La sixième séquence de la grande guerre patriotique: la prise de Berlin

À partir des dix coups de Staline, l’armée rouge est un rouleau compresseur que plus rien n’arrête. Pour la ville de Königsberg, 580 000 soldats des armées nazies font face à 2,6 millions de soldats soviétiques, c’est l’écrasement, certaines poches étant sciemment encerclées sans être attaquées, afin d’épuiser l’ennemi.

Au début de l’année rouge 1945, l’armée est à Varsovie.

L’offensive soviétique de janvier à mars 1945

En une dernière poussée, l’armée rouge arrive à Berlin en avril. Ses effectifs sont de 2,5 millions de soldats, avec 6 250 chars et 7 500 avions (les armées nazies disposaient lors de l’opération Barbarossa de 3 millions de soldats, 3 600 chars et 2 258 avions). La ville capitule le 2 mai.

Le 8 mai, l’Allemagne nazie capitulait, c’est-à-dire le 9 mai pour l’URSS en raison du décalage horaire.

35,5 millions de soldats soviétiques auront participé à la guerre, dont 490 000 femmes. Autour de 12 millions d’entre eux ont perdu la vie, dont plus de trois millions dans les camps nazis.

Le titre de Héros de l’Union soviétique a été décerné à 11 681 soldats, 2 532 personnes recevant l’Ordre de la Gloire, pour courage exceptionnel.

14,6 millions de civils ont perdu la vie, 2,2 millions de personnes étant mortes dans le cadre du travail forcé en Allemagne, 7,4 millions étant exterminées, dont 1,3 millions car Juives.

1710 villes ont été pillées par les armées nazies, ainsi que plus de 70 000 villages. 32 000 usines ont été détruites, 98 000 fermes collectives et 2 890 stations de machines et de tracteurs pillées.

En 1944, 60 000 soldats de l’armée nazie défilaient à Moscou, mais comme prisonniers de guerre. La victoire, en 1945, revenait à l’URSS de Staline.

La cinquième séquence de la grande guerre patriotique: les dix coups de Staline

L’effondrement au Sud-Ouest des armées nazies assit celui au Nord. La ville de Leningrad, qu’Adolf Hitler entendait entièrement raser avec l’appui finlandais, sortit le 27 janvier 1944 d’un siège de 872 jours, avec un blocus terrible. Un million d’habitants est mort de faim.

La ville était cernée par la Finlande au Nord, par les armées nazies au sud, alors qu’une poche se maintenait isolée à l’Ouest et qu’une autre poche existait à l’Est, elle seule reliée au reste de l’URSS.

Tanya Savicheva, né le 23 janvier 1930, écrivit un petit journal de bord ; elle décédera de tuberculose après l’évacuation, le 1er juillet 1944. Sur l’un des feuillets on lit : Jenya est morte le 28 décembre à midi, 1941

Grand-mère est morte le 25 janvier à trois heures, 1942

Leka est morte le 17 mars 1942, à cinq heures le matin, 1942

Oncle Vasya est mort le 13 avril à deux heures le matin, 1942

Oncle Lesha le 10 mai, à quatre heures de l’après-midi, 1942

Maman le 13 mai à 7h30 le matin, 1942

Les Savichev sont morts

Tout le monde est mort

Il ne reste que Tanya

Un exemple d’héroïsme se déroula à l’Institut de production végétale, qui disposait d’un très grand fond de graines spécialisées mais que les employés refusèrent catégoriquement d’utiliser pour se nourrir, afin de servir la science. 28 d’entre eux moururent de faim.

La libération de Leningrad rentre dans le cadre d’une vaste offensive menée sur tout le front, divisée en dix opérations qui furent surnommées les dix attaques de Staline, celui-ci ayant employé l’expression des « dix oups » lors du 27e congrès des députés du Soviet de Moscou, en novembre 1944.

L’URSS dispose en janvier 1944 de 6,5 millions de soldats, de 5 600 tanks, de 8 800 avions, contre 4,3 millions de soldats aux forces de l’Axe, 2 300 tanks, 3 000 avions. L’Allemagne nazie a perdu, alors que de toutes façons les États-Unis et les Britanniques, avec les Français, ont également débarqué en Sicile en juillet 1943, prolongeant par le débarquement en Normandie en juin 1944.

Les dix coups emportèrent littéralement les armées nazies. L’opération Bagration marqua un parcours de 600 km sur une ligne de front de 1000 km, en deux mois, provoquant le plus grand désastre qu’ait connu l’armée allemande, avec pratiquement 300 000 tués et toute l’armée nazie du centre structurellement anéantie.

Les opérations soviétiques d’août à décembre 1944

En août 1944, la route menant à Berlin était ainsi ouverte ; le nom de l’opération faisait référence au prince géorgien Pyotr Bagration (1765-1812), qui fut un général russe lors des guerres napoléoniennes.

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La quatrième séquence de la grande guerre patriotique: réussite de la contre-offensive

Les armées nazies avaient été repoussées dans leur offensive du Caucase, mais pas anéanties : l’encerclement avait échoué. La réponse nazie fut l’opération citadelle, avec 900 000 soldats, 2000 avions, 2700 chars, 10 000 canons, soit sa plus grande mobilisation historique. Il s’agissait, dans le prolongement des initiatives passées, de chercher une bataille décisive.

Cependant, l’URSS n’était plus simplement dans une position de contre-offensive cette fois. Elle avait énormément étudié tous les événements depuis 1941 et entièrement modernisé sa lecture des opérations d’envergure. Le rapport de force avait également changé. L’URSS mobilisa en effet contre l’opération citadelle 1 900 000 soldats, 2700 avions, 3300 chars, 19 300 canons.

L’URSS se prépara donc à une défense extrêmement bien élaborée pour faire face à l’offensive nazie. Cela donna la plus grande bataille de chars de l’Histoire, ainsi que la plus grande bataille aérienne, à égalité avec la bataille d’Angleterre.

Si les armées nazies réussirent leur pénétration visant à former un étau, les armées soviétiques au prix d’importantes pertes firent craquer le front, au nord avec l’opération Koutouzov et au sud avec l’opération Roumiantsev. Les deux opérations ont leur nom faisant référence à des hauts responsables militaires russes et reflètent la stratégie soviétique.

Le général en chef des armées de Russie Mikhaïl Koutouzov (1745-1813) fut celui qui organisa la contre-offensive à l’invasion napoléonienne et le maréchal Piotr Alexandrovitch Roumiantsev (1725-1796) fut notamment actif militairement en Ukraine.

Il faut bien saisir ici que, tactiquement, ce qu’on appelle en général la « bataille de Koursk » fut une victoire tactique pour les armées nazies, qui essuyèrent cinq fois moins de perte. Mais les allusions à Koutouzov et Roumiantsev montrent que l’URSS raisonnant en termes d’opération et à ce titre, ce fut un triomphe soviétique.

Forcées à la défensive, les armées nazies cherchèrent à faire de la Dniepr un barrage naturel.

Cependant, la contre-offensive soviétique se prolongea avec l’opération Chernihiv-Pripyat comme front central, l’opération Sumy-Pryluk comme front Voronej, l’opération Poltava-Kremenchug comme front des steppes.

Ces trois fronts s’étalaient sur 700 km de long et l’armée rouge l’enfonça sur 250-300 km vers l’Ouest en un mois. Les armées nazis pratiquèrent systématiquement la politique de la terre brûlée lors de leur retraite, menant d’innombrables crimes, ce qui força l’armée rouge à intervenir d’autant plus vite, quitte à perdre de nombreuses forces.

Alors que la ligne de front faisait 1400 km, 2 650 000 soldats, 2400 tanks et 2850 avions se précipitèrent sur une ligne de 300 km pour franchir la Dniper en force. Les armées nazies avaient fait de l’autre rive du fleuve la ligne Panther-Wotan, avec des centaines bunkers, des fossés antichars, des barbelés, des fortifications, etc.

Les armées nazies ne purent tenir le choc et l’élan de l’armée rouge alla jusqu’à Kiev, définitivement libérée à la fin de 1943.

