les responsabilités de tous ceux qui ont conduit la France à la catastrophe.

    La clique des dirigeants banqueroutiers de la politique de guerre a bénéficié de l’appui de tous les partis unis dans une même besogne de trahison et dans une même haine de la classe ouvrière et du communisme (…).

    La malédiction d’un peuple trahi monte vengeresse vers ces hommes qui ont voulu la guerre et préparé la défaite.

    À cause de ces hommes, la moitié du territoire français subit l’occupation de l’armée allemande, aux frais de la France comme l’indique le traité d’armistice.

    A cause de ces hommes le peuple de France connaît l’humiliation de cette occupation et ne se sent pas chez lui. 

    Il voit en même temps, qu’un gouvernement de traîtres et de vendus siège à Vichy en attendant de venir à Versailles pour imiter le sinistre Thiers et mise sur des concours extérieurs pour se maintenir au pouvoir contre la volonté de la Nation.

    Mais rien ne pourra empêcher que les comptes soient réglés et les masses laborieuses en demandant que la France soit aux Français expriment à la fois la volonté d’indépendance de tout un peuple et sa ferme résolution de se débarrasser à tout jamais de ceux qui l’ont conduit à la catastrophe (…).

    Désormais, chaque Français est à même de constater que si les propositions communistes, toutes de clairvoyance et de sagesse avaient été suivies, la guerre avec ses désastres aurait été épargnée à notre pays.

    Mais les gouvernants qui n’ont pas voulu la paix ne se sont pas préparés à la guerre et ont sciemment organisé la trahison (…).

    Jamais un grand peuple comme le nôtre ne sera un peuple d’esclaves et si, malgré la terreur ce peuple a su, sous les formes les plus diverses, montrer sa réprobation de voir la France enchaînée au char de l’impérialisme britannique, il saura signifier aussi à la bande actuellement au pouvoir sa volonté d’être libre.

    Les politiciens civils et militaires, à la solde du capitalisme, ont conduit le peuple de France à la guerre sous prétexte de défendre la liberté et, aujourd’hui, ils imposent leur dictature parce qu’ils ne veulent pas rendre de comptes, parce qu’ils veulent que les ploutocrates puissent s’enrichir de la défaite comme ils se sont enrichis de la guerre.

    Cela ne doit pas être, cela ne sera pas ! La France ne deviendra pas une sorte de pays colonisé, la France au passé si glorieux ne s’agenouillera pas devant une équipe de valets prête à toutes les besognes.

    La France doit se relever, elle se relèvera. Il le faut, dans l’intérêt même de la fraternité des peuples, que, de toutes façons, nous voulons (…).

    C’est dans le peuple que résident les grands espoirs de libération nationale et sociale.

    Et c’est seulement autour de la classe ouvrière ardente et généreuse, pleine de confiance et de courage, parce que l’avenir lui appartient ; c’est seulement autour de la classe ouvrière, guidée par le Parti Communiste, parti de propreté d’honneur et d’héroïsme, que peut se constituer le Front de la Liberté, de l’Indépendance et de la Renaissance de la France (…).

    Sous le signe de la lutte contre le régime capitaliste générateur de misère et de guerre, d’exploitation et de corruption, qui a déjà disparu sur un sixième du globe, en URSS.

    Sous le signe de l’unité et de l’indépendance de la nation, sous le signe de la fraternité des peuples, nous serons les artisans de la renaissance de la France.

    A bas le capitalisme générateur de misère et de guerre !

    Vive l’Union Soviétique de Lénine et Staline, espoir des travailleurs du monde !

    Vive l’unité de la nation française !

    Vive la France libre et indépendante !

    Vive le Parti Communiste espoir du peuple de France !

    Vive le gouvernement du peuple au service du peuple ! »

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • Le Parti Communiste Français se reconstruit après l’interdiction de 1940

    L’interdiction du Parti Communiste Français en 1940 est réalisée sans coup férir. Si l’on omet le petit appareil clandestin, tout était parfaitement légal, les membres étaient fichés par les services secrets et les activités publiques, parfaitement répertoriées.

    La mobilisation nationale, en raison de la guerre désormais déclarée, ajoute au désarroi, avec les multiples départs au front. De ce fait, en septembre 1940, le Parti Communiste Français a disparu de la scène politique.

    Dans ce climat de sauve-qui-peut, il y a une vraie loyauté qui reste : seule une infime minorité de cadres capitule, autour de 3 %. Cependant, tout est paralysé ou organisé dans la précipitation, et pas pour le meilleur.

    On a ainsi des cadres de L’Humanité qui tentent de négocier la reparution du quotidien auprès de l’occupant nazi, une fois la défaite de 1940 passée.

    Ce qui va alors se passer, c’est que toute une nouvelle génération va se retrouver en première ligne, l’ensemble de la restructuration étant directement supervisée par l’Internationale Communiste.

    Maurice Thorez ayant été exfiltré à Moscou, c’est Jacques Duclos qui assume désormais la direction du Parti dans les faits. À ses côtés, on a Benoît Frachon et Charles Tillon, ce dernier allant s’occuper des questions militaires. Auguste Havez, Auguste Lecœur, Eugène Hénaff… vont jouer un rôle toujours plus important.

    Des cadres sont dispatchés dans le pays, comme Charles Tillon à Bordeaux, Gaston Monmousseau en Provence, Benoît Frachon en région parisienne : leur mission est de restructurer le Parti et ici, les femmes ont le premier rôle.

    Le roman à feuilleton Les Communistes de Louis Aragon qui raconte cette période devait ainsi initialement s’intituler Les femmes communistes.

    C’est l’Union des Jeunes Filles de France qui mène ici une activité intense ; sa dirigeante formée à Moscou, Danielle Casanova, mourra à Auschwitz en 1943 après avoir été un cadre exemplaire toute sa vie.

    Avec tout ce travail de fond, le Parti est rapidement reconstitué, sur la base de cellules de quelques membres. Voici ce qu’on lit dans La Vie du Parti, en octobre 1940, un petit bulletin clandestin.

    « L’importance du travail d’organisation du Parti dans les circonstances actuelles ne peut échapper à personne. L’expérience de notre propre travail et l’expérience du glorieux Parti Bolchevik nous apprennent que toute notre activité doit être orientée dans le sens de l’organisation des larges masses de notre pays (…).

    En lisant « L’Histoire du Parti Bolchevik », en étudiant le sens profond de cette citation on comprend ce que doit être notre travail de masse. Il est évident que si nous enracinons notre organisation dans les masses, nous serons invincibles et pour cela, toutes les organisations du Parti, sans exception, doivent être résolument orientées dans le sens d’un large travail de masse (…).

    Durant la période de notre activité légale nous avions des cellules de 15 – 20 – 30 membres, mais une telle forme d’organisation est actuellement impossible et compromettrait la sécurité de notre Parti.

    Après avoir, pendant toute une période, basé l’organisation du Parti sur les cellules de 3 adhérents, on est arrivé à les grossir jusqu’à 8 et même 12 membres. C’est trop, beaucoup trop. Il faut absolument décentraliser les cellules, au plus vite.

    Nous devons décentraliser parce que nous travaillons dans des circonstances difficiles, les forces ennemies nous guettent, essayent de pénétrer notre organisation pour lui porter des coups ; c’est pourquoi, dans cette période, les cellules ne doivent pas compter plus de 5 membres, ce qui nous permettra de parer plus aisément aux coups de l’ennemi de classe, de rendre moins vulnérable nos organisations de base et d’éviter plus facilement les provocations des agents de l’ennemi dans nos rangs (…).

    En règle générale, il ne faut pas réunir plus de 3 camarades à la fois, afin d’obtenir le maximum de sécurité (…).

    Le Parti Communiste Français (S.F.I.C.), sous la direction de ses chefs éprouvés : THOREZ, DUCLOS, MARTY, CACHIN, FRACHON a la confiance des larges masses de la population française qui voit en lui le Parti de l’avenir (…).

    Nous, communistes qui, depuis le début, avons lutté contre la guerre impérialiste, nous luttons et nous lutterons contre toute tentative d’entraîner à nouveau notre malheureux pays dans le conflit. »

    Il y a là un grand paradoxe. Le Parti adopte dans la clandestinité une ligne dans la continuité d’avant son interdiction : il est contre la guerre. Pourtant, avec la nouvelle situation d’une France marquée d’occupation par l’Allemagne nazie ou le régime de Vichy, il apparaît comme le principal levier de la confrontation, de la Résistance.

    Lui seul est prêt à un activisme et est en mesure de fournir des structures pour le mener.

    Le second paradoxe, c’est que le Parti suivait Maurice Thorez dans une Ligne Opportuniste de Droite, prônant le patriotisme et l’union nationale. Ce fut un échec complet, avec un Parti finalement marginalisé et interdit.

    Mais avec la défaite militaire française, le Parti se voit propulsé comme la grande force de libération nationale. Tout le discours sur la « République », expression hier d’un réel opportunisme, devient subitement un outil utile et déjà maîtrisé.

    Autrement dit, fin 1939 le Parti est interdit et battu politiquement ; après la défaite de 1940, il profite du fait d’être le seul à fournir des structures clandestines et un discours patriotique.

    Le troisième paradoxe se produira ensuite, lorsque le Parti Communiste Français, qui ne voulait pas de lutte armée de masse initialement, servira de vecteur, de sas populaire après juin 1941, en se lançant dans la bataille militaire en soutien à l’URSS faisant désormais face à l’invasion nazie.

    Ce qui suit en attendant l’interdiction, c’est donc un désarroi ; il sera suivi d’une longue séquence où le Parti ne va pas cesser de se renforcer, de s’agrandir, de s’aguerrir.

    L’interdiction est surmontée, les organisations reconstruites, patiemment et avec un grand sens du sacrifice. La tentative de mener un large travail de masse se produit également rapidement, au-delà des problématiques d’organisation.

    Une Lettre à un travailleur socialiste est éditée à 100 000 exemplaires à l’automne 1940, puis fin 1940 c’est la Lettre à un travailleur radical, on trouve de manière similaire le tract Paysan de France au moment de l’occupation, où l’on peut lire à l’automne 1941 :

    « Amis paysans, cachez vos récoltes et cachez-les bien. Vous êtes assez malins pour « rouler » tous les contrôleurs de Vichy et les brutes de la Gestapo. Abattez vos bêtes si l’on veut vous les faire livrer à l’occupant. Ne vendez qu’aux Français et pour les Français. Faites preuve de ruse, d’habileté pour échapper à toutes les perquisitions. »

    Sont rapidement publiés clandestinement La Vie du Parti et les Cahiers du bolchévisme, ces derniers devenant en 1944 les Cahiers du communisme (édités chaque trimestre à 35 000 exemplaires).

    Il y a l’Avant-Garde comme organe de la Jeunesse Communiste, ainsi que des journaux régionaux, bulletins d’entreprises ou locaux, ou encore des organes comme L’École libératrice par les instituteurs, Le Médecin français, Le Palais libre ou La Relève (fondée en 1938) par l’Union des Étudiants et Lycéens Communistes de France.

    Georges Politzer fit reparaître, avec Jacques Solomon et Jacques Decour la Pensée devenue la Pensée libre et mettent en place l’Université libre.

    Georges Politzer, immigré hongrois et pratiquement la principale figure intellectuelle du Parti Communiste, fondateur de l’Université ouvrière, est connu surtout comme auteur du manuel Principes élémentaires de philosophie.

    Il est également l’auteur en février 1941 de Sang et or, qui est une longue analyse de la démagogie fasciste et d’une critique du discours sur « l’Europe unie » prononcé par le théoricien nazi Rosenberg devant les hauts fonctionnaires nazis rassemblés à Paris. Dans le même esprit, Gabriel Péri rédige en avril 1941 Non, le nazisme n’est pas le socialisme.

    De juin 1940 à juin 1941, 2 696 000 tracts ou bulletins sont diffusés ; à partir du printemps 1941 est relancée la publication d’ouvrages classiques comme le Manifeste communiste, Socialisme utopique et socialisme scientifique, Travail salarié et capital, La maladie infantile du communisme (le « gauchisme »), L’État et la révolution.

