Auteur/autrice : IoULeeM0n

  • Le Palais des Soviets

    Lorsque le projet du Palais des Soviets est validé en tant que tel en 1939, on est dans une extrême effervescence. Il ne s’agit en effet pas d’un projet bureaucratique, mais d’une initiative générale engageant non seulement le Parti et les architectes choisis pour former l’équipe de base, mais également les meilleurs artistes en peinture, sculpture… ainsi que les techniciens dans de multiples domaines.

    C’est que d’un côté, les proportions du Palais des Soviets sont devenues titanesques : le bâtiment fait 300 mètres, la statue de Lénine 100 mètres.

    La statue représentait ici naturellement le plus grand défi technique et encore en 1939 il y a de très vastes débats sur le choix de la forme de Lénine, en rapport avec la perspective. Le bâtiment était prévu au centre de la ville de Moscou, la statue est en effet vue très différemment selon les endroits où on se place, et ce sur une très grande échelle. Or, il fallait que cela soit réussi où que l’on se place.

    Furent ainsi été étudiées des sculptures d’importance d’Inde, de Chine, la statue du Bouddha du temple Kōtoku-in au Japon, des statues de l’antiquité égyptienne, grecque, romaine.

    Mais ce n’était là qu’un aspect somme toute secondaire par rapport à l’immensité du travail à effectuer pour l’intérieur du Palais des Soviets. Celui-ci doit en effet abriter des lieux devenant le cœur même du socialisme soviétique. Voici comment le principal architecte, Boris Iofan, explique de quoi il en retourne:

    « Nous avons essayé de rendre claire la silhouette du Palais, facile à retenir, ce qui est particulièrement nécessaire pour un édifice monumental. 

    La richesse de la solution tridimensionnelle du Palais exige le caractère laconique de son traitement architectural. 

    Les groupes sculpturaux sur les côtés de l’emblème de l’Union et les bas-reliefs, avec lesquels les parties rectangulaires de la façade du palais sont traitées, saturent son architecture et la rendent humaine, proche du peuple – le créateur des remarquables victoires de notre époque. 

    Le thème des groupes sculpturaux et des bas-reliefs révèle le Palais des Soviets comme un monument de la Grande Révolution socialiste d’Octobre, un monument de l’ère stalinienne.

    La disposition interne du Palais des Soviets est déterminée par son contenu idéologique en tant que Palais du Peuple, Palais de la Démocratie Socialiste. 

    Au centre de tout l’intérieur se trouve la Grande Salle – un amphithéâtre grandiose pour 21 000 spectateurs, et la Petite Salle pour 6 000 spectateurs, la salle de la Constitution de Staline, la salle de l’Héroïsme de la Guerre Civile, la salle de l’Héroïsme de la construction du socialisme. 

    En outre, deux salles sont destinées au travail séparé des chambres du Soviet suprême de l’URSS – le Soviet de l’Union et le Soviet des nationalités. 

    Les autres locaux majeurs du Palais sont : la salle des ordres et la salle de réception du gouvernement de l’URSS. Un complexe spécial est le siège des travaux du Présidium du Conseil suprême. 

    De plus, le Palais dispose d’un immense complexe de locaux desservant l’ensemble du Palais. »

    Une peinture d’Alexandre Kotyagine mettant en scène le Palais des Soviets

    On a ainsi une petite salle, en forme de demi-cercle, destinée à 6000 personnes, sans balcon afin de mettre tout le monde sur un pied d’égalité. La scène est peu profonde également, afin que les sièges latéraux disposent d’une bonne visibilité.

    Elle est destinée à des réunions, des conférences, des réunions du Soviet suprême de l’URSS (avec également deux salles annexes de 1200 personnes), des représentations théâtrales.

    Projet final de la petite salle
    Projet final de la petite salle

    On a une grande salle, qui elle est ronde, pour un diamètre de 140 mètres, profitant d’une hauteur de 100 mètres, avec un espace scénique central d’un diamètre de 42 mètres. Elle est destinée à 21 000 personnes pour des événements de nature solennelle. 

    Projet final de la grande salle
    Projet final de la grande salle
    Projet final de la grande salle

    Voici le bâtiment vu en coupe, avec la petite salle à gauche, la grande salle au centre.

    On voit qu’il y a également de nombreuses autres salles. Ce qui signifie que, concrètement, le Palais des Soviets exige 72 grandes sculptures, 650 bustes et petites sculptures,19 groupes sculpturaux dont la taille varie de 10 à 14 mètres, 11 000 m² de bas-reliefs externes et internes (représentant pas moins de 3 à 4 000 personnages), à quoi il faut ajouter des fresques, des panneaux, des mosaïques, des tapisseries.

    Cela demande un personnel nombreux et hautement qualifié, qui n’est justement pas disponible dans tous les domaines. Il faudrait en effet par exemple 530 sculpteurs épaulés de 630 assistants et de 500 ouvriers, or l’Union des sculpteurs soviétiques rassemble 300 personnes, à quoi on peut ajouter 150 semi-amateurs, 100 amateurs, 100 étudiants.

    C’est l’une des problèmes du projet de Palais des Soviets, alors qu’en plus, le choix des éléments picturaux demande à être encore réellement effectué.

    Les salles annexes illustrent bien cette question, puisqu’en 1939, on est pratiquement encore au stade des ébauches fondamentales.

    On a ainsi déjà le foyer principal, appelé salle de la Constitution stalinienne. C’est elle qui donne sur la façade du Palais des Soviets. Elle fait 75 mètres sur 26, pour une hauteur de 17 mètres.

    La salle de la Constitution stalinienne
    La salle de la Constitution stalinienne
    La salle de la Constitution stalinienne

    Les deux autres salles importantes sont consacrées à l’héroïsme de la guerre civile et à l’héroïsme de la construction socialiste. Elles font 52 mètres sur 20, pour une hauteur de 20 mètres. Elles donnent sur la rue historique de Volkhonka pour l’une et sur la rivière Moskova pour l’autre.

    La salle des héroïques de la guerre civile, avec la prise du palais d’Hiver comme thème central, sur une suggestion de Staline

    Le travail artistique à mener est gigantesque et, surtout, la combinaison des arts est considérée comme l’aspect central de la démarche. Tout le discours soviétique au sujet du Palais des Soviets présente comme la substance même de l’oeuvre sa capacité à faire s’entremêler les arts, témoignant du niveau historique atteint.

    Boris Iofan résume bien cette dimension historique de la coopération des arts dans le Palais des Soviets en disant en 1939 que :

    « La forme architecturale devient plus expressive lorsqu’elle est combinée avec la sculpture. La sculpture acquiert plus de monumentalité et de puissance en étant associée à l’architecture. 

    La peinture murale de la même manière enrichit l’architecture et s’enrichit elle-même intérieurement à travers l’architecture.

    L’étroite coopération des arts donne une variété et une richesse de possibilités artistiques, la puissance des techniques artistiques et assure la création d’images artistiques véritablement monumentales et profondément idéologiques.

    La recherche d’un grand art monumental dans le passé a souvent échoué et s’est soldée par de profondes crises créatives. 

    Ces échecs étaient dus à l’incohérence interne inhérente même aux périodes de plus haut épanouissement des arts à différentes époques.

    L’absence d’une vision intégrale du monde, le conflit de l’artiste avec l’environnement ont souvent donné lieu à des contradictions entre la forme et le contenu dans la créativité artistique.

    Ces collisions internes se sont parfois transformées en une tragédie de la créativité, une tragédie de l’art. Dans les meilleures œuvres de Michel-Ange, nous pouvons retracer les contradictions non résolues entre la forme et le contenu, entre l’artiste et l’environnement.

    L’intégrité de la vision du monde et la véracité de la créativité dans la vie, le lien de cette créativité avec le peuple, l’absence de contradictions entre l’artiste et la société – telles sont les conditions préalables au grand art, qui sont données à notre époque par notre culture socialiste , libre des contradictions de l’ancienne société. »

    Il faut ajouter à cela 90 escalators, 200 ascenseurs, la lumière intérieure demandant une grande complexité en fonction de ce qui est mis en valeur, la lumière extérieure pour illuminer la statue, un énorme travail jamais mené jusque-là sur l’acoustique, le départ et l’arrivée de 41 000 personnes présentes dans le bâtiment, la question des couleurs à employer en général (et les décalages des couleurs sur grande distance et avec la perspective), etc.

    Le projet du Palais des Soviets mettait ainsi en branle des artistes et des ingénieurs dans tous les domaines, servant d’émulateur idéologique et pratique.

    Le processus en cours eut toutefois déjà ses bases posées à partir de 1938. Deux anneaux concentriques en béton d’un diamètre de 140 et 160 mètres furent mis en place, chacun de 21 mètres de hauteurs, pour soutenir 34 colonnes en acier chacun devant permettre de porter la statue.

    Cela demanda le déblaiement de 160 000 m3 de pierre et de 620 000 m3 de terre. Au total, la construction du Palais des Soviets prévoyait l’emploi de 350 000 tonnes d’acier.

    L’invasion nazie vint cependant anéantir les travaux en cours, le matériel devenant nécessaire pour faire face à l’invasion.

    Un groupe de travail s’installa à Sverdlovsk afin de continuer à améliorer le projet, mais il fut gelé en 1945, cédant la place à d’autres projets de construction qui étaient justement prévues pour aller avec le Palais des Soviets : les « sept sœurs ».

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  • Le Palais des Soviets : vers le projet final

    Le concours du Palais des Soviets connut une troisième forme, en mars 1932, avec 12 architectes seulement, puis 5 seulement, en juillet 1932.

    Au cours de ce processus, long et particulièrement étudié, c’est finalment le travail de Boris Iofan qui fut considéré comme la direction la plus juste, le Comité de la construction du Palais des Soviets en faisant la base sur laquelle il fallait se fonder.

    Voici d’autres œuvres proposées également.

    Vladimir Helfreich et Vladimir Chtchouko, 1932
    Victor et Alexandre Vesnine, 1932
    Alexeï Chtchoussev, 1932
    Ivan Joltovski, 1932
    Victor et Alexandre Vesnine, 1933
    Alexeï Chtchoussev et Ivan Joltovski, 1933

    Le projet de Boris Iofan évolua alors en le sens de davantage de hauteur, en mai 1933, avec la statue d’un prolétaire « libéré » (de 18 mètres de hauteur) surplombant le bâtiment ayant acquis une dimension désormais monumentale.

    Boris Iofan se vit, au cours de ce processus d’élaboration toujours plus poussée, épauler de Vladimir Helfreich et Vladimir Chtchouko afin peaufiner le projet, qui commença à avancer jusqu’à son acceptation totale lorsque la tour prit encore plus hauteur, avec une statue de Lénine qui vint s’adjoindre.

    C’est le sculpteur Sergei Merkulov, qui avait par ailleurs connu Lénine personnellement et qui devint un artiste émérite dans la production de ses statues, qui la conceptualisa.

    Il y a ici une montée en puissance ; le premier Congrès de l’Union des architectes soviétiques se tient en juillet 1937, le projet de Palais des Soviets est validé en 1939. Il devient un projet majeur idéologiquement, le grand symbole de la construction du socialisme.

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  • Le Palais des Soviets : la première étape

    Le Palais des Soviets n’a jamais vu le jour à Moscou, sa construction étant interrompue par la deuxième guerre mondiale impérialiste, puis stoppée par le révisionnisme. Cela devait être le monument majeur de l’URSS sur le plan architectural, la Cathédrale du Christ-Sauveur étant détruite en 1931 pour lui céder la place à la suite de l’ouverture d’un concours d’architecture en ce sens.

    C’est Sergeï Kirov qui s’était occupé de lancer le projet, affirmant qu’il fallait un endroit suffisamment vaste pour les grandes réunions des responsables des Soviets, ainsi qu’un symbole de la construction du socialisme en URSS, notamment en direction du prolétariat européen « endormi » encore. Son discours, datant du 30 décembre 1922, fut également celui où fut proclamé la fondation de l’URSS.