L’offensive soviétique de juillet à décembre 1943

Dans les premiers mois de 1944, de multiples offensives se concrétisèrent pour aller encore plus à l’Ouest, écrasant les forces allemandes, roumaines et hongroises, infligeant les coups humains et matériels les plus forts depuis Stalingrad.

L’offensive soviétique de décembre 1943 à avril 1944

Les armées nazies cherchèrent à tout prix à maintenir le front, faisant venir de l’Ouest pas moins de 550 000 soldats et 853 tanks. Mais il était trop tard : la contre-offensive s’était transformée en rouleau compresseur, tout le sud-ouest de l’Union Soviétique était reconquis et déjà la Roumanie se préparait à abandonner l’Allemagne nazie.

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La première séquence de la grande guerre patriotique: l’invasion allemande

Le problème soviétique était très simple à comprendre. Le personnel militaire était issu de la révolution russe et ses traditions militaires étaient fortes, mais ne touchant pas à tous les domaines militaires, en particulier les grandes opérations s’appuyant sur du matériel moderne. Or, ce matériel moderne n’existait qui plus est que depuis récemment, avec l’industrialisation de l’URSS.

Du côté allemand, on avait la situation inverse à ce niveau. Les traditions militaires avaient été puissamment ébranlées par la défaite de 1918 et le national-socialisme visait justement à les régénérer. Inversement, il y avait une immense expérience accumulée depuis pratiquement cent ans, dans une continuité complète tant pour les écoles militaires que pour les formations effectuées.

Cela explique les frictions au sein de l’armée allemande entre le courant directement issu des traditions et celui ayant permis de régénérer celle-ci par l’offensive. L’unification se fit cependant dans la logique expansionniste, avec une Allemagne nazie économiquement bien plus développée alors que l’URSS.

L’Europe sous occupation des forces de l’Axe juste avant l’opération Barbarossa

C’est là la base pour l’opération Barbarossa commencée le 22 juin 1941 et visant à la destruction rapide de l’URSS. Furent mobilisées 3,8 millions de soldats, 4300 chars, 4389 avions, dans une offensive d’une dimension jamais vue encore.

Le calcul de l’armée allemande était simple : il fallait profiter de la rapide défaite française pour empêcher l’URSS d’arriver à un niveau militaire conséquent. C’était un retournement de situation totale, facile à comprendre.

L’opération Barbarossa avait une immense envergure. Il y avait les objectifs stratégiques du blé ukrainien et du pétrole du Caucase, ainsi que la liquidation du communisme, l’opération impliquant le meurtre systématique de tous les commissaires politiques et de tous les cadres du Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik).

Le prolongement de l’opération était censé ensuite permettre l’expulsion des populations slaves vers l’Est et une colonisation allemande. L’extermination de la population juive était quant à elle réaliser de manière immédiate et systématique, avec la Shoah par balles.

Ce qui fut nommé le Blitzkrieg – la guerre-éclair – et qui devait amener la victoire par la supériorité du matériel militaire et de la technique militaire, sembla réussir dans un premier temps, puisque un million de soldats soviétiques fut balayé dans l’offensive, l’opposition étant totalement dépassée tant techniquement que sur le plan du matériel.

Seulement, il arriva aux armées nazies la même chose qu’à celles de Napoléon. Le territoire était trop vaste : 800 km avaient été parcourus, 1 500 000 km² de territoires occupés. Les liaisons entre les unités trop compliquées à gérer, sans parler de l’approvisionnement à mettre en place.

L’invasion avait coûté la moitié des chars et des avions et sur les six premiers mois, 750 000 soldats allemands avaient perdu la vie. Le chiffre montera à 1,3 million six mois plus tard. Il ne faut ainsi pas considérer abstraitement que ce serait l’hiver qui aurait provoqué l’enlisement allemand.

L’URSS a de son côté perdu 1,5 million de soldats tués au combat et 4 millions faits prisonniers, dont 2 millions seront assassinés. La majeure partie de la Russie européenne était occupée, paralysant donc la zone la plus industrialisée. Mais si le premier échelon stratégique avait été écrasé, le second était là et le troisième se renforçait continuellement.

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La notion de «grande guerre patriotique» et la bataille de Borodino

L’URSS de Staline a appelé la guerre contre l’Allemagne nazie la « grande guerre patriotique ».

L’expression fut initialement employée par l’historien Alexander Mikhailovsky-Danilevsky pour désigner la résistance à l’invasion des armées napoléoniennes, dans son travail en quatre volumes intitulé Description de la guerre patriotique de 1812.

Vassili Verechtchaguine, Napoléon à Borodino [en 1812], 1897

Après 1917, l’expression fut mise de côté, avant de revenir à la fin des années 1930, les historiens soviétiques considérant que c’était du sociologisme vulgaire que de réduire cette guerre du côté russe à une guerre de rapine des classes dirigeantes russes face à un Napoléon ne faisant que, mécaniquement et sans le savoir, protéger les acquis de la révolution française.

L’historien soviétique Evgeny Tarle réactiva ainsi l’expression en 1938, dans son ouvrage L’invasion de la Russie par Napoléon en 1812, qui fut par ailleurs précédé d’une biographie de Napoléon deux ans plus tôt. Il y soulignait qu’en fait, cette guerre napoléonienne était spécifique, car elle n’était pas portée par une logique défensive préventive, mais bien une dynamique expansionniste de la part des classes dominantes en France alors.

Concrètement, Napoléon cherchait en effet à se marier avec une princesse russe pour stabiliser sa dynastie ; devant deux échecs, il se maria à une princesse autrichienne et visa à une hégémonie sur la Russie en l’affaiblissant, afin de renforcer le blocus continental anti-britannique et même de viser les Indes.

Il chercha initialement à ce que se déroulent des combats tout à l’Ouest de l’empire russe, mais les armées russes se replièrent. Finalement, après une longue et inédite tergiversation, Napoléon joua le tout pour le tout en visant la ville de Moscou pour anéantir l’empire russe.

Alexeï Kivchenko, Conseil de guerre à Fili (1880)
C’est à ce conseil de guerre que fut décidé d’abandonner Moscou à Napoléon.
Comte von Bennigsen [officier allemand servant l’empire russe] : Faut-il abandonner sans combat l’antique et sainte capitale de la Russie ou faut-il la défendre?
Mikhaïl Koutouzov : L’antique et sainte capitale de la Russie! Permettez-moi de vous dire, Excellence, que cette question n’a pas de sens pour un russe. On ne peut poser une pareille question et elle n’a pas de sens. La question pour laquelle j’ai demandé à ces messieurs de se réunir est une question militaire. C’est la suivante : « Le salut de la Russie est dans son armée. Est-il préférable de risquer la perte de l’armée et de Moscou en acceptant la bataille ou de livrer Moscou sans combat? ». Voilà la question sur laquelle je désire connaître votre opinion.

Au début des années 1950, l’œuvre d’Evgeny Tarle fut cependant critiquée pour son manque de prise en considération de l’aspect populaire de la guerre du côté russe, de l’intense activité militaire dirigée par Mikhaïl Koutouzov, de l’impréparation française à agir sur de vastes territoires. Evgeny Tarle décéda toutefois avant de pouvoir publier la nouvelle version de son ouvrage.

Entre-temps, la seconde guerre mondiale fut dénommée grande guerre patriotique du côté soviétique. Vyacheslav Molotov parla le 23 juin 1941, dans un discours à la radio, d’une guerre sur le sol national, l’éditorial de la Pravda du lendemain parlant de « la grande guerre patriotique du peuple soviétique contre le fascisme allemand ».

Enfin, un décret du présidium du Soviet suprême officialisa l’expression, le 20 mai 1942, en instituant un ordre militaire : l’Ordre de la Guerre patriotique.

Pour bien comprendre le parallèle avec l’invasion nazie, il faut prendre en considération tant la forme que le fond. Le but de l’invasion napoléonienne était le coup de force, l’effondrement russe sous des coups de boutoirs bien précis, dans une vaste offensive. La méthode nazie était la même et connut exactement la même réponse.

