Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1939-1953)

Le tableau suivant présente les données pour la période de 1939 à 1953. On notera qu’à un moment il n’y a plus d’exécutions, l’URSS considérant qu’elle avait suffisamment avancé dans la construction du socialisme pour avoir dépassé la peine de mort. Cela fut remis en cause face à l’offensive de l’espionnage épaulé principalement par les États-Unis.

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Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1937-1938)

Le tableau suivant présente les données de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS pour les années 1937-1938. Celles-ci ont été décrites comme celles de « la grande terreur » par les historiens bourgeois.

En réalité, il s’agit d’une vaste opération de liquidation des restes de l’ancienne société cherchant à se revigorer dans la société soviétique, jouant le tout pour le tout.

La cible a pour cette raison constitué en les anciens officiers tsaristes, les anciens membres du clergé, les anciens bandits, voleurs, contrebandiers, etc., qui continuent leurs activités, ainsi que les koulaks ayant fui les campagnes collectivisées.

En 1937, il était clair que l’appareil de sécurité d’État avait été à la traîne dans le combat contre le sabotage et l’espionnage, ayant été en retard sur les initiatives du Parti à ce niveau. Lors de la session du Comité Central du PCUS(b) en février-mars 1937, cela apparut comme une évidence.

Le NKVD se focalisait à 80 % contre les crimes relevant en pratique de la police (légers vols, petits crimes, vandalisme, etc.) et avait raté la confrontation avec la contre-révolution, alors qu’avec les immenses succès dans la construction du socialisme en URSS, les ennemis de classe étaient passés à la tactique du « sabotage tranquille ».

Cela exigea une vaste initiative, qui par ailleurs frappa le NKVD lui-même : 2 hauts cadres furent arrêtés en 1936, 71 en 1937, 107 en 57, 3 en 1940.

Quant à la vague de répression de la contre-révolution de 1937-1938, elle concerna au total autour de 1,5 millions de personnes, dans une opération ayant sidéré les commentateurs bourgeois de par la capacité d’intervention de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS.

Celui-ci avait exécuté 1118 personnes en 1936 et procéda à l’application de cette mesure suprême pour 353 074 personnes en 1937 et 328 618 personnes en 1938.

Les éléments les moins actifs des éléments anti-sociaux ciblés furent envoyés dans les camps de travail. En 1940, il y avait 53 camps dépendant de l’administration dénommée Gulag, avec 1,3 million de prisonniers.

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Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1930-1936)

Le tableau suivant présente les données pour la période de 1930 à 1936.

Le nombre de peine de morts se réduit de manière très sensible, mais il y a des pics de répression : en 1935, l’appareil de sécurité d’Etat arrêta 43 686 personnes, soit 2,5 fois plus que l’année précédente.

L’élément déclencheur fut l’assassinat de Kirov le premier décembre 1934, qui révéla à quel point il y avait des réseaux organisés pour le renversement du régime. C’est le grand affrontement avec les éléments anti-sociaux rétifs à l’organisation du nouveau régime, alors qu’à l’arrière-plan le pays s’industrialise à grande vitesse.

On doit noter aussi qu’en sept années, pratiquement 900 000 personnes ont été envoyées en prison ou en camp de travail.

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Les chiffres de la répression de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS (1921-1929)

Le tableau suivant présente les données pour la période de 1921 à 1929, c’est-à-dire celle de l’instauration de l’appareil de sécurité d’État à la fin de la guerre civile jusqu’à la fin de la première période de sa structuration.

On peut voir que la démarche de la guerre civile se prolonge tout au long des années 1920, avec des condamnations à mort.

On remarque aussi l’émergence de condamnations liées au NKVD, notamment de la troïka, signifiant une intervention en urgence.

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L’appareil de sécurité d’État et la mise en place des camps de travail en URSS socialiste

En raison de la place du travail dans l’idéologie communiste, l’emprisonnement était lié au fait de devoir travailler pour se transformer pour contribuer à la société que le condamné avait combattu de par son comportement.

L’instauration des camps de travail datent d’une résolution du Bureau Politique du Comité Central du PCUS(b) du 27 juin 1929 « Sur l’utilisation du travail des criminels condamnés ». C’est l’OGPU qui était chargé de l’organisation.

Initialement, les camps devant être formés devaient avoir une capacité d’accueil totale de 50 000 places, dans des régions éloignées devant être développées économiquement.

L’intensité de la lutte des classes, notamment par rapport aux paysans riches, les koulaks, modifia la donne et au premier janvier 1930, les camps créés accueillaient 180 000 personnes.

Le travail constitua à l’origine en le déboisement – comme soutien à des entreprises existantes – et rapidement fut mis en place le projet de canal de la mer Blanche. Long de 227 kilomètres, il fut construit en vingt mois, entre 1931 et 1933 par 126 000 prisonniers au total, dont environ 10 % moururent (plus de 300 000 selon la propagande anticommuniste).

Le 11 novembre 1931, le Bureau Politique du Comité Central du PCUS(b) mit en place la Dalstroi (Construction du grand Nord) pour le développement des mines d’or, qui employèrent 36 000 prisonniers ; le 30 septembre 1932 il décida de la construction d’un canal entre la Volga et la rivière de la Moskova, qui employa 196 000 prisonniers, puis le 23 octobre 1932 d’une voie ferrée en Extrême-Orient, la Magistrale Baïkal-Amour (la BAM).

Dans ce dernier cas, le Bamlag (Camp de correction par le travail de la voie ferrée Baikal Amour) rassembla à son pic en 1938 201 000 personnes ; l’Amurlag (Camp de correction par le travail de voie ferrée de l’Amour) qui lui succéda était à son pic constitué de 125 000 personnes la même année.

L’un des prisonniers du Bamlag fut Constantin Rokossovski ; condamné en 1937, il fut finalement innocenté en mars 1940.