    Voici ce que dit Sergueï Kirov :

    « Ce bâtiment devrait être un emblème du pouvoir à venir , le triomphe du communisme, pas seulement ici, mais même là-bas en Occident… Ils parlent beaucoup de nous, ils nous caractérisent par le fait que nous effaçons les palais des banquiers, des propriétaires terriens et des tsars de la surface de la terre avec la vitesse de l’éclair. C’est juste.

    Érigeons sur place le nouveau palais des ouvriers et des paysans laborieux, rassemblons tout ce dont les pays soviétiques sont riches, mettons toute notre créativité ouvrière et paysanne dans ce monument et montrons à nos amis et à nos ennemis que nous sommes capables de décorer la terre pécheresse avec de tels monuments dont nos ennemis n’ont jamais rêvé. »

    Un concours fut ainsi lancé pour le projet d’un Palais des Soviets. Une telle idée de concours pour un grand projet s’était déjà réalisée en 1922, avec un appel pour un « Palais du travail ». Le gagnant fut Noi Trotsky, alors que les frères Vesnine (Alexandre, Victor et Leonid) présentaient alors la première oeuvre « constructiviste » en architecture. Le projet de Palais fut rapidement abandonné.

    Le projet de Noi Trotsky
    Le projet des frères Vesnine, premier projet architectural de type constructiviste

    Le concours pour le Palais des Soviets fut lancé en février 1931 ; il devait amener la réalisation à l’horizon d’une décennie, sous la supervision du Conseil pour la construction du Palais des Soviets (le terme Soviet voulant dire Conseil, cela donne en russe le Soviet pour la construction du Palais des Soviets, d’où la dénomination raccourcie employée de Soviet pour la construction).

    Le concours reçut 15 propositions, mais acquit rapidement une réputation mondiale et s’ouvrit en juillet 1931 à l’international, débouchant sur la production de 136 soviétiques et 24 non-soviétiques, dont celles d’éminents architectes comme Walter Gropius, Armando Brasini , Le Corbusier… pour 112 projets sous la forme de concepts conceptuels,160 sous la forme de projets architecturaux.

    Le Corbusier et la maquette de son projet

    Le côté hangar du projet de Le Corbusier l’amena à être rejeté, revenant trop au formalisme constructiviste des années 1920, ce qui rendit l’architecte très mécontent, au nom d’un esprit prétendument d’avant-garde.

    L’oeuvre de Le Corbusier fut critiquée ainsi en 1939 :

    « Si la façade avant de la grande salle (avec un arc géant en face) peut encore revendiquer une signification architecturale, les façades de la petite salle et la façade latérale de l’ensemble de la structure révèlent toutefois clairement une sous-estimation de l’attention nécessaire à la bonne conception architecturale de l’ouvrage. »

    Les autres œuvres rejetées étaient souvent plus dans l’esprit soviétique, elles étaient plus travaillées, mais avaient des travers trop marquants.

    Armando Brasini
    Armando Brasini
    Alexeï Chtchoussev
    Heinrich Ludwig
    Georges Krasine et Alexandre Kutsaev
    Karo Alabyan et Vladimir Simbirtsev
    Moïsseï Ginzbourg
    Nikolaï Ladovski 
    Leonid, Victor et Alexandre Vesnine
    Georgy Golts et Ivan Joltovski
    Ilya Golosov
    Karo Alabyan, Georgy Kochar et Anatoly Mordvinov
    Alexandre Vlasov
    Vladimir Helfreich et Vladimir Chtchouko
    Ivan Joltovski (second projet)
    Vladimir Helfreich et Vladimir Chtchouko

    Les gagnants du concours en février 1932 furent les soviétiques Boris Iofane et Ivan Joltovski, ainsi que l’Américain d’origine britannique Hector Hamilton, dont l’oeuvre était intitulé Simplicité.

    Simplicité de Hector Hamilton
    Plan de Simplicité

    L’oeuvre de Hector Hamilton marqua les esprits, mais elle avait un souci : elle était fonctionnaliste en ce qui concerne les déplacements. Il y avait bien de multiples entrées, mais aucune place à l’extérieure où se rassembler ; il devait même y avoir des voies pour automobiles souterraines sous le Palais.

    Le projet de Boris Iofane n’était quant à lui pas d’esprit symétrique et avait plus d’allant, avec notamment un monument et l’idée d’un espace marqué entre les bâtiments.

    Le projet d’Ivan Joltovski était quant à lui tourné vers un élément central organisant l’ensemble sous forme d’une composition très prononcée.

    Il fut néanmoins considéré par le Conseil de construction qu’on n’était pas encore au point et le concours connut une seconde grande étape.

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  • Les fantaisies architecturales de Iakov Tchernikhov

    Le métro de Moscou est le symbole même d’une architecture soviétique ayant une perspective générale et concrète, à rebours de l’utopisme expérimental des années 1920, dont les tenants s’effacèrent devant les exigences des années 1930.

    Iakov Tchernikhov est justement ici emblématique du constructivisme architectural et de ses prétentions à la radicalité ultra, à ceci près que lui s’est toujours cantonné dans une démarche purement théorique, même s’il a réalisé quelques projets secondaires. Lui-même était professeur et tout au long des années 1930-1940, il a réalisé des dessins à la dimension fantastique, mais particulièrement inspirante, à côté de nombreux ouvrages.

    Il s’insère ainsi dans l’architecture soviétique en mettant de côté toute prétention utopiste généralisée, ce qui en fait un personnage intéressant.

    Iakov Tchernikhov est surtout connu pour ses Fantaisies architecturales de 1933, année où une exposition lui fut accordée, sous la supervision de Sergueï Kirov lui-même, au Palais Anitchkov à Leningrad. Deux autres de ses ouvrages ont la même approche, Les fondements de l’architecture contemporaine et La construction des formes architecturales et mécaniques, mais il a également écrit L’Art du tracé graphique, Le Tracé géométrique, Cours général de dessin technique, Recherches graphiques sur les lettres de l’alphabet, cette dernière oeuvre paraissant en 1950.

    Iakov Tchernikhov relève donc d’une approche de laboratoire, mais sous la forme d’un dérapage contrôlé, sans les prétentions fantasmagoriques des constructivistes entendant refaçonner la société toute entière avec leur architecture comme moyen absolu.

    Ses œuvres restent d’ailleurs des compositions se cantonnant dans une ouverture, dans la proposition d’une inspiration, sans aller dans le sens d’un projet fermé, fourni clef en main.

    De telles œuvres étaient d’ailleurs destinées aux étudiants, afin de les aider à saisir la logique compositionnelle. Il en restait toutefois à un certain formalisme, puisque pour lui tout passait par les lignes, les surfaces, les solides.

    En fait, Iakov Tchernikhov considère que l’architecture est prétexte à une démarche visionnaire, mais qui ne peut pas forcément déboucher sur quelque chose de concret en raison d’une époque trop arriérée. Aussi, pour les temps nouveaux, il tente de se reconnecter avec ce principe d’architecte comme visionnaire afin d’élargir le champ de la compréhension de ce qu’est l’espace.

    Il dit ainsi que :

    « Dans mes contes de fées, je me suis permis toutes sortes de digressions, d’accumulations, d’exagérations et d’hypothèses, mais j’ai ainsi pu révéler les défauts et les avantages des caractéristiques qui influencent la création d’une forme. »

    Il y a d’un côté une tendance à aller chercher une forme « pure » comme dans le suprématisme, de l’autre côté il y a une véritable tentative de mieux cerner les possibilités compositionnelles dans l’espace.

    Il avait d’ailleurs publié en 1920 un ouvrage intitulé « Aristographie », de facture cubo-futuriste dans le sens suprématiste.

    La dimension compositionnelle, architecturale au sens strict, l’a emporté ; il ne termina d’ailleurs sa formation d’architecte qu’en 1925.

    Iakov Tchernikhov, à côté de son travail de professeur, continua toute sa vie dans cette perspective, produisant 17 000 dessins. Il faut bien saisir à l’arrière-plan qu’il avait une sorte de quête à la fois démocratique et utopiste.

    D’un côté, il considérait que l’architecture était un langage graphique de portée universelle, de dimension civilisationnelle, penchant donc vers le formalisme, vers l’architecture comme forme suprême. De l’autre, son objectif était de rendre disponible pour tous la dimension graphique de l’architecture.

    Il faut bien saisir également que certaines libertés sont prises avec les perspectives, rendant plus marquantes les œuvres, mais les rendant impossibles. Cela est assumé entièrement, le côté imaginatif prenant le dessus. Pour Iakov Tchernikhov :

    « Il se peut que le matériel présenté n’ait pas ses aspects positifs. Les fantasmes architecturaux montrent de nouveaux processus de composition, de nouvelles techniques d’affichage, cultivent le sens de la forme et de la couleur, entraînent l’imagination, excitent les impulsions créatives, attirent de nouvelles créations et idées, aident à trouver des solutions aux nouvelles idées, etc. (…).

    Avec l’aide des moyens d’expression figuratifs présentés dans les fantasmes architecturaux, nous avons l’opportunité de les appliquer à leur utilisation directe dans notre pratique utilitaire et, ainsi, d’améliorer cette dernière.

    De plus, en tant que l’une des techniques méthodologiques, les fantasmes architecturaux devraient être utilisés dans la pratique éducative des architectes novices. Ainsi, tout ce qui précède convainc que le côté positif des fantasmes architecturaux est utile, diversifié et grand, et cette circonstance nous permet de parler de l’attitude la plus attentive et la plus prudente envers cette étape du travail de l’architecte. »

    Iakov Tchernikhov, comme l’ensemble des architectes à quelques exceptions près, prit le tournant réaliste socialiste du début des années 1930, mais prisonnier de son approche compositionnelle, il se tourna vers l’aspect monumentaliste seulement.

    Ici, ses idées pour le Palais des Soviets, dont le concours fut un moment marquant pour l’architecture soviétique de l’époque socialiste.

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  • Le métro de Moscou

    Le métropolitain de Moscou est une oeuvre majeure de l’architecture soviétique ; au début des années 1930, c’est un projet symbolique de très grande ampleur, aux côtés de la réorganisation urbaine de Moscou et du Canal de Moscou (faisant 128 km et reliant la Moskova à la Volga), les trois projets étant officialisés en juin 1931 par le Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik).

    Le métropolitain de Moscou se vit accorder une attention significative, étant donné qu’il était considéré que cela doit être le symbole même de la citoyenneté soviétique.

    Station Sverdlov
    Passage entre la station de la place Sverdlov et celle de la Révolution

    Le métro de Moscou ouvrit ses portes en mai 1935, avec alors 13 stations pour une distance parcourue de 11,2 km. Là encore, la seconde guerre mondiale vint interrompre les travaux, néanmoins en 1950 il y a déjà 35 stations sur 5 lignes pour un parcours de 43,5 km.

    Station de la Maison des soviets
    Entrée de la station Krasnye Vorota (la porte rouge)

    La 5e ligne, de 1950, est circulaire et sert pour les correspondances ; c’est Staline qui a indiqué sa nécessité aux architectes en plaçant une tasse de café laissant une trace circulaire. Depuis, le symbole de la ligne est la couleur marron.

    Station de la place de la Révolution
    Entrée de la station de la Maison des soviets

    Les lignes sont particulièrement profondes, car il a été prévu dès le départ qu’il fallait que les stations puissent servir d’abri.

    Station Paveletskaïa
    Station Komsomolskaïa

    Le métro de Moscou s’appuie naturellement sur des mosaïques, des statues, des peintures, des bas-reliefs, etc. L’architecture soviétique unifie les arts de manière marquée.