Plan de la bataille de Borodino, en septembre 1812

Napoléon considéra avoir ainsi gagné la bataille meurtrière de la Moskova, puisque fut prise le village de Borodino. Le chemin de Moscou était ouvert. Mais, inversement, du côté russe cette bataille, appelée bataille de Borodino, était également considérée comme une victoire, qui indiquait le caractère invincible de la Russie.

Peter von Hess, La bataille de Borodino, 1843

Les armées russes avaient en effet infligé des coups durs aux Français, elles s’étaient repliées avec leurs hommes et leur matériel, elles pouvaient disposer de renforts. On a ici le principe de la retraite des hommes et du matériel en profitant d’un vaste repli stratégique, pour enliser et faire s’effondrer l’ennemi. C’est le contraire exact du principe de la victoire décisive.

Hitler, comme Napoléon, chercha perpétuellement cette victoire décisive, qu’il ne trouva jamais, les armées soviétiques rééditant le principe de 1812.

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Les notions fondamentales de la grande guerre patriotique

Pour comprendre la guerre menée par l’URSS dirigée par Staline contre l’Allemagne nazie, il faut connaître plusieurs fondamentaux, sans quoi on passe totalement à côté de la démarche employée.

Il faut en effet saisir le principe d’art opérationnel produit par les théoriciens militaires soviétiques dans les années 1920, aboutissant au concept de guerre en profondeur. Cela exige qu’on connaisse l’expérience russe de la guerre napoléonienne, qui fut justement appelée grande guerre patriotique, expression reprise précisément pour la guerre de 1941-1945 en raison du strict parallèle existant.

Il est possible de prendre les échecs, un jeu particulièrement populaire en Russie, pour saisir adéquatement cette compréhension soviétique de la guerre, qui se fonde sur le matérialisme dialectique, alors à son étape marxiste-léniniste.

Aux échecs, il y a un objectif stratégique : la prise de contrôle du roi adverse.

Cette prise de contrôle s’effectue par une menace associée à l’impossibilité pour le roi de se déplacer pour y échapper.

Ce qu’on appelle tactique consiste en les choix élémentaires d’action. Par exemple, le cheval étant le seul à pouvoir sauter au-dessus des pièces, on peut commencer à le sortir dès le départ afin de pouvoir profiter de son action.

Ce qu’on appelle art opérationnel est la combinaison d’éléments tactiques.

La défense dite ouest-indienne consiste par exemple à sortir le cheval, avancer un pion pour permettre d’avancer le fou qui protège le cheval et menace potentiellement tout une ligne. On ajoute à cela le « roque », qui permet d’intervertir d’un seul coup les emplacements du roi et de la tour, au prix du décalage d’une case. On a alors une solide défense à la suite de toute une opération de tactiques combinées.

Il y a ensuite la question de la guerre en profondeur. L’idée est la suivante : il ne suffit pas d’avoir de bons éléments tactiques correctement associée de manière opérationnelle. Il faut également avoir en vue le long terme. Dans ce cadre, un échec apparent à court terme peut s’avérer contribuer très fortement au succès par la suite.

Ici, le cheval est placé de telle manière à se sacrifier. C’est une perte à court terme, un déséquilibre en termes de pièces essentielles par rapport à l’adversaire, mais l’idée est de déstructurer toute la défense au moyen de cette action. Si le cheval est effectivement pris, les noirs se retrouvent dans une posture catastrophique plusieurs coups après, leur défense étant désorganisée.

Ces différents aspects sont à maîtriser pour comprendre les modalités soviétiques de la grande guerre patriotique. Sans cela, on ne peut pas du tout comprendre les choix soviétiques et on aboutit à des fantasmes explicatifs.

Le film Stalingrad de Jean-Jacques Annaud, sorti en 2001, reprend ainsi les idées totalement fausses d’une armée rouge utilisant des « vagues humaines » comme sacrifices pour aller à la victoire, avec à l’arrière des commandos exterminant ceux refusant d’avancer.

C’est une expression directe d’une incompréhension complète de l’art opérationnel soviétique et du principe de guerre en profondeur.

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Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1939-1953)

Le tableau suivant présente les données pour la période de 1939 à 1953. On notera qu’à un moment il n’y a plus d’exécutions, l’URSS considérant qu’elle avait suffisamment avancé dans la construction du socialisme pour avoir dépassé la peine de mort. Cela fut remis en cause face à l’offensive de l’espionnage épaulé principalement par les États-Unis.

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de l’État de l’URSS socialiste

Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1937-1938)

Le tableau suivant présente les données de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS pour les années 1937-1938. Celles-ci ont été décrites comme celles de « la grande terreur » par les historiens bourgeois.

En réalité, il s’agit d’une vaste opération de liquidation des restes de l’ancienne société cherchant à se revigorer dans la société soviétique, jouant le tout pour le tout.

La cible a pour cette raison constitué en les anciens officiers tsaristes, les anciens membres du clergé, les anciens bandits, voleurs, contrebandiers, etc., qui continuent leurs activités, ainsi que les koulaks ayant fui les campagnes collectivisées.

En 1937, il était clair que l’appareil de sécurité d’État avait été à la traîne dans le combat contre le sabotage et l’espionnage, ayant été en retard sur les initiatives du Parti à ce niveau. Lors de la session du Comité Central du PCUS(b) en février-mars 1937, cela apparut comme une évidence.

Le NKVD se focalisait à 80 % contre les crimes relevant en pratique de la police (légers vols, petits crimes, vandalisme, etc.) et avait raté la confrontation avec la contre-révolution, alors qu’avec les immenses succès dans la construction du socialisme en URSS, les ennemis de classe étaient passés à la tactique du « sabotage tranquille ».

Cela exigea une vaste initiative, qui par ailleurs frappa le NKVD lui-même : 2 hauts cadres furent arrêtés en 1936, 71 en 1937, 107 en 57, 3 en 1940.

Quant à la vague de répression de la contre-révolution de 1937-1938, elle concerna au total autour de 1,5 millions de personnes, dans une opération ayant sidéré les commentateurs bourgeois de par la capacité d’intervention de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS.

Celui-ci avait exécuté 1118 personnes en 1936 et procéda à l’application de cette mesure suprême pour 353 074 personnes en 1937 et 328 618 personnes en 1938.

Les éléments les moins actifs des éléments anti-sociaux ciblés furent envoyés dans les camps de travail. En 1940, il y avait 53 camps dépendant de l’administration dénommée Gulag, avec 1,3 million de prisonniers.

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Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1921-1929)

Le tableau suivant présente les données pour la période de 1921 à 1929, c’est-à-dire celle de l’instauration de l’appareil de sécurité d’État à la fin de la guerre civile jusqu’à la fin de la première période de sa structuration.

On peut voir que la démarche de la guerre civile se prolonge tout au long des années 1920, avec des condamnations à mort.

On remarque aussi l’émergence de condamnations liées au NKVD, notamment de la troïka, signifiant une intervention en urgence.

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L’appareil de sécurité d’État et la mise en place des camps de travail en URSS socialiste

En raison de la place du travail dans l’idéologie communiste, l’emprisonnement était lié au fait de devoir travailler pour se transformer pour contribuer à la société que le condamné avait combattu de par son comportement.

L’instauration des camps de travail datent d’une résolution du Bureau Politique du Comité Central du PCUS(b) du 27 juin 1929 « Sur l’utilisation du travail des criminels condamnés ». C’est l’OGPU qui était chargé de l’organisation.

Initialement, les camps devant être formés devaient avoir une capacité d’accueil totale de 50 000 places, dans des régions éloignées devant être développées économiquement.

L’intensité de la lutte des classes, notamment par rapport aux paysans riches, les koulaks, modifia la donne et au premier janvier 1930, les camps créés accueillaient 180 000 personnes.

Le travail constitua à l’origine en le déboisement – comme soutien à des entreprises existantes – et rapidement fut mis en place le projet de canal de la mer Blanche. Long de 227 kilomètres, il fut construit en vingt mois, entre 1931 et 1933 par 126 000 prisonniers au total, dont environ 10 % moururent (plus de 300 000 selon la propagande anticommuniste).

