Lettre d’invitation au Parti Communiste d’Allemagne pour le premier congrès de l’Internationale Communiste

Chers Camarades !

Les partis et organisations soussignés considèrent que la convocation du premier Congrès de la nouvelle Internationale révolutionnaire est d’une nécessité urgente.

Au cours de la guerre et de la révolution s’est manifesté non seulement la faillite complète des anciens partis socialistes et social-démocrates et en même temps de la Deuxième Internationale, non seulement l’incapacité des éléments intermédiaires de l’ancienne social-démocratie (dite « Centre ») à l’action révolutionnaire effective, mais actuellement on voit déjà se dessiner les contours de la véritable Internationale révolutionnaire.

Le mouvement ascendant extrêmement rapide de la révolution mondiale posant constamment de nouveaux problèmes, le danger d’étouffement de cette révolution par l’alliance des Etats capitalistes s’unissant contre la révolution sous le drapeau hypocrite de la « Société des Nations », les tentatives des partis social-traîtres de s’unir et d’aider de nouveau leurs gouvernements et leurs bourgeoisies à trahir la classe ouvrière après s’être accordé une « amnistie » réciproque ; enfin l’expérience révolutionnaire extrêmement riche déjà acquise et l’internationalisation de tout le mouvement révolutionnaire – toutes ces circonstances nous obligent à prendre l’initiative de mettre à l’ordre du jour de la discussion la question de la convocation d’un Congrès international des partis prolétariens révolutionnaires.

I. – LES BUTS ET LA TACTIQUE

La reconnaissance des paragraphes suivants, établis ici comme programme et élaborés sur la base des programmes du Spartakusbund en Allemagne et du Parti communiste (bolcheviks) en Russie doit, selon nous, servir de base à la nouvelle Internationale.

I. La période actuelle est celle de la décomposition et de l’effondrement de tout le système capitaliste mondial et sera celle de l’effondrement de la civilisation européenne en général, si on ne détruit pas le capitalisme avec ses contradictions indissolubles.

2. La tâche du prolétariat consiste à présent à prendre le pouvoir d’Etat. La prise du pouvoir d’Etat signifie la destruction de l’appareil d’Etat de la bourgeoisie et l’organisation d’un nouvel appareil du pouvoir prolétarien.

3. Le nouvel appareil du pouvoir doit représenter la dictature de la classe ouvrière et à certains endroits aussi celle des petits paysans et des ouvriers agricoles, c’est-à-dire, qu’il doit être l’instrument du renversement systématique de la classe exploiteuse et celui de son expropriation.

Non pas la fausse démocratie bourgeoise – cette forme hypocrite de la domination de l’oligarchie financière – avec son égalité purement formelle, mais la démocratie prolétarienne, avec la possibilité de réaliser la liberté des masses laborieuses ; non pas le parlementarisme, mais l’auto-administration de ces masses par leurs organismes élus ; non pas la bureaucratie capitaliste, mais des organes d’administration créés par les masses elles-mêmes, avec la participation réelle de ces masses à l’administration du pays et à l’activité de l’édification socialiste – voilà quel doit être le type de l’Etat prolétarien. Le pouvoir des conseils ouvriers ou des organisations ouvrières est sa forme concrète.

4. La dictature du prolétariat doit être le levier de l’expropriation immédiate du capital, de l’abolition de la propriété privée sur les moyens de production et de la transformation de cette propriété en propriété populaire.

La socialisation (par socialisation on entend ici l’abolition de la propriété privée qui est remise à l’Etat prolétarien et à l’administration socialiste de la classe ouvrière) de la grande industrie et des banques, ses centres d’organisation ; la confiscation des terres des grands propriétaires fonciers et la socialisation de la production agricole capitaliste ; la monopolisation du commerce ; la socialisation des grands immeubles dans les villes et des grandes propriétés à la campagne ; l’introduction de l’administration ouvrière et la centralisation des fonctions économiques entre les mains des organismes émanants de la dictature prolétarienne – voilà les problèmes essentiels du jour.

5. Pour la sécurité de la révolution socialiste, pour sa défense contre des ennemis intérieurs et extérieurs, pour l’aide aux autres fractions nationales du prolétariat en lutte, etc., le désarmement complet de la bourgeoisie et de ses agents, et l’armement général du prolétariat sont nécessaires.

6. La situation mondiale exige maintenant le contact le plus étroit entre les différentes parties du prolétariat révolutionnaire et l’union complète des pays dans lesquels la révolution socialiste a triomphé.

7. La méthode fondamentale de la lutte est l’action de masse du prolétariat, y compris la lutte ouverte à main armée contre le pouvoir d’Etat du capital.