    Station Komsomolskaïa
    Station Elektrozavodskaya
    Station Stalinskaïa
    Station Stalinskaïa

    Les stations s’appuient sur des thématiques. La station Kievskaïa, qui correspond à la gare de Kiev pour les trains à destination de l’Ukraine, thématise l’amitié russo-ukrainienne ; la station Belorusskaya, qui correspond à la gare de Biélorussie pour les trains à destination de celle-ci, thématise la Biélorussie et notamment les partisans (la station a ouvert en 1952), etc.

    Station Izmaylovskaya 
    Station Belorusskaya

    Il va de soi également que l’extérieur des stations elles-mêmes s’accorde justement avec les principes du métro lui-même.

    Station Dynamo

    Il est important de la souligner, car cette capacité d’unification des arts et de liaison systématiques des bâtiments dans leur nature est justement impossible pour le capitalisme.

    Station Izmaylovskaya 
    Station Paveletskaïa

    Le métro moscovite est l’exemple même d’un projet planifié, mais non pas formellement, ou fonctionnellement, mais justement bien avec une nature socialiste : c’est là l’exigence du réalisme socialiste.

    Station Izmaylovskaya 
    Station Sokol

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  • L’architecture soviétique au service d’une réalité en construction

    Le sururbanisme et le désurbanisme représentaient les deux faces de la même médaille, celle d’une architecture coupée de la réalité des gens et de leur histoire à travers les siècles. La notion de personnes travaillant y a disparu au profit d’individus considérés comme des numéros ou bien comme des valeurs absolues. En réalité, l’architecture soviétique se devait de se placer au service d’une réalité en construction.

    Sanatorium à Sotchi
    Sanatorium à Sotchi

    L’architecture soviétique de l’époque socialiste, avec Staline, ne perdait pas ainsi de vue son utilité, sans faire de la fonction des œuvres construites un fétiche, car les bâtiments mis en place exprimaient un cadre particulier avec ses exigences. Le caractère directement heureux de Sotchi n’est pas la nature directement ordonnée d’un lieu de décision administrative.

    Gare de Matsesta près de Sotchi
    Maison du Conseil des députés ouvriers du district Volodarsky à Leningrad

    De la même manière, la dignité d’une habitation ne correspond pas au caractère marquant d’un cinéma, un genre en expansion alors et possédant la même valorisation que le théâtre.

    Habitations à Leningrad
    Cinéma « Moscou » à Leningrad

    Ce qui est marquant justement dans le sururbanisme, le désurbanisme et autres utopies faites en laboratoire, c’est leur incapacité à produire des œuvres affirmatives relevant d’une dimension de masse. L’architecture soviétique y parvient justement, car elle est orientée par le Parti guidant le processus général de construction.

    Maison des soviets à Leningrad
    Maison des soviets à Leningrad

    Le deuxième aspect très important est que l’architecture soviétique, un aspect du réalisme socialiste propre à l’architecture, assume le patrimoine historique, s’inscrit dans l’Histoire et par conséquent valorise les éléments positifs du parcours des peuples. Les projets « utopistes » sont de leur côté fonctionnalistes, systématiquement cosmopolites.

    Monument au savant Mikhaïl Lomonossov, Moscou
    Monument au dramaturge Alexandre Ostrovski, Moscou

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  • Sur-urbanisme et désurbanisme

    La vague d’architecture constructiviste des années 1920, pour toute relative qu’elle ait été, avait frappé les esprits de par le côté « cube » ou « boîtes » des constructions et par le discours hyper révolutionnaire de leurs architectes, par le côté utopiste radical.

    Club des ouvriers Zouïev par Ilya Golossov
    Club ouvrier Roussakov à Moscou par Constantin Melnikov

    La plupart du temps, les projets constructivistes étaient de toutes façons irréalisables. On parle ici d’une idéologie au sens propre.

    Ville aérienne par Lazar Khidekel

    Le projet délirant de monument à la 3e Internationale de Tatline, imaginé en 1919-1920, signifiait par exemple une tour de 400 mètres de haut avec trois éléments en forme de double hélice en rotation permanente, un écran géant, des projections de texte sur les nuages, etc.

    De fait, même lorsque cela atteignait une certaine dimension sur le terrain, le côté formel l’emportait. Le bâtiment du Derzhprom (c’est-à-dire de l’industrie d’Etat) est ainsi efficace du point de vue constructiviste, il a été construit littéralement avec les moyens du bord, avec un état d’esprit très volontaire, au point que les ouvriers ukrainiens de Kharkiv, qui ne parlaient d’ailleurs pas russe, ont impressionné le poète Vladimir Maïakovsky.

    Cependant, s’il est mobilisateur abstraitement, une fois qu’il est mis en place, il n’y a pas d’esprit, pas d’âme. Si on est reste au point formel, c’est excellent, mais si on veut du fond, on ne trouve plus rien. Tout est sec.

    La construction du Derzhprom
    La construction du Derzhprom
    Le Derzhprom
    Le Derzhprom

    Dès le tout début des années 1930, le Parti Communiste d’Union Soviétique (bolchevik) avait prévenu que des intellectuels petits-bourgeois utopistes se rêvaient prendre les commandes de l’Etat pour réaliser, du moins l’imaginaient-ils, leurs fantasmagories. Dans le décret du Parti Sur les travaux de restructuration du mode de vie, du 16 mai 1930, il est ainsi affirmé que :

    « Le Comité central note que, parallèlement à la croissance du mouvement pour un mode de vie socialiste, il y a des tentatives extrêmement infondées, semi-fantastiques et donc extrêmement nuisibles de la part de camarades individuels pour « sauter » par-dessus ces obstacles sur la voie de la réorganisation de la vie dans les socialisme, tentatives qui s’enracinent, d’une part, dans le retard économique et culturel du pays, et d’autre part, la nécessité actuelle de concentrer au maximum les ressources sur l’industrialisation rapide du pays, qui seule crée la conditions matérielles réelles pour un changement radical de vie.

    De telles tentatives de certains travailleurs, qui cachent leur essence opportuniste sous la « phrase de gauche », incluent des projets qui sont récemment apparus dans la presse pour replanifier les villes existantes et en construire de nouvelles, exclusivement aux frais de l’État. »

    Cette « replanification » absolue rêvée par les « utopistes » allaient très loin. Dans Les tâches de l’architecture soviétique, écrit en 1937, Karo Alabyan, dénonce justement deux tendances marquantes de l’architecture soviétique qui représentaient la pointe de la démarche formaliste-constructiviste : le sur-urbanisme et le désurbanisme, conceptions nées pour ainsi dire en laboratoire au fur et à mesure des années 1920.

    Voici ce qu’il en dit :

    « Nos constructivistes – les frères Vesnine, Ginzburg et d’autres, suivant la doctrine de leurs collègues d’Europe occidentale – Corbusier, Gropius et d’autres, se sont longtemps couverts de phraséologie de gauche et de phrases fortes sur la « nature révolutionnaire, socialiste et de principe » de leur art.

    Cependant, il ne fait aucun doute que nos constructivistes ont suivi l’exemple de leurs collègues d’Europe occidentale, représentants de l’architecture bourgeoise en décomposition.

    Ces camarades ont-ils tenté de se libérer de la captivité du constructivisme bourgeois ? Ils ont fait quelque chose dans ce sens. Mais c’étaient des hésitations, et des hésitations aléatoires et sans principes.

    En particulier, le groupe d’architecte autour de Ginzburg se précipita comme dans une fièvre du sur-urbanisme au désurbanisme, de la propagande de gigantesques complexes résidentiels – des maisons communales, avec près d’un million d’habitants, aux huttes sur cuisses de poulet, des principes de Corbusier dans la planification des villes industrielles, à la prédication de la destruction des villes et leur remplacement par des villages paysans idylliques.

    Engagés dans des expériences irresponsables, ils ont défiguré des villes avec des maisons-boîtes grises ternes, des maisons d’aquarium, des serres, des maisons pour voiture et d’autres curiosités similaires.

    Ces erreurs et ces hésitations sans principes sont le résultat d’une méconnaissance de l’essence de l’architecture soviétique et de son rôle dans la construction socialiste, une incompréhension des tâches que le parti et le gouvernement nous ont confiées. »

    C’est que le sur-urbanisme et le désurbanisme étaient des utopies formées dans les esprits d’ultra-gauchistes dans les cabinets d’architecture, une situation permise par la situation particulière des années 1920. Il n’y avait aucune production concrète, à part des réalisations architecturales formelles et prétentieuses. Il s’agissait, au sens strict, de projets idéologiques ultras, qui furent par conséquent rejetés.

    Le sur-urbanisme fut théorisé jusqu’à son comble par Leonid Sabsovich, le désurbanisme par Mikhail Okhitovich. Le premier voulait que les gens vivent les uns sur les autres, jusqu’à effacer leur individualité ; le second exigeait une indépendance la plus grande possible des gens, jusqu’à l’éloignement géographique maximal devant obligatoirement se servir de véhicules dans un environnement semi-rural.

    Au sens strict, on peut dire que la ligne de Mikhail Okhitovich était typiquement capitulationniste – trotskiste en ce qui concerne les possibilités de l’industrialisation, celle de Leonid Sabsovich étant au contraire triomphaliste – volontariste jusqu’à l’utopisme planiste ultra.

    Mikhail Okhitovich avait d’ailleurs initialement été un partisan de Trotsky et exclu du Parti en 1928, puis autorisé à le réintégrer en 1930, mais menant ensuite une campagne en faveur du constructivisme, puis du désurbanisme, et par conséquent liquidé.

    Pour Mikhail Okhitovich, les unités d’habitation devaient regrouper 3, 20, 50, 500 personnes, couvrant toute une zone géographique, chaque ménage vivant dans un préfabriqué modulable, alors que pour Leonid Sabsovich, on parle de grands blocs collectifs de 50 000 personnes où les personnes n’ont droit qu’à une petite chambre chacune et encore seulement pour y dormir.

    Mikhail Okhitovich prônait le désurbanisme comme fétichisme absolu de l’individu, Leonid Sabsovich comme sa négation la plus absolue. C’était des utopies faites en laboratoire, où l’architecture devenait le fond révolutionnaire par excellence.

    Des habitations le long de « rubans » comme projet pour la ville de Magnitogorsk selon Mikhail Okhitovich

    Les préfabriqués devaient être modulables selon Mikhail Okhitovich, afin de pouvoir être rassemblé par exemple pour une vie de couple, ou bien désassemblés en cas de divorce. Les transports seraient effectués par voiture , train ou avion. L’architecture devait suivre une individualité pour ainsi maximalisée, c’est une utopie ultra-individualiste.

    Des habitations modulables comme projet pour la ville de Magnitogorsk selon Mikhail Okhitovich

    Pour Leonid Sabsovich, la planification urbaine était strictement inverse, elle imposait un rassemblement généralisé et la suppression même de l’idée de ménage, les individus étant de purs rouages de la production, les enfants étaient « collectivisés », etc.

    Cela donnait une allure hyper-révolutionnaire à son communautarisme architectural, qui prétendait immédiatement appliquer des préceptes collectivistes, pour façonner les gens ; c’était en réalité une démarche mécanique – formelle.

    Voici une présentation de son utopie ultra-productiviste planiste dans son ouvrage Villes socialistes de 1930 :

    « Le problème de la ville devient extrêmement important. Car si le développement de l’industrie, de l’agriculture et des transports doit créer la base matérielle de la possibilité de construire le socialisme, alors la restructuration de nos villes et villages doit créer les conditions immédiates pour la réalisation d’un mode de vie socialiste, les conditions immédiates pour la réalisation du socialisme (…).

    Une autre voie s’est tracée récemment : c’est la voie d’une reconstruction socialiste radicale de la vie, la voie d’une restructuration complète de la vie sur la base de la socialisation complète du service aux besoins quotidiens et culturels de la population laborieuse, la voie de la construction les nouvelles villes socialistes et la reconstruction socialiste radicale des villes existantes. 