Le 11 novembre 1931, le Bureau Politique du Comité Central du PCUS(b) mit en place la Dalstroi (Construction du grand Nord) pour le développement des mines d’or, qui employèrent 36 000 prisonniers ; le 30 septembre 1932 il décida de la construction d’un canal entre la Volga et la rivière de la Moskova, qui employa 196 000 prisonniers, puis le 23 octobre 1932 d’une voie ferrée en Extrême-Orient, la Magistrale Baïkal-Amour (la BAM).

Dans ce dernier cas, le Bamlag (Camp de correction par le travail de la voie ferrée Baikal Amour) rassembla à son pic en 1938 201 000 personnes ; l’Amurlag (Camp de correction par le travail de voie ferrée de l’Amour) qui lui succéda était à son pic constitué de 125 000 personnes la même année.

L’un des prisonniers du Bamlag fut Constantin Rokossovski ; condamné en 1937, il fut finalement innocenté en mars 1940.

Constantin Rokossovski avait participé à la guerre civile suivant la révolution russe, recevant en 1921 l’Ordre du Drapeau Rouge. Il joua par la suite un grand rôle dans la seconde guerre mondiale, notamment comme commandant de la 16e armée dans la défense de Moscou, comme commandant de la 65e armée (4e armée de chars), de la 24e armée et de la 66e armée dans la défense de Stalingrad, comme commandant du Front central pour la bataille de Koursk.

Il fut enfin l’un des grands stratèges de l’Opération Bagration, offensive soviétique sur un front de mille kilomètres en 1944 avec 800 000 hommes, 553 blindés et 839 avions.

Il devint maréchal de l’URSS, puis de par ses origines polonaises ministre de la défense de la Pologne et maréchal en Pologne, avant d’être démis de ses fonctions à la mort de Staline, renvoyé en URSS dans des postes subalternes.

En octobre 1932, l’OGPU organisa également une entreprise d’État dite Ukhta-Pechora afin de développer les mines de charbon et la production de pétrole du bassin de Pechora, dans le grand Nord. Elle employa 21 000 prisonniers.

La démarche se généralisa, avec par exemple 35 000 prisonniers du camp de Temnikovo produisant du bois pour Moscou, 43 000 prisonniers du camp de Svir faisant la même chose pour Leningrad.

D’un côté, l’intérêt économique du Gulag était indéniable. Il permettait la mise en place de projets s’ajoutant à l’industrialisation du pays.

En juin 1935 est ainsi formé le Norilag, chargé de l’exploitation minière de cuivre et de nickel à Norilsk en Sibérie, puis du développement de la région en général. Le camp avait 1200 prisonniers en 1935, avant de s’élargir pour en accueillir 9 000 en 1937, 72 500 en 1951. Au total, 400 000 personnes passèrent à un moment par ce camp.

De l’autre, il faut saisir ici que le travail des prisonniers était peu efficace, élémentaire, le plus souvent.

De plus, le NKVD menait une tâche politique et c’était clairement l’aspect prioritaire de son activité. Le Gulag devait faire du mieux qu’il pouvait, mais en aucun cas les opérations du NKVD ne dépendaient des exigences économiques.

Ainsi, alors qu’en janvier 1939, il y a 350 000 personnes en prison et un million dans les camps de travail, le Gulag était particulièrement affaibli dans ses capacités d’organisation, en raison de sa dépendance aux initiatives du NKVD.

Le déclenchement de la seconde guerre mondiale fut alors la source d’une nouvelle impulsion : 14 % des investissements centraux relevèrent alors du NKVD, afin de parer à l’urgence de la mise en place de nouvelles infrastructures.

Furent mises en place, en Extrême-Orient et dans le Nord du pays, des canaux (Volga-Baltique, Dvina septentrionale pour une liaison entre la Baltique et la mer blanche avec la mer Caspienne), des ports, des stations hydro-électriques, la production de métaux comme avec le Severonikel dans la région de Mourmansk ou la ville de Jezqazğan formée au Kazakhstan.

L’invasion allemande accéléra le processus, avec de nouvelles tâches assignées aux prisonniers, telle en 1941 la construction ou la rénovation de 251 pistes d’atterrissage militaires.

Cela s’accompagne d’une réorganisation du Gulag. Ainsi, en 1941, 420 000 prisonniers furent libérés plus tôt que prévu, tout comme 157 000 autres en 1942 et 1943 qui pouvaient être appelés à l’armée et n’avaient été condamnés que pour des motifs mineurs.

Cela impliquait également des conditions d’existence plus difficile pour les prisonniers restants. De 1941 à 1945, 1 005 000 prisonniers décédèrent dans les camps de travail.

Inversement, il y avait aussi un nouvel afflux, avec 400 000 prisonniers, composés de membres relevant de nationalités posant problème car leur pays d’origine était en guerre avec l’URSS (Allemands, Finlandais, Roumains). 220 000 d’entre eux travaillèrent dans les institutions du NKVD, le reste pour les commissariats du peuple.

Finalement, dans la seconde moitié de 1945, il n’y eut plus que 750 000 prisonniers capables de travailler réellement dans le système du Gulag. Le XIXe congrès du Parti, annonçant que le socialisme avait triomphé, impliquait également sa fermeture.

Laurenti Beria, à la tête du ministère des affaires intérieures qui avait intégré en son sein le MVD, envoya un mémorandum en mars 1953 pour faire passer les entreprises industrielles et de construction aux ministères concernés. Il en alla de même pour les entreprises du secteur agricole en mai.

Un million des 2,5 millions de prisonniers fut également amnistié au mois de mars, alors que les camps et colonies pénitentiaires passèrent de l’appareil de sécurité d’État au ministère de la justice.

Le contexte était cependant celui de l’offensive révisionniste transformant l’URSS en social-impérialisme, ce qui modifia l’ensemble de la réalité économique, sociale et culturelle du pays.

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de l’État de l’URSS socialiste

La supervision par l’appareil de sécurité d’État en URSS socialiste

De par la construction du socialisme, les activités criminelles s’asséchaient d’elles-mêmes dans la société ; il y avait moins de crimes en 1935 dans toute l’URSS que dans la seule ville américaine de Chicago.

Cependant, les réseaux criminels s’entremêlaient avec la contre-révolution. Cela correspond tout à fait à l’affirmation soviétique des deux sociétés : à côté de la société socialiste, il y avait les éléments hostiles en général.

Ainsi, sur la ligne ferroviaire de Tomsk, rien que pour les dix premiers mois de 1935, il y eut 5 972 « incidents », avec des soucis techniques significatifs pour 166 locomotives, 38 wagons de passagers, 1 256 wagons de fret. Cela provoqua 59 décès, 119 blessés et 62 kilomètres de rails avaient été endommagés

C’était une guerre anti-soviétique toujours plus insidieuse, épaulée par les pays capitalistes de manière forcenée.

Or, la supervision de la situation de la société par l’appareil de sécurité d’État était délicate en URSS socialiste initialement, de par le manque de moyens.

Ainsi, la police – en fait la milice ouvrière-paysanne – était financée par les budgets des soviets locaux ou de districts, ce qui impliquait des ressources plus que minimes.

En 1930, il n’y avait en République socialiste soviétique de Russie qu’un nombre très restreint de policiers. 53 000 étaient dédiés à la protection des entreprises, 33 563 étaient en tant que tels chargés de l’ordre public, dont 12 887 dans les campagnes, alors que 4441 étaient des enquêteurs. C’était là quatre fois moins de policiers qu’en 1913 dans la Russie tsariste.

Même une ville comme Moscou avait seulement un policier pour 750-1000 habitants, un nombre extrêmement faible (3,5 fois moins que la France en 2019).

A Novossibirsk, qui passa de 146 000 à 180 000 habitants entre 1930 et 1931, il n’y avait que 276 policiers en 1930, 197 en 1931. Dans la ville la plus importante des campagnes à l’ouest de Novossibirsk, Bisk, il y avait 69 policiers pour 53 000 habitants.

A Novokouznetsk, à 360 kilomètres de là, le nombre de policiers passa entre 1930 et 1931 de 24 à 38, la ville de 28 000 à 170 000 habitants.

A cela s’ajoute que seulement le quart des policiers était physiquement au point, les très faibles salaires n’attirant pas du tout. Il faudra attendre le début des années 1930 pour voir une véritable modification en profondeur, le budget de la police passant d’ailleurs à un organisme national en 1932.