Constantin Rokossovski avait participé à la guerre civile suivant la révolution russe, recevant en 1921 l’Ordre du Drapeau Rouge. Il joua par la suite un grand rôle dans la seconde guerre mondiale, notamment comme commandant de la 16e armée dans la défense de Moscou, comme commandant de la 65e armée (4e armée de chars), de la 24e armée et de la 66e armée dans la défense de Stalingrad, comme commandant du Front central pour la bataille de Koursk.

Il fut enfin l’un des grands stratèges de l’Opération Bagration, offensive soviétique sur un front de mille kilomètres en 1944 avec 800 000 hommes, 553 blindés et 839 avions.

Il devint maréchal de l’URSS, puis de par ses origines polonaises ministre de la défense de la Pologne et maréchal en Pologne, avant d’être démis de ses fonctions à la mort de Staline, renvoyé en URSS dans des postes subalternes.

En octobre 1932, l’OGPU organisa également une entreprise d’État dite Ukhta-Pechora afin de développer les mines de charbon et la production de pétrole du bassin de Pechora, dans le grand Nord. Elle employa 21 000 prisonniers.

La démarche se généralisa, avec par exemple 35 000 prisonniers du camp de Temnikovo produisant du bois pour Moscou, 43 000 prisonniers du camp de Svir faisant la même chose pour Leningrad.

D’un côté, l’intérêt économique du Gulag était indéniable. Il permettait la mise en place de projets s’ajoutant à l’industrialisation du pays.

En juin 1935 est ainsi formé le Norilag, chargé de l’exploitation minière de cuivre et de nickel à Norilsk en Sibérie, puis du développement de la région en général. Le camp avait 1200 prisonniers en 1935, avant de s’élargir pour en accueillir 9 000 en 1937, 72 500 en 1951. Au total, 400 000 personnes passèrent à un moment par ce camp.

De l’autre, il faut saisir ici que le travail des prisonniers était peu efficace, élémentaire, le plus souvent.

De plus, le NKVD menait une tâche politique et c’était clairement l’aspect prioritaire de son activité. Le Gulag devait faire du mieux qu’il pouvait, mais en aucun cas les opérations du NKVD ne dépendaient des exigences économiques.

Ainsi, alors qu’en janvier 1939, il y a 350 000 personnes en prison et un million dans les camps de travail, le Gulag était particulièrement affaibli dans ses capacités d’organisation, en raison de sa dépendance aux initiatives du NKVD.

Le déclenchement de la seconde guerre mondiale fut alors la source d’une nouvelle impulsion : 14 % des investissements centraux relevèrent alors du NKVD, afin de parer à l’urgence de la mise en place de nouvelles infrastructures.

Furent mises en place, en Extrême-Orient et dans le Nord du pays, des canaux (Volga-Baltique, Dvina septentrionale pour une liaison entre la Baltique et la mer blanche avec la mer Caspienne), des ports, des stations hydro-électriques, la production de métaux comme avec le Severonikel dans la région de Mourmansk ou la ville de Jezqazğan formée au Kazakhstan.

L’invasion allemande accéléra le processus, avec de nouvelles tâches assignées aux prisonniers, telle en 1941 la construction ou la rénovation de 251 pistes d’atterrissage militaires.

Cela s’accompagne d’une réorganisation du Gulag. Ainsi, en 1941, 420 000 prisonniers furent libérés plus tôt que prévu, tout comme 157 000 autres en 1942 et 1943 qui pouvaient être appelés à l’armée et n’avaient été condamnés que pour des motifs mineurs.

Cela impliquait également des conditions d’existence plus difficile pour les prisonniers restants. De 1941 à 1945, 1 005 000 prisonniers décédèrent dans les camps de travail.

Inversement, il y avait aussi un nouvel afflux, avec 400 000 prisonniers, composés de membres relevant de nationalités posant problème car leur pays d’origine était en guerre avec l’URSS (Allemands, Finlandais, Roumains). 220 000 d’entre eux travaillèrent dans les institutions du NKVD, le reste pour les commissariats du peuple.

Finalement, dans la seconde moitié de 1945, il n’y eut plus que 750 000 prisonniers capables de travailler réellement dans le système du Gulag. Le XIXe congrès du Parti, annonçant que le socialisme avait triomphé, impliquait également sa fermeture.

Laurenti Beria, à la tête du ministère des affaires intérieures qui avait intégré en son sein le MVD, envoya un mémorandum en mars 1953 pour faire passer les entreprises industrielles et de construction aux ministères concernés. Il en alla de même pour les entreprises du secteur agricole en mai.

Un million des 2,5 millions de prisonniers fut également amnistié au mois de mars, alors que les camps et colonies pénitentiaires passèrent de l’appareil de sécurité d’État au ministère de la justice.

Le contexte était cependant celui de l’offensive révisionniste transformant l’URSS en social-impérialisme, ce qui modifia l’ensemble de la réalité économique, sociale et culturelle du pays.

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La supervision par l’appareil de sécurité d’État en URSS socialiste

De par la construction du socialisme, les activités criminelles s’asséchaient d’elles-mêmes dans la société ; il y avait moins de crimes en 1935 dans toute l’URSS que dans la seule ville américaine de Chicago.

Cependant, les réseaux criminels s’entremêlaient avec la contre-révolution. Cela correspond tout à fait à l’affirmation soviétique des deux sociétés : à côté de la société socialiste, il y avait les éléments hostiles en général.

Ainsi, sur la ligne ferroviaire de Tomsk, rien que pour les dix premiers mois de 1935, il y eut 5 972 « incidents », avec des soucis techniques significatifs pour 166 locomotives, 38 wagons de passagers, 1 256 wagons de fret. Cela provoqua 59 décès, 119 blessés et 62 kilomètres de rails avaient été endommagés

C’était une guerre anti-soviétique toujours plus insidieuse, épaulée par les pays capitalistes de manière forcenée.

Or, la supervision de la situation de la société par l’appareil de sécurité d’État était délicate en URSS socialiste initialement, de par le manque de moyens.

Ainsi, la police – en fait la milice ouvrière-paysanne – était financée par les budgets des soviets locaux ou de districts, ce qui impliquait des ressources plus que minimes.