    Il y aura eu en tout 317 numéros clandestins de L’Humanité, diffusés à 50 millions d’exemplaires.

    Dès août 1940 l’organe de la CGT, la Vie ouvrière, est publiée clandestinement. À l’automne 1940 il existe déjà plus de cent comités d’union syndicale et d’action dans les usines métallurgiques de la région parisienne. En décembre, Renault est obligé de jeter à la ferraille plusieurs centaines de motos sabotées.

    Il y a même en région parisienne la première manifestation de masse, de la porte Saint-Denis à Richelieu-Drouot, qui rassemble 10 000 personnes, le 14 juillet 1941.

    Il faut pourtant des cadres éprouvés pour porter tout cela : d’où viennent-ils ? Ils ne sauraient venir des activités légales, des actions électorales, des élus municipaux, des acteurs du syndicalisme.

    Ils ont trois sources : l’Organisation Spéciale, les Bataillons de la jeunesse, les groupes spéciaux de la Main-d’œuvre immigrée (MOI). On parle ici de l’appareil clandestin mis en place dans le cadre de l’Internationale Communiste, des cadres de la Jeunesse Communiste, des immigrés ayant une expérience de la lutte armée notamment avec la guerre d’Espagne.

    Ces trois structures se regrouperont ensuite sous le nom de Comité Militaire National, puis de Francs-tireurs et partisans.

    L’Organisation Spéciale est, initialement, une structure d’appui logistique à l’agitation clandestine ; très vite, dans le Nord occupé par l’Allemagne nazie et relevant d’un statut spécial, la lutte armée se spécialise, sous l’impulsion surtout des mineurs polonais. Elle existe dès 1940.

    Les Bataillons de la Jeunesse, recrutés dans la Jeunesse Communiste, est une organisation directement fondée avec comme objectif la lutte armée ; elle date du milieu de l’année 1941, dans la foulée de l’offensive de l’Allemagne nazie contre l’URSS.

    La Main-d’œuvre immigrée (MOI) est initialement une structure de la CGT Unitaire regroupant les travailleurs immigrés, souvent bien plus politisés et idéologues que les communistes Français. Elle a joué un grand rôle dans le soutien à la République espagnole et dès l’interdiction du Parti Communiste Français, elle établit des structures clandestines.

    Grâce à ces appuis essentiels, tant sur les plans subjectif qu’objectif, le Parti Communiste devient la seule organisation qui sur le territoire français ne cède en rien au pessimisme et a comme objectif annoncé la victoire. Le Parti Communiste devient alors une organisation révolutionnaire authentique, c’est-à-dire fonctionnant clandestinement et selon les principes stricts de la compartimentation.

    Chaque groupe fonctionne en triangle. Seule une personne fait office de liaison avec une autre structure de l’organisation.

    Les différents groupes ne se connaissent pas entre eux et si une structure tombe, l’organisation peut se maintenir. Le plus souvent, les groupes ne rassemblent que trois personnes, afin d’éviter tout risque d’infiltration.

    Les structures sont supervisées par un responsable des opérations militaires, un responsable technique – logistique et bien entendu un commissaire politique, base de toute armée rouge. Et, au départ du moins, la ligne de construction des structures clandestines se fait sur la base des revendications.

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    Le Parti Communiste Français
    de la lutte armée à l’acceptation

  • L’interdiction du Parti Communiste Français en 1939

    Le Parti Communiste Français paya très cher son incompréhension du barrage à droite prédominant depuis 1938. Il connut une déchirure interne provoquée par l’annonce de l’accord germano-soviétique, mais qui témoigne d’un problème de fond dans son positionnement.

    Pour preuve, il y a le départ de 22 des 74 parlementaires communistes, qui mettront en place par la suite un nouveau groupe parlementaire, l’Union populaire française. Une démarche scissionniste d’une telle ampleur ne peut naître qu’à partir d’un véritable manque de solidité.

    Les tendances droitières s’agitaient d’ailleurs toujours plus massivement dans le Parti, et cela alors que la France entrait en guerre contre l’Allemagne nazie, aux côtés du Royaume-Uni.

    Vint alors le remaniement dans le gouvernement le 13 septembre 1939. Édouard Daladier, déjà président du Conseil, s’appropria les postes de ministre des Affaires étrangères, ainsi que de ministre de la Guerre et de la Défense nationale.

    Il décida ensuite d’interdire le Parti Communiste Français, le 26 septembre 1939.

    « Article premier. Est interdite, sous quelque forme qu’elle se présente, toute activité ayant directement ou indirectement pour objet de propager les mots d’ordre émanant ou relevant de la Troisième internationale communiste ou d’organismes contrôlés en fait par cette Troisième internationale.

    Art. 2. Sont dissous de plein droit le parti communiste (SFIC), toute association, toute organisation ou tout groupement de fait qui s’y rattachent et tous ceux qui, affiliés ou non à ce parti, se conforment dans l’exercice de leur activité, à des mots d’ordre relevant de la Troisième internationale communiste ou d’organismes contrôlés en fait par cette Troisième internationale.

    Art. 3. Sont interdites la publication, la circulation, la distribution, la mise en vente, l’exposition aux regards du public et la détention en vue de la distribution, de l’offre, de la vente ou de l’exposition des écrits, périodiques ou non, des dessins et, d’une façon générale, de tout matériel de diffusion tendant à propager les mots d’ordre de la Troisième internationale ou des organismes qui s’y rattachent.

    Art. 4. Sans préjudice de l’application du décret du 29 juillet 1939 relatif à la sureté extérieure de l’État, les infractions au présent décret sont punies d’un emprisonnement d’un an à cinq ans et d’une amende de 100 à 5 000 fr. Les peines prévues à l’article 42 du code pénal pourront être prononcées par le tribunal. »

    La répression va durer plusieurs jours, car le Parti Communiste Français rassemble alors 250 000 adhérents, gère 317 municipalités (soit le double d’avant 1935) et dispose de 2 718 élus.

    Ses organismes générés sont très nombreux ; rien que l’ARAC (Association républicaine des Anciens combattants), c’était déjà 93 permanences locales à Paris, 191 dans sa banlieue.

    La police perquisitionne les lieux les uns après les autres, procédant à la saisie des documents, emportant le matériel, scellant les locaux, le tout avec une rigueur de métronome, suivant un plan bien établi.

    Dès le départ, en quelques jours seulement, sont brisées les principales organisations du Parti comme des principaux organismes générés, ainsi que de L’Humanité.

    Puis au fur et à mesure, la répression démantèle l’ensemble des organisations générées, qu’ils relèvent du sport ou de la musique, de l’enfance ou de la culture.

    D’autres organismes générés sont épurés ou bien voient leurs gestionnaires totalement renouvelés : on parle ici des bibliothèques, des coopératives, des colonies de vacances.

    Du côté des députés restant, ceux-ci formèrent un groupe « ouvrier et paysan », mais début octobre 1935 la répression s’abat sur eux également.

    Les municipalités communistes sont évidemment dissoutes, tous les élus déchus de leurs mandats.

    Quant à la CGT, elle participe à la saignée : les dirigeants communistes sont exclus dès le départ, puis chaque syndicat doit rejeter ouvertement l’accord germano-soviétique, sous peine d’être dissous, ce qui sera le sort de beaucoup par différentes vagues, notamment un peu plus d’une centaine dans le département de la Seine.

    Le processus est exactement le même dans la Fédération sportive et gymnique du travail, avec l’exclusion des dirigeants communistes et la dissolution de 48 clubs et de 21 comités régionaux.

    Le Parti Communiste Français est alors un pantin désarticulé. Il n’a pas prévu une telle répression, il est resté un mois sans presse ni propagande, attendant passivement que les choses se débloquent, une illusion fatale.

    Il n’a donc pas les moyens de faire face à la répression, alors qu’en plus les défections sont nombreuses, et que la mobilisation faite par l’armée désorganise encore plus ce qui tente de se maintenir avec les multiples départs au front, puisque la guerre avec l’Allemagne est déclarée.

    Le décret-loi du 18 novembre 1939 permet l’internement administratif des « individus dangereux pour la défense nationale ». Le camp de vacances de l’union syndicale des ouvriers métallurgistes à à Baillet-en-France à vingt kilomètres de Paris est ainsi par exemple utilisé pour l’internement de 282 communistes.

    En mars 1940, Paul Reynaud devient président du Conseil avec le soutien des socialistes et le ministre socialiste de la justice Albert Sérol instaure la peine de mort pour les activités communistes.

    Le Parti Communiste Français est alors battu. Maurice Thorez, qui a été mobilisé et a accepté son affectation, est appelé à déserter par l’Internationale Communiste, qui l’amène clandestinement en URSS.

    Il y restera pendant toute la seconde guerre mondiale, coupée des réalités du Parti Communiste Français se maintenant dans la clandestinité.

    Celui-ci se reconstitue en effet, difficilement, à partir du petit appareil clandestin qui existait, avec ses planques, ses caches, ses imprimeries. Une nouvelle génération de cadres va émerger, menant la Résistance armée.

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • Le rejet par les socialistes et l’interdiction de la presse communiste en 1939

    Dans son rapport au Comité central de mai 1939, Maurice Thorez espère qu’après le refus de l’unité, effectué lors de son conseil national, le Parti socialiste-SFIO va modifier sa ligne lors de son congrès.

    Il est obligé de penser cela, de par son positionnement : il doit croire jusqu’au bout les illusions de sa conception « républicaine ».

    Il a les moyens matériels de le faire, pour l’instant encore : le 21 mai 1939, 200 000 personnes se rassemblent à Paris pour les cortèges en l’honneur de la Commune. Le mouvement ouvrier connaît un reflux, mais ses structures restent massives et ses traditions puissantes.

    Le Parti Communiste Français écrit donc de nouveau au Parti socialiste-SFIO afin de parler de l’unité.

    Cependant, au congrès de la fin mai 1939 à Nantes, les choses basculent : cette fois les centristes se sont associés avec l’aile droite.

    La question du « noyautage communiste » donne lieu à un très long débat, avec une volonté nette de casser les organismes générés par le Parti Communiste Français.

    Une motion en ce sens est alors largement adoptée par 5 490 mandats contre 1 771 et 264 abstentions.

    « Le Congrès considérant qu’il est interdit à un membre du Parti d’appartenir à un autre parti ou groupement politique quel qu’il soit, et quelle que soit sa dénomination ;

    Précise que cette interdiction s’applique également aux groupements, ligues ou associations ayant en réalité un caractère politique, comme relevant directement ou indirectement d’un parti politique tels que : amicales d’entreprises radicales ou communistes et toutes amicales d’entreprises sous l’influence d’un parti politique autre que le nôtre : Secours Populaire de France, Paix et Liberté, Parti Unique du Prolétariat, Femmes contre la Guerre et le Fascisme, Jeunes Filles de France, Amis de l’Union Soviétique, etc.

    Le Congrès rappelle, en outre, qu’il est interdit à tout membre du Parti d’appartenir à un groupement dont l’action s’avérerait hostile au Parti. »

    C’était un coup terrible porté au Parti Communiste Français et le Parti socialiste-SFIO le savait très bien. C’était aussi ouvertement torpiller toute idée d’unité organique entre socialistes et communistes, comme il avait déjà été décidé au Conseil national de mars.

    Malgré tout, contre tout bon sens et de la même manière qu’avec les radicaux, les communistes cherchèrent encore à empêcher une vraie rupture, à l’instar de cette lettre à la direction socialiste de Jacques Duclos au nom du Parti Communiste Français.

    « Paris, le 3 juin 1939.

    Chers camarades,

    La résolution adoptée par le congrès de Nantes affirme que votre parti n’entend renoncer à aucune possibilité d’action commune, et précise que, pour porter tous ses fruits, cette action doit avoir lieu pour des buts et dans des conditions délibérés, acceptés au préalable et appliqués sur le plan national.

