Le Palais des Soviets : la première étape

Le Palais des Soviets n’a jamais vu le jour à Moscou, sa construction étant interrompue par la deuxième guerre mondiale impérialiste, puis stoppée par le révisionnisme. Cela devait être le monument majeur de l’URSS sur le plan architectural, la Cathédrale du Christ-Sauveur étant détruite en 1931 pour lui céder la place à la suite de l’ouverture d’un concours d’architecture en ce sens.

C’est Sergeï Kirov qui s’était occupé de lancer le projet, affirmant qu’il fallait un endroit suffisamment vaste pour les grandes réunions des responsables des Soviets, ainsi qu’un symbole de la construction du socialisme en URSS, notamment en direction du prolétariat européen « endormi » encore. Son discours, datant du 30 décembre 1922, fut également celui où fut proclamé la fondation de l’URSS.

Voici ce que dit Sergueï Kirov :

« Ce bâtiment devrait être un emblème du pouvoir à venir , le triomphe du communisme, pas seulement ici, mais même là-bas en Occident… Ils parlent beaucoup de nous, ils nous caractérisent par le fait que nous effaçons les palais des banquiers, des propriétaires terriens et des tsars de la surface de la terre avec la vitesse de l’éclair. C’est juste.

Érigeons sur place le nouveau palais des ouvriers et des paysans laborieux, rassemblons tout ce dont les pays soviétiques sont riches, mettons toute notre créativité ouvrière et paysanne dans ce monument et montrons à nos amis et à nos ennemis que nous sommes capables de décorer la terre pécheresse avec de tels monuments dont nos ennemis n’ont jamais rêvé. »

Un concours fut ainsi lancé pour le projet d’un Palais des Soviets. Une telle idée de concours pour un grand projet s’était déjà réalisée en 1922, avec un appel pour un « Palais du travail ». Le gagnant fut Noi Trotsky, alors que les frères Vesnine (Alexandre, Victor et Leonid) présentaient alors la première oeuvre « constructiviste » en architecture. Le projet de Palais fut rapidement abandonné.

Le projet de Noi Trotsky
Le projet des frères Vesnine, premier projet architectural de type constructiviste

Le concours pour le Palais des Soviets fut lancé en février 1931 ; il devait amener la réalisation à l’horizon d’une décennie, sous la supervision du Conseil pour la construction du Palais des Soviets (le terme Soviet voulant dire Conseil, cela donne en russe le Soviet pour la construction du Palais des Soviets, d’où la dénomination raccourcie employée de Soviet pour la construction).

Le concours reçut 15 propositions, mais acquit rapidement une réputation mondiale et s’ouvrit en juillet 1931 à l’international, débouchant sur la production de 136 soviétiques et 24 non-soviétiques, dont celles d’éminents architectes comme Walter Gropius, Armando Brasini , Le Corbusier… pour 112 projets sous la forme de concepts conceptuels,160 sous la forme de projets architecturaux.

Le Corbusier et la maquette de son projet

Le côté hangar du projet de Le Corbusier l’amena à être rejeté, revenant trop au formalisme constructiviste des années 1920, ce qui rendit l’architecte très mécontent, au nom d’un esprit prétendument d’avant-garde.

L’oeuvre de Le Corbusier fut critiquée ainsi en 1939 :

« Si la façade avant de la grande salle (avec un arc géant en face) peut encore revendiquer une signification architecturale, les façades de la petite salle et la façade latérale de l’ensemble de la structure révèlent toutefois clairement une sous-estimation de l’attention nécessaire à la bonne conception architecturale de l’ouvrage. »

Les autres œuvres rejetées étaient souvent plus dans l’esprit soviétique, elles étaient plus travaillées, mais avaient des travers trop marquants.

Armando Brasini
Armando Brasini
Alexeï Chtchoussev
Heinrich Ludwig
Georges Krasine et Alexandre Kutsaev
Karo Alabyan et Vladimir Simbirtsev
Moïsseï Ginzbourg
Nikolaï Ladovski 
Leonid, Victor et Alexandre Vesnine
Georgy Golts et Ivan Joltovski
Ilya Golosov
Karo Alabyan, Georgy Kochar et Anatoly Mordvinov
Alexandre Vlasov
Vladimir Helfreich et Vladimir Chtchouko
Ivan Joltovski (second projet)
Vladimir Helfreich et Vladimir Chtchouko

Les gagnants du concours en février 1932 furent les soviétiques Boris Iofane et Ivan Joltovski, ainsi que l’Américain d’origine britannique Hector Hamilton, dont l’oeuvre était intitulé Simplicité.

Simplicité de Hector Hamilton
Plan de Simplicité

L’oeuvre de Hector Hamilton marqua les esprits, mais elle avait un souci : elle était fonctionnaliste en ce qui concerne les déplacements. Il y avait bien de multiples entrées, mais aucune place à l’extérieure où se rassembler ; il devait même y avoir des voies pour automobiles souterraines sous le Palais.

Le projet de Boris Iofane n’était quant à lui pas d’esprit symétrique et avait plus d’allant, avec notamment un monument et l’idée d’un espace marqué entre les bâtiments.

Le projet d’Ivan Joltovski était quant à lui tourné vers un élément central organisant l’ensemble sous forme d’une composition très prononcée.

Il fut néanmoins considéré par le Conseil de construction qu’on n’était pas encore au point et le concours connut une seconde grande étape.

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Les fantaisies architecturales de Iakov Tchernikhov

Le métro de Moscou est le symbole même d’une architecture soviétique ayant une perspective générale et concrète, à rebours de l’utopisme expérimental des années 1920, dont les tenants s’effacèrent devant les exigences des années 1930.

Iakov Tchernikhov est justement ici emblématique du constructivisme architectural et de ses prétentions à la radicalité ultra, à ceci près que lui s’est toujours cantonné dans une démarche purement théorique, même s’il a réalisé quelques projets secondaires. Lui-même était professeur et tout au long des années 1930-1940, il a réalisé des dessins à la dimension fantastique, mais particulièrement inspirante, à côté de nombreux ouvrages.

Il s’insère ainsi dans l’architecture soviétique en mettant de côté toute prétention utopiste généralisée, ce qui en fait un personnage intéressant.

Iakov Tchernikhov est surtout connu pour ses Fantaisies architecturales de 1933, année où une exposition lui fut accordée, sous la supervision de Sergueï Kirov lui-même, au Palais Anitchkov à Leningrad. Deux autres de ses ouvrages ont la même approche, Les fondements de l’architecture contemporaine et La construction des formes architecturales et mécaniques, mais il a également écrit L’Art du tracé graphique, Le Tracé géométrique, Cours général de dessin technique, Recherches graphiques sur les lettres de l’alphabet, cette dernière oeuvre paraissant en 1950.

Iakov Tchernikhov relève donc d’une approche de laboratoire, mais sous la forme d’un dérapage contrôlé, sans les prétentions fantasmagoriques des constructivistes entendant refaçonner la société toute entière avec leur architecture comme moyen absolu.