    Les partisans de cette voie soutiennent que nous devons nous éloigner de la voie des « réformes sociales » progressives dans le mode de vie des travailleurs, que nous devons immédiatement nous engager sur la voie d’une reconstruction radicale de la vie sur des principes socialistes (…).

    L’expansion de l’industrie dans les villes existantes, à son tour, conduit à un afflux encore plus important de personnes dans ces villes, à l’expansion de la construction de logements, à une augmentation de la capacité des voies de transport, à l’expansion des services publics, etc. la présence dans nos villes de travailleurs, surtout de travailleurs qualifiés, la présence de logements pour les travailleurs, la disponibilité d’équipements, d’institutions centrales, etc., tout cela nous oblige à construire des entreprises industrielles principalement dans les villes existantes. 

    L’expansion de l’industrie dans les villes existantes, à son tour, conduit à un afflux encore plus important de personnes dans ces villes, à l’expansion de la construction de logements, à une augmentation de la capacité des voies de transport, à l’expansion des services publics, etc.

    Ainsi, une chaîne sans fin est obtenue, ce qui conduit à la création de villes géantes, qui sont un produit typique de l’ère capitaliste du développement humain. 

    Nous suivons l’ancienne voie capitaliste éprouvée, sans tenir compte des changements économiques et sociaux radicaux que la période de reconstruction socialiste de l’économie nationale apporte à notre développement (…).

    Dans un avenir proche, nous n’aurons plus besoin des grandes villes, qui créent inévitablement des conditions très malsaines pour la vie et le travail de la population active. Le réseau de transport dense, que nous devrons créer d’ici 5 à 8 ans, nous permettra d’implanter beaucoup plus librement les entreprises industrielles sur l’ensemble du territoire de l’Union (…).

    Nous devons tirer des conclusions similaires en ce qui concerne le développement des grandes villes existantes. Il faut arrêter complètement d’y construire de nouvelles entreprises, déplacer ces entreprises sur un territoire à plusieurs dizaines de kilomètres de ces villes et construire de nouvelles villes socialistes autour de ces entreprises (…).

    Il faut esquisser un plan de décentralisation progressive des villes existantes en construisant leur périphérie le plus loin possible du centre-ville et en faisant ainsi de ces périphéries des villes nouvelles indépendantes. 

    Au lieu de plans d’expansion sans fin des villes existantes, au lieu de plans de création du « Grand Moscou », du « Grand Nijniy Novgorod », etc., nous devons créer des plans de décentralisation progressive et de reconstruction socialiste des villes existantes (…).

    Les villes nouvelles, créées au début comme des villes à prédominance purement agraire, nous nous transformerons progressivement en villes agraires-industrielles, créant dans ces villes des entreprises industrielles de transformation des produits agricoles, ainsi que toutes sortes d’autres entreprises industrielles. 

    De la même manière, nous transformerons progressivement les villes industrielles en villes industrielles-agraires, réunissant en elles la population travaillant à la fois dans les entreprises industrielles et dans les grandes entreprises agricoles adjacentes à la région industrielle . Certaines des villes que nous créerons immédiatement en tant que villes industrielles-agraires ou agraires-industrielles (…).

    Le ménage, cette base de la vie individualiste petite-bourgeoise, absorbe improductivement une énorme quantité de travail. Selon le RSFSR RCT, 36 millions d’heures de travail sont consacrées quotidiennement à la cuisine dans le ménage, soit environ 4,5 millions de journées de travail complètes (traduites par une journée de travail de 8 heures). 

    La cuisson centralisée dans nos cuisines d’usine imparfaites ne nécessiterait que 6 millions d’heures de travail par jour, c’est-à-dire qu’elle libérerait environ 4 millions de mains des dépenses de travail improductives. Nous avons la même dépense improductive de travail dans le ménage individuel dans le domaine de la lessive, de la garde des enfants, etc.

    Il suffit de souligner qu’en présence d’un ménage, seuls 30 % environ de la population totale peuvent être employés à un travail socialement productif, tandis que dans la socialisation de la vie quotidienne, plus de 60 % peuvent être employés à un travail productif (…).

    Ces maisons modernes, étant un produit de la vie individualiste, adapté à son entretien, à la fois nourrissent cette vie individualiste, petite-bourgeoise, l’inculquent à la nouvelle génération, qui devra achever l’édification du socialisme et continuer à vivre dans les conditions du système socialiste réalisé . 

    « Son coin à soi », ses meubles à soi, sa famille à soi, sa vie isolée, arrachée au collectif, tels sont les traits que le mode de vie individualiste petit-bourgeois qui règne dans les pays capitalistes et dans les nôtres instille dans les gens qui travaillent.

    Cela est encore plus vrai par rapport à la vie de nos villages, où chaque famille, menant sa propre petite économie paysanne séparée, a son propre domaine, sa propre hutte, adaptée (et très mal adaptée) pour répondre à tous les besoins domestiques de l’agriculture qui sont à un niveau très bas la population.

    Ce mode de vie petit-bourgeois et individualiste est en contradiction flagrante avec les tâches de construction du socialisme , avec les tâches de création d’un homme nouveau. Il est étranger au prolétariat en tant que classe édifiant le socialisme. 

    Asservissant la moitié féminine de l’humanité, déformant la jeune génération, elle est hostile au prolétariat et elle doit être détruite comme l’un des héritages les plus difficiles du système capitaliste, entravant la force des travailleurs, les empêchant de construire une société socialiste. 

    Les tâches de la révolution culturelle socialiste sont étroitement liées à la destruction de ce mode de vie petit-bourgeois et individualiste. Sans sa destruction, la révolution culturelle socialiste est impossible.

    Le fossoyeur de la bourgeoisie – le prolétariat – est appelé à enterrer le mode de vie individualiste petit-bourgeois et à créer à sa place un mode de vie socialiste basé sur le service socialisé des besoins quotidiens et culturels des travailleurs. , libérant les travailleurs – et surtout les femmes – des soucis du ménage, de la garde des enfants et de leur éducation individuelle (…).

    Nous ne devons pas construire de grandes villes avec une accumulation contre nature de masses gigantesques de la population. La taille des villes devrait mieux répondre à la tâche d’organiser systématiquement la vie et le travail collectifs des travailleurs et à la tâche de créer les conditions les plus saines pour la vie des travailleurs. 

    Il faut tenir compte du fait que dans une ville socialiste, la vie publique et l’auto-activité publique de la population seront développées dans une mesure infiniment plus grande que dans nos villes. Par conséquent, il n’est guère opportun de construire une ville socialiste pour une population de plus de 50 000 à 60 000 personnes (…).

    Les maisons d’habitation dans une ville socialiste doivent être construites de telle manière qu’elles offrent le plus grand confort pour la vie collective, le travail collectif, la récréation collective des travailleurs. Ils doivent également assurer les conditions les plus favorables au travail individuel et aux loisirs individuels. 

    Dans ces maisons, il ne devrait pas y avoir d’appartements séparés avec cuisines, garde-manger, etc. , adaptés aux ménages individuels, car le maintien des besoins quotidiens des travailleurs sera complètement socialisé. Ils ne doivent pas non plus contenir les prémisses de la vie isolée de chaque famille individuelle, car la famille telle qu’elle existe aujourd’hui disparaîtra certainement.

    La place de l’unité familiale fermée individuelle avec une vie séparée sera prise par la « famille collective » commune des travailleurs, dans laquelle il n’y aura pas de place pour un tel isolement (…).

    L’une des questions importantes est de savoir si les enfants doivent vivre dans la même maison (bâtiment) que les adultes, ou si les maisons communales doivent être destinées uniquement à la population adulte (à partir de 17 ans environ). La question de la résidence commune des enfants sur la même place avec leurs parents ne peut être résolue que négativement (…).

    Les enfants d’âge préscolaire et scolaire doivent passer la majeure partie de leur temps dans les locaux destinés à leur éducation, leur travail de production et leurs loisirs. Placer leur logement dans la même maison que des adultes, où ils doivent rentrer pour la nuit, semble également clairement inapproprié. Par conséquent, les bâtiments communaux résidentiels ne devraient être construits que pour la population adulte (…).

    Tout ce qui crée aujourd’hui la nécessité de l’existence d’un ménage individuel et y lie une femme doit être complètement détruit dans une ville socialiste. En plus de l’exemption de cuisiner à la maison, une femme devrait être complètement libérée des tâches ménagères telles que la lessive, le raccommodage des vêtements, etc. 

    Dans une ville socialiste, pour 60 000 habitants, le nombre d’adultes (à partir de 17 ans) sera de 40 à 42 000. Par conséquent, la ville entière sera composée de 15 à 20 complexes résidentiels et d’un certain nombre de grands bâtiments publics desservant l’ensemble population . Ainsi, dans une ville socialiste, selon le nombre d’étages, il n’y aura que 50 à 100 grands bâtiments. »

    => Retour au dossier sur Le réalisme socialiste dans l’architecture soviétique

  • L’orientation concrète de l’architecture soviétique

    Il faut bien saisir comment, au début des années 1930, les architectes soviétiques ont su dépasser la dimension expérimentale – utopiste pour aborder de manière concrète la question du style socialiste.

    Les architectes soviétiques ont ainsi participé à des discussions artistiques les 9, 10 et 13 juillet 1933, ce qui fut un moment important, car à ce moment-là, l’ensemble des architectes avait été réunie en 1932 dans une Association unique, l’Association des architectes soviétiques tient son premier congrès en juin 1937.

    Son dirigeant fut l’ancien constructiviste Victor Vesnine ; ce dernier devint le principal architecte pour tout ce qui concernait l’industrialisation, ainsi que le président de l’Académie d’architecture de l’URSS.

    Victor Vesnine

    Il avait été ainsi mis fin aux regroupements divers et variés, dont les plus marquants au sens des plus bruyants furent les constructivistes de l’OSA (Organisation d’Architectes Contemporains), les « rationalistes » – en fait des formalistes – de l’ASNOVA (association de nouveaux architectes), les fétichistes de l’ARU (Association des architectes urbains) faisant du métier d’architecte le vrai planificateur de la société socialiste, les tenants gauchistes du proletkult de la VOPRA (Association panrusse des architectes prolétariens), etc.

    Lors des discussions de 1933, des documents avaient été mis à la disposition, comme illustrations, avec des mots d’ordre. On a ici des orientations fondamentales pour l’architecture soviétique.

    On a ainsi « Une planification complexe enrichit l’architecture avec de nouveaux moyens artistiques », accompagné par le Forum de Rome, l’Acropole et Versailles.

    On a « L’expérience artistique du passé nous arme dans la lutte pour la nouvelle architecture socialiste », accompagné de deux œuvres de la Renaissance italienne : la chapelle des Pazzi de Filippo Brunelleschi à Florence et le palais Contucci d’Antonio da Sangallo le Vieux à Montepulciano.

    La chapelle des Pazzi (source wikipédia)
    Le palais Contucci (source wikipédia)

    On a « Le problème de l’appropriation critique du meilleur que la culture mondiale a produit ne doit pas être feint par l’imitation passive d’anciennes formes architecturales et de systèmes stylistiques ». Le mot d’ordre est accompagné du Panthéon de Rome et de la cathédrale de Cologne.

    On a « Traitons l’expérience architecturale des époques antérieures dans le laboratoire créatif de l’architecture soviétique », accompagné du palais de la Chancellerie et de la cathédrale de Cologne.

    Le Panthéon de Rome
    Le palais de la Chancellerie à Rome

    On a « L’époque du socialisme doit rendre à l’architecture la plénitude du langage », accompagné du palais Chiericati d’Andrea Palladio à Vicence.

    Le palais Chiericati (source wikipédia)
    Le palais Chiericati

    On a « Que soit un mis un terme aux maisons-boîtes recopiées sur le modèle des casernes », avec l’illustration d’une ligne d’habitations à Leningrad.