Il. – RAPPORTS AVEC LES PARTIS « SOCIALISTES »

8. La II° Internationale s’est partagée en trois groupes principaux : les social-patriotes déclarés qui, pendant toute la guerre impérialiste des années 1914-1918 soutenaient leur propre bourgeoisie et transformaient la classe ouvrière en bourreau de la révolution internationale ; le « centre » dont le dirigeant théorique est actuellement Kautsky, et qui représente une organisation d’éléments constamment oscillants, incapables de suivre une ligne directrice déterminée, et agissant parfois en véritables traîtres ; enfin, l’aile gauche révolutionnaire.

9. A l’égard des social-patriotes, qui partout, aux instants critiques, s’opposent les armes à la main à la révolution prolétarienne, seul la lutte implacable est possible. A l’égard du « centre » – la tactique de l’effritement des éléments révolutionnaires, critique impitoyable, et démasquer les chefs. A une certaine étape du développement, la séparation organisatrice des gens du centre est absolument nécessaire.

10. D’autre part le bloc est nécessaire avec ces éléments du mouvement révolutionnaire qui, tout en n’ayant pas appartenu autrefois au parti socialiste, se placent maintenant dans l’ensemble sur le terrain de la dictature prolétarienne sous la forme du pouvoir soviétique. Ce sont en première ligne les éléments syndicalistes du mouvement ouvrier.

11. Enfin, il est nécessaire d’attirer tous les groupes et organisations prolétariennes qui, tout en ne s’étant pas ralliés ouvertement au courant révolutionnaire de gauche, manifestent néanmoins dans leur développement une tendance dans cette direction.

12. Concrètement, nous proposons que participent au Congrès les représentants des partis, tendances et groupes suivants (les membres à pleins droits de la Troisième Internationale seront des partis tout à fait autres et qui se placeront entièrement sur son terrain) :
1. Le Spartakusbund (Allemagne) ; 
2. Le Parti Communiste (Bolchevik) (Russie) ; 
3. Le Parti Communiste de l’Autriche allemande ; 
4. Celui de la Hongrie ; 
5. Celui de la Finlande ; 
6. Le Parti Communiste Ouvrier polonais ; 
7. Le Parti Communiste d’Estonie ; 
8. Celui de la Lettonie ; 
9. Celui de la Lituanie ; 
10. Celui de la Russie Blanche ; 
11. Celui de l’Ukraine ; 
12. Les éléments révolutionnaires du parti social-démocrate tchèque ; 
13. Le Parti social-démocrate bulgare (étroits) ; 
14. Le P. s.-d. roumain ; 
15. L’aile gauche du parti s.-d. serbe ; 
16. La gauche du parti s.-d. suédois ; 
17. Parti s.-d. norvégien ; 
18. Pour le Danemark le groupe Klassenkampen ; 
19. Le Parti communiste hollandais ; 
20. Les élément révolutionnaires du parti ouvrier belge ; 
21 et 22. Les groupes et organisations à l’intérieur du mouvement socialiste et syndicaliste français, qui, dans l’ensemble se solidarisent avec Loriot ; 
23. La gauche s.-d. de la Suisse ; 
24. Le parti socialiste italien ; 
25. Les éléments révolutionnaires du P.S. espagnol ; 
26. Les éléments de gauche du parti socialiste portugais ; 
27. Les partis socialistes britanniques (avant tout le courant représenté par Mac Lean) ; 
28. S. L. P. (Angleterre) ; 
29. I. W. W. (Angleterre) ; 
30. I. W. of Great Britain ; 
31. Les éléments révolutionnaires des organisations ouvrières de l’Irlande ; 
32. Les élément révolutionnaires des shop stewards (Grande-Bretagne) ; 
33. S. L. P. (Amérique) ; 
34. Les éléments de gauche du P. S. d’Amérique (la tendance représentée par Debi et la Ligue de Propagande Socialiste) ; 
35. I. W. W. Amérique; 
36. I. W. W. (Australie) ; 
37. Workers International Industrial Union (Amérique) ; 
38. Les groupes socialistes de Tokyo et de Yokohama (représentés par le cam. Katayama) ; 
39. L’Internationale socialiste des Jeunes (représentée par le cam. Münzenberg).

III. – LA QUESTION DE L’ORGANISATION ET LE NOM DU PARTI

13. La base de la Troisième Internationale est donnée par le fait que dans différentes parties de l’Europe se sont déjà formés des groupes et des organisations de camarades d’idées, se plaçant sur une plate-forme commune et employant en gros les mêmes méthodes tactiques. Ce sont en premier lieu les spartakistes en Allemagne et les partis communistes dans beaucoup d’autres pays.

14. Le Congrès doit faire paraître, en vue d’une liaison permanente et d’une direction méthodique du mouvement un organe de lutte commun, centre de l’Internationale Communiste, subordonnant les intérêts du mouvement de chaque pays aux intérêts communs de la révolution à l’échelle internationale. Les formes concrètes de l’organisation, de la représentation, etc., seront élaborées par le Congrès.

15. Le Congrès devra prendre le nom de « Premier Congrès de l’Internationale Communiste », les différents partis devenant sections de celle-ci. Théoriquement Marx et Engels déjà ont trouvé faux le nom de « social-démocrate ». L’effondrement honteux de l’Internationale social-démocrate exige ici aussi une séparation. Enfin le noyau fondamental du grand mouvement est déjà formé par une série de partis qui ont pris ce nom.