En 1930, il n’y avait en République socialiste soviétique de Russie qu’un nombre très restreint de policiers. 53 000 étaient dédiés à la protection des entreprises, 33 563 étaient en tant que tels chargés de l’ordre public, dont 12 887 dans les campagnes, alors que 4441 étaient des enquêteurs. C’était là quatre fois moins de policiers qu’en 1913 dans la Russie tsariste.

Même une ville comme Moscou avait seulement un policier pour 750-1000 habitants, un nombre extrêmement faible (3,5 fois moins que la France en 2019).

A Novossibirsk, qui passa de 146 000 à 180 000 habitants entre 1930 et 1931, il n’y avait que 276 policiers en 1930, 197 en 1931. Dans la ville la plus importante des campagnes à l’ouest de Novossibirsk, Bisk, il y avait 69 policiers pour 53 000 habitants.

A Novokouznetsk, à 360 kilomètres de là, le nombre de policiers passa entre 1930 et 1931 de 24 à 38, la ville de 28 000 à 170 000 habitants.

A cela s’ajoute que seulement le quart des policiers était physiquement au point, les très faibles salaires n’attirant pas du tout. Il faudra attendre le début des années 1930 pour voir une véritable modification en profondeur, le budget de la police passant d’ailleurs à un organisme national en 1932.

Le nombre de policiers passa à 98 000 à la fin de 1932, 124 000 à la fin de 1934, 138 000 en 1937, 182 000 en 1938 et 213 469 en 1940. La police s’occupait désormais également des trains et disposait d’unités spécialement consacrées aux crimes économiques.

L’ossature de l’appareil de sécurité d’État reposait ainsi bien davantage directement sur les services de répression de la contre-révolution que sur la police, qui de toute façon ne pouvait se confronter à des réseaux organisés utilisant la clandestinité.

Eu égard à l’application du droit soviétique, l’appareil de sécurité d’État – dont dépendait la police, par ailleurs – disposait donc de modes d’organisation très particuliers selon les besoins ; ses membres possédaient une réalité active extrêmement différente.

Les résidents continuaient leurs propres activités en tant que responsables dans une entreprise ou à l’armée, tout en servant d’interface. Les agents infiltraient les opposants. Les agents spéciaux sont des spécialistes soit de l’économie, de l’industrie, en sciences, etc. devant vérifier le travail des entreprises, éviter les sabotages, etc., soit des spécialistes quant au crime spécialisé (des pickpockets aux cambrioleurs, etc.).

L’appareil de sécurité d’État tenait un registre concernant la qualification des opposants, dont voici les principaux exemples.

AS – éléments anti-soviétiques

B – blancs, pour les participants à la guerre civile du côté blanc

PR – antagonistes, désignant les membres des partis politiques avant 1917

KR – contre-révolutionnaires

TS – les éléments liés au clergé

S – les religieux prônant la dissidence

P – les insurrectionnels

N – les nationalistes

sI – en liaison avec des étrangers (que ce soit le personnel d’ambassade ou des correspondants)

ShP – les espions

T – les terroristes

D – les diversionnistes

Prav – les éléments droitiers dans le Parti (boukharinistes)

Tr – les trotskystes

F – les fascistes

H – les éléments pro-hitlériens

B – les soutiens de Bandera en Ukraine

Vl – les soutiens de Vlassov

ns – les serviles vis-à-vis de la bourgeoisie

Cette liste amène des individus à être « qualifiés ». Cela ne préjuge pas d’un dossier qui se fait en plus, par d’autres. Il y a deux niveaux : la qualification en général d’une personne, un dossier directement consacré à lui, le groupe auquel il participe, les personnes proches d’une manière ou d’une autre.

Cela permettait une véritable cartographie du pays. Un passeport interne et un système d’enregistrement local fut organisé de manière générale par ailleurs au début de 1933. Il faut néanmoins bien voir qu’une telle cartographie se situe dans un contexte de lutte de classes acharnée.

Ainsi, 1 802 392 koulaks et leurs familles avaient été bannis dans des endroits précis en 1930-1931.

En 1932 seulement 1 317 022 d’entre eux avaient obéi à cette consigne, les autres étant partis sans qu’on sache trop où, exigeant des campagnes de répression pour aller les récupérer.

Ces campagnes de répression ciblée firent littéralement halluciner la bourgeoisie mondiale de par sa capacité à avoir un impact généralisé. Ainsi, en mai 1935, le décret sur les éléments socialement hostiles aboutit à une série d’opérations et 266 000 personnes furent arrêtés et condamnés en ce sens.

Elles appartenaient à plusieurs catégories : les criminels déjà condamnés, libérés et maintenant leurs activités, les sans activités connues liées aux criminels, les mendiants professionnels, les personnes arrêtées à plusieurs reprises au même endroit sans permis de résidence, les personnes retournées aux endroits dont elles avaient été exilées, les enfants de plus de douze ans arrêtés pour des activités criminelles.

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L’intime conviction dans le cadre du droit soviétique en URSS socialiste

Il ressort des lois du droit soviétique – et notamment l’article 58 – que c’est la défense du peuple qui est le noyau de l’attitude du tribunal en URSS socialiste. Son objectif assumé est la contribution à l’établissement de l’ordre social socialiste, en marche vers le communisme.

Par conséquent, l’intime conviction, déformée par le subjectivisme bourgeois au fur et à mesure de l’installation du mode de production capitaliste, est désormais dépassée par l’approche socialiste.

Le juge est impliqué dans tout son ordre, subjectivement, car il fait partie de la réalité objective.

Le droit soviétique est la preuve de la mise en place d’un droit socialiste – à rebours des conceptions anarchiste et gauchiste exigeant une « dissolution » immédiate du droit.