Le nombre de policiers passa à 98 000 à la fin de 1932, 124 000 à la fin de 1934, 138 000 en 1937, 182 000 en 1938 et 213 469 en 1940. La police s’occupait désormais également des trains et disposait d’unités spécialement consacrées aux crimes économiques.

L’ossature de l’appareil de sécurité d’État reposait ainsi bien davantage directement sur les services de répression de la contre-révolution que sur la police, qui de toute façon ne pouvait se confronter à des réseaux organisés utilisant la clandestinité.

Eu égard à l’application du droit soviétique, l’appareil de sécurité d’État – dont dépendait la police, par ailleurs – disposait donc de modes d’organisation très particuliers selon les besoins ; ses membres possédaient une réalité active extrêmement différente.

Les résidents continuaient leurs propres activités en tant que responsables dans une entreprise ou à l’armée, tout en servant d’interface. Les agents infiltraient les opposants. Les agents spéciaux sont des spécialistes soit de l’économie, de l’industrie, en sciences, etc. devant vérifier le travail des entreprises, éviter les sabotages, etc., soit des spécialistes quant au crime spécialisé (des pickpockets aux cambrioleurs, etc.).

L’appareil de sécurité d’État tenait un registre concernant la qualification des opposants, dont voici les principaux exemples.

AS – éléments anti-soviétiques

B – blancs, pour les participants à la guerre civile du côté blanc

PR – antagonistes, désignant les membres des partis politiques avant 1917

KR – contre-révolutionnaires

TS – les éléments liés au clergé

S – les religieux prônant la dissidence

P – les insurrectionnels

N – les nationalistes

sI – en liaison avec des étrangers (que ce soit le personnel d’ambassade ou des correspondants)

ShP – les espions

T – les terroristes

D – les diversionnistes

Prav – les éléments droitiers dans le Parti (boukharinistes)

Tr – les trotskystes

F – les fascistes

H – les éléments pro-hitlériens

B – les soutiens de Bandera en Ukraine

Vl – les soutiens de Vlassov

ns – les serviles vis-à-vis de la bourgeoisie

Cette liste amène des individus à être « qualifiés ». Cela ne préjuge pas d’un dossier qui se fait en plus, par d’autres. Il y a deux niveaux : la qualification en général d’une personne, un dossier directement consacré à lui, le groupe auquel il participe, les personnes proches d’une manière ou d’une autre.

Cela permettait une véritable cartographie du pays. Un passeport interne et un système d’enregistrement local fut organisé de manière générale par ailleurs au début de 1933. Il faut néanmoins bien voir qu’une telle cartographie se situe dans un contexte de lutte de classes acharnée.

Ainsi, 1 802 392 koulaks et leurs familles avaient été bannis dans des endroits précis en 1930-1931.

En 1932 seulement 1 317 022 d’entre eux avaient obéi à cette consigne, les autres étant partis sans qu’on sache trop où, exigeant des campagnes de répression pour aller les récupérer.

Ces campagnes de répression ciblée firent littéralement halluciner la bourgeoisie mondiale de par sa capacité à avoir un impact généralisé. Ainsi, en mai 1935, le décret sur les éléments socialement hostiles aboutit à une série d’opérations et 266 000 personnes furent arrêtés et condamnés en ce sens.

Elles appartenaient à plusieurs catégories : les criminels déjà condamnés, libérés et maintenant leurs activités, les sans activités connues liées aux criminels, les mendiants professionnels, les personnes arrêtées à plusieurs reprises au même endroit sans permis de résidence, les personnes retournées aux endroits dont elles avaient été exilées, les enfants de plus de douze ans arrêtés pour des activités criminelles.

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de l’État de l’URSS socialiste

L’intime conviction dans le cadre du droit soviétique en URSS socialiste

Il ressort des lois du droit soviétique – et notamment l’article 58 – que c’est la défense du peuple qui est le noyau de l’attitude du tribunal en URSS socialiste. Son objectif assumé est la contribution à l’établissement de l’ordre social socialiste, en marche vers le communisme.

Par conséquent, l’intime conviction, déformée par le subjectivisme bourgeois au fur et à mesure de l’installation du mode de production capitaliste, est désormais dépassée par l’approche socialiste.

Le juge est impliqué dans tout son ordre, subjectivement, car il fait partie de la réalité objective.

Le droit soviétique est la preuve de la mise en place d’un droit socialiste – à rebours des conceptions anarchiste et gauchiste exigeant une « dissolution » immédiate du droit.

Voici comment l’intime conviction, dans le cadre du droit soviétique, est présentée avec justesse par Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« La principale tâche du tribunal est d’établir la vérité, de donner la bonne réponse, c’est-à-dire une adaptation aux circonstances réelles de la cause, la compréhension de cet événement, le rôle et le comportement des personnes impliquées dans la procédure en tant qu’accusés, victimes ou plaignants, de donner les moyens légaux et juridiques approprié, l’évaluation socio-politique de ce comportement, de déterminer les conséquences juridiques de cette évaluation (justifier, condamner, punir, satisfaire la demande, rejeter le procès, etc.).

Cela signifie que la tâche du tribunal est de donner une réponse claire et précise aux questions directement liées à l’affaire qui est devant le tribunal (…).

Sans accorder l’attention nécessaire à l’examen des preuves dans l’affaire, remplaçant les spécificités judiciaires par un raisonnement abstrait, souvent sans rapport avec les circonstances ayant fait l’objet d’une enquête directe par le tribunal, le tribunal tombe dans le schématisme, émascule le contenu vivant de l’affaire et prive son travail de l’énorme signification qu’il a ou devrait, avec les juges, comprendre correctement leurs tâches et leurs responsabilités (…).

L’intime conviction d’un juge est toujours liée de manière organique à sa vision du monde, à sa conscience juridique, qui est dominante dans la société.

Dans la société des propriétaires de marchandises, des exploiteurs, des trafiquants de main-d’œuvre humaine, de sang, l’intime conviction des juges se nourrit du sol de la conscience juridique bourgeoise, qui considère les phénomènes et les actions des personnes et des personnes elles-mêmes du point de vue des intérêts de la propriété privée, de l’achat et de la vente, et de l’exploitation.

Dans une société socialiste, l’intime conviction judiciaire se nourrit du jus du sol socialiste, des principes d’une attitude socialiste envers la société, son entourage, son devoir envers l’État. Il est déterminé par la vision globale du monde de la personne qui considère le phénomène, et les actions des gens, et les gens eux-mêmes, en termes d’intérêts de l’État socialiste et de la construction socialiste.

Par conséquent, dans la société soviétique, chaque citoyen conscient considère, par exemple, la spéculation comme un crime, et pas seulement parce qu’elle est qualifiée ainsi par notre droit, mais bien en vertu de ses opinions personnelles, de sa conviction, c’est-à-dire de sa conscience juridique socialiste.

Chaque juge, qui examine un cas particulier et décide, par exemple, de la question de la peine, de la restriction des droits du défendeur, etc., doit être guidé par les exigences de la loi, en évitant toute dérogation arbitraire à ces exigences.

Mais ici, le rôle décisif est joué par la conscience juridique du juge, son appréciation, son attitude vis-à-vis de ce crime, sa vision du monde générale et juridique. La bonne compréhension par le juge du crime et de sa signification socio-politique et économique aide le juge à prononcer la peine, et même le choix de la peine en tant que tel.

Il faut surtout garder à l’esprit cette dernière circonstance lorsque la loi elle-même laisse au juge une certaine marge de manœuvre pour choisir des mesures punitives, en se limitant à fixer la limite inférieure ou supérieure de la peine (« pas inférieure », « pas supérieure » à telle ou telle punition).

Dans une société socialiste, la formation libre et indépendante d’une intime conviction judiciaire est pleinement assurée conformément aux faits réels, avec des relations réelles, conformément aux exigences de la vérité et de la justice socialistes, précisément parce que ces exigences ne constituent qu’une partie de la vision générale des juges.

De là sont clairs le rôle et la signification de l’intime conviction et de la conscience juridique socialiste en tant que facteurs les plus importants du processus de preuve.