Considérant ce qui vient d’être dit, nous proposons à toutes les organisations et partis frères de mettre à l’ordre du jour la question de la convocation du Congrès Communiste International.

Avec notre salut socialiste.

Le Comité Central du Parti Communiste Russe (Lénine, Trotsky).

Le Bureau étranger du Parti Ouvrier Communiste de Pologne (Karsky).

Le Bureau étranger du Parti Ouvrier Communiste de Hongrie (Rudnianszky).

Le Bureau étranger du Parti Ouvrier Communiste de l’Autriche allemande (Duda).

Le Bureau russe du Comité Central du Parti Communiste de Lettonie (Rosing).

Le Comité Central du Parti Communiste de Finlande (Sirola).

Le Comité Exécutif de la Fédération Social-démocrate Révolutionnaire Balkanique (Rakovsky).

Pour le S. L. P. (Amérique) (Reinstein)

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Après le premier congrès de l’Internationale Communiste: un début d’intégration

Les échecs en Europe centrale impliquèrent une accentuation des initiatives de l’Internationale Communiste vers des pays comme l’Angleterre, la France, l’Italie, ainsi que les États-Unis. On a ainsi la dénonciation, comme le 13 mai 1919, du traité de Versailles, avec un appel aux prolétaires de France, d’Angleterre, d’Amérique et d’Italie, puisque la situation des ouvriers allemands et autrichiens dépendaient désormais de l’application des accords impitoyables du traité par les pays victorieux.

Cependant, au-delà de cette orientation générale, il y avait deux axes très concrets. Le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste avait comme objectif de récupérer les meilleurs activistes d’un côté, même s’ils étaient trop gauchistes, et d’accueillir les structures révolutionnaires de masse, même si elles étaient trop droitières.

En janvier 1920, le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste écrivit en ce sens aux IWW (Industrial Workers of the World), une structure syndicaliste révolutionnaire alors importante aux États-Unis. C’était la tentative d’expliquer les principes communistes et l’importance de l’intervention politique que refusaient justement les syndicalistes.

« Un seul grand syndicat », « Nous voulons la terre » : affiche du syndicat américain Industrial Workers of the World,
qui s’était opposé à la première guerre mondiale et regroupait environ 60 000 membres.

Cet espoir dans les courants syndicalistes-révolutionnaire, voire anarchistes, était alors très fort ; dans la même idée, le KAPD, une importante scission anti-syndicats du KPD, reçut également une lettre ouverte le 2 juin 1920, où il fut proposé d’envoyer des délégués pour le prochain congrès de l’Internationale Communiste, mais à condition d’en accepter les règles.

Il y eut également une circulaire sur la question parlementaire et celle des soviets qui fut diffusée, afin de souligner qu’affirmer le pouvoir des soviets n’excluait pas d’utiliser tactiquement le parlement.

Ce document du 1er septembre 1919 note de manière par ailleurs positive l’existence d’un groupe dénommé « Parti Communiste » en France. C’est notable, car cette petite structure rassemblant syndicalistes-révolutionnaires et anarchistes et fondé par Raymond Péricat était en décalage total par rapport aux bolcheviks.

Son organe de presse, Le communiste, se définissait d’ailleurs étant l’Organe Officiel du Parti Communiste et des soviets adhérant à la Section Française de la IIIe Internationale de Moscou, des Conseils Ouvriers, de Paysans et de Soldats, sombrant dès décembre 1919 en une « Fédération communiste des soviets » disparaissant rapidement.

Pareillement, le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste publia un communiqué pour les cinq ans de l’assassinat de Jean Jaurès, le 31 juillet 1919. Normalement, quand il est parlé de ce dernier, sa dimension social-patriote est toujours dénoncée comme l’autre aspect de son pacifisme. Ce n’est pas le cas ici, seulement l’activité anti-guerre de Jean Jaurès étant soulignée, avec son positionnement contre l’alliance entre les réactionnaires français et russes. C’est que le communiqué a une forme bien particulière, celle d’une lettre destinée à Fernand Loriot.

Ce dernier, qui s’avérera lui aussi un syndicaliste plus que toute autre chose, était le chef de file des partisans de la IIIe Internationale chez les socialistes français, qui étaient quant à eux encore totalement à l’écart d’une avancée vers la révolution russe et Lénine.

Mais cela n’excluait donc nullement la tentative par le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste de se tourner également vers les larges masses oscillant plutôt à droite, mais passant à gauche.

Le 22 septembre 1919, le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste écrivit une lettre au congrès de Bologne du Parti Socialiste italien, qui fut effectivement un grand succès pour elle. Le Comité Central du PSI avait, le 19 mars 1919, choisit de rejoindre l’Internationale Communiste, ce qui fut confirmé par le congrès de Bologne. Le PSI obtint même 156 députés sur 508 en novembre, mais le souci était qu’il n’avait pas expulsé la minorité hostile à l’Internationale Communiste, qui avait Filippo Turati à sa tête.