Voici comment l’intime conviction, dans le cadre du droit soviétique, est présentée avec justesse par Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« La principale tâche du tribunal est d’établir la vérité, de donner la bonne réponse, c’est-à-dire une adaptation aux circonstances réelles de la cause, la compréhension de cet événement, le rôle et le comportement des personnes impliquées dans la procédure en tant qu’accusés, victimes ou plaignants, de donner les moyens légaux et juridiques approprié, l’évaluation socio-politique de ce comportement, de déterminer les conséquences juridiques de cette évaluation (justifier, condamner, punir, satisfaire la demande, rejeter le procès, etc.).

Cela signifie que la tâche du tribunal est de donner une réponse claire et précise aux questions directement liées à l’affaire qui est devant le tribunal (…).

Sans accorder l’attention nécessaire à l’examen des preuves dans l’affaire, remplaçant les spécificités judiciaires par un raisonnement abstrait, souvent sans rapport avec les circonstances ayant fait l’objet d’une enquête directe par le tribunal, le tribunal tombe dans le schématisme, émascule le contenu vivant de l’affaire et prive son travail de l’énorme signification qu’il a ou devrait, avec les juges, comprendre correctement leurs tâches et leurs responsabilités (…).

L’intime conviction d’un juge est toujours liée de manière organique à sa vision du monde, à sa conscience juridique, qui est dominante dans la société.

Dans la société des propriétaires de marchandises, des exploiteurs, des trafiquants de main-d’œuvre humaine, de sang, l’intime conviction des juges se nourrit du sol de la conscience juridique bourgeoise, qui considère les phénomènes et les actions des personnes et des personnes elles-mêmes du point de vue des intérêts de la propriété privée, de l’achat et de la vente, et de l’exploitation.

Dans une société socialiste, l’intime conviction judiciaire se nourrit du jus du sol socialiste, des principes d’une attitude socialiste envers la société, son entourage, son devoir envers l’État. Il est déterminé par la vision globale du monde de la personne qui considère le phénomène, et les actions des gens, et les gens eux-mêmes, en termes d’intérêts de l’État socialiste et de la construction socialiste.

Par conséquent, dans la société soviétique, chaque citoyen conscient considère, par exemple, la spéculation comme un crime, et pas seulement parce qu’elle est qualifiée ainsi par notre droit, mais bien en vertu de ses opinions personnelles, de sa conviction, c’est-à-dire de sa conscience juridique socialiste.

Chaque juge, qui examine un cas particulier et décide, par exemple, de la question de la peine, de la restriction des droits du défendeur, etc., doit être guidé par les exigences de la loi, en évitant toute dérogation arbitraire à ces exigences.

Mais ici, le rôle décisif est joué par la conscience juridique du juge, son appréciation, son attitude vis-à-vis de ce crime, sa vision du monde générale et juridique. La bonne compréhension par le juge du crime et de sa signification socio-politique et économique aide le juge à prononcer la peine, et même le choix de la peine en tant que tel.

Il faut surtout garder à l’esprit cette dernière circonstance lorsque la loi elle-même laisse au juge une certaine marge de manœuvre pour choisir des mesures punitives, en se limitant à fixer la limite inférieure ou supérieure de la peine (« pas inférieure », « pas supérieure » à telle ou telle punition).

Dans une société socialiste, la formation libre et indépendante d’une intime conviction judiciaire est pleinement assurée conformément aux faits réels, avec des relations réelles, conformément aux exigences de la vérité et de la justice socialistes, précisément parce que ces exigences ne constituent qu’une partie de la vision générale des juges.

De là sont clairs le rôle et la signification de l’intime conviction et de la conscience juridique socialiste en tant que facteurs les plus importants du processus de preuve.

Les faits perçus par les juges sont résumés à travers le prisme de l’idéologie judiciaire, une vision du monde, dont la justice fait partie.

À la lumière de la conscience juridique du juge, le processus le plus compliqué d’évaluation de la valeur d’une preuve suit le processus de formation de l’intime condamnation du juge sur la base de la totalité des circonstances de l’affaire.

Ainsi, la conscience juridique socialiste et la conviction profonde du juge sont les principes de procédure les plus importants qui ont une valeur pratique profonde dans le droit de la preuve soviétique (…).

La condamnation judiciaire interne, qui résulte du travail du juge dans l’instruction du dossier, qui constitue son achèvement, détermine le contenu de la décision de justice ou de la décision de justice.

La condamnation judiciaire interne est formée sur la base de faits ou de circonstances examinés par le tribunal, vérifiés et pondérés par le juge en privé et avec sa propre conscience.

En formant une condamnation judiciaire, protégé dans son indépendance, protégé par la loi elle-même de toute ingérence et influence extérieures, le juge en vient à la conclusion que telle chose est vraie et que telle chose n’est pas vraie, en s’appuyant sur les faits établis par l’enquête judiciaire.

Par conséquent, la première condition pour que la décision rendue par un juge soit correcte est la conformité de cette décision avec les circonstances de l’espèce (…).

La condamnation judiciaire n’est pas une simple perception des résultats de ces opérations.

Cela ne ressemble pas du tout, par exemple, à une conviction mathématique, qui dépend entièrement des opérations effectuées avec des expressions mathématiques (nombres, formules, etc.).

C’est le résultat de l’activité non seulement de l’esprit, comme dans la logique formelle s’appliquant aux syllogismes, ou comme dans les mathématiques qui traitent des nombres, ou comme dans toute science révélant l’essence de phénomènes au moyen de l’activité mentale d’une personne, mais aussi de l’activité de la personne tout entière, et la force morale, tout son caractère.

La condamnation judiciaire n’est pas seulement un savoir, mais aussi une reconnaissance des faits, non seulement pour savoir comment ils se sont déroulés et quelles ont été leurs suites, mais aussi par une capacité à évaluer correctement la signification de cet événement, c’est-à-dire conformément aux intérêts de la société et aux intérêts concernés.

Cela signifie qu’une compréhension et une connaissance correctes des circonstances de l’affaire, créant une condamnation pour un juge, ne peuvent être dissociées de la somme de ses idées, de ses vues, de sa vision du monde, de sa conscience politique et juridique.