Les faits perçus par les juges sont résumés à travers le prisme de l’idéologie judiciaire, une vision du monde, dont la justice fait partie.

À la lumière de la conscience juridique du juge, le processus le plus compliqué d’évaluation de la valeur d’une preuve suit le processus de formation de l’intime condamnation du juge sur la base de la totalité des circonstances de l’affaire.

Ainsi, la conscience juridique socialiste et la conviction profonde du juge sont les principes de procédure les plus importants qui ont une valeur pratique profonde dans le droit de la preuve soviétique (…).

La condamnation judiciaire interne, qui résulte du travail du juge dans l’instruction du dossier, qui constitue son achèvement, détermine le contenu de la décision de justice ou de la décision de justice.

La condamnation judiciaire interne est formée sur la base de faits ou de circonstances examinés par le tribunal, vérifiés et pondérés par le juge en privé et avec sa propre conscience.

En formant une condamnation judiciaire, protégé dans son indépendance, protégé par la loi elle-même de toute ingérence et influence extérieures, le juge en vient à la conclusion que telle chose est vraie et que telle chose n’est pas vraie, en s’appuyant sur les faits établis par l’enquête judiciaire.

Par conséquent, la première condition pour que la décision rendue par un juge soit correcte est la conformité de cette décision avec les circonstances de l’espèce (…).

La condamnation judiciaire n’est pas une simple perception des résultats de ces opérations.

Cela ne ressemble pas du tout, par exemple, à une conviction mathématique, qui dépend entièrement des opérations effectuées avec des expressions mathématiques (nombres, formules, etc.).

C’est le résultat de l’activité non seulement de l’esprit, comme dans la logique formelle s’appliquant aux syllogismes, ou comme dans les mathématiques qui traitent des nombres, ou comme dans toute science révélant l’essence de phénomènes au moyen de l’activité mentale d’une personne, mais aussi de l’activité de la personne tout entière, et la force morale, tout son caractère.

La condamnation judiciaire n’est pas seulement un savoir, mais aussi une reconnaissance des faits, non seulement pour savoir comment ils se sont déroulés et quelles ont été leurs suites, mais aussi par une capacité à évaluer correctement la signification de cet événement, c’est-à-dire conformément aux intérêts de la société et aux intérêts concernés.

Cela signifie qu’une compréhension et une connaissance correctes des circonstances de l’affaire, créant une condamnation pour un juge, ne peuvent être dissociées de la somme de ses idées, de ses vues, de sa vision du monde, de sa conscience politique et juridique.

Un juge qui statue sur une affaire, évalue les circonstances de l’affaire, évalue les actions de l’accusé, du demandeur ou du défendeur, cherche inévitablement l’appui de ses principes moraux, politiques et idéologiques, de sa vision du monde tout entier, de ses points de vue principaux sur le monde, de ses rapports avec les gens, de ses buts et de ses objectifs de sa propre existence.

Le système de vues philosophiques, politiques et juridiques du juge joue un rôle crucial dans son attitude envers la réalité, dans la perception et l’évaluation de certains faits.

L’intime conviction et la conscience juridique d’un juge, comme toute personne, sont inextricablement liées ; de plus, le premier dans un certain sens est dû au second, comme le particulier concerne le général. »

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Le droit soviétique et la consolidation des rapports sociaux en URSS socialiste

Pour que l’article 58 ait un sens, il faut que le droit soviétique assume que les tribunaux soient eux-mêmes les vecteurs de la construction du socialisme. Cela est posé juridiquement, comme le présente ici Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« La bourgeoisie essaie de donner à la nation la primauté du droit qui prévaut dans la société bourgeoise et parle de sa propre conscience juridique en tant que conscience juridique du « peuple ».

En fait, dans une cour bourgeoise, les opinions populaires, la justice populaire se manifestent sous une forme pervertie et falsifiée.

Les vues authentiques du peuple, ses idées juridiques sont corrompues et déformées par l’influence des forces hostiles au peuple, exploitant les classes, essayant d’inculquer au peuple des vues et des concepts étrangers, mais bénéfiques et agréables pour les exploiteurs eux-mêmes.

Un sens véritablement populaire de la justice, comme une intime conviction judiciaire vraiment libre, n’est possible que dans un pays véritablement populaire et libre, où la justice elle-même est appliquée de manière autonome et indépendante, dans l’intérêt du peuple et directement par le peuple lui-même.

Ce pays est notre patrie, la grande Union des Républiques Socialistes Soviétiques.

Absolument indépendante, objective et impartiale dans son attitude à l’égard des faits, des phénomènes, des événements, soumise uniquement à la loi, la cour soviétique joue également le rôle de propagandiste d’une nouvelle loi, d’une nouvelle conscience juridique socialiste, contribuant à renforcer les nouvelles habitudes de la société, une nouvelle attitude à l’égard de l’État, du travail, à ses devoirs.

En ce sens, l’activité des instances judiciaires soviétiques, qui correspondent à l’ensemble de la pratique de leur travail aux tâches de la lutte pour le socialisme, aux tâches de reconstruction de la société sur une base socialiste, est une activité de l’État, politique au sens large du terme.

En ce sens, il faut comprendre les mots de Lénine sur les tribunaux soviétiques comme des « tribunaux politiques ».

Les tribunaux soviétiques sont activement impliqués dans la construction de l’État, pour être les conducteurs de la politique de l’État soviétique. Cette politique vise à éliminer la résistance de ses ennemis à la cause du socialisme, à renforcer la dictature du prolétariat, le pouvoir des soviets, le respect des règles du cadre socialiste et la discipline de l’État (…).

Les procès ouverts en URSS éduquent les masses en montrant le mal, en exposant toutes sortes d’ennemis de classe et leurs agents, en renforçant la vigilance des masses, en renforçant leur dévouement pour la cause de la construction socialiste.

Le travail vénérable de la cour soviétique est son énorme signification sociopolitique.

Ce travail fait de la cour soviétique le facteur le plus important dans la lutte pour le socialisme, un outil puissant de la dictature prolétarienne.

Pour la cour soviétique, la tâche la plus importante est celle qui est parfaitement exprimée à l’article 3 de la loi sur le système judiciaire de l’URSS, des républiques fédérées et autonomes, dans les termes suivants :

« Le tribunal soviétique, en appliquant des mesures de sanction pénale, punit non seulement les criminels, mais a également pour objectif la correction et la rééducation des criminels.

Avec toutes ses activités, la cour éduque les citoyens de l’URSS dans un esprit de dévouement à la cause du socialisme, dans le respect des lois soviétiques, dans le respect de la propriété socialiste, dans le respect des règles de la vie socialiste. »

Aucun pays au monde, à l’exception de l’URSS, ne connaît une loi telle que notre loi sur le pouvoir judiciaire tel que l’article 3, sous une forme extrêmement vive et forte, qui exprime toute la profondeur des principes de la justice soviétique.

La cour soviétique, en tant que l’un des plus puissants leviers de régulation des rapports sociaux socialistes, utilise la méthode de la contrainte et la méthode de la persuasion pour s’acquitter de sa tâche, punissant et éduquant les personnes qui violent la discipline sociale et étatique, qui empruntent la voie du crime (…).

En tant que socialiste, le droit soviétique consolide les rapports sociaux socialistes. Telle est la tâche, en particulier, du droit constitutionnel soviétique, des lois fondamentales de l’État, de sa Constitution.

Le droit socialiste autorise, sanctifie, consolide dans l’économie et tout le système social conditionné par l’économie, la prépondérance des principes du socialisme : la propriété sociale des moyens de production, la protection des travailleurs, le droit au travail, à l’éducation, au repos, etc.

Mais la loi socialiste est une loi, c’est-à-dire un régulateur des relations sociales et donc économiques, une manière de comptabiliser et de contrôler la production et la distribution, une manière de subordonner les personnes et les classes aux règles établies par la classe dominante dans une société donnée, qui sont avantageuses et agréables pour cette classe.

En tant que régulateur des rapports sociaux, le droit socialiste remplit des fonctions similaires au droit bourgeois, qui ne se ressemblent toutefois que de l’extérieur, puisque les tâches, la direction et le but du droit socialiste sont fondamentalement différents du droit de la bourgeoisie (…).