Propagande du Parti Socialiste italien
pour les élections de 1919

Le 17 janvier 1920, une lettre dans le même esprit fut envoyée au congrès de Strasbourg du Parti Socialiste SFIO. Ce congrès fut également un succès, puisque 4300 délégués contre 300 décidèrent d’abandonner la seconde Internationale, bien que 3000 contre 1600 refusèrent, pour l’instant, l’adhésion à l’Internationale Communiste.

Il y eut également un travail de fond en direction des socialistes de gauche organisées dans l’USPD, ce que le KPD bien plus petit n’appréciait guère, considérant que ce parti était trop ancré dans le réformisme. Cependant, en décembre 1919, à son congrès de Lepizig, 227 délégués de l’USPD sur 54 votèrent pour quitter la seconde Internationale et 169 contre 114 pour rejoindre l’Internationale Communiste.

Aussi, une lettre fut envoyée à la fois à l’USPD et au KPD, le 5 février 1920, insistant sur la nécessité pour l’USPD d’aller au bout de son raisonnement. Le 27 mai 1920, une seconde lettre dénonça que la première n’ait pas été rendue publique à la base de l’USPD ; une troisième fut envoyée le 21 juin 1920, rappelant que le prochain congrès de l’Internationale Communiste allait se tenir et qu’il n’était pas possible de ne pas être présent.

Un autre fait marquant fut qu’en décembre 1919, les socialistes espagnols votèrent à 14 000 voix pour la seconde Internationale, mais à 12 500 voix pour l’Internationale Communiste. La tendance à l’affirmation de l’Internationale Communiste l’emportait, mais c’était une tendance de fond encore seulement.

L’espoir d’une affirmation extrêmement rapide, telle qu’elle s’était exprimée au premier congrès de l’Internationale Communiste, ne se concrétisait pas tel quel. Le second congrès devra en fait faire face au défi de l’intégration et de la formation d’une nouvelle génération.

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Après le premier congrès de l’Internationale Communiste: entre désillusion et affirmation

Entre le premier et le second congrès de l’Internationale Communiste, il fut largement oscillé entre désillusion et une solide affirmation de la perspective. Cela se lit particulièrement dans les communiqués des premiers mai 1919 et 1920.

De fait, dans son communiqué du premier mai 1919, l’Internationale Communiste peut souligner que la mise en place de cette journée internationale des travailleurs datait de 1889, soit d’alors il y a trente ans.

Le premier mai fut en effet décidé par la seconde Internationale lors de son congrès de Paris. La troisième Internationale est le prolongement de la seconde Internationale, avec la mise à l’écart des opportunistes ; elle peut affirmer, triomphaliste, sa victoire imminente :

« Notre Internationale Communiste prend dans ses mains l’organisation de la fête internationale du premier mai (…).

Il n’y a pas de voie médiane. Ou bien la dictature sanglante des généraux bourreaux, qui tuent des centaines de milliers d’ouvriers et de paysans au profit d’une bande de banquiers, ou bien la dictature de la classe ouvrière, c’est-à-dire de la majorité opprimée des travailleurs, qui désarme la bourgeoisie, forme son armée rouge et libère la planète entière de l’esclavage (…).

La tempête commence. Les flammes incendiaires de la révolution prolétarienne s’attise avec une force irrépressible dans toute l’Europe. Le moment se rapproche qui était attendu par nos prédécesseurs et maîtres, et qui a été prévu par les fondateurs géniaux du socialisme scientifique, Marx et Engels.

Notre drapeau rouge, coloré par le sang du cœur de générations entières de grands combattants et martyrs de la classe ouvrière, ce drapeau flotte dans le monde entier (…).

Nos mots d’ordre :

Vive la dictature du prolétariat du monde entier !

Vive la république soviétique internationale !

En défense des républiques soviétiques russe, hongroise, bavaroise !

Vive l’armée rouge internationale !

Vive la troisième Internationale !

Vive le communisme !

Vive le premier mai communiste ! (…)

La seconde Internationale est morte. Le communisme est arrivé dans les rues. La révolution communiste grandit sous nos yeux. Une république soviétique en Russie, une république soviétique en Hongrie, une république en Bavière – ce sont les résultats des récentes luttes de la classe ouvrière.

En 1919, la grande Internationale Communiste est née. En 1920, la grande République soviétique internationale naîtra. »

Cependant, en 1920, le communiqué du premier mai a un ton bien différent. Les républiques soviétiques hongroise et bavaroise se sont effondrées ; les martyrs sont nombreux dans l’ensemble de l’Allemagne, pays où les sociaux-démocrates s’opposaient frontalement à la révolution. La situation devenait par contre plus favorable en Italie et en France.