Un juge qui statue sur une affaire, évalue les circonstances de l’affaire, évalue les actions de l’accusé, du demandeur ou du défendeur, cherche inévitablement l’appui de ses principes moraux, politiques et idéologiques, de sa vision du monde tout entier, de ses points de vue principaux sur le monde, de ses rapports avec les gens, de ses buts et de ses objectifs de sa propre existence.

Le système de vues philosophiques, politiques et juridiques du juge joue un rôle crucial dans son attitude envers la réalité, dans la perception et l’évaluation de certains faits.

L’intime conviction et la conscience juridique d’un juge, comme toute personne, sont inextricablement liées ; de plus, le premier dans un certain sens est dû au second, comme le particulier concerne le général. »

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Le droit soviétique et la consolidation des rapports sociaux en URSS socialiste

Pour que l’article 58 ait un sens, il faut que le droit soviétique assume que les tribunaux soient eux-mêmes les vecteurs de la construction du socialisme. Cela est posé juridiquement, comme le présente ici Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« La bourgeoisie essaie de donner à la nation la primauté du droit qui prévaut dans la société bourgeoise et parle de sa propre conscience juridique en tant que conscience juridique du « peuple ».

En fait, dans une cour bourgeoise, les opinions populaires, la justice populaire se manifestent sous une forme pervertie et falsifiée.

Les vues authentiques du peuple, ses idées juridiques sont corrompues et déformées par l’influence des forces hostiles au peuple, exploitant les classes, essayant d’inculquer au peuple des vues et des concepts étrangers, mais bénéfiques et agréables pour les exploiteurs eux-mêmes.

Un sens véritablement populaire de la justice, comme une intime conviction judiciaire vraiment libre, n’est possible que dans un pays véritablement populaire et libre, où la justice elle-même est appliquée de manière autonome et indépendante, dans l’intérêt du peuple et directement par le peuple lui-même.

Ce pays est notre patrie, la grande Union des Républiques Socialistes Soviétiques.

Absolument indépendante, objective et impartiale dans son attitude à l’égard des faits, des phénomènes, des événements, soumise uniquement à la loi, la cour soviétique joue également le rôle de propagandiste d’une nouvelle loi, d’une nouvelle conscience juridique socialiste, contribuant à renforcer les nouvelles habitudes de la société, une nouvelle attitude à l’égard de l’État, du travail, à ses devoirs.

En ce sens, l’activité des instances judiciaires soviétiques, qui correspondent à l’ensemble de la pratique de leur travail aux tâches de la lutte pour le socialisme, aux tâches de reconstruction de la société sur une base socialiste, est une activité de l’État, politique au sens large du terme.

En ce sens, il faut comprendre les mots de Lénine sur les tribunaux soviétiques comme des « tribunaux politiques ».

Les tribunaux soviétiques sont activement impliqués dans la construction de l’État, pour être les conducteurs de la politique de l’État soviétique. Cette politique vise à éliminer la résistance de ses ennemis à la cause du socialisme, à renforcer la dictature du prolétariat, le pouvoir des soviets, le respect des règles du cadre socialiste et la discipline de l’État (…).

Les procès ouverts en URSS éduquent les masses en montrant le mal, en exposant toutes sortes d’ennemis de classe et leurs agents, en renforçant la vigilance des masses, en renforçant leur dévouement pour la cause de la construction socialiste.

Le travail vénérable de la cour soviétique est son énorme signification sociopolitique.

Ce travail fait de la cour soviétique le facteur le plus important dans la lutte pour le socialisme, un outil puissant de la dictature prolétarienne.

Pour la cour soviétique, la tâche la plus importante est celle qui est parfaitement exprimée à l’article 3 de la loi sur le système judiciaire de l’URSS, des républiques fédérées et autonomes, dans les termes suivants :

« Le tribunal soviétique, en appliquant des mesures de sanction pénale, punit non seulement les criminels, mais a également pour objectif la correction et la rééducation des criminels.

Avec toutes ses activités, la cour éduque les citoyens de l’URSS dans un esprit de dévouement à la cause du socialisme, dans le respect des lois soviétiques, dans le respect de la propriété socialiste, dans le respect des règles de la vie socialiste. »

Aucun pays au monde, à l’exception de l’URSS, ne connaît une loi telle que notre loi sur le pouvoir judiciaire tel que l’article 3, sous une forme extrêmement vive et forte, qui exprime toute la profondeur des principes de la justice soviétique.

La cour soviétique, en tant que l’un des plus puissants leviers de régulation des rapports sociaux socialistes, utilise la méthode de la contrainte et la méthode de la persuasion pour s’acquitter de sa tâche, punissant et éduquant les personnes qui violent la discipline sociale et étatique, qui empruntent la voie du crime (…).

En tant que socialiste, le droit soviétique consolide les rapports sociaux socialistes. Telle est la tâche, en particulier, du droit constitutionnel soviétique, des lois fondamentales de l’État, de sa Constitution.

Le droit socialiste autorise, sanctifie, consolide dans l’économie et tout le système social conditionné par l’économie, la prépondérance des principes du socialisme : la propriété sociale des moyens de production, la protection des travailleurs, le droit au travail, à l’éducation, au repos, etc.

Mais la loi socialiste est une loi, c’est-à-dire un régulateur des relations sociales et donc économiques, une manière de comptabiliser et de contrôler la production et la distribution, une manière de subordonner les personnes et les classes aux règles établies par la classe dominante dans une société donnée, qui sont avantageuses et agréables pour cette classe.

En tant que régulateur des rapports sociaux, le droit socialiste remplit des fonctions similaires au droit bourgeois, qui ne se ressemblent toutefois que de l’extérieur, puisque les tâches, la direction et le but du droit socialiste sont fondamentalement différents du droit de la bourgeoisie (…).