    On a « Que soit mis un terme à l’abstraction sur papier du formalisme architectural », avec des exemples de projets fantasmagoriques des avant-gardes.

    On a également des citations de Lénine sur la culture, accompagnées du palais des doges à Venise et du Parthénon.

    Le palais des doges
    Le palais des doges

    On a ici des éléments essentiels de ce qui est la base de l’architecture soviétique de l’époque socialiste : la recherche d’une oeuvre concrète et non pas fantasmée, avec un travail s’orientant par rapport à l’idéologie socialiste tournée vers la vie réelle des masses, sur la base du meilleur de la culture humaine historiquement.

    => Retour au dossier sur Le réalisme socialiste dans l’architecture soviétique

  • L’ampleur et l’harmonie de l’architecture soviétique

    L’architecte soviétique doit être impliqué dans son oeuvre, s’engager lui-même en elle et non pas avoir un regard froid, extérieur, car il s’agit de la reconnaissance de la dignité du réel, au cœur du matérialisme dialectique.

    Ce n’est qu’ainsi qu’on est capable de suivre le cours réel des choses et de saisir le développement intérieur. Pour l’architecte, cela signifie être capable d’être un producteur et en même temps de comprendre de l’intérieur l’utilisation de ses œuvres, leur nature concrète.

    Habitations à Leningrad, 1936-1940
    Maison des stakhanovistes du chantier naval Krasnoïé Sormovo n°112 de la ville de Gorki, 1936-1939

    L’architecte soviétique travaille pour le peuple soviétique, tout en relevant du peuple soviétique ; son travail est le support pour l’activité du peuple soviétique. C’est pourquoi les productions architecturales doivent permettre de saisir le processus en cours, au sens où ils reconnaissent eux-mêmes la dignité du réel de la construction du socialisme. C’est cela qui explique le classicisme comme expression de l’ampleur, de l’harmonie de la société en construction.

    Opéra et ballet de Novossibirsk
    Habitations à Magnitogorsk

    L’architecture soviétique va dans le sens d’œuvres rassurantes et en même temps puissantes dans leur affirmation ; ces œuvres sont accessibles, elles n’écrasent pas, et en même temps elles sont un vecteur idéologique.

    Sanatorium pour enfants à Yalta
    Maison des bateliers à Kouïbychev

    Il va de soi ici que la question du pouvoir est incontournable ; l’existence même de ces œuvres produites par le socialisme exprime directement l’activité des ouvriers et des paysans, qui sont aux commandes de la société et profitent directement des avancées faites. C’est cela qui fait que l’architecture soviétique est une composante de la mentalité de la citoyenneté soviétique.

    Habitation à Gorki
    Club des cheminots à Sverdlovsk

    Il ne s’agit pas seulement de développer les forces productives, mais de le faire en restant aligné dans la perspective socialiste, dans les valeurs du socialisme.

    Habitation à Moscou
    Habitation à Moscou

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  • L’architecte soviétique face à son œuvre

    La critique du constructivisme en architecture, au sens d’une tendance à privilégier la composition architecturale abstraite, à considérer la forme comme fin en soi, triompha aisément parmi les architectes soviétiques, qui avaient bien vu qu’on était à un tournant.

    Karo Alabyan, dans Les tâches de l’architecture soviétique, souligne en 1937 que l’architecte produit au sein d’une société organisée, pour des êtres humains concrets, dont il n’est pas séparé par une muraille de Chine comme c’est le cas dans le capitalisme.

    Il explique ainsi que :

    « Le principe directeur de notre construction est le souci stalinien de l’homme.

    À cet égard, l’architecture du métro de Moscou dirigée par L.M. Kaganovitch : le Parti a confié aux constructeurs la tâche de faire des gares souterraines de véritables œuvres d’art, qu’elles aient de belles formes, des couleurs vives, qu’elles soient légères, spacieuses, confortables, afin qu’une personne qui monte dans le métro ressente un sentiment de joie (…).

    seul un mépris de l’homme peut expliquer l’indifférence totale de certains architectes à l’aménagement intérieur, à la décoration et à l’équipement des bâtiments, notamment résidentiels.

    L’intérieur est ce domaine de l’architecture où une personne entre quotidiennement en contact avec l’art de l’architecture, le plus directement, pour ainsi dire, intimement.

    C’est pour l’architecture soviétique, conçue pour répondre au maximum aux besoins quotidiens d’une personne, que les questions intérieures revêtent une importance exceptionnelle.

    Dans la pratique de l’aménagement intérieur des bâtiments résidentiels, les vestiges du fameux «fonctionnalisme», une interprétation simpliste et purement mécaniste des «processus se déroulant dans le bâtiment», affectent encore.

    L’architecture intérieure d’un bâtiment résidentiel doit prendre en compte les besoins et les exigences les plus divers d’une personne, allant de ses plus petits besoins quotidiens à ses besoins esthétiques et ses goûts artistiques. »

    Pour se tourner de manière adéquate vers les êtres humains concrets et leurs besoins, les architectes doivent vivre au rythme du peuple et de son activité. Leurs productions doivent être en phase avec la réalité et les gens réels, s’inscrire dans leur vie et donc être accessible.

    L’école 518 à Moscou, par Ivan Andreevich Zvezdine, 1935

    On retrouve les principes du réalisme socialiste en peinture, en musique, en sculpture… le caractère typique, l’ancrage dans la vie quotidienne réelle, l’adéquation avec le peuple et son histoire. Karo Alabyan résume pour cette raison l’approche architecturale selon le réalisme socialiste par les principes de vérité et de simplicité.

    « Notre architecture soviétique est étrangère au mensonge, aux formes abstraites, à toutes sortes de bouffonneries esthétiques bourgeoises. Le réalisme socialiste en architecture signifie avant tout : vérité et simplicité.

    La véritable simplicité artistique n’a rien à voir avec la simplification. Il témoigne de la véritable maîtrise de toute la richesse du contenu.

    Pouchkine a travaillé dur pour parvenir à une forme simple de ses brillants poèmes. Les œuvres de Lénine et de Staline sont simples et claires, car elles sont le summum de la pensée humaine. 

    La simplicité des formes d’une structure architecturale signifie avant tout la belle harmonie de ces formes, qui, à son tour, est l’expression des proportions et des rapports les plus parfaits des éléments individuels.

    Le réalisme socialiste n’est pas un système de normes et de canons abstraits. L’étroitesse et la limitation sont, par leur nature même, étrangères à la méthode du réalisme socialiste.

    C’est la méthode du réalisme socialiste qui ouvre à l’architecte des possibilités illimitées d’enrichir son langage artistique, sa créativité et sa compréhension des différents styles. »

    Le métro de Moscou, une initiative d’envergure pour l’architecture socialiste dans les années 1930

    Cette vérité et cette simplicité s’opposent au culte de la forme pour la forme – c’est le formalisme, dénoncé à tous les niveaux artistiques en URSS dans les années 1930. Karo Alabyan constate ainsi que la bataille est en cours :

    « La restructuration créative de l’architecture soviétique est loin d’être achevée. Dans notre pratique, les rechutes du formalisme, du constructivisme et d’autres influences qui nous sont étrangères sont encore fortes.

    Le culte de la « forme pure » surgit toujours sur la base de l’appauvrissement de la pensée, de l’absence de grandes idées. Plus l’architecte est impuissant à révéler le contenu, à résoudre l’image artistique, plus il essaie de se vanter de manière intrusive de son « originalité », en recourant à diverses fausses méthodes, à la création de formes abstraites et à la ruse pour cela.

    A ses origines, le formalisme de notre architecture, comme le constructivisme, est lié aux dernières tendances décadentes de l’architecture bourgeoise d’Europe occidentale. Les opus formalistes n’ont rien de commun avec la réalité soviétique. Le formalisme est anti-peuple, anti-démocratique, il est hostile à la vérité, hostile à nos grandes idées de construction socialiste.

    C’est pourquoi la lutte contre le formalisme est en même temps une lutte pour les architectes, qui, bien que sujets à cette grave maladie, ne sont pas désespérés du point de vue de leur restructuration ; c’est la lutte pour leur développement créatif et idéologique correct, la lutte pour leur vision du monde. »

    => Retour au dossier sur Le réalisme socialiste dans l’architecture soviétique

  • L’architecture soviétique : des œuvres architecturales posées

    Ce qui n’allait pas avec la démarche fonctionnaliste, portée souvent par des architectures d’esprit moderniste, de type cubo-futuriste, c’était la dimension impersonnelle de leur travail.

    L’architecture soviétique de l’époque socialiste a inversement toujours souligné deux choses : tout d’abord, qu’il fallait arriver à un style qui porte une dimension humaine, avec un architecture portant son oeuvre, dans une confrontation subjective, et non pas au moyen d’un « objectivisme » neutralisateur et abstrait.

    Ensuite, qu’il n’y avait pas de ligne de conduite générale pour tous les architectes, seulement des exigences historiques. C’est ce qui explique le puissant élan qu’il y a dans les années 1930 qu’il y a chez les architectes soviétiques à formuler des œuvres qui posent quelque chose.

    Habitations, Moscou
    Habitations, Moscou

    Cette démarche de « poser » une oeuvre a puissamment puisé dans le classicisme ; l’une des références incontournables est ici le Vénitien Andrea Palladio (1508–1580). Les commentateurs bourgeois considèrent d’ailleurs l’architecture « stalinienne » comme un néo-palladianisme.

    Bibliothèque d’Etat Lénine, Moscou

    C’est que l’architecture soviétique s’inscrit dans la construction du socialisme et marque donc l’établissement d’objets architecturaux à la fois nécessaires et marquants. Il s’agit à la fois de refléter la construction du socialisme et de relever de celle-ci. La construction de logements est emblématique de cela.

    Habitations, Moscou
    Habitations, Moscou

    La question de l’envergure était d’autant plus nécessaire que la réalité soviétique était en rupture quantitative complète avec le régime passé qui pourrissait sur pied. Il y avait des choses nouvelles et d’importance.

    Habitations, Moscou
    Siège de la Pravda, Moscou

    La ville de Moscou acquiert ici la dimension principale de l’architecture soviétique, car elle était considérée comme la capitale du socialisme.

    Habitations, Moscou
    Habitations, Moscou

    L’architecture soviétique ne se veut donc pas une fin en soi, ni un mode opératoire, elle ne prétend pas modifier la réalité. Elle l’accompagne, la reflète, l’exprime.

    Habitations, Moscou
    Intérieur de la maison de la culture de l’usine automobile Staline à Moscou

    C’est pourquoi les habitations elles-mêmes relèvent d’une véritable exigence au niveau du style, sans quoi elles voient leur statut dégradé à un simple niveau fonctionnel faussement pragmatique, comme cela le sera justement dans le révisionnisme à partir de 1953.

    C’est pourquoi aussi les critiques furent innombrables à l’époque, chaque production étant analysée, évaluée, afin d’avancer toujours plus. Il n’y avait aucune auto-satisfaction, même si bien entendu il fallait également lutter contre les routines.

    Habitations, Rostov sur le Don
    Habitations, Kiev

    => Retour au dossier sur Le réalisme socialiste dans l’architecture soviétique

  • Le bâtiment de la Centrosoyuz

    Pour comprendre l’architecture soviétique, ce qu’elle est et ce qu’elle n’est pas, on peut s’appuyer sur l’exemple du bâtiment de la Centrosoyuz, l’Union centrale des coopératives de consommateur, qui ouvrit ses portes en 1934 à Moscou et abrita très rapidement le bâtiment du Commissariat du peuple à l’industrie légère. C’est le fruit de tout l’esprit des années 1920 et du début des années 1930, avec une vague de jeunes intellectuels ayant rejoint le camp de la révolution de 1917 et œuvrant dans une perspective utilitaire.