Les choses avançaient, mais tout apparaissait comme plus complexe et le communiqué est donc bien plus prudent :

« L’année qui vient ouvre un chapitre nouveau, peut-être le plus important dans l’histoire de notre lutte pour la libération de toute l’humanité du joug du capitalise.

Puisse la fête du premier mai 1920 être celle du triomphe de l’internationale Communiste (…). Notre victoire est certaine. Le prolétariat va mettre en place le pouvoir soviétique dans le monde entier. Vive le premier mai ! »

C’était une remise en perspective.

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Le premier congrès de l’Internationale Communiste et la mise en place du Comité Exécutif

Symboliquement, des participants de la conférence de Zimmerwald publièrent dans la foulée de la fondation de l’Internationale Communiste un document annonçant la dissolution du bureau en étant issue et annonçant que ses documents devaient être remis à l’Internationale Communiste.

La conférence devenue congrès se prononça ensuite contre la renaissance des sociaux-démocrates, considérés comme désormais seulement des sociaux-chauvins ou des centristes, puis l’accord fut fait sur un manifeste.

Un Comité Exécutif de l’Internationale Communiste fut mis en place avec un représentant chacun des partis de Russie, d’Allemagne, de l’Autriche allemande, de Hongrie, de la fédération balkanique, de Suisse, de Scandinavie.

Il se réunit pas mal 56 fois entre le premier et le second congrès, cherchant d’un côté à organiser, de l’autre à promouvoir les conceptions communistes.

L’Internationale Communiste, revue publiée notamment en allemand, en anglais,
en français et en russe.

Le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste intervint ainsi notamment pour les événements ou célébrations les plus notables, comme la tentative de coup d’État militaire en Allemagne au début de l’année 1920, l’anniversaire du martyr de Rosa Luxembourg et de Karl Liebknecht, à l’occasion du 8 mars, etc.

A cela s’ajoutent différentes déclarations et appels, comme un Appel à la jeunesse, une déclaration au prolétariat de la zone danubo-balkanique et aux Partis Communistes de Bulgarie, de Roumanie, de Serbie et de Turquie, une déclaration au congrès du Parti socialiste de Norvège et à celui du Parti Communiste de Finlande, à celui des communistes et des socialistes de gauche de Scandinavie, etc.

Sur le plan de l’organisation, un événement marquant fut l’annonce en juin 1920 de la tenue du second congrès en juillet, à Moscou, fut l’annonce de la tenue d’un congrès des peuples de l’Orient, à Bakou. Il y eut également une lettre envoyée aux États-Unis, où existaient deux structures se revendiquant de l’Internationale Communiste, ce qui était incohérent et exigeait par conséquent une fusion.

A la fin de l’année 1919, un bureau de l’Internationale Communiste fut également mis en place à Amsterdam, mais en raison de nombreux positionnements gauchistes, il dut au bout de quelques mois s’effacer devant le secrétariat occidental de l’Internationale Communiste, à Berlin, fondé pareillement dans la foulée du congrès.

Le symbole employé par l’Internationale Communiste pour sa revue : un ouvrier brisant des chaînes enserrant la planète

Le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste prit bien entendu position contre les sociaux-démocrates s’enferrant dans le refus de la révolution. En avril 1920, la conférence internationale syndicale fut la cible de grandes attaques. Le congrès de Lucerne de la seconde internationale fut vigoureusement dénoncé le 15 juillet 1919 ; ce congrès parvint cependant à organiser un comité qui réalisa un congrès international à Genève en juillet 1920, unifiant les sociaux-démocrates allemands, anglais, belge, danois, hollandais, suédois.

L’intervention impérialiste contre la Russie soviétique fut bien sûr la cible récurrente des interventions de l’Internationale Communiste, avec des appels à des expressions de solidarité comme le 18 juin 1919, ou de multiples avertissements quant aux menées militaires anti-soviétiques polonaises (comme le 17 février 1920, le 18 mai 1920), d’ailleurs soutenues par la France avec de nombreux stocks d’armes et même 600 officiers.

Toutefois, le Comité Exécutif de l’Internationale Communiste s’évertua surtout à chercher à mobiliser ses partisans dans deux zones politiques bien délimitées : les milieux syndicalistes-révolutionnaires et anarchistes d’un côté, la gauche de la social-démocratie de l’autre. Cela était imposé par les défaites immédiates marquant l’histoire de l’Europe centrale.

Car l’Internationale Communiste accorda bien entendu une place importante à la formation de républiques soviétiques en Hongrie et en Bavière, avec un appel au soutien, à la mobilisation… Mais en en juillet 1919, l’Internationale Communiste devait dresser un constat terrible :

« A tous ! A tous !

Un monstrueux crime est en train d’être commis, duquel en comparaison tous les méfaits des classes possédantes pendant la guerre semblent bien pâles.

Les impérialistes anglais et français encerclent la République soviétique hongroise de tous les côtés, afin de noyer dans le sang les ouvriers hongrois, la révolution hongroise.