Ses œuvres restent d’ailleurs des compositions se cantonnant dans une ouverture, dans la proposition d’une inspiration, sans aller dans le sens d’un projet fermé, fourni clef en main.

De telles œuvres étaient d’ailleurs destinées aux étudiants, afin de les aider à saisir la logique compositionnelle. Il en restait toutefois à un certain formalisme, puisque pour lui tout passait par les lignes, les surfaces, les solides.

En fait, Iakov Tchernikhov considère que l’architecture est prétexte à une démarche visionnaire, mais qui ne peut pas forcément déboucher sur quelque chose de concret en raison d’une époque trop arriérée. Aussi, pour les temps nouveaux, il tente de se reconnecter avec ce principe d’architecte comme visionnaire afin d’élargir le champ de la compréhension de ce qu’est l’espace.

Il dit ainsi que :

« Dans mes contes de fées, je me suis permis toutes sortes de digressions, d’accumulations, d’exagérations et d’hypothèses, mais j’ai ainsi pu révéler les défauts et les avantages des caractéristiques qui influencent la création d’une forme. »

Il y a d’un côté une tendance à aller chercher une forme « pure » comme dans le suprématisme, de l’autre côté il y a une véritable tentative de mieux cerner les possibilités compositionnelles dans l’espace.

Il avait d’ailleurs publié en 1920 un ouvrage intitulé « Aristographie », de facture cubo-futuriste dans le sens suprématiste.

La dimension compositionnelle, architecturale au sens strict, l’a emporté ; il ne termina d’ailleurs sa formation d’architecte qu’en 1925.

Iakov Tchernikhov, à côté de son travail de professeur, continua toute sa vie dans cette perspective, produisant 17 000 dessins. Il faut bien saisir à l’arrière-plan qu’il avait une sorte de quête à la fois démocratique et utopiste.

D’un côté, il considérait que l’architecture était un langage graphique de portée universelle, de dimension civilisationnelle, penchant donc vers le formalisme, vers l’architecture comme forme suprême. De l’autre, son objectif était de rendre disponible pour tous la dimension graphique de l’architecture.

Il faut bien saisir également que certaines libertés sont prises avec les perspectives, rendant plus marquantes les œuvres, mais les rendant impossibles. Cela est assumé entièrement, le côté imaginatif prenant le dessus. Pour Iakov Tchernikhov :

« Il se peut que le matériel présenté n’ait pas ses aspects positifs. Les fantasmes architecturaux montrent de nouveaux processus de composition, de nouvelles techniques d’affichage, cultivent le sens de la forme et de la couleur, entraînent l’imagination, excitent les impulsions créatives, attirent de nouvelles créations et idées, aident à trouver des solutions aux nouvelles idées, etc. (…).

Avec l’aide des moyens d’expression figuratifs présentés dans les fantasmes architecturaux, nous avons l’opportunité de les appliquer à leur utilisation directe dans notre pratique utilitaire et, ainsi, d’améliorer cette dernière.

De plus, en tant que l’une des techniques méthodologiques, les fantasmes architecturaux devraient être utilisés dans la pratique éducative des architectes novices. Ainsi, tout ce qui précède convainc que le côté positif des fantasmes architecturaux est utile, diversifié et grand, et cette circonstance nous permet de parler de l’attitude la plus attentive et la plus prudente envers cette étape du travail de l’architecte. »

Iakov Tchernikhov, comme l’ensemble des architectes à quelques exceptions près, prit le tournant réaliste socialiste du début des années 1930, mais prisonnier de son approche compositionnelle, il se tourna vers l’aspect monumentaliste seulement.

Ici, ses idées pour le Palais des Soviets, dont le concours fut un moment marquant pour l’architecture soviétique de l’époque socialiste.

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Le métro de Moscou

Le métropolitain de Moscou est une oeuvre majeure de l’architecture soviétique ; au début des années 1930, c’est un projet symbolique de très grande ampleur, aux côtés de la réorganisation urbaine de Moscou et du Canal de Moscou (faisant 128 km et reliant la Moskova à la Volga), les trois projets étant officialisés en juin 1931 par le Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik).

Le métropolitain de Moscou se vit accorder une attention significative, étant donné qu’il était considéré que cela doit être le symbole même de la citoyenneté soviétique.

Station Sverdlov
Passage entre la station de la place Sverdlov et celle de la Révolution

Le métro de Moscou ouvrit ses portes en mai 1935, avec alors 13 stations pour une distance parcourue de 11,2 km. Là encore, la seconde guerre mondiale vint interrompre les travaux, néanmoins en 1950 il y a déjà 35 stations sur 5 lignes pour un parcours de 43,5 km.

Station de la Maison des soviets
Entrée de la station Krasnye Vorota (la porte rouge)

La 5e ligne, de 1950, est circulaire et sert pour les correspondances ; c’est Staline qui a indiqué sa nécessité aux architectes en plaçant une tasse de café laissant une trace circulaire. Depuis, le symbole de la ligne est la couleur marron.

Station de la place de la Révolution
Entrée de la station de la Maison des soviets

Les lignes sont particulièrement profondes, car il a été prévu dès le départ qu’il fallait que les stations puissent servir d’abri.

Station Paveletskaïa
Station Komsomolskaïa

Le métro de Moscou s’appuie naturellement sur des mosaïques, des statues, des peintures, des bas-reliefs, etc. L’architecture soviétique unifie les arts de manière marquée.

Station Komsomolskaïa
Station Elektrozavodskaya
Station Stalinskaïa
Station Stalinskaïa

Les stations s’appuient sur des thématiques. La station Kievskaïa, qui correspond à la gare de Kiev pour les trains à destination de l’Ukraine, thématise l’amitié russo-ukrainienne ; la station Belorusskaya, qui correspond à la gare de Biélorussie pour les trains à destination de celle-ci, thématise la Biélorussie et notamment les partisans (la station a ouvert en 1952), etc.

Station Izmaylovskaya 
Station Belorusskaya

Il va de soi également que l’extérieur des stations elles-mêmes s’accorde justement avec les principes du métro lui-même.

Station Dynamo

Il est important de la souligner, car cette capacité d’unification des arts et de liaison systématiques des bâtiments dans leur nature est justement impossible pour le capitalisme.

Station Izmaylovskaya 
Station Paveletskaïa

Le métro moscovite est l’exemple même d’un projet planifié, mais non pas formellement, ou fonctionnellement, mais justement bien avec une nature socialiste : c’est là l’exigence du réalisme socialiste.

Station Izmaylovskaya 
Station Sokol

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L’architecture soviétique au service d’une réalité en construction

Le sururbanisme et le désurbanisme représentaient les deux faces de la même médaille, celle d’une architecture coupée de la réalité des gens et de leur histoire à travers les siècles. La notion de personnes travaillant y a disparu au profit d’individus considérés comme des numéros ou bien comme des valeurs absolues. En réalité, l’architecture soviétique se devait de se placer au service d’une réalité en construction.

Sanatorium à Sotchi
Sanatorium à Sotchi

L’architecture soviétique de l’époque socialiste, avec Staline, ne perdait pas ainsi de vue son utilité, sans faire de la fonction des œuvres construites un fétiche, car les bâtiments mis en place exprimaient un cadre particulier avec ses exigences. Le caractère directement heureux de Sotchi n’est pas la nature directement ordonnée d’un lieu de décision administrative.