    Nous basant sur cette décision souveraine de votre congrès et nous référant au pacte d’unité d’action qui, depuis le 27 juillet 1934, lie nos deux partis, nous vous proposons de réaliser l’action commune de nos organisations et de nos militants pour faire face à toutes les attaques de la réaction et du fascisme, tant sur le plan de la politique extérieure que de la politique intérieure.

    Par notre action commune, nous pouvons et nous devons assurer l’application d’une politique résolue à maintenir l’intégrité du territoire de la France, à défendre contre toute atteinte son indépendance politique et à assurer les droits et les libertés des populations indigènes des colonies.

    Par notre action commune, nous pouvons fit nous devons exiger du gouvernement français qu’il oppose aux entreprises de violence, une volonté inébranlable de résistance et de coalition des forces pacifiques.

    Par notre action commune, nous pouvons et nous devons combattre victorieusement les injustices des décrets-lois, sachant bien que les ouvriers et les paysans acceptent leur
    participation aux sacrifices communs, mais réclament l’équité dans là répartition des lourdes charges résultant des menaces extérieures.

    Par notre action commune, nous pouvons contrecarrer toutes les tentatives de destruction des institutions démocratiques et imposer leur fonctionnement normal.

    Enfin, si l’unité d’action est nécessaire sur le plan national, si elle est seule susceptible dé faciliter le regroupement autour des travailleurs organisés de tous les démocrates sincères, d’assurer le rassemblement national et républicain dont s’excluent eux-mêmes les alliés du fascisme intérieur et extérieur.

    Elle est non moins nécessaire sur le plan international. »

    Le Parti Communiste Français systématisa sa propagande à double niveau, avec l’appel à l’union sur le plan national et sur le plan international.

    Pour le premier aspect, il fut grandement profité du 150e anniversaire de la révolution française, notamment pour un grand meeting à Paris le 25 juin 1939, avec 60 000 personnes.

    Pour le second aspect, il y eut notamment début juillet des rassemblements pour la constitution d’un front de la paix, avec 20 000 personnes à Montreuil, 15 000 à Ivry, 15 000 à la Courneuve, 5 000 à Rueil, 10 000 à Dijon, puis 15 000 personnes à Bordeaux, 5 000 à Montreuil, 2 000 à Gagny, 6 000 dans le 13e arrondissement de Paris…

    Ainsi que de multiples autres, avec à chaque fois plusieurs milliers de personnes, et avec des orateurs différents à chaque fois afin de multiplier facilement les initiatives, principalement Maurice Thorez, Jacques Duclos, Marcel Cachin, André Marty, Georges Cogniot, Emmanuel Fleury.

    Le 14 juillet 1939 fut également prétexte à un vaste rassemblement de masse, avec 250 000 personnes à Paris, 100 000 à Marseille, 50 000 à Saint-Etienne, 10 000 à Toulouse, 8 000 à Angoulême.

    Mais étant donné que c’était le 150e anniversaire de la révolution française, ces chiffres sont à relativiser : un véritable engouement eut donné des chiffres autrement plus fort.

    D’ailleurs, 25 000 personnes seulement se retrouvent devant le Panthéon, en honneur de Jean Jaurès le 30 juillet 1939, un chiffre vraiment très faible étant donné l’ambiance de guerre régnante alors.

    La tension commence alors à monter de manière significative : des poursuites contre L’Humanité sont engagées pour divulgation d’informations confidentielles (mais un acquittement est prononcé) et surtout le 29 juillet 1939 un décret… prolonge de deux ans les mandats des députés.

    On est dans une situation où le gouvernement gouverne par décrets, avec une assemblée inutile qui plus est prolongée de deux années : c’est une centralisation des pouvoirs dans un sens fasciste, et le Parti Communiste Français n’en a pas saisi ni l’importance, ni la signification historique.

    D’où son erreur tactique monumentale. Lorsque l’URSS, craignant la trahison franco-britannique semblant évidente de par le jeu de la Pologne, réalise un accord avec l’Allemagne nazie pour éviter de se retrouver seule dans un affrontement direct avec celle-ci, le Parti Communiste Français salue bruyamment l’initiative.

    Le propos est juste, mais politiquement la mise en place d’une telle ligne est une erreur tactique complète.

    « Déclaration du Parti Communiste français

    Au moment où l’UNION SOVIETIQUE apporte une nouvelle et inappréciable contribution à la sauvegarde de la paix constamment mise en péril par les fauteurs de guerre fascistes, le Parti communiste français adresse au Pays du socialisme, à son Parti et à son grand chef Staline, un salut chaleureux.

    Depuis vingt-deux ans, le pouvoir des travailleurs démontre aux peuples de l’univers que le socialisme, c’est la paix.

    Le premier acte du pouvoir des Soviets, le 8 novembre 1917, fut un appel en faveur de la paix, et il s’adressait particulièrement « aux ouvriers les plus conscients des trois nations les plus avancées de l’humanité : l’Angleterre, la France et l’Allemagne ».

    Depuis, et en toute occasion, l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques a su tenir bien haut le drapeau de la grande paix humaine.

    Malgré vents et marées, malgré les attaques, violentes ou sournoises, malgré là contre-révolution, le blocus, le cordon sanitaire et le fil de fer barbelé de la réaction internationale, malgré les calomnies et les manœuvres de toutes sortes, malgré les Trotski et les Toukatchevski, l’U.R.S.S. a su défendre la paix et triompher de tous ses ennemis.

    Elle a pris position aux côtés de tous les peuples victimes ou menacés d’une agression.

    Seule parmi toutes les nations, l’Union soviétique a porté secours à l’Espagne républicaine envahie par les hordes barbares du fascisme international et lâchement abandonnée par les gouvernements de France et d’Angleterre au mépris des traités librement contractés et des engagements solennellement proclamés.

    L’UNION SOVIETIQUE a sauvé l’honneur de l’humanité civilisée et progressive en refusant de s’associer à cette politique criminelle de la « non-intervention ».

    L’UNION SOVIETIQUE est aujourd’hui aux côtés de la Chine martyre, agressée par le Japon militariste et fasciste, mais qui, grâce à son unité nationale, à son héroïsme, au soutien sans réserve de l’U.R.S.S. et des travailleurs du monde entier, aura raison de ses ennemis et débarrassera son territoire des brigands japonais.

    Il y aura bientôt un an que la Tchécoslovaquie, trahie par ses alliés, parmi lesquels la France, était livrée au fascisme hitlérien. Un peuple libre et fier connait maintenant le joug féroce de la dictature hitlérienne.

    L’UNION SOVIETIQUE fut seule jusqu’au bout, comme le rappelait récemment encore le Président Bénès, à observer rigoureusement ses engagements et à soutenir la cause du peuple tchécoslovaque.

    L’UNION SOVIETIQUE a droit à la gratitude de ces peuples.

    Mais ceux qui les ont trahis, ceux qui ont pratiqué la « non-intervention » ou fait Munich, doivent s’apercevoir que leurs capitulations successives devant le fascisme international a eu pour résultat d’attirer la menace d’agression sur leur propre pays.

    Au lendemain du 15 mars, lorsque grâce à la complicité de la France et de l’Angleterre, Hitler eut annexé brutalement ce que Munich avait laissé de la Tchécoslovaquie, l’Union soviétique a proposé une conférence en vue de réaliser l’alliance de tous les peuples libres pour défendre la paix et barrer la route à toute nouvelle agression.

    Malgré le refus des principales puissances intéressées, elle a persévéré dans son effort de construction de la paix.

    Quand, cédant à la pression des masses populaires, les gouvernements de Londres et de Paris se résignèrent à engager des pourparlers avec elle, l’Union soviétique a formulé des propositions sages et concrètes dont la prise en considération eut permis la conclusion d’une alliance anglo-franco-soviétique basée sur l’égalité et la réciprocité.

    C’eût été la digue de la paix contre laquelle les entreprises des fauteurs de guerre se fussent brisées.

    Mais si l’Union soviétique, soucieuse des intérêts de la paix et des peuples visés par de proches agressions, avait la ferme volonté d’aboutir, cette même volonté ne se rencontrait pas chez ses interlocuteurs.

    En présence des atermoiements, des tergiversations, du sabotage de Londres et de Paris, l’U.R.S.S. a fait, preuve d’une incroyable patience.

    Et voilà que ceux-là mêmes qui, depuis cinq mois manœuvrent pour empêcher la conclusion de l’alliance anglo-franco-soviétique, déclenchent contre le pays du socialisme une violente campagne parce qu’il accepte la demande de l’Allemagne hitlérienne de conclure avec lui un pacte de non-agression.

    Silence à ceux qui sont responsables si, aujourd’hui, les peuples vivent dans l’angoisse !
    La volte-face du fascisme hitlérien fait éclater le triomphe de la force de l’U.R.S.S., due à la construction victorieuse du socialisme, à sa puissance économique, politique et culturelle, à l’unité morale et politique de la société soviétique, à l’armée et à la marine militaire rouges, à sa politique de fermeté envers les agresseurs fascistes, politique qui a fait ses preuves au lac Khassan [victoire de l’armée rouge sur une incursion japonais en août 1938].

    Hitler, en reconnaissant, la puissance du pays du socialisme, accuse du même coup sa propre faiblesse.

    Ce succès que l’Union soviétique vient de remporter, nous le saluons avec joie car il sert la cause de la paix.

    La conclusion d’un tel pacte de non-agression ne peut que réjouir tous les amis de la paix, communistes, socialistes, démocrates, républicains.

    Tous savent qu’un tel pacte aura comme unique conséquence la consolidation de la paix. Tous savent qu’il ne privera aucun peuple de sa liberté, qu’il ne livrera aucun-arpent de terre d’une nation quelconque, ni une colonie.

    Tous savent qu’un tel pacte de non-agression n’a rien de commun avec certains autres traités, comme les accords de Rome que les communistes français furent seuls à combattre et qui livraient l’Abyssinie à Mussolini, comme le « gentlemen-agreement » conclu entre l’Angleterre et l’Italie sans souci des autres nations du bassin méditerranéen, comme l’accord de « non-intervention » qui livra l’Espagne républicaine à Mussolini et à Hitler, comme le honteux diktat de Munich qui permit le dépècement de la Tchécoslovaquie, comme les accords entre l’Angleterre et le Japon, qui reconnaissent le droit au Japon de conquérir la Chine et qui livrent au bourreau japonais quatre Chinois de Tien-Tsin.

    Nous n’avons aucune peine à comprendre la fureur des fascistes et de la réaction mondiale devant l’exemple de l’UNION SOVIETIQUE qui démontre la possibilité de signer des accords et des traités sans laisser la voie libre à l’agression et, contrairement à ce qui fut le cas en d’autres circonstances, sans aliéner l’indépendance d’une nation avec la même facilité qu’un particulier peut vendre une propriété.

    Le pacte de non-agression qui vient d’être signé à MOSCOU est un coup direct à l’agression.

    Comme l’attestent les nouvelles du Japon agresseur de la Chine, et de l’Espagne franquiste, il divise, et par conséquent affaiblit, le camp des fauteurs de guerre qui s’étaient unis sous le signe du pacte antikomintern.

    Le désarroi qui règne parmi les alliés du fascisme hitlérien suffit à montrer, et dans les semaines qui viennent les peuples s’en convaincront mieux encore, que l’U.R.S.S. vient de rendre un inoubliable service à la cause de la paix, à la sécurité des peuples menacés, et de la France en particulier.

    Et si quelques chefs socialistes ont estimé devoir prendre place dans le chœur fasciste et réactionnaire pour injurier l’UNION SOVIETIQUE, ils seront condamnés par tous les travailleurs, y compris les travailleurs socialistes.

    Ceux qui ont sur la conscience le crime de la non-intervention, ceux qui, au lendemain de Munich qu’ils approuvaient, ressentaient selon la formule du camarade Léon Blum « un lâche soulagement », ceux qui approuvent, les gouvernements qui livrent les peuples à l’esclavage fasciste, ceux-là sont disqualifiés pour prétendre s’ériger encenseurs de la politique de paix de l’Union soviétique.