Les féodaux roumains incitent leurs troupes, trompés par la noblesse, contre la Hongrie.

Depuis deux autres directions, les gouvernements tchécoslovaques et yougoslaves s’activent contre la Hongrie, sous l’impulsion des impérialistes français. »

La chute de la république soviétique hongroise fut également présentée dans un communiqué du 5 août 1919, qui dénonce vigoureusement les sociaux-démocrates ayant, dans les pays occidentaux, saboté la grève de soutien prévu pour le 21 juillet 1919.

Cela ne changeait rien au problème, aggravé par la défaite de la république soviétique bavaroise. Tout un élan était en partie brisé.

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Le premier congrès de l’Internationale Communiste: conférence et congrès

Le fait que des révolutionnaires se réunissent dans un pays où la révolution a été un succès ne pouvait que produire une dynamique.

Le troisième jour, les délégués du Parti Communiste de l’Autriche allemande, le Parti des sociaux-démocrates de gauche de Suède, la Fédération ouvrière social-démocrate révolutionnaire des Balkans et le Parti Communiste de Hongrie rendirent un document commun appelant à la fondation de l’Internationale Communiste.

Trois raisons furent nommées : l’unité des communistes se battant sur le même terrain, la crainte de se voir déborder par une formation d’une Internationale opportuniste se profilant, le fait qu’une non-fondation donnerait l’image d’un échec après s’être retrouvé à Moscou.

La réponse du délégué du Parti Communiste d’Allemagne fut immédiate, longue et conséquente. Elle se résume bien avec la constatation suivante :

« Je suis très surpris de voir que le représentant de la Suède demande la fondation de la IIIe Internationale et soit obligé d’admettre qu’il n’y a pas encore en Suède d’organisation purement communiste, qu’il n’existe qu’un grand groupe communiste à l’intérieur du Parti social-démocrate suédois. »

Ce n’était pas tout à fait exact, car les Suédois étaient sortis pour fondeur leur propre structure, cependant l’idée était là : les communistes étaient pour l’instant somme toute regroupés dans des petites structures à l’ombre de la social-démocratie. Selon lui, si l’on y regardait bien, on n’avait aucune idée de qui suivrait réellement les délégués.

Le délégué allemand mentionna également l’absence de l’Italie, de la Belgique, du Portugal, même de la France (puisque Jacques Sadoul était présent depuis longtemps en Russie) ; aussi expliqua-t-il :

« Il y a tellement peu d’organisations s’impliquant dans la fondation de la III Internationale qu’il est difficile d’apparaître ainsi devant l’opinion publique.

Il est par conséquent nécessaire, avant d’avancer à la fondation, de faire connaître au monde notre plate-forme et d’exiger des organisations communistes qu’elles annoncent si elles sont prêtes à fonder avec nous la IIIe Internationale. »

La réponse de Zinoviev fut la suivante :

« Vous vouliez auparavant la fondation formelle de Partis Communistes dans tous les pays ? Vous avez une révolution victorieuse, c’est davantage qu’une fondation formelle.

Vous avez en Allemagne un Parti qui avance au pouvoir et qui formera dans quelques mois un gouvernement prolétarien.

Et donc nous devrions hésiter ? On ne nous comprendrait pas. »

Le Parti Communiste de Finlande intervint alors, se posant pour la fondation de la IIIe Internationale, soulignant également que si une orientation tactique était décidée, alors cela montrait bien qu’une nouvelle structure était née de toutes façons.

A part le délégué allemand, les prises de paroles soulignaient également que la conférence devait devenir congrès, car elle se situait dans le prolongement de la gauche de Zimmerwald, qui s’était opposé à la guerre mondiale. Les luttes de classes faisant également rage, il ne fallait pas tergiverser.

Et de fait, à part les cinq voix abstentionnistes du Parti Communiste d’Allemagne, tous les délégués, y compris ceux avec les voix consultatives, votèrent pour la fondation de l’Internationale Communiste. C’était un premier aléa dans l’histoire du Parti Communiste d’Allemagne, dont les complications et la voie tortueuse n’en finira pas tout au long du développement de l’Internationale Communiste.

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Le premier congrès de l’Internationale Communiste et les discussions sur la ligne

Si le délégué allemand exprima les doutes du KPD, le paradoxe est que c’est lui qui, avec Boukharine, écrivit la proposition de lignes directrices pour l’Internationale Communiste. Les débats de la conférence portaient précisément sur ces orientations.

La question syndicale fut vite réglée. Malgré les énormes différences selon les pays – le délégué allemand souligna que le mouvement révolutionnaire affrontait les syndicats car ceux-ci se positionnaient ouvertement comme obstacle – il fut admis par tous (sauf les Norvégiens) que les syndicats devaient se transformer pour aller dans le sens de la révolution. Cette question, apparemment secondaire, devrait ressurgir par la suite, une fois les Partis Communistes établis solidement.