Le droit soviétique a pour rôle d’assurer l’accomplissement de cette tâche : établir l’ordre le plus strict, la discipline du travail et de l’État, établir la responsabilité du bon fonctionnement de certaines parties de l’organisme économique et de l’ensemble de l’organisme, en vue de l’exécution des ordres de dirigeants uniques. »

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de l’État de l’URSS socialiste

L’appareil de sécurité d’État de l’URSS socialiste et l’article 58

Le droit soviétique dispose d’un tribunal analysant les choses objectivement, et donc subjectivement car reconnaissant la nature dialectique de la réalité et prenant le parti des larges masses contre les réactionnaires.

Par conséquent, il façonne les lois de telle manière à correspondre à cette réalité. L’appareil de sécurité d’État de l’URSS se fonde ainsi, pour l’exclusion des éléments anti-sociaux à dimension contre-révolutionnaire, sur l’article 58 du code pénal.

Mis en place le 25 février 1927, corrigé notamment le 8 juin 1934, il établit les peines et formule la manière de considérer les activités contre-révolutionnaires.

Il est évident que cet article, composé de différents points, a une portée éminemment politique, faisant de l’URSS un État socialiste. Cela a par conséquent beaucoup choqué les théoriciens bourgeois du droit, qui eux s’évertuent à masquer le caractère bourgeois de l’État dans le mode de production capitaliste.

Cela souligne bien la nature politique de l’intervention de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS dans la société soviétique, comme défenseur du droit et applicateur subjectif du droit.

58-1

Par « contre-révolutionnaire », il faut comprendre toute action dirigée vers le renversement, la subversion, ou l’affaiblissement du pouvoir des conseils ouvriers-paysans ou de leur gouvernement ouvrier-paysan de l’URSS, de l’union et des républiques autonomes, choisi par eux (selon la Constitution de l’URSS et les constitutions des républiques de l’union), ou vers la subversion ou l’affaiblissement de la sécurité extérieure de l’URSS et les acquis fondamentaux économiques, politiques, nationaux de la révolution prolétarienne.

En considération de la solidarité internationale envers les intérêts de tous les ouvriers, les actes sont pareillement considérés comme « contre-révolutionnaires » lorsqu’ils sont dirigés contre n’importe quel autre gouvernement ouvrier, même s’il ne fait pas partie de l’URSS.

58-1a

La trahison vis-à-vis de la patrie, c’est-à-dire les actes des citoyens de l’URSS commis au détriment de la puissance militaire de l’URSS, de sa souveraineté nationale, ou de l’inviolabilité de son territoire, telle que : l’espionnage, la trahison de secrets d’État ou militaire, le passage à l’ennemi, la fuite à l’étranger, doivent être punis par :

la mesure suprême de la punition criminelle – l’exécution avec confiscation de tous les biens ou, en cas de circonstances atténuantes – d’une privation de liberté de dix ans et de la confiscation des biens.

58-1b

Ces mêmes crimes, perpétrés par le personnel militaire, sont à punir par la mesure suprême de la punition criminelle – l’exécution avec confiscation de tous les biens.

58-1c

En cas de fuite d’un militaire à l’étranger, les membres majeurs de sa famille – qui l’ont aidé de quelque manière que ce soit à fuir ou ont dissimulé le fait aux autorités – sont passibles d’une privation de liberté de 5 à 10 ans et d’une confiscation de tous leurs biens.

Les autres membres majeurs de la famille qui vivaient avec le coupable ou dépendaient matériellement de lui au moment du crime sont passibles d’une privation des droits civils et d’un exil de 5 ans dans un arrondissement éloigné de Sibérie.

58-1d

L’échec par un membre de l’armée de dénoncer des préparatifs ou la réalisation d’une trahison sont punissables d’une privation de liberté de 10 ans.

58-2

L’insurrection armée ou l’incursion de bandes armées à intentions contre-révolutionnaires sur le territoire soviétique, la prise d’un pouvoir local ou central avec de semblables intentions – en particulier celle d’arracher à l’Union une partie de son territoire, ou de briser des accords conclus par l’Union avec d’autres États – sont passibles de la suprême mesure de la défense sociale – l’exécution – ou de l’attribution de la désignation d’« ennemi du peuple » avec confiscation de tous les biens et retrait de la citoyenneté nationale et soviétique, et expulsion définitive hors des frontières de l’URSS.

En cas de circonstances atténuantes : privation de liberté pour une durée de pas moins de trois années et confiscation de tout ou partie des biens.

58-3

La collusion à des fins contre-révolutionnaires avec un État étranger ou avec ses représentants individuels, et pareillement toute forme d’assistance portée à cet État ou à un État en guerre ou en État en lutte contre l’U.R.S.S au moyen d’une intervention ou d’un blocus, doit être punissable par les mesures de défense sociale indiquée dans l’article 58-2 de ce code.

58-4

L’offre de toute sorte d’aide à la partie de la bourgeoise internationale qui, ne reconnaissant pas les droits égalitaires du système communiste remplaçant le système capitaliste, l’effort à le renverser, et pareillement pour des groupes publics et des organisations, le fait d’être sous l’influence ou directement organisée par cette bourgeoisie, dans l’objectif de mener des activités hostiles envers l’URSS, doit être puni par la privation de liberté pour une période de pas moins de trois années avec confiscation de tous les biens personnels, jusqu’à, en cas de circonstances particulièrement aggravantes, de la mesure suprême de la défense sociale – l’exécution ou la désignation comme ennemi du peuple, avec la suppression de la citoyenneté d’une république soviétique et, pareillement, de la citoyenneté de l’URSS et l’expulsion pour toujours au-delà des frontières de l’URSS, avec confiscation des biens.

58-5

L’inclinaison vers un État étranger ou tout groupe public en son sein, au moyen de rapports avec ses représentants, l’utilisation de faux papiers ou d’autres moyens, en faveur d’une déclaration de guerre, d’une intervention armée dans les affaires de l’URSS ou toutes autres actions inamicales tels le blocus, l’appropriation de la propriété de l’URSS ou des républiques de l’union, la rupture des relations diplomatiques, la rupture de traités conclus par l’URSS, etc. doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées à l’article 58-2 de ce code.

58-6

L’espionnage, c’est-à-dire la transmission, l’appropriation ou la collecte à fin de transmission d’informations considérées comme secrets d’État particulièrement gardés en raison de leur nature, pour le compte d’États étrangers, d’organisations contre-révolutionnaires ou de particuliers, sont à punir d’une privation de liberté d’une durée de pas moins de 3 ans, avec confiscation de tout ou partie des biens, et dans les cas où l’espionnage a mené ou aurait pu mener des conséquences particulièrement graves pour les intérêts de l’URSS, par la mesure suprême de défense social – l’exécution ou la désignation comme ennemi des ouvriers avec privation de la citoyenneté d’une république de l’union et, pareillement, de la citoyenneté de l’URSS et l’expulsion pour toujours hors des frontières de l’URSS avec confiscation des biens.

La transmission, l’appropriation ou la collecte à fin de transmission d’informations économiques, ne consistant pas dans leur contenu en des secrets d’État spécialement protégés, mais en même temps pas sujet à publication que ce soit en raison d’une interdiction légale directe, ou bien par décision de la direction du département, de l’institution ou de l’entreprise, que ce soit pour des raisons mercantiles ou gratuitement, à des organisations et des personnes mentionnées ci-dessus, doit être punie par la privation de la liberté pour une période allant jusqu’à trois années.