    La paix, c’est le bien précieux des hommes.

    Pour la préserver contre ceux qui la menacent, il est de notre devoir de seconder les efforts admirables et couronnés de succès de l’Union soviétique.

    Nous savons que pour cela l’unité de la classe ouvrière est nécessaire. A cette œuvre, nous nous consacrons sans réserve et avec le concours de tous les ouvriers conscients nous parviendrons à paralyser les diviseurs.

    En empêchant jusqu’à ce jour l’action commune des travailleurs socialistes et communistes, ces diviseurs ont fait beaucoup de mal, ils ont empêché la riposte aux coups portés à la paix et à l’indépendance des peuples par le fascisme.

    Les campagnes de division d’un [socialiste néerlandais Johan Willem] Albarda, d’un [socialiste belge Paul-Henri] Spaak ou d’un [socialiste français] Paul Faure sont néfastes aux intérêts de la classe ouvrière et des peuples libres.

    Travailleurs socialistes et communistes viendront à bout de la division et, en groupant autour d’eux tous les amis de la paix et de la liberté radicaux, démocrates, croyants et laïques ils formeront le barrage aux forces d’agression.

    Pour la défense du pain, de la liberté et de la paix, les travailleurs se rassembleront sous le drapeau du socialisme, le drapeau qui flotte victorieusement sur un sixième du globe grâce au Parti bolchevik, aux peuples fraternellement unis de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques et à, leur chef génial, le camarade Staline.

    Le Parti communiste, fidèle à la doctrine de Marx, Engels, Lénine, Staline, est plus que jamais l’ennemi implacable du fascisme international, en première ligne du fascisme hitlérien le plus bestial et le principal fauteur de guerre, l’adversaire le plus dangereux de la démocratie.

    Il appelle tous les communistes et la masse imposante de ses sympathisants à remplir tout leur devoir pour la défense de la démocratie, de la liberté et de la paix.

    Dans le vrai combat contre le fascisme agresseur, le Parti communiste revendique sa place au premier rang.

    Vive l’UNION SOVIETIQUE, pays du socialisme vainqueur et bastion de la paix dans le monde !
    Vive l’UNION de la classe ouvrière internationale et de tous les peuples contre le fascisme !
    VIVE LA PAIX DANS LA DIGNITE ET L’INDEPENDANCE DES NATIONS.

    Le Parti communiste français (S.F.I.C.) »

    La réponse du gouvernement fut quasi immédiate : la presse communiste est interdite en date du 25 août 1939, toute réunion publique communiste est interdite dans la foulée en date du 27 août. Les arrestations commencent, par centaines.

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • « Pour la paix ! Pour le progrès ! Pour la République ! Français, unissez-vous ! »

    Maurice Thorez présente de la manière suivante son rapport au Comité central le 19 mai 1939, lors d’une de ses sessions. Le mot d’ordre est « Pour la paix ! Pour le progrès ! Pour la République ! Français, unissez-vous ! ».

    On y trouve d’exprimé la synthèse en cours : celle de l’union la plus large pour la paix et de l’assimilation du marxisme-léninisme diffusé par l’URSS.

    Il y a une approche bien plus profonde qu’avant, bien plus idéologique ; on est ici dans le maximum de ce qui pouvait sortir du Parti Communiste Français et il est évident qu’une révolutionnarisation était nécessaire pour pouvoir aller plus loin.

    Après la bolchévisation, il fallait assumer le marxisme-léninisme comme science ; le Parti Communiste Français n’en aura pas le temps.

    « Camarades,

    Quatre mois à peine se sont écoulés depuis la conférence nationale de notre Parti communiste. Et cependant nous nous réunissons aujourd’hui membres du Comité central, secrétaires régionaux et autres militants responsables dans une situation toute nouvelle en France et dans le monde (…).

    Les espoirs de paix se sont évanouis. L’inquiétude, l’angoisse sont de nouveau au coeur des hommes et des femmes soudain placés devant la dure réalité : la guerre est là, la guerre affreuse, la guerre tueuse et dévastatrice. L’Europe est comme un immense camp retranché. Elle est de nouveau la poudrière que la moindre étincelle peut faire sauter et dans laquelle cependant des fous furieux brandissent leurs torches incendiaires (…).

    Le moindre incident, une provocation quelconque, un attentat, peuvent désormais fournir le prétexte à une généralisation de la guerre. Et quelle guerre ! Une guerre qui n’épargnerait rien ni personne. Une guerre si terrible, si effroyable, que disparaîtraient à l’esprit des survivants le souvenir des horreurs de 1914 à 1918 (…).

    C’est contre la France que Mussolini élève des prétentions insolentes, visant non seulement Djibouti, et la Tunisie, mais une partie du sol national, la Corse, Nice et la Savoie.

    C’est contre la France que Hitler et Mussolini ont poussé au plus loin leurs opérations préliminaires d’isolement, d’encerclement (…).

    Nous SEULS, communistes, nous avons en septembre mis en garde contre la trahison qui se préparait.

    Nous SEULS nous avons dénoncé résolument. à la Chambre et dans le pays, la capitulation de Munich qui a compromis gravement, on s’en rend compte maintenant, la sécurité de la France et là cause de la paix.

    Nous, SEULS, le 4 octobre 1938 nous avons refusé la confiance au gouvernement des munichois (…).

    Les travailleurs approuvent notre Parti communiste qui a voté, seul, le 4 octobre 1938, et contre les accords de Munich, et contre les pleins pouvoirs.

    La classe ouvrière ne veut pas supporter les sacrifices à sens unique, les décrets-lois qui portent atteinte aux lois sociales et aux libertés démocratiques, l’abrogation de la semaine de 40 heures, la violation des conventions collectives et la suppression de la liberté du travail, toute relative.

    L’obligation de faire des heures supplémentaires, sous menace de congédiement, sans pouvoir être réembauché dans une autre entreprise ni être inscrit sur un fonds de chômage pendant six mois, fait reculer d’un siècle notre législation sociale (…).

    Enfin, mise hors d’état de nuire des traîtres, capitulards, espions du fascisme. Soutien des officiers républicains et des soldats du peuple contre les manœuvres et les provocations des éléments fascistes.

    Souffle républicain dans l’armée, la police, l’administration et la magistrature. Dissolution effective des ligues fascistes. Interdiction de leur presse. Arrestation de leurs chefs (…).

    Le fascisme, ce n’est pas le signe de la santé et de la force du capitalisme, c’est le signe de sa décrépitude irrémédiable. Le fascisme, c’est le produit le plus abject du monde capitaliste en décomposition.

    Le fascisme souligne la faiblesse de la bourgeoisie, en ce sens qu’elle renonce à ses méthodes antérieures de domination, aux méthodes démocratiques qui correspondaient à la période ascendante, progressive, du capitalisme, pour recourir aux méthodes de la violence brutale et sanglante.

    Le fascisme, c’est la dictature des éléments les plus réactionnaires et les plus acharnés du capital. Le fascisme supprime toutes les libertés, il tente d’anéantir le mouvement ouvrier, il détruit les syndicats, il interdit le Parti communiste et tous les autres partis de démocratie.

    Le fascisme voudrait donner l’apparence de la force, mais nous sommes des communistes, des marxistes-léninistes.

    Notre doctrine, notre théorie, la théorie scientifique du matérialisme dialectique « veut que les phénomènes soient considérés non seulement du point de vue de leurs relations et de leur conditionnement réciproques, mais aussi du point de vue de leur mouvement, de leur changement, de leur développement, du point de vue de leur apparition et de leur disparition

    Pour la méthode dialectique, ce qui importe avant tout, ce n’est pas ce qui à un moment donné paraît stable, mais commence déjà à dépérir ce qui importe avant tout, c’est ce qui naît et se développe, si même la chose semble à tin moment donné instable car pour la méthode dialectique il n’y a d’invincible que ce qui naît et se développe. » (Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., page 100.)

    Or, en Allemagne et en Italie, ce qui naît, ce qui se développe, c’est l’opposition de la multitude opprimée, asservie, économiquement et politiquement, à la dictature provisoire momentanée du fascisme.

    Les misères et les souffrances des peuples soumis au joug bestial du fascisme déterminent une accumulation énorme de ressentiments et de haines légitimes qui ne peuvent pas ne pas conduire ultérieurement à une explosion formidable qui balayera les dictateurs et leur régime sanglant (…).

    La volonté de paix et de liberté des masses populaires de tous les pays est encouragée par la fermeté inébranlable de l’Union soviétique face aux agresseurs fascistes et aux provocateurs de guerre.

    Oui, on peut résister à la fureur guerrière, du fascisme, il suffit d’unir autour des grandes démocraties tous les peuples oui veulent préserver leur indépendance (…).

    Il est encore temps d’inviter les peuples à la ronde de la paix autour de la France, de l’Angleterre et de l’Union soviétique (…).

    Les travailleurs sont prêts aux sacrifices qu’exige la défense du pays et de la paix ; ils jugent nécessaires le renforcement de la capacité militaire de la France, la fabrication massive d’armements qu’imposent les circonstances. Mais les travailleurs entendent que les sacrifices soient imposés d’abord aux possédants.

    Il faut contraindre le grand patronat routinier et cupide à la rénovation des méthodes de production, à la modernisation de l’outillage, à la réintégration de tous les chômeurs dans la production, et alors, alors seulement, les travailleurs accepteront de faire, sous le contrôle de leurs syndicats, les heures supplémentaires dont la nécessité apparaîtrait.

    Un gouvernement de défense nationale s’appuyant sur la classe ouvrière donnerait en outre la certitude que les armements fabriqués par les travailleurs ne seront pas dirigés contre eux ou contre l’Union soviétique (…).

    Nous devons dire au camarade Léon Blum : Vous défendez présentement sur les questions vitales pour la classe ouvrière et pour le pays des opinions qui ne se distinguent guère de celles que nous professons depuis longtemps nous-mêmes.

    Dans ces conditions rien ne devrait s’opposer à l’action commune de nos deux Partis, à l’unité de la classe ouvrière.

    Camarade Léon Blum, dans une grande mesure le sort de la classe ouvrière est entre vos mains, de vous surtout dépend le retour à la pratique effective de l’action commune.

    Léon Blum et ses partisans ont obtenu la majorité au Conseil National du Parti socialiste en décembre 1938, puis en mars dernier.

    Dans le dernier Conseil National, Blum et ses camarades de tendance auraient pu repousser le vote du texte [de Justin] Arnol suspendant l’unité d’action ; ils ont préféré s’abstenir.

    Nous souhaitons bien vivement qu’au prochain Congrès socialiste s’affirme une majorité favorable à l’unité d’action.

    Ce serait un événement heureux pour la classe ouvrière de notre pays, ce serait un pas sérieux vers la réalisation du front unique international (…).

    Notre parti groupe en premier lieu les ouvriers d’avant-garde, les meilleurs prolétaires, les représentants authentiques et les plus qualifiés de la classe ouvrière.

    Or, la classe ouvrière est, dans la société actuelle de production capitaliste, une classe révolutionnaire. La classe ouvrière qui subit l’exploitation capitaliste ne peut ne pas être l’adversaire, l’antagoniste irréductible de la classe des exploiteurs capitalistes.

    La classe ouvrière est ainsi conduite à une lutte de plus en plus consciente contre le capitalisme, à une lutte révolutionnaire qui part de la défense des intérêts quotidiens des prolétaires pour aboutir à la suppression de l’exploitation capitaliste, à l’instauration du système de production socialiste, à l’avènement du communisme.

    La conscience de ces buts de la classe ouvrière, de sa mission historique d’affranchissement de l’humanité, voilà l’explication de l’hostilité foncière des communistes au capitalisme qui engendre la guerre et qui a donné naissance au fascisme.