Gare de Matsesta près de Sotchi
Maison du Conseil des députés ouvriers du district Volodarsky à Leningrad

De la même manière, la dignité d’une habitation ne correspond pas au caractère marquant d’un cinéma, un genre en expansion alors et possédant la même valorisation que le théâtre.

Habitations à Leningrad
Cinéma « Moscou » à Leningrad

Ce qui est marquant justement dans le sururbanisme, le désurbanisme et autres utopies faites en laboratoire, c’est leur incapacité à produire des œuvres affirmatives relevant d’une dimension de masse. L’architecture soviétique y parvient justement, car elle est orientée par le Parti guidant le processus général de construction.

Maison des soviets à Leningrad
Maison des soviets à Leningrad

Le deuxième aspect très important est que l’architecture soviétique, un aspect du réalisme socialiste propre à l’architecture, assume le patrimoine historique, s’inscrit dans l’Histoire et par conséquent valorise les éléments positifs du parcours des peuples. Les projets « utopistes » sont de leur côté fonctionnalistes, systématiquement cosmopolites.

Monument au savant Mikhaïl Lomonossov, Moscou
Monument au dramaturge Alexandre Ostrovski, Moscou

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Sur-urbanisme et désurbanisme

La vague d’architecture constructiviste des années 1920, pour toute relative qu’elle ait été, avait frappé les esprits de par le côté « cube » ou « boîtes » des constructions et par le discours hyper révolutionnaire de leurs architectes, par le côté utopiste radical.

Club des ouvriers Zouïev par Ilya Golossov
Club ouvrier Roussakov à Moscou par Constantin Melnikov

La plupart du temps, les projets constructivistes étaient de toutes façons irréalisables. On parle ici d’une idéologie au sens propre.

Ville aérienne par Lazar Khidekel

Le projet délirant de monument à la 3e Internationale de Tatline, imaginé en 1919-1920, signifiait par exemple une tour de 400 mètres de haut avec trois éléments en forme de double hélice en rotation permanente, un écran géant, des projections de texte sur les nuages, etc.

De fait, même lorsque cela atteignait une certaine dimension sur le terrain, le côté formel l’emportait. Le bâtiment du Derzhprom (c’est-à-dire de l’industrie d’Etat) est ainsi efficace du point de vue constructiviste, il a été construit littéralement avec les moyens du bord, avec un état d’esprit très volontaire, au point que les ouvriers ukrainiens de Kharkiv, qui ne parlaient d’ailleurs pas russe, ont impressionné le poète Vladimir Maïakovsky.

Cependant, s’il est mobilisateur abstraitement, une fois qu’il est mis en place, il n’y a pas d’esprit, pas d’âme. Si on est reste au point formel, c’est excellent, mais si on veut du fond, on ne trouve plus rien. Tout est sec.

La construction du Derzhprom
La construction du Derzhprom
Le Derzhprom
Le Derzhprom

Dès le tout début des années 1930, le Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) avait prévenu que des intellectuels petits-bourgeois utopistes se rêvaient prendre les commandes de l’Etat pour réaliser, du moins l’imaginaient-ils, leurs fantasmagories. Dans le décret du Parti Sur les travaux de restructuration du mode de vie, du 16 mai 1930, il est ainsi affirmé que :

« Le Comité central note que, parallèlement à la croissance du mouvement pour un mode de vie socialiste, il y a des tentatives extrêmement infondées, semi-fantastiques et donc extrêmement nuisibles de la part de camarades individuels pour « sauter » par-dessus ces obstacles sur la voie de la réorganisation de la vie dans les socialisme, tentatives qui s’enracinent, d’une part, dans le retard économique et culturel du pays, et d’autre part, la nécessité actuelle de concentrer au maximum les ressources sur l’industrialisation rapide du pays, qui seule crée la conditions matérielles réelles pour un changement radical de vie.

De telles tentatives de certains travailleurs, qui cachent leur essence opportuniste sous la « phrase de gauche », incluent des projets qui sont récemment apparus dans la presse pour replanifier les villes existantes et en construire de nouvelles, exclusivement aux frais de l’État. »

Cette « replanification » absolue rêvée par les « utopistes » allaient très loin. Dans Les tâches de l’architecture soviétique, écrit en 1937, Karo Alabyan, dénonce justement deux tendances marquantes de l’architecture soviétique qui représentaient la pointe de la démarche formaliste-constructiviste : le sur-urbanisme et le désurbanisme, conceptions nées pour ainsi dire en laboratoire au fur et à mesure des années 1920.

Voici ce qu’il en dit :

« Nos constructivistes – les frères Vesnine, Ginzburg et d’autres, suivant la doctrine de leurs collègues d’Europe occidentale – Corbusier, Gropius et d’autres, se sont longtemps couverts de phraséologie de gauche et de phrases fortes sur la « nature révolutionnaire, socialiste et de principe » de leur art.

Cependant, il ne fait aucun doute que nos constructivistes ont suivi l’exemple de leurs collègues d’Europe occidentale, représentants de l’architecture bourgeoise en décomposition.

Ces camarades ont-ils tenté de se libérer de la captivité du constructivisme bourgeois ? Ils ont fait quelque chose dans ce sens. Mais c’étaient des hésitations, et des hésitations aléatoires et sans principes.

En particulier, le groupe d’architecte autour de Ginzburg se précipita comme dans une fièvre du sur-urbanisme au désurbanisme, de la propagande de gigantesques complexes résidentiels – des maisons communales, avec près d’un million d’habitants, aux huttes sur cuisses de poulet, des principes de Corbusier dans la planification des villes industrielles, à la prédication de la destruction des villes et leur remplacement par des villages paysans idylliques.

Engagés dans des expériences irresponsables, ils ont défiguré des villes avec des maisons-boîtes grises ternes, des maisons d’aquarium, des serres, des maisons pour voiture et d’autres curiosités similaires.

Ces erreurs et ces hésitations sans principes sont le résultat d’une méconnaissance de l’essence de l’architecture soviétique et de son rôle dans la construction socialiste, une incompréhension des tâches que le parti et le gouvernement nous ont confiées. »

C’est que le sur-urbanisme et le désurbanisme étaient des utopies formées dans les esprits d’ultra-gauchistes dans les cabinets d’architecture, une situation permise par la situation particulière des années 1920. Il n’y avait aucune production concrète, à part des réalisations architecturales formelles et prétentieuses. Il s’agissait, au sens strict, de projets idéologiques ultras, qui furent par conséquent rejetés.

Le sur-urbanisme fut théorisé jusqu’à son comble par Leonid Sabsovich, le désurbanisme par Mikhail Okhitovich. Le premier voulait que les gens vivent les uns sur les autres, jusqu’à effacer leur individualité ; le second exigeait une indépendance la plus grande possible des gens, jusqu’à l’éloignement géographique maximal devant obligatoirement se servir de véhicules dans un environnement semi-rural.

