Léon Jouhaux, prix Nobel de la Paix en 1951

Lors de la constitution de la CGT-Force Ouvrière à son premier congrès, Léon Jouhaux est nommé président, un poste à portée symbolique. C’est capital pour la CGT-FO, afin de se prétendre la seule vraie CGT.

Léon Jouhaux en 1951

Pour l’aider en ce sens, il va y avoir un véritable appui international. Léon Jouhaux fut ainsi nommé vice-président du Bureau international du travail des Nations-Unies dès 1946 et surtout, en 1949, vice-président de la Confédération internationale des syndicats libres (CISL), qui unit tous les syndicats violemment anticommunistes et opposés par conséquent à la Fédération syndicale mondiale.

Cela lui vaudra le prix Nobel de la paix en 1951. Voici un extrait de son discours pour la remise de son prix :

« La C.G.T.-F.O., à la fin de 1947, ressuscita les traditions et l’esprit de notre vieille C.G.T. et dans des discours, des articles, des rapports, nous avons repris et précisé les solutions qu’elle avait, avec la F.S.I., offertes au monde pour le sauver.

Nous avons approuvé le Plan Marshall parce qu’il était une manifestation de solidarité internationale, qu’il s’offrait à toutes les Nations éprouvées sans aucune discrimination et que nous ne pouvions voir en lui, puisqu’il remettait aux Etats bénéficiaires le pouvoir de décider eux-mêmes de l’utilisation des crédits, l’expression d’une politique d’armement et de prestige.

Nous avons approuvé la propagande en faveur de l’unité de l’Europe, en soulignant que nous considérions cette unité comme un premier pas fait sur le chemin de l’unité du Monde. Elu Président du Mouvement Européen en tant que syndicaliste au mois de février 1949, j’ouvris au printemps suivant la Conférence Economique de Westminster en précisant notre sentiment:

«Il est normal, il est logique, il est conforme à l’esprit même de l’histoire que la classe ouvrière organisée participe activement à la construction de l’Europe. Elle a toujours proclamé qu’elle ne séparait pas, qu’elle ne pouvait pas séparer parce que c’eut été établir des barrières que les événements internationaux eussent balayé comme des fétus de paille, qu’elle ne voulait pas séparer la lutte pour son émancipation du combat constant pour le maintien de la paix.»

Il s’agit pour l’Europe de se construire et non de s’enfermer. Cette masse humaine qui dispose d’immenses ressources naturelles, dont les possibilités intellectuelles sont les plus grandes du globe, cette masse humaine ne veut pas s’isoler du reste du monde. Elle est prête à tendre une main fraternelle à tous ceux qui voudront s’associer à ses efforts: «l’Europe que nous bâtirons aura plus de portes et de fenêtres que de murs.»

En juillet 1950, dans une introduction aux rapports établis sur la Conférence sociale du Mouvement Européen, j’insistai encore sur son objectif de paix internationale et de justice sociale.

«Nous voulons faire de l’Europe une petite presqu’ile du vaste continent Eurasiatique ou depuis des millénaires, la guerre a été le seul moyen de résoudre les oppositions des peuples, une communauté pacifique, unie malgré et dans sa diversité pour une lutte ardente et constante contre la misère et toutes les souffrances et menaces qu’elle engendre. Nous ne voulons pas faire de l’Europe un camp plus retranché, plus étendu et mieux armé.»

Nous avons approuvé le Plan Schuman pour une Communauté Européenne de l’acier et du charbon. Peu de jours après la déclaration du 9 mai 1950, le 31 mai très exactement, traitant dans un journal de la Conférence de la C.I.S.L. sur le Statut de la Ruhr, j’était conduit à écrire: «les promoteurs du Combinat ne peuvent avoir pour objectif … qu’une unification progressive de l’Europe. Or, cette unification ne peut pas être une fin en elle-même.

Le but final, le but essentiel à atteindre, le seul valable est d’accroître le bien-être des travailleurs, de les faire participer plus équitablement à la répartition des produits du travail collectif, de faire de l’Europe une démocratie sociale et d’assurer la paix que veulent tous les hommes de toutes les races et de toutes les langues en prouvant que les démocraties sont capables de réaliser la justice sociale dans l’organisation rationnelle de la production sans sacrifier la liberté et la dignité des individus. »

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