    La mise en place du nouveau régime a en effet libéré les forces productives et permis un élan généralisé de constructions ; sur le plan architectural, cela implique la construction de bâtiments publics, de maisons de la culture, d’hôpitaux, de centres sportifs, d’installations scientifiques, d’écoles et d’universités, d’usines, de bureaux, de bâtiments résidentiels, etc.

    Cela a permis à toute une génération de se mettre à la tâche, d’avoir des idées nouvelles, mais également, de fait, d’expérimenter sans un réel cadre et de faire parfois un fétiche de cette expérimentation.

    Le bâtiment de la Centrosoyuz n’a toutefois pas été réalisé par un jeune architecte, mais par l’architecte suisse Le Corbusier, aidé de son cousin et associé Pierre Jeanneret, ainsi que du jeune architecte russe Nikolaï Kolli. Le Corbusier était alors en train de devenir la principale figure mondiale de l’architecture, avec, pour résumer, l’utilisation massive de structures en acier ou en béton armé afin de faire tenir l’ensemble et d’agencer librement le reste, tout ce qui était porteur initialement n’étant plus nécessaire.

    Le Corbusier a ainsi une conception qui le fait passer, à ses yeux, d’architecte à urbaniste, c’est-à-dire de maître d’un certain agencement, suivant une logique compositionnelle. Au sujet du Centrosoyuz, il explique ainsi :

    « Nous avons abordé le problème en urbanistes, c’est-à-dire que nous avons considéré que les couloirs et les escaliers sont comme des rues fermées.

    En conséquence, ces rues ont une largeur de 3,25 mètres et sont toujours bien éclairées. De plus, nous avons remplacé les volées d’escaliers pénibles par des rampes en pente douce (14 %) qui permettent une circulation libre et facile. »

    De fait, le bâtiment n’a strictement aucun escalier, l’accès aux sept étages se faisant par des rampes, le bâtiment lui-même consistant en trois immeubles accueillant 3 500 personnes, avec une cantine, des salles de conférence (dont une grande dans un bâtiment séparé), une salle de lecture, etc. ; l’idée était de faciliter le mouvement en permanence.

    Le projet initial de Le Corbusier a d’ailleurs été modifié, puisqu’il y avait un concours d’architecture, Le Corbusier étant vainqueur au troisième tour.

    Alexandre Vesnine, le plus grand représentant des architectes soviétiques de perspective « constructiviste » des années 1920 et du début des années 1930, salua ainsi l’œuvre de Le Corbusier :

    « Le bâtiment du Commissariat du peuple de l’industrie légère à Moscou, sur la rue Myasnitskaya, en cours de construction selon le projet de l’architecte Le Corbusier, sera sans aucun doute le meilleur bâtiment construit à Moscou depuis un siècle.

    La clarté exceptionnelle de la pensée architecturale, la netteté de la construction des masses et des volumes, la pureté des proportions, la clarté des rapports de tous les éléments opposés en contraste et en nuance, l’ampleur de la structure entière dans son ensemble et dans ses parties individuelles, la légèreté alliée à la monumentalité, l’unité architecturale, une stricte simplicité caractérisent cet ouvrage. »

    Inversement, Ivan Fomine critique l’absence d’esprit à l’œuvre, ce qui aboutissait selon lui à une démarche planiste-formelle :

    « Le Corbusier est l’architecte d’un pays capitaliste. Il veut construire magnifiquement, à moindre coût, commodément, sous des formes constructivement justifiées – et c’est sa tâche.

    Notre architecte, avec son architecture, apporte l’esprit de gaieté, de courage et de gaieté dans notre nouveau mode de vie. Il n’y a pas de tels mots dans le lexique du Corbusier. »

    La critique d’Ivan Fomine l’emporta et de fait, au moment de la construction de la Centrosoyuz, l’architecture soviétique était déjà passée à autre chose. Cette question de l’esprit était central : l’architecture se devait d’avoir un architecte s’engageant humainement dans son œuvre, sans quoi la démarche tournait à l’abstraction.

    C’était le développement du réalisme socialiste dans l’architecture. La Centrosoyuz ne servit ainsi pas de modèle, alors que du tuf arménien y fut ajoutée pour humaniser les larges surfaces neutres.

    => Retour au dossier sur Le réalisme socialiste dans l’architecture soviétique

  • L’architecture soviétique de l’époque socialiste: une construction parallèle au socialisme

    Lorsque se produit la révolution d’Octobre en 1917, les pays qui vont constituer l’Union Soviétique sont très peu développés. Cela signifie que l’architecture soviétique a dû accompagner le développement des différents pays, tout en dépendant étroitement des capacités productives en train d’être mises en place seulement.

    Cela produisit une contradiction significative initialement entre des architectes en mode utopiste, élaborant en laboratoire des plans d’autant plus de grande envergure qu’ils s’avéraient irréalisables, et la réalité architecturale d’une URSS en construction cherchant à mettre en place à la fois des références et des exemples majeurs.

    Les années 1920, plutôt expérimentales, cédèrent pour cette raison la place à des années 1930 où l’architecture s’alignait sur le réalisme socialiste, en soulignant la véracité, la simplicité, l’affirmation.

    Habitations à Leningrad
    Monument pour Lénine, Kazan

    Par véracité, il faut comprendre que l’architecture se fonde sur la vie quotidienne réelle des gens en URSS ; par simplicité, il faut saisir l’absence de fonctionnalisme ou de formalisme, c’est-à-dire de fioritures, de formes comme fin en soi ou pseudo-preuve de « radicalité ».

    Par affirmation, il faut entendre la mise en valeur d’une vie nouvelle, d’une culture propre à des pays socialistes, avec chacun leurs particularités culturelles historiques.

    Station sur le canal Moscou à Khimki, près de Moscou
    Maison de la culture Maxime Gorki MoscouNarva à Leningrad

    L’architecture soviétique de l’époque socialiste rejette ainsi le fonctionnalisme, qui fait de la fonction l’alpha et l’oméga de toute construction. Elle n’accepte pas le formalisme, qui fait de la forme une fin en soi. Elle exige de se tourner vers les gens et d’accompagner la réalité socialiste en construction de ces gens.

    Boulevard Nikitsky, Moscou
    Place Arbat, Moscou

    L’architecture soviétique de l’époque socialiste – de 1917 à 1953, ou plus exactement pour être strict du début des années 1930 à 1953 – se veut ainsi à la fois un accompagnement et une mise en perspective. Il n’y a pas de recettes définitives, mais des mises en place qui visent à exprimer une réalité et à s’inscrire en elle, dans un rapport dialectique.

    Perspective Kirov, Leningrad
    Perspective Kirov, Leningrad

    L’architecture soviétique de l’époque socialiste cherche donc à synthétiser une époque ; elle n’a eu de cesse de travailler à l’élaboration d’un style qui soit en correspondance avec l’esprit de la planification soviétique et la démarche socialiste de millions d’ouvriers et de paysans. C’est là la tension dialectique à la base en ce domaine.

    Institut de l’industrie légère, Leningrad
    Habitations à Leningrad

    Il y a donc l’exigence d’un nouveau classicisme, d’une architecture en phase avec la citoyenneté soviétique.

    Ecole d’ingénieurs, Leningrad

    Il faut ici remarquer que l’architecture soviétique va nécessairement de pair avec la sculpture et des arts en général, de l’urbanisme au sens de l’agencement des lieux. Il ne saurait exister d’endroits séparés du reste par une muraille de Chine, comme c’est justement le cas dans le capitalisme qui sépare tout.

    Monument aux victimes du 9 janvier 1905 à Leningrad
    Monument à Lénine à Smolny

    En ce sens, comprendre l’architecture soviétique de l’époque socialiste est simple en général, mais demande plus concrètement, si l’on veut pousser les choses jusqu’au bout, de s’intéresser à chaque ville en particulier, avec son histoire et sa nature particulière.

    Leningrad est ainsi une ville historique, laissant peu de moyens de construire des œuvres majeures nouvelles, alors que Moscou a été façonnée par le capitalisme et exigeait une réorganisation. Inversement la ville de Stalino (aujourd’hui Donetsk) était pratiquement entièrement nouvelle.

    Parc central de culture et de loisirs Gorki, Moscou
    Monument à Volodarski, Leningrad

    Le Parc central de culture et de loisirs Gorki à Moscou, ouvert en 1928, est ainsi emblématique de l’accompagnement de la vie quotidienne des gens.

    Parc central de culture et de loisirs Gorki, Moscou
    Parc central de culture et de loisirs Gorki, Moscou

    Il est pour cette raison erroné de séparer l’architecture soviétique de l’époque socialiste de la réalité concrète à l’époque, des gens réels dans leur vie quotidienne, même si c’est naturellement nécessaire pour une introduction et une compréhension du phénomène historiquement.

    Parc culture et de recréation Izmaïlovsky, Moscou
    Habitations, Moscou

    L’architecture soviétique de l’époque socialiste est, en ce sens, toujours une réponse concrète à une question concrète. C’est ce qui explique aussi les différences de sensibilité ou le décalage qu’on peut avoir aujourd’hui sur certains points, principalement la question du rapport à la Nature. Il s’agit ici de la maturité d’une époque qui joue, pas une question idéologique en soi – même si inversement l’époque joue sur l’idéologie, ce qu’explique la Grande Révolution Culturelle Prolétarienne en Chine populaire.

    Stade du dynamo
    Stade du dynamo

    => Retour au dossier sur Le réalisme socialiste dans l’architecture soviétique

  • Le matérialisme dialectique et le passage de l’unité addition/soustraction à l’unité multiplication/division

    Il existe en mathématiques l’addition, qu’on oppose à la soustraction, et la multiplication, qu’on oppose à la division. En réalité, addition et soustraction relèvent d’un seul même phénomène, uni par deux aspects contradictoires, tout comme multiplication et division formant un seul phénomène eux-mêmes.

    Et le phénomène que représente l’addition et la soustraction, comme contradiction, produit le phénomène qu’est la multiplication et la division.

    Une addition est concrètement une soustraction et une soustraction une addition. Si l’on dit que 2+3=5, on dit en même temps 5-3=2. Il s’agit de la même chose, mais inversée, comme vue à travers un miroir. On peut dire que l’addition est le reflet de la soustraction, ou inversement que la soustraction est le reflet de l’addition.

    Cette dernière démarche semble plus juste, car tout reflet est nécessairement imparfait ou plus exactement asymétrique. Cela se voit avec le caractère remplaçable des nombres dans l’addition, qu’on ne retrouve pas dans la soustraction.

    Dans l’addition, on a indifféremment 2+3=5 et 3+2=5. Or, pour la soustraction, on a d’un côté la même dimension remplaçable, mais sans aboutir au même résultat, puisque d’un côté 5-3=2, de l’autre 5-2=3.

    La soustraction permet de revenir aux même fondamentaux que l’addition, mais en même temps elle est en décalage. On ne retrouve pas l’identité entre 3 et 2 qu’on a dans l’addition : 2 et 3, dans la soustraction, restent différents, malgré leur liaison.

    C’est en ce sens qu’on peut dire que la soustraction est le reflet asymétrique de l’addition.

    La multiplication et la division découlent, comme phénomène contradictoire, de cette contradiction addition/soustraction. Cela se voit dans les caractéristiques qu’on y retrouve.

    Si l’on prend la multiplication, on a indifféremment 5×2=10 ou 2×5=10. Dans la division, on a 10:2=5 et 10:5=2. On a pareillement l’identité dans la multiplication, comme dans l’addition, et la différence dans la division, comme dans la soustraction. 2 et 5 sont remplaçable dans la multiplication, pas dans la division.

    Ce qui change par contre pour la multiplication/division par rapport à l’addition/soustraction, c’est que la première relève de la qualité, la seconde de la quantité.

    Dans l’addition comme la soustraction, on fonctionne suivant le principe de l’accumulation. On peut tout à fait remplacer un chiffre par des bâtonnets, on est dans un calcul très facile à saisir pour l’esprit puisqu’on ajoute, on retranche et qu’on peut le faire sans interruption aucune, en continuité.