Au sens strict, on peut dire que la ligne de Mikhail Okhitovich était typiquement capitulationniste – trotskiste en ce qui concerne les possibilités de l’industrialisation, celle de Leonid Sabsovich étant au contraire triomphaliste – volontariste jusqu’à l’utopisme planiste ultra.

Mikhail Okhitovich avait d’ailleurs initialement été un partisan de Trotsky et exclu du Parti en 1928, puis autorisé à le réintégrer en 1930, mais menant ensuite une campagne en faveur du constructivisme, puis du désurbanisme, et par conséquent liquidé.

Pour Mikhail Okhitovich, les unités d’habitation devaient regrouper 3, 20, 50, 500 personnes, couvrant toute une zone géographique, chaque ménage vivant dans un préfabriqué modulable, alors que pour Leonid Sabsovich, on parle de grands blocs collectifs de 50 000 personnes où les personnes n’ont droit qu’à une petite chambre chacune et encore seulement pour y dormir.

Mikhail Okhitovich prônait le désurbanisme comme fétichisme absolu de l’individu, Leonid Sabsovich comme sa négation la plus absolue. C’était des utopies faites en laboratoire, où l’architecture devenait le fond révolutionnaire par excellence.

Des habitations le long de « rubans » comme projet pour la ville de Magnitogorsk selon Mikhail Okhitovich

Les préfabriqués devaient être modulables selon Mikhail Okhitovich, afin de pouvoir être rassemblé par exemple pour une vie de couple, ou bien désassemblés en cas de divorce. Les transports seraient effectués par voiture , train ou avion. L’architecture devait suivre une individualité pour ainsi maximalisée, c’est une utopie ultra-individualiste.

Des habitations modulables comme projet pour la ville de Magnitogorsk selon Mikhail Okhitovich

Pour Leonid Sabsovich, la planification urbaine était strictement inverse, elle imposait un rassemblement généralisé et la suppression même de l’idée de ménage, les individus étant de purs rouages de la production, les enfants étaient « collectivisés », etc.

Cela donnait une allure hyper-révolutionnaire à son communautarisme architectural, qui prétendait immédiatement appliquer des préceptes collectivistes, pour façonner les gens ; c’était en réalité une démarche mécanique – formelle.

Voici une présentation de son utopie ultra-productiviste planiste dans son ouvrage Villes socialistes de 1930 :

« Le problème de la ville devient extrêmement important. Car si le développement de l’industrie, de l’agriculture et des transports doit créer la base matérielle de la possibilité de construire le socialisme, alors la restructuration de nos villes et villages doit créer les conditions immédiates pour la réalisation d’un mode de vie socialiste, les conditions immédiates pour la réalisation du socialisme (…).

Une autre voie s’est tracée récemment : c’est la voie d’une reconstruction socialiste radicale de la vie, la voie d’une restructuration complète de la vie sur la base de la socialisation complète du service aux besoins quotidiens et culturels de la population laborieuse, la voie de la construction les nouvelles villes socialistes et la reconstruction socialiste radicale des villes existantes. 

Les partisans de cette voie soutiennent que nous devons nous éloigner de la voie des « réformes sociales » progressives dans le mode de vie des travailleurs, que nous devons immédiatement nous engager sur la voie d’une reconstruction radicale de la vie sur des principes socialistes (…).

L’expansion de l’industrie dans les villes existantes, à son tour, conduit à un afflux encore plus important de personnes dans ces villes, à l’expansion de la construction de logements, à une augmentation de la capacité des voies de transport, à l’expansion des services publics, etc. la présence dans nos villes de travailleurs, surtout de travailleurs qualifiés, la présence de logements pour les travailleurs, la disponibilité d’équipements, d’institutions centrales, etc., tout cela nous oblige à construire des entreprises industrielles principalement dans les villes existantes. 

L’expansion de l’industrie dans les villes existantes, à son tour, conduit à un afflux encore plus important de personnes dans ces villes, à l’expansion de la construction de logements, à une augmentation de la capacité des voies de transport, à l’expansion des services publics, etc.

Ainsi, une chaîne sans fin est obtenue, ce qui conduit à la création de villes géantes, qui sont un produit typique de l’ère capitaliste du développement humain. 

Nous suivons l’ancienne voie capitaliste éprouvée, sans tenir compte des changements économiques et sociaux radicaux que la période de reconstruction socialiste de l’économie nationale apporte à notre développement (…).

Dans un avenir proche, nous n’aurons plus besoin des grandes villes, qui créent inévitablement des conditions très malsaines pour la vie et le travail de la population active. Le réseau de transport dense, que nous devrons créer d’ici 5 à 8 ans, nous permettra d’implanter beaucoup plus librement les entreprises industrielles sur l’ensemble du territoire de l’Union (…).

Nous devons tirer des conclusions similaires en ce qui concerne le développement des grandes villes existantes. Il faut arrêter complètement d’y construire de nouvelles entreprises, déplacer ces entreprises sur un territoire à plusieurs dizaines de kilomètres de ces villes et construire de nouvelles villes socialistes autour de ces entreprises (…).

Il faut esquisser un plan de décentralisation progressive des villes existantes en construisant leur périphérie le plus loin possible du centre-ville et en faisant ainsi de ces périphéries des villes nouvelles indépendantes. 

Au lieu de plans d’expansion sans fin des villes existantes, au lieu de plans de création du « Grand Moscou », du « Grand Nijniy Novgorod », etc., nous devons créer des plans de décentralisation progressive et de reconstruction socialiste des villes existantes (…).

Les villes nouvelles, créées au début comme des villes à prédominance purement agraire, nous nous transformerons progressivement en villes agraires-industrielles, créant dans ces villes des entreprises industrielles de transformation des produits agricoles, ainsi que toutes sortes d’autres entreprises industrielles. 

De la même manière, nous transformerons progressivement les villes industrielles en villes industrielles-agraires, réunissant en elles la population travaillant à la fois dans les entreprises industrielles et dans les grandes entreprises agricoles adjacentes à la région industrielle . Certaines des villes que nous créerons immédiatement en tant que villes industrielles-agraires ou agraires-industrielles (…).

Le ménage, cette base de la vie individualiste petite-bourgeoise, absorbe improductivement une énorme quantité de travail. Selon le RSFSR RCT, 36 millions d’heures de travail sont consacrées quotidiennement à la cuisine dans le ménage, soit environ 4,5 millions de journées de travail complètes (traduites par une journée de travail de 8 heures). 

La cuisson centralisée dans nos cuisines d’usine imparfaites ne nécessiterait que 6 millions d’heures de travail par jour, c’est-à-dire qu’elle libérerait environ 4 millions de mains des dépenses de travail improductives. Nous avons la même dépense improductive de travail dans le ménage individuel dans le domaine de la lessive, de la garde des enfants, etc.

Il suffit de souligner qu’en présence d’un ménage, seuls 30 % environ de la population totale peuvent être employés à un travail socialement productif, tandis que dans la socialisation de la vie quotidienne, plus de 60 % peuvent être employés à un travail productif (…).