Le droit soviétique a pour rôle d’assurer l’accomplissement de cette tâche : établir l’ordre le plus strict, la discipline du travail et de l’État, établir la responsabilité du bon fonctionnement de certaines parties de l’organisme économique et de l’ensemble de l’organisme, en vue de l’exécution des ordres de dirigeants uniques. »

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de l’État de l’URSS socialiste

L’appareil de sécurité d’État de l’URSS socialiste et l’article 58

Le droit soviétique dispose d’un tribunal analysant les choses objectivement, et donc subjectivement car reconnaissant la nature dialectique de la réalité et prenant le parti des larges masses contre les réactionnaires.

Par conséquent, il façonne les lois de telle manière à correspondre à cette réalité. L’appareil de sécurité d’État de l’URSS se fonde ainsi, pour l’exclusion des éléments anti-sociaux à dimension contre-révolutionnaire, sur l’article 58 du code pénal.

Mis en place le 25 février 1927, corrigé notamment le 8 juin 1934, il établit les peines et formule la manière de considérer les activités contre-révolutionnaires.

Il est évident que cet article, composé de différents points, a une portée éminemment politique, faisant de l’URSS un État socialiste. Cela a par conséquent beaucoup choqué les théoriciens bourgeois du droit, qui eux s’évertuent à masquer le caractère bourgeois de l’État dans le mode de production capitaliste.

Cela souligne bien la nature politique de l’intervention de l’appareil de sécurité d’État de l’URSS dans la société soviétique, comme défenseur du droit et applicateur subjectif du droit.

58-1

Par « contre-révolutionnaire », il faut comprendre toute action dirigée vers le renversement, la subversion, ou l’affaiblissement du pouvoir des conseils ouvriers-paysans ou de leur gouvernement ouvrier-paysan de l’URSS, de l’union et des républiques autonomes, choisi par eux (selon la Constitution de l’URSS et les constitutions des républiques de l’union), ou vers la subversion ou l’affaiblissement de la sécurité extérieure de l’URSS et les acquis fondamentaux économiques, politiques, nationaux de la révolution prolétarienne.

En considération de la solidarité internationale envers les intérêts de tous les ouvriers, les actes sont pareillement considérés comme « contre-révolutionnaires » lorsqu’ils sont dirigés contre n’importe quel autre gouvernement ouvrier, même s’il ne fait pas partie de l’URSS.

58-1a

La trahison vis-à-vis de la patrie, c’est-à-dire les actes des citoyens de l’URSS commis au détriment de la puissance militaire de l’URSS, de sa souveraineté nationale, ou de l’inviolabilité de son territoire, telle que : l’espionnage, la trahison de secrets d’État ou militaire, le passage à l’ennemi, la fuite à l’étranger, doivent être punis par :

la mesure suprême de la punition criminelle – l’exécution avec confiscation de tous les biens ou, en cas de circonstances atténuantes – d’une privation de liberté de dix ans et de la confiscation des biens.

58-1b

Ces mêmes crimes, perpétrés par le personnel militaire, sont à punir par la mesure suprême de la punition criminelle – l’exécution avec confiscation de tous les biens.

58-1c

En cas de fuite d’un militaire à l’étranger, les membres majeurs de sa famille – qui l’ont aidé de quelque manière que ce soit à fuir ou ont dissimulé le fait aux autorités – sont passibles d’une privation de liberté de 5 à 10 ans et d’une confiscation de tous leurs biens.

Les autres membres majeurs de la famille qui vivaient avec le coupable ou dépendaient matériellement de lui au moment du crime sont passibles d’une privation des droits civils et d’un exil de 5 ans dans un arrondissement éloigné de Sibérie.

58-1d

L’échec par un membre de l’armée de dénoncer des préparatifs ou la réalisation d’une trahison sont punissables d’une privation de liberté de 10 ans.

58-2

L’insurrection armée ou l’incursion de bandes armées à intentions contre-révolutionnaires sur le territoire soviétique, la prise d’un pouvoir local ou central avec de semblables intentions – en particulier celle d’arracher à l’Union une partie de son territoire, ou de briser des accords conclus par l’Union avec d’autres États – sont passibles de la suprême mesure de la défense sociale – l’exécution – ou de l’attribution de la désignation d’« ennemi du peuple » avec confiscation de tous les biens et retrait de la citoyenneté nationale et soviétique, et expulsion définitive hors des frontières de l’URSS.

En cas de circonstances atténuantes : privation de liberté pour une durée de pas moins de trois années et confiscation de tout ou partie des biens.

58-3

La collusion à des fins contre-révolutionnaires avec un État étranger ou avec ses représentants individuels, et pareillement toute forme d’assistance portée à cet État ou à un État en guerre ou en État en lutte contre l’U.R.S.S au moyen d’une intervention ou d’un blocus, doit être punissable par les mesures de défense sociale indiquée dans l’article 58-2 de ce code.

58-4

L’offre de toute sorte d’aide à la partie de la bourgeoise internationale qui, ne reconnaissant pas les droits égalitaires du système communiste remplaçant le système capitaliste, l’effort à le renverser, et pareillement pour des groupes publics et des organisations, le fait d’être sous l’influence ou directement organisée par cette bourgeoisie, dans l’objectif de mener des activités hostiles envers l’URSS, doit être puni par la privation de liberté pour une période de pas moins de trois années avec confiscation de tous les biens personnels, jusqu’à, en cas de circonstances particulièrement aggravantes, de la mesure suprême de la défense sociale – l’exécution ou la désignation comme ennemi du peuple, avec la suppression de la citoyenneté d’une république soviétique et, pareillement, de la citoyenneté de l’URSS et l’expulsion pour toujours au-delà des frontières de l’URSS, avec confiscation des biens.

58-5

L’inclinaison vers un État étranger ou tout groupe public en son sein, au moyen de rapports avec ses représentants, l’utilisation de faux papiers ou d’autres moyens, en faveur d’une déclaration de guerre, d’une intervention armée dans les affaires de l’URSS ou toutes autres actions inamicales tels le blocus, l’appropriation de la propriété de l’URSS ou des républiques de l’union, la rupture des relations diplomatiques, la rupture de traités conclus par l’URSS, etc. doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées à l’article 58-2 de ce code.