    On a ainsi I I I I I auquel on enlève II, ce qui donne I I I, auquel peut ajouter I I I I I ce qui donne I I I I I I I I ; on peut ajouter, soustraire, on s’y retrouve très facilement.

    Cela n’est pas vrai pour la multiplication et la division. Pour le comprendre, on peut s’appuyer sur la légende de la naissance du jeu d’échecs en Inde. Ayant inventé le jeu pour le roi, Sissa demanda qu’on lui fournisse du riz de la manière suivante : un grain de riz pour la première case du jeu, deux pour la seconde, quatre pour la troisième, huit pour la quatrième, et ainsi de suite.

    Sur le plan mathématique, Sissa a demandé qu’on double le nombre de grains de riz à chaque case. Le roi accepta la demande, sauf que si on double le grain de riz depuis la première case jusqu’à la soixante-quatrième, on obtient au final plus de 18 milliards de milliards de grains de riz.

    Le roi avait raisonné en termes d’addition, pensant que le processus correspondrait à 1, 1+1, 2 +2, 4+4, 8+8,16+16, etc. et que cela n’irait pas bien loin. En réalité, il s’agissait du passage de la quantité à la qualité, de l’addition à la multiplication.

    Cela se comprend si on regarde l’échiquier dans son ensemble. Si l’on prend deux cases qui se suivent, on reste dans l’addition. Mais dès qu’on voit les chiffres, on constate qu’on est dans des proportions propres à la multiplication.

    Voici justement quelques exemples de multiplications qu’on retrouve au travers des nombres qui doublent. On ainsi 32×8192=262144, 4096×8388608=34359738368, etc.

    Ce qui est cohérent puisqu’on double à chaque fois, qu’il s’ensuit la mise en place d’une proportion et que la multiplication reflète cette proportion. Autrement dit, lorsqu’on double à chaque fois, procédant à une addition de deux nombres identiques, il s’ensuit un rapport entre les nombres qui sont le produit de cette addition, qu’on retrouve sous la forme de proportion visible dans la multiplication.

    L’erreur du roi en Inde consistait précisément à s’en tenir à un développement linéaire – accumulatif, là où en réalité le mouvement d’addition connaissait un saut qualitatif aboutissant à un développement inégal procédant par bonds.

    C’est un excellent exemple de comment la multiplication/division est issue de l’addition/soustraction, par l’établissement de nouveaux rapports, de nouvelles liaisons internes.

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  • Sur la déclaration révisionniste « Non à la guerre mondiale! Non à la guerre nucléaire! »

    Nous voulons ici attirer l’attention sur une déclaration anti-guerre de juin 2022, rendue publique début juillet 2022 et signée par l’ensemble des courants politiques issus de la gauche du Parti « Communiste » Français des années 1990. Cette déclaration véhicule une lecture erronée de la guerre, en raison d’une conception non scientifique de ce qu’est le capitalisme.

    Cette déclaration commune contient d’ailleurs toute une série d’erreurs et de fautes en termes d’économie politique. Nous voulons cependant ici souligner le point le plus essentiel, car il forme l’aspect principal et qui veut sincèrement combattre la guerre doit absolument le comprendre.

    Il est possible de résumer notre critique en disant que nous sommes fidèles à la conception de la guerre comme « repartage du monde » exprimée par Lénine dans L’impérialisme, stade suprême du capitalisme, alors que la déclaration reprend la conception erronée d’un impérialisme comme « militarisme » développée notamment par Rosa Luxembourg dans L’accumulation du capital.

    Tout peut être compris à partir de comment la déclaration présente ce que seraient les « causes » des guerres :

    « Les guerres à répétition qui ont éclaté depuis la dissolution du Pacte de Varsovie ont toutes les mêmes causes : le besoin de repousser à plus tard les effets de la crise aggravée du capitalisme tardif, donc de conquérir des marchés, de lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit et d’assurer l’augmentation des bénéfices des complexes militaro-industriels, quasiment le seul secteur industriel à n’avoir pas été délocalisé dans le cadre du capitalisme mondialisé.

    Le système dominant a ainsi démontré que dans sa course poursuite vers la stagnation, la régression et la folie destructrice, il ne reculait devant aucune violence, aucune guerre, aucune manipulation, aucune provocation. »

    Si l’on va au fond des choses, ces lignes reflètent la conception révisionniste selon laquelle l’impérialisme aurait cédé la place à un « capitalisme monopoliste d’État ». Cette thèse a été développée dans les années 1950-1960 à la fois en URSS par Eugen Varga et en France par Paul Boccara, puis adoptée comme idéologie officielle tant par l’URSS que l’ensemble des « partis communistes » qui lui étaient liées.

    Les signataires de la déclaration commune s’alignent justement tous sur cette conception, car ils sont issus de l’opposition interne au sein du Parti « Communiste » Français des années 1990 – il s’agit du Comité internationaliste pour la solidarité de classe, du Rassemblement communiste, du Pôle de Renaissance communiste en France, de l’Association nationale des communistes, du Parti communiste révolutionnaire de France, des Jeunes pour la Renaissance communiste en France.

    Cependant, les signataires cherchent à masquer cela et procèdent pour cette raison par allusions et par manipulation. Ils ne peuvent en effet pas ouvertement assumer qu’ils se fondent sur une conception révisionniste des années 1960 : cela nuirait à l’image qu’ils veulent donner et ils ne veulent de toutes façons pas assumer l’économie politique, afin de toujours se donner des portes de sortie, par opportunisme. C’est de cela qu’il ne faut pas être dupe et c’est cela que nous voulons démasquer.

    Les mots-clefs sont ici « capitalisme tardif », « stagnation », « régression », « folie destructrice », « manipulation », « provocation », tous correspondant à la thèse révisionniste du « capitalisme monopoliste d’État », avec pour cette raison une définition erronée des objectifs de la guerre : « conquérir des marchés », « lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit », « assurer l’augmentation des bénéfices des complexes militaro-industriels ».

    Selon en effet la thèse révisionniste du capitalisme monopoliste d’État, le capitalisme aurait dépassé le stade impérialiste en atteignant un stade « organisé ». Le capitalisme serait ainsi justement « tardif », en « stagnation », en « régression », il maintiendrait toutefois son existence en manipulant la société au moyen de l’État.

    Autrement dit et pour résumer, les monopoles capitalistes auraient effectué une main-mise fusionnelle sur l’État et seraient en mesure d’organiser et de réorganiser l’économie comme bon leur semble. C’est le principe de privatiser les profits et socialiser les pertes. Cela sauverait le capitalisme qui aurait fait sans cela son temps.

    Eugen Varga explique cette thèse de la manière suivante dans Le Capitalisme au vingtième siècle (1961), un ouvrage majeur du révisionnisme :

    « L’alliance des monopoles et de l’État est effectué principalement sous la forme de la fusion des monopoles et de la machine d’État. Les monopoles envoient leurs représentants à des postes dirigeants dans le gouvernement, comme ministres, sénateurs ou membres du parlement.

    La réciproque est également vrai – des généraux, des diplomates et des ministres quittent fréquemment le service du gouvernement pour des postes hautement payés dans les monopoles.

    L’alliance prend aussi la forme de décisions communes au sujet de questions économiques importantes (…).

    Le capitalisme monopoliste d’État pleinement développé se manifeste principalement par la régulation étatique de l’économie, des entreprises possédées par l’État et l’appropriation et la redistribution d’une plus part du revenu national par l’État. »

    Cette interprétation des faits servait à justifier une alliance populiste contre uniquement les grands monopoles et non plus la bourgeoisie, en présentant également l’État comme un outil neutre qu’on pourrait récupérer pour ensuite faire l’inverse des monopoles. Mais là n’est pas ici la question ; ce qui compte, c’est que cette thèse aboutit à une définition de la guerre comme une tentative de « conquérir des marchés », « lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit », « assurer l’augmentation des bénéfices des complexes militaro-industriels ».

    Cela est erroné, car cela présente la guerre comme des poussées quantitatives qui seraient choisies de manière rationnelle. C’est la réduction de la guerre à une sorte de militarisme pragmatique utilisée par des manipulateurs tirant les ficelles en ce sens. Les grands capitalistes seraient « conscients » de ce qui leur manque et agirait en fonction, en manipulant les gens et en donnant libre cours au militarisme.

    Mais précisons ici tout de suite quelque chose de très important, le document considérant que la guerre est apparue sous sa forme actuelle en 1991.

    Est-il juste que depuis la dissolution du Pacte de Varsovie, en février 1991, le capitalisme a eu besoin de « conquérir des marchés », « lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit », « assurer l’augmentation des bénéfices des complexes militaro-industriels » ?

    Absolument pas. De 1991 à 2020, le capitalisme a connu une formidable expansion. Il a connu un saut qualitatif en multipliant les marchés, en développant les forces productives. Il a profité comme on le sait de la Chine passée au capitalisme après la mort de Mao Zedong et de l’intégration des pays de l’Est européen dans le dispositif capitaliste occidental.

    Il suffit de voir qu’aujourd’hui on utilise quotidiennement des ordinateurs portables, des smartphones et internet pour saisir comment le capitalisme a développé des technologies majeures depuis 1991. Des barrières morales, culturelles, politiques, idéologiques… sont également tombées, permettant au capitalisme d’ouvrir de nouveaux marchés.

    Dans les faits, le capitalisme a très puissamment développé la consommation au cours des trois dernières décennies, façonnant une société capitaliste de bout en bout, sans commune mesure avec auparavant. Il faut être nostalgique de l’URSS social-impérialiste des années 1980 pour ne pas le voir. Nier l’expansion capitaliste depuis 1991 est aberrant.

    Cela est très important, car cela montre que pour les signataires de la déclaration commune, le capitalisme ne serait pas en mesure de se développer par lui-même, il devrait chercher pour ainsi dire à l’extérieur de lui-même pour connaître une expansion. Le capitalisme ne pourrait pas se suffire à lui-même sans se ratatiner, l’accumulation du capital aurait forcément et uniquement besoin de ressources extérieures.

    Rosa Luxembourg fut la grande théoricienne de cette conception où le capitalisme devait forcément profiter d’une zone non capitaliste pour être en mesure de connaître une expansion. Eugen Varga et Paul Boccara, avec leur thèse du « capitalisme monopoliste d’État », ont ensuite réédité l’erreur de Rosa Luxembourg quant à l’accumulation du capital.

    Or, c’est là ne pas comprendre le développement en spirale et le fait que le capitalisme s’appuie non seulement sur le capital qui produit des marchandises, mais également sur le capital produisant les moyens de produire les marchandises. Les deux processus forment un mouvement dialectique. C’est cela qui permet l’élargissement des forces productives et du marché capitaliste.

    Si l’on voit uniquement ce mouvement dialectique renforçant les forces productives, alors on bascule dans la conception d’Eduard Bernstein et du réformisme en général, puisque le capitalisme semble se développer sans limites. Et si on ne voit pas ce mouvement, comme Rosa Luxembourg, on est obligé d’inventer des fantasmagories pour expliquer que le capitalisme existe encore alors qu’il est censé être agonisant.

    C’est là justement le sens de la conception révisionniste du capitalisme monopoliste d’État : le capitalisme, pour se développer, devrait ainsi chercher dans les poches des travailleurs, du capitaliste voisin ou du capitaliste étranger. On en arrive alors à l’opposition entre une poignée d’ultras grands capitalistes et la société, à une sorte de super parasitisme.

    C’est la raison pour laquelle la déclaration commune ne parle justement pas des travailleurs, des ouvriers, des prolétaires, mais des « forces du travail et de citoyenneté », ce qui correspond ici à la conception populiste des 99 % contre les 1 % d’ultras-riches – la déclaration n’employant pas non plus le terme de bourgeoisie.