Ces maisons modernes, étant un produit de la vie individualiste, adapté à son entretien, à la fois nourrissent cette vie individualiste, petite-bourgeoise, l’inculquent à la nouvelle génération, qui devra achever l’édification du socialisme et continuer à vivre dans les conditions du système socialiste réalisé . 

« Son coin à soi », ses meubles à soi, sa famille à soi, sa vie isolée, arrachée au collectif, tels sont les traits que le mode de vie individualiste petit-bourgeois qui règne dans les pays capitalistes et dans les nôtres instille dans les gens qui travaillent.

Cela est encore plus vrai par rapport à la vie de nos villages, où chaque famille, menant sa propre petite économie paysanne séparée, a son propre domaine, sa propre hutte, adaptée (et très mal adaptée) pour répondre à tous les besoins domestiques de l’agriculture qui sont à un niveau très bas la population.

Ce mode de vie petit-bourgeois et individualiste est en contradiction flagrante avec les tâches de construction du socialisme , avec les tâches de création d’un homme nouveau. Il est étranger au prolétariat en tant que classe édifiant le socialisme. 

Asservissant la moitié féminine de l’humanité, déformant la jeune génération, elle est hostile au prolétariat et elle doit être détruite comme l’un des héritages les plus difficiles du système capitaliste, entravant la force des travailleurs, les empêchant de construire une société socialiste. 

Les tâches de la révolution culturelle socialiste sont étroitement liées à la destruction de ce mode de vie petit-bourgeois et individualiste. Sans sa destruction, la révolution culturelle socialiste est impossible.

Le fossoyeur de la bourgeoisie – le prolétariat – est appelé à enterrer le mode de vie individualiste petit-bourgeois et à créer à sa place un mode de vie socialiste basé sur le service socialisé des besoins quotidiens et culturels des travailleurs. , libérant les travailleurs – et surtout les femmes – des soucis du ménage, de la garde des enfants et de leur éducation individuelle (…).

Nous ne devons pas construire de grandes villes avec une accumulation contre nature de masses gigantesques de la population. La taille des villes devrait mieux répondre à la tâche d’organiser systématiquement la vie et le travail collectifs des travailleurs et à la tâche de créer les conditions les plus saines pour la vie des travailleurs. 

Il faut tenir compte du fait que dans une ville socialiste, la vie publique et l’auto-activité publique de la population seront développées dans une mesure infiniment plus grande que dans nos villes. Par conséquent, il n’est guère opportun de construire une ville socialiste pour une population de plus de 50 000 à 60 000 personnes (…).

Les maisons d’habitation dans une ville socialiste doivent être construites de telle manière qu’elles offrent le plus grand confort pour la vie collective, le travail collectif, la récréation collective des travailleurs. Ils doivent également assurer les conditions les plus favorables au travail individuel et aux loisirs individuels. 

Dans ces maisons, il ne devrait pas y avoir d’appartements séparés avec cuisines, garde-manger, etc. , adaptés aux ménages individuels, car le maintien des besoins quotidiens des travailleurs sera complètement socialisé. Ils ne doivent pas non plus contenir les prémisses de la vie isolée de chaque famille individuelle, car la famille telle qu’elle existe aujourd’hui disparaîtra certainement.

La place de l’unité familiale fermée individuelle avec une vie séparée sera prise par la « famille collective » commune des travailleurs, dans laquelle il n’y aura pas de place pour un tel isolement (…).

L’une des questions importantes est de savoir si les enfants doivent vivre dans la même maison (bâtiment) que les adultes, ou si les maisons communales doivent être destinées uniquement à la population adulte (à partir de 17 ans environ). La question de la résidence commune des enfants sur la même place avec leurs parents ne peut être résolue que négativement (…).

Les enfants d’âge préscolaire et scolaire doivent passer la majeure partie de leur temps dans les locaux destinés à leur éducation, leur travail de production et leurs loisirs. Placer leur logement dans la même maison que des adultes, où ils doivent rentrer pour la nuit, semble également clairement inapproprié. Par conséquent, les bâtiments communaux résidentiels ne devraient être construits que pour la population adulte (…).

Tout ce qui crée aujourd’hui la nécessité de l’existence d’un ménage individuel et y lie une femme doit être complètement détruit dans une ville socialiste. En plus de l’exemption de cuisiner à la maison, une femme devrait être complètement libérée des tâches ménagères telles que la lessive, le raccommodage des vêtements, etc. 

Dans une ville socialiste, pour 60 000 habitants, le nombre d’adultes (à partir de 17 ans) sera de 40 à 42 000. Par conséquent, la ville entière sera composée de 15 à 20 complexes résidentiels et d’un certain nombre de grands bâtiments publics desservant l’ensemble population . Ainsi, dans une ville socialiste, selon le nombre d’étages, il n’y aura que 50 à 100 grands bâtiments. »

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L’orientation concrète de l’architecture soviétique

Il faut bien saisir comment, au début des années 1930, les architectes soviétiques ont su dépasser la dimension expérimentale – utopiste pour aborder de manière concrète la question du style socialiste.

Les architectes soviétiques ont ainsi participé à des discussions artistiques les 9, 10 et 13 juillet 1933, ce qui fut un moment important, car à ce moment-là, l’ensemble des architectes avait été réunie en 1932 dans une Association unique, l’Association des architectes soviétiques tient son premier congrès en juin 1937.

Son dirigeant fut l’ancien constructiviste Victor Vesnine ; ce dernier devint le principal architecte pour tout ce qui concernait l’industrialisation, ainsi que le président de l’Académie d’architecture de l’URSS.

Victor Vesnine

Il avait été ainsi mis fin aux regroupements divers et variés, dont les plus marquants au sens des plus bruyants furent les constructivistes de l’OSA (Organisation d’Architectes Contemporains), les « rationalistes » – en fait des formalistes – de l’ASNOVA (association de nouveaux architectes), les fétichistes de l’ARU (Association des architectes urbains) faisant du métier d’architecte le vrai planificateur de la société socialiste, les tenants gauchistes du proletkult de la VOPRA (Association panrusse des architectes prolétariens), etc.

Lors des discussions de 1933, des documents avaient été mis à la disposition, comme illustrations, avec des mots d’ordre. On a ici des orientations fondamentales pour l’architecture soviétique.

On a ainsi « Une planification complexe enrichit l’architecture avec de nouveaux moyens artistiques », accompagné par le Forum de Rome, l’Acropole et Versailles.

On a « L’expérience artistique du passé nous arme dans la lutte pour la nouvelle architecture socialiste », accompagné de deux œuvres de la Renaissance italienne : la chapelle des Pazzi de Filippo Brunelleschi à Florence et le palais Contucci d’Antonio da Sangallo le Vieux à Montepulciano.

La chapelle des Pazzi (source wikipédia)
Le palais Contucci (source wikipédia)

On a « Le problème de l’appropriation critique du meilleur que la culture mondiale a produit ne doit pas être feint par l’imitation passive d’anciennes formes architecturales et de systèmes stylistiques ». Le mot d’ordre est accompagné du Panthéon de Rome et de la cathédrale de Cologne.