    Ce n’est pas tout. Notre Parti communiste est pourvu d’une boussole incomparable qui lui permet de fixer à coup sûr la route de la classe ouvrière ; cette boussole c’est la doctrine scientifique de Marx, Engels, Lénine et Staline, c’est la théorie révolutionnaire du marxisme-léninisme.

    La classe ouvrière, en raison de ses conditions de vie, de sa position dans la société vient naturellement au socialisme, au communisme.

    Mais il à été nécessaire de l’éclairer sur ses propres destinées, de la préparer il son rôle de « fossoyeur du capitalisme », d’organisateur de la société communiste de l’avenir. Ce fut l’oeuvre de Marx et d’Engels, des plus grands penseurs de l’humanité.

    Marx et Engels ont découvert les lois du développement des sociétés depuis les époques les plus reculées. Marx et Engels ont démontré que la société capitaliste dans laquelle nous vivons a succédé à d’autres sociétés depuis les communautés primitives, à l’esclavage, et à la féodalité et qu’elle conduit inévitablement à une société, supérieure, au communisme.

    Marx et Engels ont démontré que le fondement de ces sociétés diverses, c’est la façon dont les hommes produisent et sont groupés entre eux dans la production sociale ; les rapports sociaux de production, la place des individus et des collectivités dans la production, dépendant en dernière analyse « moins de ce que l’on fabrique, que de la manière de fabriquer, que des moyens de travail par lesquels on fabrique » (Capital, tome I, p.16. E.S.I.).

    Marx et Engels ont professé le matérialisme dialectique, « ainsi nommé parce que sa façon de considérer les phénomènes de la nature, sa méthode d’investigation et de connaissance est DIALECTIQUE et son interprétation, sa conception des phénomènes de la nature, sa théorie est matérialiste (Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., p. 98).

    Par là, la doctrine marxiste se rattache directement au matérialisme philosophique des grands encyclopédistes français du dix-huitième siècle.

    Marx lui-même a écrit : «  De même que le matérialisme cartésien a son aboutissement dans les sciences physiques proprement dites, l’autre tendance du matérialisme français aboutit directement au socialisme et au communisme » (Karl Marx. Œuvres philosophiques, La Sainte Famille, tome II, p. 234).

    Les représentants de cette autre tendance furent notamment Condillac, Helvétius, La Mettrie, Diderot, d’Alembert, etc.

    Marx poursuit : « Quand on étudie les théories du matérialisme sur la bonté originelle et l’égale intelligence des hommes, sur la toute-puissance de l’expérience, l’habitude, l’éducation, l’influence des conditions extérieures sur les hommes, la haute importance de l’industrie, le bien-fondé de la jouissance, etc. il n’est pas besoin d’une sagacité extraordinaire pour découvrir ce qui tes rattache nécessairement au communisme et au socialisme. »

    De son côté, Engels écrit dès la deuxième phrase de son œuvre capitale « L’Anti-Dühring » : « Dans sa forme théorique, le socialisme apparaît à ses débuts comme une continuation plus poussée, qui veut être plus conséquente, des Encyclopédistes du XVIIIe siècle.

    Comme toute théorie nouvelle, le socialisme devait tout d’abord se rattacher au fonds d’idées existant au moment de son apparition, à quelque point qu’il eût sa racine dans les conditions économiques.

    Les grands hommes qui, en France, ont éclairé les cerveaux en vue, de la Révolution future, se montraient eux-mêmes extrêmement révolutionnaires. Ils ne reconnaissaient aucune autorité en dehors d’eux, quelle qu’elle fût : religion, conception de la nature, société, organisation de l’Etat, tout était soumis à une critique implacable. »

    Le marxisme c’est l’unité de la théorie et de la pratique révolutionnaire. Dès 1845, rédigeant ses thèses sur Feuerbach, Marx termina de la sorte : « Les philosophes n’ont fait qu’interpréter le monde de différentes manières, mais il s’agit de le transformer ».

    Marx et Engels démontrèrent que nulle classe dans le passé n’avait renoncé de plein gré à l’exercice de sa domination, même lorsque le progrès des forces productives exigeait l’établissement, de nouveaux rapports de production, même lorsque l’histoire portait une condamnation inexorable contre les temps révolus.

    Le cent cinquantenaire de la Grande Révolution ne vient-il pas rappeler à ce propos que la bourgeoisie française a dû briser par la violence révolutionnaire le pouvoir, du roi et des seigneurs féodaux, qu’elle a dû défendre au moyen de la terreur révolutionnaire, contre les ennemis du dedans et du dehors, les conquêtes sociales et politiques de la France Nouvelle.

    Marx et Engels ont démontré que la classe ouvrière devra inévitablement recourir aux mêmes méthodes révolutionnaires pour briser la domination de la bourgeoisie dépassée par les nouveaux progrès de la science, de la technique, des forces de production que la classe ouvrière doit se préparer à l’exercice de la dictature du prolétariat pour assurer son nouveau pouvoir, pour préparer la société sans classes, qui verra enfin régner sur le monde dans l’épanouissement du communisme libérateur, la justice, le bonheur, la paix.

    Afin de rapprocher le jour heureux où selon son expression si poétique : « il y aura du pain pour tout le monde et aussi des roses. »

    Marx et son compagnon Engels, ont enseigné que la classe, ouvrière doit avoir son propre parti qu’ils ont appelé le Parti communiste.

    Ils ont rédigé, il y a presque un siècle, leur « Manifeste communiste », l’œuvre immortelle qui reste la base de notre doctrine révolutionnaire.

    Lénine n’a pas seulement défendu la doctrine de Marx et d’Engels contre les révisionnistes et les falsificateurs de la social-démocratie. Lénine a fait progresser la théorie marxiste (…).

    Comme toute théorie, comme toute science, la théorie marxiste-léniniste se développe ; elle se perfectionne constamment.

    Le mérite, la gloire de notre grand Staline résident précisément dans les apports substantiels dont il enrichit sans cesse la doctrine des fondateurs du socialisme scientifique, dans les nouveaux progrès que fait, grâce à ses travaux, le marxisme-léninisme (…).

    Les adversaires du communisme, les ennemis du peuple croient nous désobliger en nous appelant des stalinistes. Ils ne voient pas que c’est pour nous un titre de fierté que nous nous efforçons de mériter.

    Notre plus vif désir, notre ambition suprême, c’est de devenir des marxistes-léninistes éprouvés, de véritables stalinistes (…).

    La voie de l’Internationale communiste, la voie de l’internationale de Lénine et de Staline, c’est la voie dans laquelle nous ont précédés les travailleurs de l’Union soviétique sous la conduite du glorieux Parti bolchevik.

    La voie de l’Internationale communiste, notre voie, c’est celle de la lutte pour le pouvoir de la classe ouvrière et de l’édification socialiste.

    Le socialisme, le communisme, ce n’est plus une chimère, une utopie, un rêve. C’est la vie heureuse de 180 millions de citoyens soviétiques, c’est la vie joyeuse d’une jeunesse ardente (…).

    A l’oeuvre donc, sous le drapeau de l’Internationale, communiste, sous le drapeau de Lénine et de Staline, à l’œuvre pour un Parti communiste toujours plus fort, pour l’unité de la classe ouvrière, en France et dans le monde, pour, l’union de tous les républicains contre le fascisme et contre la guerre, à l’œuvre pour le salut de notre peuple, pour la cause universelle de la liberté et de la paix, pour le triomphe du communisme libérateur. »

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • Le PCF en 1939 : la question de l’Alliance franco-soviétique, le matérialisme dialectique

    En mars 1939, on est en plein drame historique. Hitler menace les restes de la Tchécoslovaquie et finit par l’envahir à la mi-mars. La République espagnole s’effondre et Franco va annoncer sa victoire le premier avril.

    Édouard Daladier s’arroge alors les pleins pouvoirs le 18 mars 1939, dans tous les domaines, afin de « prendre l’ensemble des mesures exceptionnelles qu’exige la sécurité du pays ».

    Le 29 mars 1939, il annonce à la radio les mesures qu’il va mettre en place, qu’il pose naturellement comme relevant de l’exceptionnel. C’est qu’on parle tout de même d’une semaine de travail à 45 heures d’un côté et d’un impôt spécial sur les bénéfices des industries de guerre de l’autre.

    Deux jours plus tard, le premier ministre britannique Neville Chamberlain affirme devant la Chambre des Communes que le Royaume-Uni apportera son « complet appui » à la Pologne si celle-ci était attaquée.

    Cela implique bien entendu que la France soit de la partie. Il manque toutefois une pièce maîtresse pour que cela soit efficace : l’appui soviétique. Ainsi commencent à partir de mars 1939 des tractations sans fin entre la France, le Royaume-Uni et l’URSS quant à une alliance tripartite.

    L’URSS appréhende la chose : elle a été mise de côté des accords de Munich scellant la fin de la Tchécoslovaquie, littéralement sacrifiée. Il y a qui plus est eu un accord anglo-allemand signé par Neville Chamberlain et Adolf Hitler le 30 septembre 1938, ainsi qu’un accord franco-allemand signé par Georges Bonnet et Joachim von Ribbentrop le 6 septembre 1938.

    L’URSS craint que les discussions avec le bloc franco-anglais ne soient somme toute qu’un piège pour gagner du temps et qu’elle va se retrouver toute seule face à l’Allemagne nazie.

    Il y a un autre problème : la Pologne, au régime pratiquement fasciste. En 1938, la Pologne avait refusé de laisser passer l’armée rouge pour aller aider la Tchécoslovaquie face à l’Allemagne nazie ; pire encore, elle avait elle-même participé au dépeçage de ce pays, s’appropriant une partie de son territoire.

    Ni la France ni le Royaume-Uni ne peuvent assurer à l’URSS que la Pologne laissera passer l’armée rouge pour combattre l’Allemagne nazie. La France fait ici des efforts, mais sans réelles garanties et l’URSS considère alors qu’elle n’a plus le choix : elle doit éviter à tout prix de se retrouver seule, du moins faut-il gagner du temps.

    Cela va donner en le pacte entre l’URSS et l’Allemagne nazie : cette dernière occupe la Pologne à l’Ouest, alors que l’URSS prend la partie est consistant en pratique en l’Ouest de l’Ukraine et l’Ouest de la Biélorussie.

    Nous sommes alors en septembre 1939 et jusqu’à cet événement, le Parti Communiste Français pousse à fond pour que la France assume l’alliance tripartite avec le Royaume-Uni et l’URSS.

    Il y a encore l’espoir du côté français que l’élan du Front populaire fasse basculer la France dans une alliance qui permettrait d’affirmer l’opposition entre démocratie et fascisme, et d’empêcher le déclenchement de la guerre impérialiste.

    Sa position est de dire que la paix est encore possible, si un double front est mené : un front des démocraties au niveau international, un front des Français au niveau national.

    Son objectif est la réintégration dans le jeu gouvernemental et c’est le travail à la base avec les socialistes qui est considéré comme l’outil essentiel ici, malgré le refus du Parti socialiste de maintenir un rapport avancé avec le Parti Communiste Français.

    Au fond, il y a l’idée qu’il faut temporiser au maximum, en considérant qu’à un moment les choses vont s’accélérer et que de par sa matrice, sa base et son style, le Parti Communiste Français peut surnager, comme en témoigne cet article de Maurice Thorez en première page de L’Humanité le 24 mars 1939.

    « UNIR ! UNIR ! UNIR !
    Progrès heureux de l’action commune

    Une hirondelle ne fait pas le printemps, mais elle l’annonce. Les premières manifestations unitaires que nous avions la joie d’offrir en exemple laissaient prévoir, à brève échéance et dans tout le pays, le retour à la pratique de l’action commune.

    C’est maintenant de partout que nus parviennent des résolutions pour l’action commune signées des socialistes et des communistes. C’est maintenant un peu partout, à Paris, en banlieue, dans la province que sont convoquées des réunions communes.

    Les organisations locales décidées à revenir à l’application résolue du pacte du 27 juillet 1934 sont déjà si nombreuses qu’on ne peut songer à en dresser la liste. Mais le plus important, c’est l’accord conclu, après celui de l’Aisne, entre les organisations socialistes et communistes de ta région parisienne, et c’est l’appel de la Fédération socialiste du Puy-de-Dôme.