    La déclaration commune des révisionnistes aboutit ainsi à une présentation des Français qui vivraient dans toujours plus de pauvreté, avec une France où la misère s’installerait, et emmenée dans la guerre comme malgré elle, en raison d’une poignée de parasites utilisant « consciemment » le militarisme.

    Les rares acquis tiendraient dans ce panorama misérabiliste des « conquêtes sociales obtenues par des luttes menées par les révolutionnaires tout au long du siècle précédent », ce qui est tout simplement ridicule pour quiconque voit le riche capitalisme français puissamment développé et aligné sur les avancées de la superpuissance impérialiste américaine. Ni Netflix, ni les télévisions écran plat, ni les McDonald’s, ni les commandes par Amazon ne sont des « conquêtes sociales » du siècle dernier, alors qu’elles font (malheureusement) partie de la vie quotidienne des masses en France.

    La vérité est que les révisionnistes nient le développement du capitalisme depuis 1991, ils reprennent à leur compte la lecture erronée d’un capitalisme ne pouvant subsister que par des conquêtes extérieures, et ainsi, par un esprit unilatéral, confondent la paupérisation générale – les masses deviennent plus pauvres en général – avec la paupérisation relative, où les masses ont un meilleur niveau de vie tout en étant toujours plus pauvres en comparaison avec les couches dominantes, relativement à la masse des valeurs produites.

    Cela reflète précisément leur base sociale : l’aristocratie ouvrière, c’est-à-dire la partie du prolétariat vendue à la bourgeoisie depuis les années 1960, par l’intermédiaire de la CGT, devenue une « force de proposition » pour mieux gérer les entreprises. Il faut rappeler en ce sens que tant le Parti « Communiste » Français que la CGT ont été farouchement opposés au mouvement de Mai et Juin 1968. Ils pensaient « réformer » l’État et lui conférait une nouvelle orientation, pas le détruire et le remplacer par un État socialiste de nature fondamentalement différente.

    Tout cela est essentiel, car cela montre en quoi la définition de la guerre par les révisionnistes est erronée. Selon eux, il s’agit par la guerre de « conquérir des marchés », « lutter contre la baisse tendancielle des taux de profit », « assurer l’augmentation des bénéfices des complexes militaro-industriels ».

    Or, en réalité, la guerre impérialiste n’est pas un « choix » de la part d’un capitalisme organisé, ni des poussées organisées en des sens précis. C’est le produit inévitable du chaos propre au capitalisme en crise générale, comme la bataille pour le repartage du monde.

    L’Internationale Communiste expliquait à son septième congrès en 1935 dans sa résolution sur la préparation d’une nouvelle guerre mondiale par les impérialistes que :

    « La crise économique mondiale et la rupture de la stabilisation capitaliste ont engendré une extrême instabilité de toutes les relations internationales. L’aggravation de la lutte sur le marché mondial, rétréci l’extrême à la suite de la crise économique, a conduit une guerre économique acharnée. En fait, le nouveau partage du monde a déjà commencé. »

    La guerre impérialiste est une guerre de repartage. Ce n’est pas que les capitalistes ne font plus de profits, c’est qu’ils n’en font pas assez par rapport au cours naturel de l’accumulation capitaliste, et qu’il faut compenser cela. Et cette faiblesse a comme base la crise générale du capitalisme.

    Concrètement, l’inégalité de développement dans la période d’accumulation élargie du capital n’engendre pas directement des rapports antagoniques entre les puissances impérialistes. Mais dès qu’un grippage absolu dans l’accumulation apparaît, c’est-à-dire lors de la crise générale, l’inégalité de développement enfante nécessairement des contradictions antagoniques qui ne peuvent que se résoudre par la guerre, plus précisément la guerre de repartage, soit pour conserver le statu quo pour la puissance hégémonique ayant bénéfice de la période antérieure, soit pour combler l’inégalité pour la principale puissance lésée par la période antérieure ou du moins non hégémonique

    C’est pour cette raison que nous avons affirmé au début de l’année 2020 que le capitalisme connaissait sa seconde crise générale avec la pandémie et que nous avons annoncé dès avril 2021 qu’il y aurait la guerre en Ukraine : nous avions compris la nature de la nouvelle période.

    Les révisionnistes ne considèrent pas qu’il y ait une césure en 2020. Pour eux, le capitalisme est en crise générale depuis 1917, ce qui est totalement ridicule. La thèse d’un mode de production qui est en crise générale sur un siècle tout en développant de manière formidable les forces productives est totalement incohérente du point de vue des enseignements de Marx et Engels.

    Encore faut-il comprendre que Lénine et Staline prolongent Marx et Engels, que Mao Zedong prolonge Lénine et Staline. Sans cela, on ne comprend pas le matérialisme dialectique, et on bascule dans des conceptions unilatérales et fantasmagoriques, comme ce capitalisme monopoliste d’État qui maintiendrait en vie le capitalisme, avec la guerre qui correspondrait de manière pragmatique au « besoin de repousser à plus tard les effets de la crise aggravée du capitalisme tardif ».

    Voilà en quoi la déclaration commune des révisionnistes est pernicieuse : elle prétend dénoncer la guerre, mais en réalité elle diffuse en contrebande des conceptions erronées, une vision totalement fausse de la réalité.

    Et, sur le plan politique, elle masque le fait qu’en France, la situation se caractérise jusqu’à présent non pas par une misère de masse se systématisant – ce n’est pas encore le cas, cela va arriver mais cela découle de la crise générale -, mais par l’expansion des rapports marchands à toutes les sphères de la vie sociale, aux dépens toujours plus de la Nature.

    On ne saurait attendre toutefois des signataires de la déclaration qu’ils comprennent cette question de la Nature, notamment celle des animaux, puisque pour eux le capitalisme n’est qu’un phénomène abstrait et ininterrompu, une abstraction théorique linéaire, et certainement pas un mode de production contradictoire où l’humanité produit et reproduit ses conditions réelles d’existence.

    Il faut assumer le marxisme-léninisme-maoïsme pour avoir une vision du monde correcte et être capable de se fonder sur le matérialisme dialectique. C’est alors qu’on comprend réellement ce qu’est la guerre impérialiste, à savoir la crise générale du capitalisme produisant le chaos de la compétition capitaliste et amenant les grandes puissances à la bataille pour le repartage du monde – et non pas un choix conscient d’un capitalisme moribond porté à bout de bras par un État « neutre » manipulé pour être à son service.

    C’est alors qu’on comprend la nature capitaliste de la société française, façonnée par sa réalité impérialiste, et ce à tous les niveaux. Dans un pays comme la France de notre époque, combattre la tendance à la guerre sur une base juste sur le plan conceptuel implique de combattre non seulement l’OTAN et le complexe militaro-industriel français, mais aussi et surtout le capitalisme sur ses propres fondements internes – ce qui implique une rupture au sein des masses françaises en elles-mêmes, par rapport à leur routine dans le capitalisme, car c’est précisément cette routine qui conduit implacablement à l’acceptation de la guerre sur tous les plans, comme évolution « naturelle » du mode de production capitaliste.

    On l’a bien vu en 1914 où la routine capitaliste a empêché les masses françaises de comprendre la nature de la guerre impérialiste. Lénine et les bolcheviks ont inversement réussi à affronter la guerre impérialiste, car ils assumaient cete rupture qui exige une idéologie de classe et une direction culturelle sur une base prolétarienne imposant à chaque étape la clarification de la ligne rouge à suivre pour élever sans cesse le niveau de conscience et de combativité des forces engagées dans la lutte.

    C’est la raison pour laquelle, à l’école de Lénine, il faut implacablement démonter toutes les lignes erronées qui faussent la route vers la rupture de masse à mesure que la situation nécessite profondeur et recul critique, clarté et évidence dans la ligne rouge.

    C’est par le marxisme-léninisme-maoïsme et uniquement par le marxisme-léninisme-maoïsme qu’on peut saisir la réalité des contradictions actuelles dans le monde, qui déchirent la paix et nous précipitent dans la guerre.

    « Nous considérons qu’il existe trois contradictions fondamentales, dans cette situation en perspective où nous évoluons.

    La première et la principale contradiction est celle entre nations opprimées, d’un côté, et superpuissances et puissances impérialistes, de l’autre –même si c’était une redondance, nous préférons les énumérer ainsi pour que ce soit clair- ; une telle contradiction trouve sa solution dans la révolution démocratique, avec la guerre populaire.

    Une deuxième contradiction fondamentale, c’est prolétariat-bourgeoisie ; celle-ci se règle avec des révolutions socialistes et des révolutions culturelles prolétariennes, également au moyen de la guerre populaire, et j’insiste, tout en considérant le type de révolution et les conditions spécifiques de chaque pays.

    Une troisième contradiction, c’est celle entre les impérialistes, entre les superpuissances, entre les superpuissances et les puissances impérialistes, et entre les puissances impérialistes elles-mêmes.

    Ces contradictions, entre eux, se règlent par des agressions, des guerres impérialistes et visent à définir l’hégémonie de la domination du monde dans une Troisième Guerre Mondiale.

    Pourquoi les plaçons-nous dans cet ordre? Parce que c’est ainsi que nous considérons leur ordre d’importance ; nous insistons sur le fait que la contradiction nations opprimées, d’un côté, et superpuissances impérialistes et puissances impérialistes, de l’autre, est la contradiction principale et qu’elle est de grande importance pour la révolution mondiale.

    À notre avis, cela a un rapport avec le poids des masses dans l’histoire ; il est évident que l’immense majorité des masses qui peuplent la Terre, vivent dans les nations opprimées ; de même, il est évident que les populations des nations opprimées s’accroissent quatre fois plus rapidement que celles vivant dans les pays impérialistes.

    Si nous appliquons le principe qui dit que ce sont les masses qui font l’histoire, si nous tenons compte du fait que la Seconde Guerre Mondiale a mis les masses debout politiquement (comme le reconnaissent, même les conseillers réactionnaires des États-Unis), nous pensons qu’une guerre mondiale engendrée par la contradiction entre les impérialistes serait une nouvelle guerre inter-impérialiste pour l’hégémonie mondiale et le partage de la Terre, donc le partage du butin.

    Le butin, ce sont les nations opprimées, et donc ils seraient obligés d’occuper notre territoire pour nous dominer ; et ainsi, à nouveau, la contradiction principale redevient la contradiction entre les masses opprimées, d’un côté, et les superpuissances et puissances impérialistes de l’autre.

    Nous y croyons fermement. Ce n’est pas, comme le disent certains, par chauvinisme d’appartenir aux pays ou aux nations opprimées ; non, ce n’est pas cela ; c’est la tendance que montre l’histoire ; c’est le poids de la masse dans l’histoire et, de plus, les faits le démontrent peu à peu que c’est avec la lutte qui se livre dans les nations opprimées que l’impérialisme s’enfonce et se ruine de plus en plus ; ce sont des faits irréfutables.

    Par conséquent nous considérons que cette contradiction principale est d’une grande importance ; elle est décisive pour balayer l’impérialisme et la réaction de la face de la Terre à condition que la révolution mondiale soit commandée et guidée par le marxisme-léninisme-maoïsme, que se développent des partis communistes basés sur cette idéologie et que soit assumée la guerre populaire, et j’insiste encore une fois, suivant le type de révolution et les conditions spécifiques. »

    Gonzalo, dirigeant du Parti Communiste du Pérou, 1988

    Combattre la guerre impérialiste exige une compréhension adéquate des contradictions dans le monde et de leur évolution. C’est là le rôle de l’avant-garde authentiquement communiste, portant la ligne rouge et la rendant victorieuse sur les lignes noires.

    Guerre à la guerre impérialiste, guerre à l’OTAN !

    Vive le marxisme-léninisme-maoïsme, à bas le révisionnisme !

    Guerre populaire jusqu’au Communisme !

    Parti Communiste de France (Marxiste-Léniniste-Maoïste)
    Juillet 2022

    [Le document critiqué est téléchargeable ici.]

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