On a « Traitons l’expérience architecturale des époques antérieures dans le laboratoire créatif de l’architecture soviétique », accompagné du palais de la Chancellerie et de la cathédrale de Cologne.

Le Panthéon de Rome
Le palais de la Chancellerie à Rome

On a « L’époque du socialisme doit rendre à l’architecture la plénitude du langage », accompagné du palais Chiericati d’Andrea Palladio à Vicence.

Le palais Chiericati (source wikipédia)
Le palais Chiericati

On a « Que soit un mis un terme aux maisons-boîtes recopiées sur le modèle des casernes », avec l’illustration d’une ligne d’habitations à Leningrad.

On a « Que soit mis un terme à l’abstraction sur papier du formalisme architectural », avec des exemples de projets fantasmagoriques des avant-gardes.

On a également des citations de Lénine sur la culture, accompagnées du palais des doges à Venise et du Parthénon.

Le palais des doges
Le palais des doges

On a ici des éléments essentiels de ce qui est la base de l’architecture soviétique de l’époque socialiste : la recherche d’une oeuvre concrète et non pas fantasmée, avec un travail s’orientant par rapport à l’idéologie socialiste tournée vers la vie réelle des masses, sur la base du meilleur de la culture humaine historiquement.

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L’ampleur et l’harmonie de l’architecture soviétique

L’architecte soviétique doit être impliqué dans son oeuvre, s’engager lui-même en elle et non pas avoir un regard froid, extérieur, car il s’agit de la reconnaissance de la dignité du réel, au cœur du matérialisme dialectique.

Ce n’est qu’ainsi qu’on est capable de suivre le cours réel des choses et de saisir le développement intérieur. Pour l’architecte, cela signifie être capable d’être un producteur et en même temps de comprendre de l’intérieur l’utilisation de ses œuvres, leur nature concrète.

Habitations à Leningrad, 1936-1940
Maison des stakhanovistes du chantier naval Krasnoïé Sormovo n°112 de la ville de Gorki, 1936-1939

L’architecte soviétique travaille pour le peuple soviétique, tout en relevant du peuple soviétique ; son travail est le support pour l’activité du peuple soviétique. C’est pourquoi les productions architecturales doivent permettre de saisir le processus en cours, au sens où ils reconnaissent eux-mêmes la dignité du réel de la construction du socialisme. C’est cela qui explique le classicisme comme expression de l’ampleur, de l’harmonie de la société en construction.

Opéra et ballet de Novossibirsk
Habitations à Magnitogorsk

L’architecture soviétique va dans le sens d’œuvres rassurantes et en même temps puissantes dans leur affirmation ; ces œuvres sont accessibles, elles n’écrasent pas, et en même temps elles sont un vecteur idéologique.

Sanatorium pour enfants à Yalta
Maison des bateliers à Kouïbychev

Il va de soi ici que la question du pouvoir est incontournable ; l’existence même de ces œuvres produites par le socialisme exprime directement l’activité des ouvriers et des paysans, qui sont aux commandes de la société et profitent directement des avancées faites. C’est cela qui fait que l’architecture soviétique est une composante de la mentalité de la citoyenneté soviétique.

Habitation à Gorki
Club des cheminots à Sverdlovsk

Il ne s’agit pas seulement de développer les forces productives, mais de le faire en restant aligné dans la perspective socialiste, dans les valeurs du socialisme.

Habitation à Moscou
Habitation à Moscou

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L’architecte soviétique face à son œuvre

La critique du constructivisme en architecture, au sens d’une tendance à privilégier la composition architecturale abstraite, à considérer la forme comme fin en soi, triompha aisément parmi les architectes soviétiques, qui avaient bien vu qu’on était à un tournant.

Karo Alabyan, dans Les tâches de l’architecture soviétique, souligne en 1937 que l’architecte produit au sein d’une société organisée, pour des êtres humains concrets, dont il n’est pas séparé par une muraille de Chine comme c’est le cas dans le capitalisme.

Il explique ainsi que :

« Le principe directeur de notre construction est le souci stalinien de l’homme.

À cet égard, l’architecture du métro de Moscou dirigée par L.M. Kaganovitch : le Parti a confié aux constructeurs la tâche de faire des gares souterraines de véritables œuvres d’art, qu’elles aient de belles formes, des couleurs vives, qu’elles soient légères, spacieuses, confortables, afin qu’une personne qui monte dans le métro ressente un sentiment de joie (…).

seul un mépris de l’homme peut expliquer l’indifférence totale de certains architectes à l’aménagement intérieur, à la décoration et à l’équipement des bâtiments, notamment résidentiels.

L’intérieur est ce domaine de l’architecture où une personne entre quotidiennement en contact avec l’art de l’architecture, le plus directement, pour ainsi dire, intimement.

C’est pour l’architecture soviétique, conçue pour répondre au maximum aux besoins quotidiens d’une personne, que les questions intérieures revêtent une importance exceptionnelle.

Dans la pratique de l’aménagement intérieur des bâtiments résidentiels, les vestiges du fameux «fonctionnalisme», une interprétation simpliste et purement mécaniste des «processus se déroulant dans le bâtiment», affectent encore.

L’architecture intérieure d’un bâtiment résidentiel doit prendre en compte les besoins et les exigences les plus divers d’une personne, allant de ses plus petits besoins quotidiens à ses besoins esthétiques et ses goûts artistiques. »

Pour se tourner de manière adéquate vers les êtres humains concrets et leurs besoins, les architectes doivent vivre au rythme du peuple et de son activité. Leurs productions doivent être en phase avec la réalité et les gens réels, s’inscrire dans leur vie et donc être accessible.

L’école 518 à Moscou, par Ivan Andreevich Zvezdine, 1935

On retrouve les principes du réalisme socialiste en peinture, en musique, en sculpture… le caractère typique, l’ancrage dans la vie quotidienne réelle, l’adéquation avec le peuple et son histoire. Karo Alabyan résume pour cette raison l’approche architecturale selon le réalisme socialiste par les principes de vérité et de simplicité.

« Notre architecture soviétique est étrangère au mensonge, aux formes abstraites, à toutes sortes de bouffonneries esthétiques bourgeoises. Le réalisme socialiste en architecture signifie avant tout : vérité et simplicité.

La véritable simplicité artistique n’a rien à voir avec la simplification. Il témoigne de la véritable maîtrise de toute la richesse du contenu.

Pouchkine a travaillé dur pour parvenir à une forme simple de ses brillants poèmes. Les œuvres de Lénine et de Staline sont simples et claires, car elles sont le summum de la pensée humaine. 

La simplicité des formes d’une structure architecturale signifie avant tout la belle harmonie de ces formes, qui, à son tour, est l’expression des proportions et des rapports les plus parfaits des éléments individuels.

Le réalisme socialiste n’est pas un système de normes et de canons abstraits. L’étroitesse et la limitation sont, par leur nature même, étrangères à la méthode du réalisme socialiste.