Le second point, Démocratie bourgeoise ou dictature du prolétariat ?, formait un point d’achoppement plus particulier entre communistes russes et communistes allemands, alors que par ailleurs, le document n’était alors disponible encore qu’en russe et en allemand.

C’est Lénine qui prit la parole pour faire un très long rapport à ce sujet. Il souligne qu’il n’existait pas de démocratie « pure », au-delà des classes, et que telle était l’erreur des socialistes.

La classe ouvrière devait inéluctablement organiser sa dictature pour briser la contre-révolution ; la Commune de Paris de 1871 formait un exemple historique de démantèlement de l’ancien État. Le pouvoir soviétique était le phénomène d’actualisation du nouveau pouvoir.

Lénine était très critique à ce sujet des communistes des autres pays qui, à part en Hongrie, n’avaient justement pas su propager l’idée des soviets et expliquer leur nature. C’était pourtant là, selon lui, la clef décidant du développement de la révolution mondiale.

Dans son intervention, Lénine explique à ce sujet que :

« Une des tâches les plus importantes pour les camarades des pays de l’Europe Occidentale consiste à expliquer aux masses la signification, l’importance et la nécessité du système des Soviets. On constate sous ce rapport une insuffisante compréhension.

S’il est vrai que Kautsky et Hilferding ont fait faillite en tant que théoriciens, les derniers articles de la Freiheit prouvent cependant qu’ils ont su exprimer exactement l’état d’esprit des parties arriérées du prolétariat allemand.

Il est arrivé la même chose chez nous : au cours des huit premiers mois de la révolution russe la question de l’organisation soviétique a été beaucoup discutée, et les ouvriers ne voyaient pas très clairement en quoi consiste le nouveau système, ni si l’on pouvait constituer l’appareil d’État avec les Soviets.

Dans notre révolution nous avons progressé non par la voie théorique mais par la voie pratique. Ainsi, par exemple, jamais auparavant nous n’avons posé théoriquement la question de l’Assemblée Constituante et nous n’avons jamais dit que nous ne reconnaissons pas celle-ci.

Ce n’est que plus tard, lorsque les institutions soviétiques se répandirent à travers tout le pays et conquirent le pouvoir politique que nous décidâmes de disperser l’Assemblée Constituante.

Nous voyons à présent que la question se pose avec beaucoup plus d’acuité en Hongrie et en Suisse.

D’un côté il est excellent qu’il en soit ainsi; nous puisons dans ce fait la conviction absolue que la révolution avance plus rapidement dans les États de l’Europe Occidentale et qu’elle nous apportera de grandes victoires.

Mais, d’autre part, il y a un certain danger et c’est à savoir que la lutte sera tellement acharnée et tendue que la conscience des masses ouvrières ne sera pas en mesure de suivre ce rythme.

Encore maintenant la signification du système des Soviets n’est pas claire pour les grandes masses des ouvriers allemands politiquement instruits, parce qu’ils ont été élevés dans l’esprit du parlementarisme et des préjugés bourgeois. »

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Le premier congrès de l’Internationale Communiste et la vague révolutionnaire en formation

L’idée de Lénine était en 1919 la suivante : la révolution russe a réussi, il y a une effervescence en Allemagne, la gauche de la social-démocratie devient souvent communiste et le principe des « soviets » se répand comme méthode universelle d’organisation prolétarienne. Il faut donc battre le fer quand il est chaud.

Tel n’était pas le point de vue du KPD. Le délégué du Parti Communiste d’Allemagne prit ainsi le premier la parole lors de ce qui a suivi les rapports : le débat sur la ligne de l’Internationale Communiste. Il souligna que le communistes allemands n’étaient nullement contre la fondation de celle-ci, mais que contrairement aux communistes russes et finlandais, ils pensaient qu’il fallait de la prudence et y aller par étapes.

Le délégua allemand expliqua qu’il y avait la crainte d’une cérémonie pompeuse de fondation, pour des résolutions finalement de papier ; les travailleurs appréhendaient selon lui une telle démarche dans les pays occidentaux. On reconnaît bien entendu ici le traumatisme de l’échec de la seconde Internationale, qui s’est brisée sur le déclenchement de la première guerre mondiale.

De plus, il insista sur les tâches pratiques, demandant un haut niveau de structuration encore impossible à atteindre, et liées à l’objectif de la prise du pouvoir. Or, selon lui, c’est incompatible avec la présence au congrès de gauches de la social-démocratie n’ayant somme toute pas encore fait une réelle rupture avec l’esprit de conciliation avec la bourgeoisie.

Lénine parmi les délégués du premier congrès
de l’Internationale communiste

Ce n’était pas l’approche des communistes russes, qui envisageaient les choses de manière particulièrement dynamique.

Pour cette raison, les voix des délégués ne dépendaient pas de la taille de leur parti, mais de l’importance de leur pays. Ils étaient considérés comme les représentants de leur prolétariat et on voit bien qu’il est considéré que, rapidement, les communistes feraient la conquête des masses.