58-7

Le fait de saper la production d’État, les transports, le commerce, les rapports monétaires ou le système de crédit, et pareillement la coopération, accompli dans un but contre-révolutionnaire, au moyen de l’utilisation correspondant d’institutions ou d’entreprises d’État, ou l’entrave à leur activité normale, et pareillement l’utilisation d’institutions et d’entreprises d’État ou l’entrave à leurs activités, réalisés dans les intérêts de leurs anciens propriétaires ou des organisations capitalistes intéressées, doit être puni par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-8

La perpétration d’actes terroristes, dirigés contre les représentants de l’autorité soviétique ou d’activistes des organisations ouvrières et paysannes révolutionnaires, et la participation à la réalisation de tels actes, même par des personnes n’appartenant pas à une organisation contre-révolutionnaire, doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-9

La dégradation ou les dommages, commis avec une visée contre-révolutionnaire, par l’explosif, l’incendie ou tout autre moyen, contre des voies ferrées et des voies de transport, des moyens de communication publique, des canalisations, des entrepôts ou d’autres structures, ou des propriétés d’État et communautaires, doivent être punis par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-10

La propagande ou l’agitation, contenant un appel au renversement, à la subversion ou à l’affaiblissement de l’autorité soviétique, ou pour la réalisation d’autres crimes contre-révolutionnaires (articles 58-2 à 58-9 du présent Code), et pareillement la distribution ou la préparation ou la conservation de littérature de cette nature, doit être punie par une privation de liberté pour une période de pas moins de six mois.

Les mêmes actions lors d’un contexte de troubles populaires, ou avec l’utilisation des préjugés religieux ou nationalistes des masses, ou en situation de guerre, ou dans les zones proclamées comme étant en situation de guerre, doivent être punies par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-11

Toute type d’activité organisée, dirigée vers la préparation ou le fait de mener des crimes indiqués dans ce chapitre, et pareillement la participation à une organisation créée pour préparer ou accomplir l’un des crimes indiqués dans ce chapitre, doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées dans les articles correspondant de ce code.

58-12

L’échec à dénoncer un crime contre-révolutionnaire, connue comme étant en préparation ou commis, doit être puni d’une privation de liberté de plus de 6 mois.

58-13

La participation active ou la lutte active contre la classe ouvrière et le mouvement révolutionnaire, manifesté sur la base d’une position responsable ou secrète dans le régime tsariste, ou dans les gouvernements contre-révolutionnaires de la période de guerre civile, doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-14

Le sabotage contre-révolutionnaire, c’est-à-dire l’échec conscient à réaliser ses tâches définies ou l’accomplissement intentionnellement négligent de ceux-ci, avec la visée particulière d’affaiblir l’autorité du gouvernement et le fonctionnement de l’appareil d’État, doit être puni par la privation de liberté pour une période de pas moins d’une année, avec confiscation de tout ou d’une partie des biens, avec en cas de circonstances aggravantes le passage à la suprême mesure de défense sociale – l’exécution, avec la confiscation des biens.

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de l’État de l’URSS socialiste

L’origine du crime et la conviction socialiste du juge selon le droit soviétique en URSS socialiste

Le matérialisme dialectique impliquant le déterminisme et non l’adhésion à la thèse idéaliste du « libre-arbitre », le droit soviétique considère les crimes comme des phénomènes sociaux, liés par conséquent à une dimension historique, et non individuelle.

Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941, présente cela ainsi :

« La démocratie socialiste cohérente du processus judiciaire soviétique est déterminée par l’organisation même du tribunal soviétique, qui est un tribunal populaire au vrai sens du mot.

Il est en outre déterminé par les méthodes de travail de la cour soviétique, dépourvues de formalisme bureaucratique, saturées par les activités des cours bourgeoises, qui tissent un réseau de scolastique juridique et de détours.

La démocratie du processus judiciaire soviétique est finalement déterminée par les tâches de la cour soviétique, qui non seulement punit, mais éduque et rééduque également les éléments arriérés de la société. Dans cette œuvre éducative de la cour soviétique, la justice soviétique a pour caractéristique fondamentale d’accroître le niveau culturel et politique (…).

La « justice » bourgeoise, c’est Moloch, à qui sont consentis de sanglants sacrifices humains. La cour bourgeoise, comme la loi bourgeoise, est un terrible instrument de répression et d’intimidation, multiplié par la corruption mentale et morale des personnes.

La justice soviétique, au contraire, est une force culturelle gigantesque visant à lutter contre les survivances restées dans l’esprit des gens, les « traditions du capitalisme » qui entravent la cause de la construction socialiste, c’est une force qui organise les masses, éduque la volonté, contribue à renforcer de nouvelles traditions, une nouvelle psychologie socialiste (…).

L’utilisation de la dialectique marxiste-léniniste non seulement garantit ou au moins aide à clarifier les circonstances, comme si elle était tissée de contradictions, mais nous enseigne également à comprendre que les phénomènes de la vie publique, ainsi que les actions et les actes prévalant dans une société donnée (faute, crimes) ne sont pas de simples « accidents ».

La dialectique marxiste-léniniste aide à révéler le lien intérieur et la conditionnalité mutuelle des phénomènes de la vie publique, des actions et actions des personnes, et leur enseigne à comprendre les lois en vigueur dans la société.

La lutte des classes posent des contradictions entre la classe des exploiteurs et des classes exploitées, et avec la victoire de la révolution socialiste et l’organisation socialiste de la société, non seulement cela persiste, mais cela éclate avec une force encore plus grande, donnant lieu à de nouvelles fraudes criminelles de la part des survivants des classes exploiteuses défaites.

Sur la base de la lutte des classes et des vestiges du capitalisme dans l’économie et dans l’esprit des gens, des crimes sont nés qui sapent les succès du nouveau système socialiste.

La justice socialiste a pour tâche de comprendre, dans chaque cas individuel, le lien entre un crime donné et les causes qui l’ont motivé, de révéler les caractéristiques de ce cas de violation du droit soviétique, d’expliquer correctement les actes de l’accusé, du demandeur ou du défendeur, du point de vue de non seulement les exigences formelles de la loi, mais aussi du point de vue des intérêts de toute la cause de la construction socialiste, la cause de la lutte pour le socialisme.

Les exigences formelles de la loi peuvent dans certains cas entrer en conflit avec les exigences de la vie, avec les intérêts vitaux de la société et de l’individu. La résolution ou l’évitement de telles contradictions est l’une des conditions les plus importantes pour la bonne administration de la justice. L’absence d’élimination de telles contradictions est un indicateur de « justice » injuste, la justice entre guillemets.

La justice socialiste en matière d’élimination des contradictions possibles entre la formule du droit et l’exigence de vie joue un rôle déterminant: elle élève la pensée et la volonté des tribunaux « à la hauteur des principes politiques de la lutte de sa classe », de sa société; cela permet au juge d’aborder l’évaluation de l’événement considéré.

Du point de vue des principes du matérialisme dialectique, est correcte cette position fondamentale permettant de répondre aux questions, ce qu’il serait impossible de faire sur la base de catégories logiques purement formelles.

Le droit de la preuve soviétique, contrairement au droit de la preuve des États exploiteurs, ne traite donc pas uniquement des catégories juridiques et de la méthodologie définie par ces catégories (…).

La justice soviétique est une justice socialiste, appliquée conformément aux principes du socialisme, aux principes de la justice socialiste et à la conviction socialiste des juges.

C’est la raison pour laquelle c’est une déformation flagrante que la tentative de certains « scientifiques » de rejeter le principe de l’intime conviction judiciaire, du système de procédure soviétique et du système du droit de la preuve soviétique.

Une campagne contre le principe de l’intime conviction judiciaire, même si elle est masquée par la critique des théories bourgeoises, magnifiant hypocritement ce principe et dissimulant sous sa couverture la dépendance esclavagiste de la cour bourgeoise vis-à-vis des classes exploiteuses, ne peut et ne doit tromper personne.

Dénonçant la nature bourgeoise du principe de la soi-disant évaluation « libre » des preuves fondée sur la « condamnation » intime des juges par un tribunal bourgeois, nous ne devrions pas et ne pouvons pas jeter le bébé avec l’eau du bain (…).

Tout le développement du droit soviétique prouve que les principes les plus importants du droit de la preuve soviétique sont la justice socialiste dans la conviction socialiste des juges.

Ces principes de justice socialiste procurent à la cour soviétique sa véritable indépendance, subordonnant sa volonté et son esprit à la loi soviétique, qui exprime la volonté et la raison du peuple soviétique.

Le tribunal soviétique a donc à la fois une position de classe et, dialectiquement, une subjectivité révolutionnaire dans son existence même.

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