C’est la méthode du réalisme socialiste qui ouvre à l’architecte des possibilités illimitées d’enrichir son langage artistique, sa créativité et sa compréhension des différents styles. »

Le métro de Moscou, une initiative d’envergure pour l’architecture socialiste dans les années 1930

Cette vérité et cette simplicité s’opposent au culte de la forme pour la forme – c’est le formalisme, dénoncé à tous les niveaux artistiques en URSS dans les années 1930. Karo Alabyan constate ainsi que la bataille est en cours :

« La restructuration créative de l’architecture soviétique est loin d’être achevée. Dans notre pratique, les rechutes du formalisme, du constructivisme et d’autres influences qui nous sont étrangères sont encore fortes.

Le culte de la « forme pure » surgit toujours sur la base de l’appauvrissement de la pensée, de l’absence de grandes idées. Plus l’architecte est impuissant à révéler le contenu, à résoudre l’image artistique, plus il essaie de se vanter de manière intrusive de son « originalité », en recourant à diverses fausses méthodes, à la création de formes abstraites et à la ruse pour cela.

A ses origines, le formalisme de notre architecture, comme le constructivisme, est lié aux dernières tendances décadentes de l’architecture bourgeoise d’Europe occidentale. Les opus formalistes n’ont rien de commun avec la réalité soviétique. Le formalisme est anti-peuple, anti-démocratique, il est hostile à la vérité, hostile à nos grandes idées de construction socialiste.

C’est pourquoi la lutte contre le formalisme est en même temps une lutte pour les architectes, qui, bien que sujets à cette grave maladie, ne sont pas désespérés du point de vue de leur restructuration ; c’est la lutte pour leur développement créatif et idéologique correct, la lutte pour leur vision du monde. »

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L’architecture soviétique : des œuvres architecturales posées

Ce qui n’allait pas avec la démarche fonctionnaliste, portée souvent par des architectures d’esprit moderniste, de type cubo-futuriste, c’était la dimension impersonnelle de leur travail.

L’architecture soviétique de l’époque socialiste a inversement toujours souligné deux choses : tout d’abord, qu’il fallait arriver à un style qui porte une dimension humaine, avec un architecture portant son oeuvre, dans une confrontation subjective, et non pas au moyen d’un « objectivisme » neutralisateur et abstrait.

Ensuite, qu’il n’y avait pas de ligne de conduite générale pour tous les architectes, seulement des exigences historiques. C’est ce qui explique le puissant élan qu’il y a dans les années 1930 qu’il y a chez les architectes soviétiques à formuler des œuvres qui posent quelque chose.

Habitations, Moscou
Habitations, Moscou

Cette démarche de « poser » une oeuvre a puissamment puisé dans le classicisme ; l’une des références incontournables est ici le Vénitien Andrea Palladio (1508–1580). Les commentateurs bourgeois considèrent d’ailleurs l’architecture « stalinienne » comme un néo-palladianisme.

Bibliothèque d’Etat Lénine, Moscou

C’est que l’architecture soviétique s’inscrit dans la construction du socialisme et marque donc l’établissement d’objets architecturaux à la fois nécessaires et marquants. Il s’agit à la fois de refléter la construction du socialisme et de relever de celle-ci. La construction de logements est emblématique de cela.

Habitations, Moscou
Habitations, Moscou

La question de l’envergure était d’autant plus nécessaire que la réalité soviétique était en rupture quantitative complète avec le régime passé qui pourrissait sur pied. Il y avait des choses nouvelles et d’importance.

Habitations, Moscou
Siège de la Pravda, Moscou

La ville de Moscou acquiert ici la dimension principale de l’architecture soviétique, car elle était considérée comme la capitale du socialisme.

Habitations, Moscou
Habitations, Moscou

L’architecture soviétique ne se veut donc pas une fin en soi, ni un mode opératoire, elle ne prétend pas modifier la réalité. Elle l’accompagne, la reflète, l’exprime.

Habitations, Moscou
Intérieur de la maison de la culture de l’usine automobile Staline à Moscou

C’est pourquoi les habitations elles-mêmes relèvent d’une véritable exigence au niveau du style, sans quoi elles voient leur statut dégradé à un simple niveau fonctionnel faussement pragmatique, comme cela le sera justement dans le révisionnisme à partir de 1953.

C’est pourquoi aussi les critiques furent innombrables à l’époque, chaque production étant analysée, évaluée, afin d’avancer toujours plus. Il n’y avait aucune auto-satisfaction, même si bien entendu il fallait également lutter contre les routines.

Habitations, Rostov sur le Don
Habitations, Kiev

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Le bâtiment de la Centrosoyuz

Pour comprendre l’architecture soviétique, ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas, on peut s’appuyer sur l’exemple du bâtiment de la Centrosoyuz, l’Union centrale des coopératives de consommateur, qui ouvrit ses portes en 1934 à Moscou et abrita très rapidement le bâtiment du Commissariat du peuple à l’industrie légère. C’est le fruit de tout l’esprit des années 1920 et du début des années 1930, avec une vague de jeunes intellectuels ayant rejoint le camp de la révolution de 1917 et œuvrant dans une perspective utilitaire.

La mise en place du nouveau régime a en effet libéré les forces productives et permis un élan généralisé de constructions ; sur le plan architectural, cela implique la construction de bâtiments publics, de maisons de la culture, d’hôpitaux, de centres sportifs, d’installations scientifiques, d’écoles et d’universités, d’usines, de bureaux, de bâtiments résidentiels, etc.

Cela a permis à toute une génération de se mettre à la tâche, d’avoir des idées nouvelles, mais également, de fait, d’expérimenter sans un réel cadre et de faire parfois un fétiche de cette expérimentation.

Le bâtiment de la Centrosoyuz n’a toutefois pas été réalisé par un jeune architecte, mais par l’architecte suisse Le Corbusier, aidé de son cousin et associé Pierre Jeanneret, ainsi que du jeune architecte russe Nikolaï Kolli. Le Corbusier était alors en train de devenir la principale figure mondiale de l’architecture, avec, pour résumer, l’utilisation massive de structures en acier ou en béton armé afin de faire tenir l’ensemble et d’agencer librement le reste, tout ce qui était porteur initialement n’étant plus nécessaire.

Le Corbusier a ainsi une conception qui le fait passer, à ses yeux, d’architecte à urbaniste, c’est-à-dire de maître d’un certain agencement, suivant une logique compositionnelle. Au sujet du Centrosoyuz, il explique ainsi :

« Nous avons abordé le problème en urbanistes, c’est-à-dire que nous avons considéré que les couloirs et les escaliers sont comme des rues fermées.

En conséquence, ces rues ont une largeur de 3,25 mètres et sont toujours bien éclairées. De plus, nous avons remplacé les volées d’escaliers pénibles par des rampes en pente douce (14 %) qui permettent une circulation libre et facile. »

De fait, le bâtiment n’a strictement aucun escalier, l’accès aux sept étages se faisant par des rampes, le bâtiment lui-même consistant en trois immeubles accueillant 3 500 personnes, avec une cantine, des salles de conférence (dont une grande dans un bâtiment séparé), une salle de lecture, etc. ; l’idée était de faciliter le mouvement en permanence.