Ainsi, au premier congrès, où il y a 35 délégués avec une voix décisionnelle, on a le Parti Communiste de Russie qui dispose de 5 voix, tout comme le Parti Communiste d’Allemagne, la Gauche française dite de Zimmerwald et le SLP américain. Or, si les communistes russes ont pris en charge un État, si les communistes allemands ont une base de masse et une longue expérience historiquement, ni les Français ni les Américains ne disposent de quelque chose de réellement ancré.

Leur importance est déterminée par leur situation historique dans le capitalisme et par le potentiel historique en résultant.

Ont trois voix les délégués de pays de taille moyenne : le Parti Communiste de l’Autriche allemande, le Parti Communiste de Hongrie, la gauche de la social-démocratie suédoise, le Parti social-démocrate de Norvège, le Parti social-démocrate de Suisse, la Fédération révolutionnaire balkanique (les Tesnjaki bulgares et le Parti Communiste roumain), le Parti Communiste de Pologne, le Parti Communiste de Finlande, le Parti Communiste d’Ukraine.

Ce sont là des organisations motivées, déterminées, avec un véritable engagement, une réelle conscience de l’enjeu historique.

Disposent d’une voix le Parti Communiste de Lettonie, celui de Lituanie et de Biélorussie, celui d’Estonie, celui d’Arménie, celui des colonies allemandes (en Russie), ainsi que le groupe unifié des peuples orientaux de Russie.

De manière consultative sont présentes plusieurs organisations, comme le groupe communiste français, le groupe communiste tchèque, le SDP de Hollande, le groupe communiste des Slaves du sud, etc.

En pratique, tout cela ne représente pas grand-chose, voire rien du tout à part les Russes et les Allemands, ainsi que les Finlandais et les Hongrois, mais aussi les Bulgares et les Norvégiens. Toutefois, c’était une initiative marquante dans un contexte explosif. Rien que la tenue d’une telle conférence, alors que la Russie était entièrement coupée du reste de l’Europe et pratiquement inaccessible en transports, était un grand marqueur politique.

Les participants au congrès en avaient tout à fait conscience.

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Le premier congrès de l’Internationale Communiste comme conférence se focalisant sur l’Allemagne

Pour Lénine, dès lors que les spartakistes partaient à l’assaut du ciel, alors la IIIe Internationale existe déjà concrètement. Or, les communistes allemands considéraient quant à eux qu’il était prématuré de fonder l’Internationale Communiste. Le premier congrès de l’Internationale Communiste allait donc trouver une voie.

Concrètement, celui-ci s’est déroulé du 2 au 19 mars 1919, à Moscou ; ce n’est que le troisième jour qu’il fut rendu public, afin de faciliter son organisation exigeant souvent des voyages clandestins pour les délégués présents.

Le premier congrès de l’Internationale Communiste

Son objectif, c’était donc sa propre fondation. Il s’agit en effet d’un congrès constitutif et par conséquent ce qui comptait avant tout, c’est l’assentiment du Parti Communiste d’Allemagne au projet. Preuve des difficultés, le délégué allemand insista, avec succès, pour que le congrès s’ouvre simplement comme « conférence communiste ».

Le premier rapport prononcé fut d’ailleurs celui du délégué du Parti Communiste d’Allemagne, qui présenta la situation après l’échec de l’insurrection de janvier et parla d’une grande actualité révolutionnaire, avec une économie allemande prête à s’effondrer alors qu’il y a de larges mouvements de masse.

Auparavant, Lénine, qui avait ouvert le congrès, avait également demandé en premier lieu aux personnes présentes de se lever en l’honneur des « meilleurs représentants de la IIIe Internationale, Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg », assassinés lors de l’échec de la révolution allemande.

Dans le discours de clôture, Lénine souligna pareillement le rapport entre les bolcheviks russes et les spartakistes allemands :

« Que la bourgeoisie du monde entier continue à sévir, qu’elle pourchasse, emprisonne et même assassine spartakistes et bolcheviks, cela ne lui servira de rien. Cela ne pourra qu’éclairer les masses et les déterminer à s’affranchir de leurs vieux préjugés bourgeois démocratiques et à se retremper dans la lutte.

La victoire de la révolution prolétarienne est assurée dans le monde entier : la constitution de la République Soviétique Internationale est en marche. »

La question allemande est donc présente à tous les niveaux ; la question de la révolution mondiale était celle de la révolution allemande. C’était Karl Liebknecht et Rosa Luxembourg qui avaient porté le flambeau de l’élargissement de la vague révolutionnaire commencée en Russie et tout reposait désormais sur la capacité des communistes d’Allemagne.

Signe de l’hégémonie de cette question, lorsque le délégué français, Jacques Sadoul, prend la parole, la première chose qu’il fait est de s’excuser… pour ne parler ni allemand, « la langue du socialisme international », ni russe, « qui sera demain déjà la langue du communisme international », ne parlant que le français, « qu’on doit qualifier de langue de la révolution d’autrefois ».

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