58-6

L’espionnage, c’est-à-dire la transmission, l’appropriation ou la collecte à fin de transmission d’informations considérées comme secrets d’État particulièrement gardés en raison de leur nature, pour le compte d’États étrangers, d’organisations contre-révolutionnaires ou de particuliers, sont à punir d’une privation de liberté d’une durée de pas moins de 3 ans, avec confiscation de tout ou partie des biens, et dans les cas où l’espionnage a mené ou aurait pu mener des conséquences particulièrement graves pour les intérêts de l’URSS, par la mesure suprême de défense social – l’exécution ou la désignation comme ennemi des ouvriers avec privation de la citoyenneté d’une république de l’union et, pareillement, de la citoyenneté de l’URSS et l’expulsion pour toujours hors des frontières de l’URSS avec confiscation des biens.

La transmission, l’appropriation ou la collecte à fin de transmission d’informations économiques, ne consistant pas dans leur contenu en des secrets d’État spécialement protégés, mais en même temps pas sujet à publication que ce soit en raison d’une interdiction légale directe, ou bien par décision de la direction du département, de l’institution ou de l’entreprise, que ce soit pour des raisons mercantiles ou gratuitement, à des organisations et des personnes mentionnées ci-dessus, doit être punie par la privation de la liberté pour une période allant jusqu’à trois années.

58-7

Le fait de saper la production d’État, les transports, le commerce, les rapports monétaires ou le système de crédit, et pareillement la coopération, accompli dans un but contre-révolutionnaire, au moyen de l’utilisation correspondant d’institutions ou d’entreprises d’État, ou l’entrave à leur activité normale, et pareillement l’utilisation d’institutions et d’entreprises d’État ou l’entrave à leurs activités, réalisés dans les intérêts de leurs anciens propriétaires ou des organisations capitalistes intéressées, doit être puni par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-8

La perpétration d’actes terroristes, dirigés contre les représentants de l’autorité soviétique ou d’activistes des organisations ouvrières et paysannes révolutionnaires, et la participation à la réalisation de tels actes, même par des personnes n’appartenant pas à une organisation contre-révolutionnaire, doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-9

La dégradation ou les dommages, commis avec une visée contre-révolutionnaire, par l’explosif, l’incendie ou tout autre moyen, contre des voies ferrées et des voies de transport, des moyens de communication publique, des canalisations, des entrepôts ou d’autres structures, ou des propriétés d’État et communautaires, doivent être punis par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-10

La propagande ou l’agitation, contenant un appel au renversement, à la subversion ou à l’affaiblissement de l’autorité soviétique, ou pour la réalisation d’autres crimes contre-révolutionnaires (articles 58-2 à 58-9 du présent Code), et pareillement la distribution ou la préparation ou la conservation de littérature de cette nature, doit être punie par une privation de liberté pour une période de pas moins de six mois.

Les mêmes actions lors d’un contexte de troubles populaires, ou avec l’utilisation des préjugés religieux ou nationalistes des masses, ou en situation de guerre, ou dans les zones proclamées comme étant en situation de guerre, doivent être punies par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-11

Toute type d’activité organisée, dirigée vers la préparation ou le fait de mener des crimes indiqués dans ce chapitre, et pareillement la participation à une organisation créée pour préparer ou accomplir l’un des crimes indiqués dans ce chapitre, doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées dans les articles correspondant de ce code.

58-12

L’échec à dénoncer un crime contre-révolutionnaire, connue comme étant en préparation ou commis, doit être puni d’une privation de liberté de plus de 6 mois.

58-13

La participation active ou la lutte active contre la classe ouvrière et le mouvement révolutionnaire, manifesté sur la base d’une position responsable ou secrète dans le régime tsariste, ou dans les gouvernements contre-révolutionnaires de la période de guerre civile, doit être punie par les mesures de défense sociale indiquées dans l’article 58-2 de ce code.

58-14

Le sabotage contre-révolutionnaire, c’est-à-dire l’échec conscient à réaliser ses tâches définies ou l’accomplissement intentionnellement négligent de ceux-ci, avec la visée particulière d’affaiblir l’autorité du gouvernement et le fonctionnement de l’appareil d’État, doit être puni par la privation de liberté pour une période de pas moins d’une année, avec confiscation de tout ou d’une partie des biens, avec en cas de circonstances aggravantes le passage à la suprême mesure de défense sociale – l’exécution, avec la confiscation des biens.

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de l’État de l’URSS socialiste

L’origine du crime et la conviction socialiste du juge selon le droit soviétique en URSS socialiste

Le matérialisme dialectique impliquant le déterminisme et non l’adhésion à la thèse idéaliste du « libre-arbitre », le droit soviétique considère les crimes comme des phénomènes sociaux, liés par conséquent à une dimension historique, et non individuelle.

Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941, présente cela ainsi :

« La démocratie socialiste cohérente du processus judiciaire soviétique est déterminée par l’organisation même du tribunal soviétique, qui est un tribunal populaire au vrai sens du mot.

Il est en outre déterminé par les méthodes de travail de la cour soviétique, dépourvues de formalisme bureaucratique, saturées par les activités des cours bourgeoises, qui tissent un réseau de scolastique juridique et de détours.

La démocratie du processus judiciaire soviétique est finalement déterminée par les tâches de la cour soviétique, qui non seulement punit, mais éduque et rééduque également les éléments arriérés de la société. Dans cette œuvre éducative de la cour soviétique, la justice soviétique a pour caractéristique fondamentale d’accroître le niveau culturel et politique (…).

La « justice » bourgeoise, c’est Moloch, à qui sont consentis de sanglants sacrifices humains. La cour bourgeoise, comme la loi bourgeoise, est un terrible instrument de répression et d’intimidation, multiplié par la corruption mentale et morale des personnes.