    L’unité est de nouveau en marche. Pouvons-nous espérer que la commission administrative permanente du parti socialiste répondra favorablement aux propositions d’action commune, que nos camarades Bonte et Bartolini sont allés en notre nom renouveler auprès des dirigeants socialistes, au siège de leur parti ?

    Tout commande l’union. Les événements vont vite.

    Comme nous n’avions eu que trop.raison de le redouter après Munich, le fascisme hitlérien, encouragé si longtemps par l’attitude de nos gouvernants, vient de se livrer à un nouveau coup de force. Pour des raisons d’ordre militaire et stratégique autant que par esprit de rapine et d’oppression, Hitler a annexé la Bohême millénaire et la Moravie. Cette fois, les plus aveugles doivent convenir que le danger de guerre n’a jamais été plus menaçant, plus proche.

    Il faut donc faire face à la menace, courageusement et résolument. Tout peut encore être sauvé. A condition de s’engager enfin dans une voie que nous n’avons cessé d’indiquer au pays, dans la voie de l’union, à l’intérieur et à l’extérieur, de toutes les forces de liberté et de paix.

    C’est dans cet esprit que nous jugeons l’orientation et l’activité gouvernementales. Nous avons voté contre les pleins pouvoirs. Aux raisons de principe s’ajoutaient, pour nous communistes, des considérations sur les responsabilités antérieures des gouvernants dont nous avions le droit et le devoir de tenir compte, nous qui avions seuls voté contre les accords de Munich.

    Nous ne pouvons pas ne pas faire des réserves sérieuses sur la façon de réaliser le redressement de notre politique extérieure, lorsque les « fidèles soutiens du gouvernement reprennent leurs campagnes de trahison contre le principe même de la sécurité collective, et contre le rapprochement nécessaire, indispensable avec l’Union soviétique, principale force de paix dans le monde.

    Ensuite, nous qui avons réclamé, après les républicains de 1848, le « droit au travail », nous qui sommes prêts à l’effort d’armement du pays, nous ne pouvons pas ne pas être inquiets lorsque les « sacrifices » sont imposés seulement à la classe ouvrière sans que des mesures sévères d’ordre financier et économique limitent là puissance et les bénéfices du capital. La classe ouvrière peut croire que les menaces contre le pays et contre la paix sont simplement mises à profit, par la réaction pour détruire les lois sociales.

    Enfin nous, qui estimons que la sécurité de la France doit se fonder sur l’entente entre les peuples de bonne volonté et sur la force matérielle et morale de notre propre pays, nous attachons le plus grand prix au maintien des libertés démocratiques.

    Le sentiment de lutter pour la défense de la liberté est un élément essentiel de la force française, et c’est aussi le lien le plus solide qui puisse nous unir aux autres peuples menacés par la fureur guerrière du fascisme. Sur tous ces problèmes, les travailleurs socialistes pensent comme leurs frères communistes. C’est la raison profonde du rapprochement qui s’opère entre militants et organisations des deux partis.

    L’unité de la classe ouvrière, ciment de l’union entre tous tes républicains, peut seule garantir, en effet, les droits et les libertés de notre peuple, à l’Heure de l’action décisive pour la sauvegardé de la paix et le salut du pays. »

    Cette démarche est indéniablement passive, toutefois un événement historique de grande ampleur se produit dans le domaine idéologique : l’impression en France du précis d’Histoire du Parti communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., qui joue le rôle de véritable manuel communiste.

    Cet ouvrage publié en 1938 en URSS raconte l’histoire du bolchévisme en Russie, avec les séquences de la lutte contre le tsarisme, la période de la révolution d’Octobre 1917, les décisions prises pour la construction du socialisme.

    On y trouve également une présentation détaillée rédigée par Staline des fondements idéologiques du marxisme-léninisme : Le matérialisme dialectique et le matérialisme historique.

    La publication française a connu immédiatement un grand succès, puisque rapidement cent mille exemplaires sont vendus. On se doute que c’est l’Internationale Communiste qui a supervisé la réalisation de cette publication et sa diffusion par le Parti.

    Et de par sa nature, ce document révolutionne véritablement ce dernier, puisqu’il exige une forme synthétique dans l’affirmation idéologique, qu’il pose une vision du monde totale.

    On peut même dire que pour la première fois, avec cette publication, le marxisme arrive en France de manière non dénaturée.

    Le souci est que le Parti Communiste Français n’aura pas le temps d’assimiler cet ouvrage ; s’il était arrivé plus tôt, tout aurait été changé, dans tous les aspects de l’existence du Parti. Une véritable génération comprenant réellement le marxisme aurait pu apparaître.

    En tout état de cause, le Parti Communiste Français va donc rester livré à lui-même.

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • La tentative de rapprochement avec le Parti socialiste-SFIO en 1939

    Le Parti Communiste Français essaya une dernière fois de faire vivre ses relations avec le Parti socialiste, qui étaient au point mort depuis l’échec du gouvernement de Léon Blum en 1937.

    Le 4 mars 1939, une lettre fut envoyée au Conseil national du Parti socialiste qui va s’ouvre alors ; elle témoigne envers les socialistes de la même incompréhension du « barrage à droite » qui s’est déroulée chez les radicaux.

    « Chers camarades,

    C’est en pleine conscience de la gravité des dangers dont les masses laborieuses de France sont menacées que le Parti communiste s’adresse à vous.

    Nous sommes à même, les uns et les autres, de voir combien la classe ouvrière et l’ensemble des populations travailleuses sont préoccupées de savoir où risque de conduire la politique du gouvernement.

    Les décrets-lois, dont on avait dit qu’ils allaient remettre la France au travail, ont, au contraire, pour conséquence d’accroître le nombre des chômeurs, de faire peser de nouvelles charges sur les petites gens, de porter gravement atteinte aux lois sociales du Front populaire, de plonger notre pays dans un marasme économique redoutable, à la fois pour les ouvriers et pour les classes moyennes.

    Les cagoulards sont libérés les uns après les autres. Des malfaiteurs publics, accusés d’avoir prépare l’assassinat de Français, bénéficient du régime politique en attendant leur mise en liberté, cependant que d’honnêtes travailleurs sont frappés de lourdes peines pour avoir usé, le 30 novembre dernier, du droit de grève inscrit dans la loi.

    Une telle politique donne au grand patronat toutes possibilités pour poursuivre sa besogne de régression sociale.

    Elle donne au fascisme toutes facilités pour développer son action dirigée a la fois contre les communistes, contre les socialistes, contre les démocrates de toutes tendances, contre les croyants de diverses confessions, contre tous ceux que les émules de .Hitler et de Mussolini veulent diviser pour pouvoir les battre les uns après les autres et faire triompher sur tous leur politique de violence, et d’esclavage.

    Par ailleurs, la reconnaissance de Franco, l’occupation acceptée du territoire espagnol par les troupes italiennes et allemandes, soulignent assez la volonté du gouvernement français de nuire au gouvernement de la République espagnole qui proclame a la face du monde sa ferme intention d’opposer une résistance farouche aux envahisseurs de l’Espagne.

    Les travailleurs communistes et socialistes s’interrogent sur les conséquences redoutables d’une telle politique de misère et de régression sociale, d’encouragement du fascisme et de trahison des intérêts de la paix. Ils se demandent comment la faire cesser.

    Nous avons, nous, communistes, la conviction que la situation actuelle, peut très rapidement changer.

    Un redressement semblable à celui qui s’opéra en 1934 et 1935 peut se reproduire si, comme à cette époque, nos deux partis, pratiquant effectivement l’unité d’action, donnent confiance aux masses populaires et créent les conditions d’un vaste regroupement des forces de démocratie et de paix.

    Nos deux partis devraient engager dans tout le pays une grande campagne :

    1) Pour l’aide, à l’Espagne républicaine à qui les soldats et les armes doivent être rendus contre les conséquences que le gouvernement veut tirer de la reconnaissance de Franco, telles que l’octroi de l’or et du matériel républicain au général rebelle ;

    2) Contre les décrets-lois de misère ; pour l’application d’une politique économique et financière conforme aux intérêts du peuple, s’inspirant du programme du Front populaire et des dispositions du projet financier du deuxième cabinet Blum, voté par la Chambre ;

    3) Contre ta tolérance dont bénéficient les cagoulards pour l’application de la loi aux ligues factieuses reconstituées, menaçant les libertés républicaines et l’indépendance du pays, et pour l’amnistie aux fonctionnaires et ouvriers suspendus, licenciés, condamnés et emprisonnés pour avoir défendu leur pain et celui de leurs enfants.

    L’action commune de nos deux partis stimulerait de nouveau l’union et l’action du peuple de France tout entier.

    De même que la signature du Pacte d’unité d’action entre nos deux partis eut bientôt pour résultat la formation du Front populaire, de même l’unité d’action pratiquée par nous dans les circonstances présentes réduirait à néant les manœuvres des diseurs, provoquerait un immense rassemblement des masses populaires et ferait passer sur la France laborieuse un grand souffle d’espoir.

    Voilà pourquoi nous pensons que le Comité national d’entente de nos deux partis, dont nous regrettons qu’il n’ait pas siégé depuis plus de 4 mois, malgré nos propositions, devrait enfin se réunir très prochainement afin d’envisager l’action à entreprendre.

    Comptant sur une réponse favorable, recevez chers camarades, notre fraternel salut communiste.

    Pour le Comité central du Parti communiste français
    Le secrétaire général Maurice THOREZ. »

    Le Conseil national du Parti socialiste repoussa la demande du Parti Communiste Français, à l’occasion d’un psychodrame, où Justin Arnol proposa initialement un amendement.

    Ce député socialiste, qui avait voté auparavant pour les accords de Munich, votera par la suite en 1940 pour les pleins pouvoir au maréchal Pétain, et mourut absolument désespéré en 1943 de ses erreurs fondamentales d’orientation. Cet exemple individuel souligne l’intensité dramatique du moment, avec une pression psychologique immense propre à cette époque.

    Justin Arnol était dès le départ pour l’unité, mais par le haut seulement ; en mars 1938, il tendait logiquement sur la droite, dans l’ambiance du moment. Son amendement demande qu’on isole le Parti Communiste Français, qu’il fallait considérer au mieux comme une force d’appoint.

    « En ce qui concerne l’unité d’action, dont le principe n’est pas remis en question, le Conseil national considère qu’elle pourrait être un utile moyen de défense si la République était mise en péril comme elle le fut en 1934.

    Mais, dans la situation intérieure et internationale assez trouble pour qu’aucune confusion n’y soit ajoutée, le Conseil national estime que le Parti Socialiste doit rester lui-même et apporter le plus de clarté possible dans sa politique et dans son action.

    Il ne voit aucun avantage à la pratique de réunions publiques communes avec n’importe quel Parti.

    Il recommande aux Fédérations de consacrer tous leurs efforts au recrutement et à l’éducation des militants et à la propagande spécifique du Parti. »

    S’oppose alors à lui Jean Zyromski, le dirigeant de l’aile gauche du Parti, qui est pour qu’on se tourne au contraire vers le Parti Communiste Français. Son amendement contredit formellement celui de Justin Arnol et l’aile gauche du Parti qu’il représente, avec comme bastion la région parisienne, fait de réels efforts pour se lier avec les communistes sur le terrain.

    Jean Zyromski a l’intelligence de présenter les choses sous l’angle de l’unité ; néanmoins, il n’a pas compris la nouvelle séquence et se contente de formuler cela comme une relance du Front populaire, qu’il s’agit simplement de « rénover ».

    « Le Conseil National proclame qu’il appartient au Parti socialiste de rassembler toutes les forces populaires contre toutes les formes de l’injustice et de l’oppression autour d’un programme à la fois audacieux et pratique, dirigé contré les privilèges capitalistes.