Le projet initial de Le Corbusier a d’ailleurs été modifié, puisqu’il y avait un concours d’architecture, Le Corbusier étant vainqueur au troisième tour.

Alexandre Vesnine, le plus grand représentant des architectes soviétiques de perspective « constructiviste » des années 1920 et du début des années 1930, salua ainsi l’œuvre de Le Corbusier :

« Le bâtiment du Commissariat du peuple de l’industrie légère à Moscou, sur la rue Myasnitskaya, en cours de construction selon le projet de l’architecte Le Corbusier, sera sans aucun doute le meilleur bâtiment construit à Moscou depuis un siècle.

La clarté exceptionnelle de la pensée architecturale, la netteté de la construction des masses et des volumes, la pureté des proportions, la clarté des rapports de tous les éléments opposés en contraste et en nuance, l’ampleur de la structure entière dans son ensemble et dans ses parties individuelles, la légèreté alliée à la monumentalité, l’unité architecturale, une stricte simplicité caractérisent cet ouvrage. »

Inversement, Ivan Fomine critique l’absence d’esprit à l’œuvre, ce qui aboutissait selon lui à une démarche planiste-formelle :

« Le Corbusier est l’architecte d’un pays capitaliste. Il veut construire magnifiquement, à moindre coût, commodément, sous des formes constructivement justifiées – et c’est sa tâche.

Notre architecte, avec son architecture, apporte l’esprit de gaieté, de courage et de gaieté dans notre nouveau mode de vie. Il n’y a pas de tels mots dans le lexique du Corbusier. »

La critique d’Ivan Fomine l’emporta et de fait, au moment de la construction de la Centrosoyuz, l’architecture soviétique était déjà passée à autre chose. Cette question de l’esprit était central : l’architecture se devait d’avoir un architecte s’engageant humainement dans son œuvre, sans quoi la démarche tournait à l’abstraction.

C’était le développement du réalisme socialiste dans l’architecture. La Centrosoyuz ne servit ainsi pas de modèle, alors que du tuf arménien y fut ajoutée pour humaniser les larges surfaces neutres.

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L’architecture soviétique de l’époque socialiste: une construction parallèle au socialisme

Lorsque se produit la révolution d’Octobre en 1917, les pays qui vont constituer l’Union Soviétique sont très peu développés. Cela signifie que l’architecture soviétique a dû accompagner le développement des différents pays, tout en dépendant étroitement des capacités productives en train d’être mises en place seulement.

Cela produisit une contradiction significative initialement entre des architectes en mode utopiste, élaborant en laboratoire des plans d’autant plus de grande envergure qu’ils s’avéraient irréalisables, et la réalité architecturale d’une URSS en construction cherchant à mettre en place à la fois des références et des exemples majeurs.

Les années 1920, plutôt expérimentales, cédèrent pour cette raison la place à des années 1930 où l’architecture s’alignait sur le réalisme socialiste, en soulignant la véracité, la simplicité, l’affirmation.

Habitations à Leningrad
Monument pour Lénine, Kazan

Par véracité, il faut comprendre que l’architecture se fonde sur la vie quotidienne réelle des gens en URSS ; par simplicité, il faut saisir l’absence de fonctionnalisme ou de formalisme, c’est-à-dire de fioritures, de formes comme fin en soi ou pseudo-preuve de « radicalité ».

Par affirmation, il faut entendre la mise en valeur d’une vie nouvelle, d’une culture propre à des pays socialistes, avec chacun leurs particularités culturelles historiques.

Station sur le canal Moscou à Khimki, près de Moscou
Maison de la culture Maxime Gorki MoscouNarva à Leningrad

L’architecture soviétique de l’époque socialiste rejette ainsi le fonctionnalisme, qui fait de la fonction l’alpha et l’oméga de toute construction. Elle n’accepte pas le formalisme, qui fait de la forme une fin en soi. Elle exige de se tourner vers les gens et d’accompagner la réalité socialiste en construction de ces gens.

Boulevard Nikitsky, Moscou
Place Arbat, Moscou

L’architecture soviétique de l’époque socialiste – de 1917 à 1953, ou plus exactement pour être strict du début des années 1930 à 1953 – se veut ainsi à la fois un accompagnement et une mise en perspective. Il n’y a pas de recettes définitives, mais des mises en place qui visent à exprimer une réalité et à s’inscrire en elle, dans un rapport dialectique.

Perspective Kirov, Leningrad
Perspective Kirov, Leningrad

L’architecture soviétique de l’époque socialiste cherche donc à synthétiser une époque ; elle n’a eu de cesse de travailler à l’élaboration d’un style qui soit en correspondance avec l’esprit de la planification soviétique et la démarche socialiste de millions d’ouvriers et de paysans. C’est là la tension dialectique à la base en ce domaine.

Institut de l’industrie légère, Leningrad
Habitations à Leningrad

Il y a donc l’exigence d’un nouveau classicisme, d’une architecture en phase avec la citoyenneté soviétique.

Ecole d’ingénieurs, Leningrad

Il faut ici remarquer que l’architecture soviétique va nécessairement de pair avec la sculpture et des arts en général, de l’urbanisme au sens de l’agencement des lieux. Il ne saurait exister d’endroits séparés du reste par une muraille de Chine, comme c’est justement le cas dans le capitalisme qui sépare tout.

Monument aux victimes du 9 janvier 1905 à Leningrad
Monument à Lénine à Smolny

En ce sens, comprendre l’architecture soviétique de l’époque socialiste est simple en général, mais demande plus concrètement, si l’on veut pousser les choses jusqu’au bout, de s’intéresser à chaque ville en particulier, avec son histoire et sa nature particulière.

Leningrad est ainsi une ville historique, laissant peu de moyens de construire des œuvres majeures nouvelles, alors que Moscou a été façonnée par le capitalisme et exigeait une réorganisation. Inversement la ville de Stalino (aujourd’hui Donetsk) était pratiquement entièrement nouvelle.

Parc central de culture et de loisirs Gorki, Moscou
Monument à Volodarski, Leningrad

Le Parc central de culture et de loisirs Gorki à Moscou, ouvert en 1928, est ainsi emblématique de l’accompagnement de la vie quotidienne des gens.

Parc central de culture et de loisirs Gorki, Moscou
Parc central de culture et de loisirs Gorki, Moscou

Il est pour cette raison erroné de séparer l’architecture soviétique de l’époque socialiste de la réalité concrète à l’époque, des gens réels dans leur vie quotidienne, même si c’est naturellement nécessaire pour une introduction et une compréhension du phénomène historiquement.

Parc culture et de recréation Izmaïlovsky, Moscou
Habitations, Moscou

L’architecture soviétique de l’époque socialiste est, en ce sens, toujours une réponse concrète à une question concrète. C’est ce qui explique aussi les différences de sensibilité ou le décalage qu’on peut avoir aujourd’hui sur certains points, principalement la question du rapport à la Nature. Il s’agit ici de la maturité d’une époque qui joue, pas une question idéologique en soi – même si inversement l’époque joue sur l’idéologie, ce qu’explique la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne en Chine populaire.

Stade du dynamo
Stade du dynamo

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