    Acceptant les lignes générales du « Plan du travail » de la C.G.T., il manifesté sa volonté de voir se grouper dans un Front populaire rénové toutes les organisations démocratiques et prolétariennes décidées à lutter sans défaillance pour la liberté, la justice et la paix. »

    Si le vote avait eu lieu, cela provoquerait une contradiction majeure dans le Parti socialiste, aussi Marx Dormoy intervint-il pour tenter d’opposer la question préalable ; il s’agit d’un vote pour dire qu’il ne s’agit pas de faire de vote.

    4 135 délégués contre 2 792 décidèrent toutefois que le vote devait avoir lieu. Et la catastrophe se produit alors : l’amendement de Justin Arnol fut appuyé par 3 300 délégués, celui de Jean Zyromski par 1 387 délégués seulement.

    Preuve de la dimension extrêmement profonde de la question, les abstentions furent de 2 642 (avec 289 absents).

    Symboliquement, la rupture socialiste avec le Parti Communiste Français était consommée. Il était évident qu’il n’y aurait plus aucun progrès ici et que les socialistes allaient toujours plus s’aligner sur la droitisation du régime.

    Début mars 1939, le Parti Communiste Français aurait dû comprendre l’importance d’une telle situation. D’autant plus que sur le plan international, les choses se précipitent.

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • La défaite de l’Espagne républicaine

    Hormis l’alignement sur les radicaux et la tentative de les remettre sur leur ligne du début du Front populaire, le Parti Communiste Français assume comme autre grand thème la guerre d’Espagne.

    Ce n’est pas nouveau : initialement, il y avait la dimension antifasciste de soulignée, puis vint l’idée que pour protéger la France il fallait une Espagne non fasciste à ses frontières.

    Avec les tensions internationales qui ont connu un terrible développement tout au long de l’année 1938, il y a désormais d’autres aspects s’entremêlant qui marquent une certaine redéfinition.

    C’est que sur le fond, il y a ce qui flotte comme logique aux yeux de tous : si l’Espagne républicaine triomphe, l’antifascisme et le mouvement ouvrier vont de l’avant ; si le coup d’État militaire de Franco réussit jusqu’au bout, c’est le fascisme qui s’impose comme tendance apparemment irrépressible.

    C’est pourquoi ce qui joue particulièrement, c’est d’une part l’Internationale Communiste à ce sujet, qui avait mis en place les « Brigades Internationales », ensuite l’idée de l’unité générale des communistes, des socialistes, des républicains de gauche et des anarchistes face au fascisme en Espagne.

    Enfin, le thème est un grand point d’accroche chez les ouvriers socialistes, étant donné que les socialistes sont bien plus timorés, avec d’ailleurs Léon Blum ayant refusé un soutien militaire ouvert lorsqu’il était à la tête du gouvernement.

    Le 21 janvier 1938, Maurice Thorez tient un long discours à ce sujet lors de la Conférence nationale du Parti Communiste Français. Voici les principaux propos.

    « Depuis la capitulation de Munich, et comme conséquence directe de cette capitulation, le problème espagnol domine maintenant la situation internationale.

    Il se trouve poser en même temps l’indépendance de ce peuple héroïque, sa liberté, et aussi l’avenir du monde, le sort de la démocratie dans le monde, et l’avenir même de notre pays.

    L’offensive italienne en Catalogne [en soutien à l’armée de Franco durant la guerre d’Espagne] a fait apparaître aux yeux des plus aveugles le danger terrible que fait courir à la France l’accomplissement du plan de Hitler : l’encerclement de notre pays.

    Nous ne sommes plus seuls, à présent, à le reconnaître. Les socialistes, des radicaux, des parlements notoires, des hommes du centre ou même de la droite, parlent désormais ainsi (…).

    Munich a été une défaite pour notre pays, une défaite pour la classe ouvrière et la démocratie, défaite provisoire, certes, mais dont ils nous faut néanmoins souligner l’origine. C’est pourquoi la classe ouvrière n’a pas fait, n’a pas su faire échec aux fauteurs de guerre. Elle n’a pas réussi cette tâche qui est sienne, parce qu’elle n’est pas unie (…).

    Sans l’unité, impossible de lutter, c’est pour cela que nous dénonçons ces adversaires au sein de la classe ouvrière, que nous luttons contre les trotskistes, les diviseurs, les ennemis du peuple, agents du fascisme international, contre ceux qui essaient de dissimuler leur trahison derrière le masque de l’anti-communisme (…).

    La conception du Front populaire est juste et féconde, de même que sera féconde notre conception de l’unité française, de l’union de la nation française, du Front français (…).

    Nous devons dire au Président du Conseil : beaucoup de questions nous divisent. Nous ri approuvons, pas la capitulation de Munich. Nous combattons les décrets-lois de M. Paul Reynaud. Nous réprouvons vos attaques aux lois sociales. Nous ne voulons pas admettre la tentative de restreindre le droit syndical.

    Mais nous disons que la question décisive, aujourd’hui, pour la France, est : sauver l’Espagne. Ouvrez la frontière ! Nos réserves subsistent ; mais pour sauver l’Espagne, nous vous soutiendrons de toutes nos forces (Vifs applaudissements.).

    Élargir à sa droite le Front populaire, refaire au Parlement ce qu’il est dans le pays. Avec nous, il demande que l’on sauve l’Espagne, pour préserver la sécurité de la France.

    Sinon, nous dirons, ne pas aider l’Espagne, c’est trahir la France, et nous vous combattrons, comme nous vous avons combattus lors de la capitulation de Munich. Rien, ni les menaces, ni la calomnie, rien ne nous fera reculer. (Vifs
    applaudissements.)

    Tous unis, communistes, la C.G.T., le parti socialiste, l’Union Socialiste Républicaine, les radicaux, tous les Français, il nous faut aider au maximum l’Espagne, il nous faut sans tarder sauver la France (Applaudissements prolongés.) (…)

    Vive l’union de la nation française, née de vingt races diverses ! Vive, dans sa diversité heureuse, la République une et indivisible ! »

    Chaque jour, L’Humanité parle en page de garde de la situation espagnole. Le début de l’année 1939 est marqué par un grand meeting pour l’Espagne de 40 000 personnes au vélodrome d’Hiver, avec le dirigeant communiste Maurice Thorez, le dirigeant socialiste Léon Blum et le dirigeant de la CGT Léon Jouhaux.

    Le 12 février 1939, 150 000 personnes manifestent à Paris en soutien à l’Espagne.

    Mais les nouvelles sont mauvaises, toujours plus mauvaises. L’armée républicaine recule sous les coups de boutoir de l’armée franquiste appuyée par l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste, alors que seuls l’URSS et le Mexique assument une aide véritable à la République.

    La chute de l’Espagne républicaine a beau être présentée comme la naissance d’une menace d’un troisième front, en plus de celui avec l’Allemagne nazie et l’Italie fasciste, rien n’y fait, il n’y a pas de mobilisation générale en France à ce sujet.

    Il est comme accepté qu’il y a un repartage du monde, et le but des Français est d’éviter les soucis à tout prix, plus qu’autre chose. La passivité s’installe – elle se révélera pleinement avec la défaite de 1940.

    Il y a pourtant le feu. L’Italie fasciste a commencé à systématiser ses exigences territoriales à l’encontre de la France. Elle exige le retour de la Savoie et de Nice, qui en 1860 en tant respectivement que duché et comté avaient été remis par le royaume de Piémont-Sardaigne à Napoléon III en échange d’une alliance.

    Elle revendique également la Corse, la Tunisie et Djibouti. Il est évident que la France va à la guerre, et pourtant jamais la question espagnole, si fondamentale, n’aura joué l’aspect qu’il aurait dû à ce moment-là – ce qui est clairement la faute d’un Front populaire présentant les choses de telle manière que la France se croit à l’écart du reste du monde.

    D’où succès de la droite dans la foulée, ou plus exactement d’un « réalisme » cynique, dont le centriste Édouard Daladier s’est fait le vecteur, notamment avec le pragmatisme des accords de Munich.

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • Le PCF et Daladier contre Daladier

    Conséquemment à sa position, le Parti Communiste Français oppose Édouard Daladier à Édouard Daladier, accusant le président du Conseil d’avoir modifié ses positions, renversé sa propre ligne de conduite.

    Édouard Daladier

    Le 8 décembre 1938, Jacques Duclos tient un discours à l’Assemblée nationale et le dit expressément. Le Parti Communiste Français se pose en réel représentant des radicaux, pour ainsi dire.

    « Enfin voici venu le moment où les représentants de la nation peuvent demander des comptes au gouvernement.

    Peut-être, monsieur le président du conseil, n’avez-vous pas agi tout à fait dans l’esprit du programme de votre parti, qui affirme la souveraineté du suffrage, universel, qui repousse la pratique, avouée ou occulte, du pouvoir personnel en faisant siéger la Chambre quarante-neuf heures trente-cinq minutes en huit mois. (Applaudissements à l’extrême-gauche)

    Mais si le gouvernement a semblé fuir le contrôle de la représentation nationale, c’est peut-être parce qu’il avait des doutes sur l’approbation de sa politique par le pays.

    Il est vrai qu’on s’est beaucoup servi du micro. On s’est trop servi du micro, mais pas assez de la tribune parlementaire, comme si la représentation légale du pays n’existait pas ou n’existait plus.

    Il est vrai qu’au micro on ne risque pas la contradiction. (Très bien !Applaudissements à l’extrême-gauche communiste).

    Nous sommes loin, monsieur le président du Conseil, de l’époque où vous attaquiez le ministre des Postes, Télégraphes et Téléphones, aujourd’hui ministre des Colonies, et considéré comme un ministre de deuxième zone, puisque banni de certaines réceptions. (Applaudissements à l’extrême-gauche)

    Nous sommes loin de l’époque où, parlant de la radio ; lorsqu’il s’agissait de constituer l’association Radio-Liberté, vous disiez

    « La pensée doit être libre. Cependant, le capitalisme a mis la main sur l’œuvre des savants désintéressés et corrompu la pensée, comme il a corrompu les cœurs et les muscles. Sur ce terrain, ajoutiez-vous, il faut donc engager la lutte quelle que soit la bataille engagée, je serai avec vous. » (Applaudissements à l’extrême-gauche) (…)

    Ecoutez, monsieur le président du Conseil, l’écho des paroles prononcées par M. Daladier en 1935.

    M. LE PRESIDENT DU CONSEIL. Je les sais par cœur.

    Jacques Duclos. « Le Front populaire disiez-vous, il paraît que c’est une alliance monstrueuse. Excusez-moi, ce Front populaire, c’est beaucoup plus simple, c’est beaucoup plus clair, c’est l’alliance du Tiers-Etat et du prolétariat. Lorsque le Tiers-Etat et les prolétaires sont groupés ils font 89, 93, 48, le 4 Septembre. (Applaudissements à l’extrême-gauche et sur divers bancs.)

    Lorsqu’ils sont divisés, on fait contre eux Thermidor, Brumaire, le 2 Décembre et, après avoir réduit le peuple en esclavage, on fait Waterloo et Sedan. (Applaudissement sur les mêmes bancs.)

    Après avoir perdu la liberté, on détruit la paix et l’intégrité de notre patrie. »

    Ces paroles, nous les approuvons et nous faisons accuser M. Daladier par M. Daladier lui-même d’avoir voulu faire cette œuvre néfaste de division.

    En effet, monsieur le président du Conseil, le 20 août. dernier, vous avez attaqué la classe ouvrière pour détruire les quarante heures. Vous avez affirmé que le volume-or des revenus du travail était resté égal à celui d’avant guerre ; et vous avez ajouté que les revenus du capital et les revenus mixtes avaient diminué. Ainsi, vous avez cherché à dresser le pays contré la classe ouvrière.

    Vous avez voulu justifier la politique de rapacité du grand capital. (Applaudissements à l’extrême-gauche.) Vous avez voulu justifier la réduction du niveau de vie des travailleurs. Vous avez voulu justifier la grande pénitence pour les masses populaires.

    Nous n’avons pas besoin de formuler la condamnation de cette politique, vous l’avez faite vous-même, monsieur le président du Conseil.

    C’est vous qui avez dit, le 13 octobre 1935 :

    «  Le système de la grande pénitence est incompatible avec le prodigieux développement des forces de production qui caractérise les temps modernes. C’est dans l’accroissement du bien-être des masses et non dans la restriction de leurs moyens de consommation qu’il faut chercher le salut. » (Applaudissements à gauche interruptions à droite.)

    Ainsi donc, du point de vue économique, vous êtes jugé par vous-même. D’ailleurs les résultats sont là. (…)

    Ceux-là, on les connaît, monsieur le président, du Conseil, et on les connaît un peu grâce à vous.

    Oseriez-vous dire aujourd’hui que les 200 familles sont une invention de l’esprit ? (Applaudissements à l’extrême-gauche)

    Oseriez-vous dire maintenant que les 200 familles sont un mythe électoral comme l’affirmaient hier vos amis d’aujourd’hui? (Applaudissements à l’extrême-gauche communiste.)

    Vous rappelez-vous ces paroles, Monsieur le Président du Conseil :

    « Dans un pays de démocratie individualiste, ce sont deux cents familles qui par l’interpénétration des conseils d’administrations, par l’autorité grandissante de la
    banque qui émettait les actions et apportait le crédit, sont devenues les maîtresses indiscutables, non seulement de l’économie française, mais de la politique française elle-même »
    (Applaudissements à l’extrême-gauche communiste et sur divers bancs à gauche.)

    Avouez, Messieurs, que j’ai de bons auteurs.

    Mais ces deux cents familles ont-elles été supprimées par décret-loi ?

    Monsieur le ministre des Finances, je ne le pense pas, elles sont toujours là.

    Et ne sont-ce pas ces 200 familles qui ont réclamé d’abord et inspiré ensuite ces décrets-lois qui ont associé désormais les deux noms de messieurs Daladier et Reynaud ?

    Oui, ce sont les puissances d’argent, ce sont les deux cents familles, les maîtresses de la politique française ! (Applaudissements à l’extrême-gauche communiste et sur divers bancs à gauche.)

    Ce sont les forces, ténébreuses et immorales du grand capital qui ont imposé toutes les mesures d’injustice contre lesquelles se dresse la France laborieuse.

    Elles ont inspiré la destruction de la semaine de 40 heures, pour accroître le chômage-et dresser les ouvriers en concurrence les uns contre les autres, pour se servir de la misère des uns afin de diminuer les salaires des autres (Applaudissements à l’extrême-gauche.) (…)

    Vous êtes allé plus loin vous avez violé le droit syndical et le droit de grève inscrits dans la loi. (Applaudissements à l’extrême-gauche.)

    Devant votre politique de violence contre les travailleurs, vous êtes allé jusqu’à l’illégalité.

    Vous voulez gouverner par le mensonge et par la peur ; vous voulez vous présenter en sauveur de l’ordre qui n’a jamais été menacé que par votre politique de contrainte et de violence.

    Monsieur le président du conseil, quand on est sûr de l’approbation du pays, on ne gouverne pas comme cela. (Applaudissements à l’extrême-gauche.)

    Un gouvernement digne de la France pourrait obtenir tous les efforts de la part des travailleurs sans dresser les baïonnettes des fils contre les poitrines des pères.

    On a agi comme si on voulait faire haïr l’armée par le peuple, alors que l’armée n’est forte que si elle est entourée de l’affection du peuple. (…)

    On fait tout cela, messieurs) au moment où l’on réclame, en Italie, la Tunisie, la Corse, Nice, la Savoie, tandis que l’Allemagne ne renonce pas ses exigences coloniales.

    On utilise le micro contre les Français, pour mettre la classe ouvrière en accusation. Mais on se tait quand on insulte notre pays, quand on insulte ses institutions, quand on insulte sa culture et ses traditions. (Vives interruptions au centre et à droite.)

    On se tait quand les barbares nous ramènent aux mœurs du moyen âge, englobant dans une même persécution juifs et catholiques, protestants et libres-penseurs. On va même jusqu’à transposer chez nous plus ou moins les préjugés odieux du racisme. (Applaudissements à l’extrême-gauche.)

    Non, cette politique de soumission au grand capital, cette politique d’insolence, cette politique de platitude à l’égard du fascisme ne sort pas des profondeurs de la France des Droits de l’homme et du citoyen. (Applaudissements à l’extrême-gauche.)

    Aujourd’hui le devoir des républicains est net. Le devoir des communistes, des socialistes, des radicaux fidèles au programme du Front. populaire, sur lequel ils ont été élus en 1936, le devoir pour tous ces hommes-là est clair : en votant contre le gouvernement, ils se refuseront à être les otages de la. réaction. (Applaudissements à l’extrême-gauche.)

    Quant à nous communistes, en votant contre le gouvernement, nous lui dirons ce que pensent, dans les profondeurs du pays, tous ceux qui travaillent, tous ceux qui peinent et qui espèrent.

    Nous lui dirons « Allez-vous en ! Laissez la place à un véritable gouvernement républicain ! » (Applaudissements à l’extrême-gauche et à gauche.) »

    De ce fait, fin décembre 1938, le Parti Communiste Français considère toujours que le Front populaire est une réalité. Il cherche à le relancer en tentant artificiellement de relancer les radicaux. On est en plein suicide politique.

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    isolé et interdit (1938-1939)

  • Le PCF en quête éperdue de l’alliance avec les radicaux à la fin des années 1930

    Voici ce qu’on lit dans Pour le salut du pays, un manifeste du 8 juin 1937. C’est la thèse devenue fondamentale du Parti Communiste Français avec Maurice Thorez, c’est la « République » contre l’oligarchie.

    « Battue aux élections de 1936 par le suffrage universel dont le verdict républicain est confirmé à chaque élection partielle, la réaction veut s’opposer à la volonté légale du pays et, pour parvenir à ses fins, elle vise en premier lieu à briser l’union des forces de progrès, de liberté et de paix.

    Le Parti communiste, attaché de toutes ses forces au Front populaire, dont il s’honore d’avoir été l’initiateur, se dresse contre les prétentions des oligarchies financières.

    Ces forces occultes et malfaisantes voudraient imposer au pays de nouveaux sacrifices, alors que les gros possédants ne veulent pas remplir leur devoir envers la Nation. »

    C’est une ligne opportuniste de droite, qui se cristallise comme social-chauvinisme ou du moins le devrait, si le Parti Communiste Français ne se faisait justement alors rejeter par les centristes.

    On lit la même chose dans Union du Front Populaire pour l’application du programme, une déclaration commune du Comité Central et du Groupe parlementaire, du 15 juin 1937.

    On notera que cette déclaration est issue d’un « débat » sous la présidence de Marcel Cachin, ce qui met à égalité sur le plan juridique interne le Comité Central et le groupe parlementaire, ce qui est absolument inacceptable du point de vue communiste.

    Il y est dit la chose suivante principalement :

    « Le Comité central et le groupe communiste [parlementaire], réunis en séance commune, affirment leur attachement indéfectible au Front populaire du pain, de la paix et de la liberté.

    Dénoncent avec indignation les manœuvres et le chantage des oligarchies qui prétendent imposer au parlement et au gouvernement des mesures financières contraires à la volonté du peuple nettement exprimée en mai 1936 (…).

    Pour sa part, en présence de l’assaut furieux de la réaction, le Parti communiste se déclare prêt à prendre toutes ses responsabilités dans un gouvernement renforcé et constitué à l’image du Front populaire pour le salut de la France, de la démocratie et de la paix. »

    Le Parti Communiste Français fit un appel le 21 juin 1937 (« La volonté du pays ») et c’est le même souci de l’unité à tout prix :

    « Le Front populaire doit rester uni dans le pays et au Parlement pour poursuivre et développer son œuvre, pour tenir les promesses faites à la nation. »

    Une nouvelle déclaration commune (« Une seul programme) du Comité Central et du Groupe parlementaire eut lieu le lendemain ; il y est souligné que :

    « Le Bureau politique et le Bureau exécutif du groupe parlementaire communiste, réunis en commun le mardi 22 juin, déclarent qu’il n’est pas possible d’envisager d’autre gouvernement qu’un gouvernement de Front populaire. »

    Après avoir formulé une telle ligne, il est impossible pour le Parti Communiste Français de reculer.

    Et lorsqu’en 1938, les centristes rejettent le Parti Communiste Français, alors ce dernier n’a plus le choix : de manière mécanique, la seule chose cohérente qu’il peut exposer à partir de son propre point de vue est que les centristes… se trahissent eux-mêmes.

    La grande bataille du Parti Communiste Français en 1938 est ainsi de dire que les centristes devraient s’assumer pleinement et donc se tourner vers lui, au lieu de faire le contraire.

    Cela donne une relecture complète des radicaux, qui ne sont plus vus comme la bourgeoisie moderne de l’époque, franc-maçonne et libérale, mais comme le parti historique de la petite-bourgeoisie, alors que la base des principes communistes est que cette dernière n’est pas une classe en tant que telle.

    Les meetings, positions, analyses du Parti Communiste Français s’alignent totalement sur cette fiction alors, justifiant n’importe quel subjectivisme au nom d’une seule et même chose : la République française.

    Il y a ainsi trois meetings à Paris, avec 7 000 personnes, le 3 décembre 1938, qui servent dans les faits à exprimer le légitimisme. Maurice Thorez dit ainsi lors de l’un des meetings que :

    « Par notre union, nous obtiendrons l’abrogation des décrets-lois et le retour à une politique de progrès social, de démocratie et de paix conforme à la volonté du pays et aux intérêts de la France. »

    30 000 personnes sont au vélodrome d’Hiver le 10 décembre 1938 ; Édouard Daladier est dénoncé comme quelqu’un aux ordres des banques, qui impose des décrets-misère.

    Cependant tout se ramène aux yeux du Parti Communiste Français au fait que les radicaux se dévoient.

    Dans un long article pour les Cahiers du bolchevisme, la revue théorique du Parti, Jean Bruhat expose de la manière suivante cette interprétation erronée. Il dit en décembre 1938 dans ses Notes sur les traditions du radicalisme français et la politique de M. Daladier :

    « M. Daladier est président du Parti radical et radical socialiste. Mais le peuple de France ne confond point M. Daladier et le Parti radical (…).

    La politique de M. Daladier n’est pas conforme aux traditions radicales françaises que nous voulons très objectivement rappeler. Le Parti radical est le parti de la petite-bourgeoisie française, de cette petite bourgeoisie dont Maurice Thorez définissait ainsi les tendances [dans L’union de la nation française] : « La petite bourgeoisie commerçante et rurale hait le capital et surtout les banquiers, détenteurs du crédit ; mais elle croit à l’existence éternelle de la propriété et même à la possibilité de l’arrondir. »

    La tactique du grand capital est très claire. Utiliser les hésitations propres à la petite bourgeoisie pour séparer le Parti radical de la classe ouvrière. Or, quand le Parti radical se sépare de la classe ouvrière, c’est à lui-même qu’il porte un coup. Toute notre histoire le prouve – et avec quelle force ! »

    Suit une très longue analyse affirmant que les radicaux n’ont jamais voulu de compromission avec la droite ni d’ennemis à gauche, qu’ils ont toujours été tournés vers les réformes sociales.

    Ce qui est complètement faux dit ainsi : les réformes relevant de la modernisation du capitalisme. Les radicaux sont l’expression de la bourgeoisie moderniste, qui réforment la société pour mieux développer le capitalisme, et ils avaient simplement besoin des socialistes comme contre-poids aux forces monarchistes et cléricales, d’où leur image « de gauche » parfois.

    Et, de toutes façons, ils ont toujours été au cœur du gouvernement et du régime, utilisant principalement la franc-maçonnerie comme moyen de rendre le tout cohérent à travers les différents partis et les différentes tendances.

    On est là dans un idéalisme porté par la ligne opportuniste de droite de Maurice Thorez.

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