La justice soviétique, au contraire, est une force culturelle gigantesque visant à lutter contre les survivances restées dans l’esprit des gens, les « traditions du capitalisme » qui entravent la cause de la construction socialiste, c’est une force qui organise les masses, éduque la volonté, contribue à renforcer de nouvelles traditions, une nouvelle psychologie socialiste (…).

L’utilisation de la dialectique marxiste-léniniste non seulement garantit ou au moins aide à clarifier les circonstances, comme si elle était tissée de contradictions, mais nous enseigne également à comprendre que les phénomènes de la vie publique, ainsi que les actions et les actes prévalant dans une société donnée (faute, crimes) ne sont pas de simples « accidents ».

La dialectique marxiste-léniniste aide à révéler le lien intérieur et la conditionnalité mutuelle des phénomènes de la vie publique, des actions et actions des personnes, et leur enseigne à comprendre les lois en vigueur dans la société.

La lutte des classes posent des contradictions entre la classe des exploiteurs et des classes exploitées, et avec la victoire de la révolution socialiste et l’organisation socialiste de la société, non seulement cela persiste, mais cela éclate avec une force encore plus grande, donnant lieu à de nouvelles fraudes criminelles de la part des survivants des classes exploiteuses défaites.

Sur la base de la lutte des classes et des vestiges du capitalisme dans l’économie et dans l’esprit des gens, des crimes sont nés qui sapent les succès du nouveau système socialiste.

La justice socialiste a pour tâche de comprendre, dans chaque cas individuel, le lien entre un crime donné et les causes qui l’ont motivé, de révéler les caractéristiques de ce cas de violation du droit soviétique, d’expliquer correctement les actes de l’accusé, du demandeur ou du défendeur, du point de vue de non seulement les exigences formelles de la loi, mais aussi du point de vue des intérêts de toute la cause de la construction socialiste, la cause de la lutte pour le socialisme.

Les exigences formelles de la loi peuvent dans certains cas entrer en conflit avec les exigences de la vie, avec les intérêts vitaux de la société et de l’individu. La résolution ou l’évitement de telles contradictions est l’une des conditions les plus importantes pour la bonne administration de la justice. L’absence d’élimination de telles contradictions est un indicateur de « justice » injuste, la justice entre guillemets.

La justice socialiste en matière d’élimination des contradictions possibles entre la formule du droit et l’exigence de vie joue un rôle déterminant: elle élève la pensée et la volonté des tribunaux « à la hauteur des principes politiques de la lutte de sa classe », de sa société; cela permet au juge d’aborder l’évaluation de l’événement considéré.

Du point de vue des principes du matérialisme dialectique, est correcte cette position fondamentale permettant de répondre aux questions, ce qu’il serait impossible de faire sur la base de catégories logiques purement formelles.

Le droit de la preuve soviétique, contrairement au droit de la preuve des États exploiteurs, ne traite donc pas uniquement des catégories juridiques et de la méthodologie définie par ces catégories (…).

La justice soviétique est une justice socialiste, appliquée conformément aux principes du socialisme, aux principes de la justice socialiste et à la conviction socialiste des juges.

C’est la raison pour laquelle c’est une déformation flagrante que la tentative de certains « scientifiques » de rejeter le principe de l’intime conviction judiciaire, du système de procédure soviétique et du système du droit de la preuve soviétique.

Une campagne contre le principe de l’intime conviction judiciaire, même si elle est masquée par la critique des théories bourgeoises, magnifiant hypocritement ce principe et dissimulant sous sa couverture la dépendance esclavagiste de la cour bourgeoise vis-à-vis des classes exploiteuses, ne peut et ne doit tromper personne.

Dénonçant la nature bourgeoise du principe de la soi-disant évaluation « libre » des preuves fondée sur la « condamnation » intime des juges par un tribunal bourgeois, nous ne devrions pas et ne pouvons pas jeter le bébé avec l’eau du bain (…).

Tout le développement du droit soviétique prouve que les principes les plus importants du droit de la preuve soviétique sont la justice socialiste dans la conviction socialiste des juges.

Ces principes de justice socialiste procurent à la cour soviétique sa véritable indépendance, subordonnant sa volonté et son esprit à la loi soviétique, qui exprime la volonté et la raison du peuple soviétique.

Le tribunal soviétique a donc à la fois une position de classe et, dialectiquement, une subjectivité révolutionnaire dans son existence même.

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de l’État de l’URSS socialiste

Le rejet des interprétations anthropologiques-sociologiques du droit soviétique en URSS socialiste

Disposer d’une approche socialiste implique de rejeter des interprétations ayant l’air de reconnaître la dimension naturelle ou sociale de l’être humain, mais pour en réalité formuler une approche idéaliste.

Le crime ne se laisse pas analyser sans interprétation matérialiste historique des événements.

Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941, présente la critique nécessaire des approches erronées sur ce point.

« Dans le domaine de la criminalité, cette théorie découle de la primauté des facteurs biologiques, psychologiques et psychopathologiques, laissant le destin du processus entièrement aux mains des experts, voire de ceux qui devraient occuper le poste d’école anthropologique.

L’école anthropologique, en substance, rend tout procès inutile.

Du point de vue de cette école, il devient complètement superflu de rassembler des preuves permettant d’établir la commission d’un crime par une personne suspectée.

Au lieu de mener une enquête, il suffit de soumettre l’accusé ou la personne sous enquête à une série d’examens médico-psychiatriques, psychopathologiques, etc., et le problème sera résolu.

Ce n’est pas dans la cellule de l’enquêteur, ni dans la salle d’audience, mais dans la clinique et le laboratoire clinique que vous devez chercher une réponse à la question de savoir qui a commis le crime, si l’accusé n’est pas coupable de ce crime, quelles mesures devraient être prises contre lui, quelles mesures doivent être prises en ce qui concerne ce type de crime (…).

L’École de sociologie ([Franz von] Liszt), qui a tenté de résoudre les problèmes fondamentaux du droit pénal en combinant des facteurs biologiques et sociaux, n’a pas fait avancer les choses d’un pas.

Dans les mains des sociologues légistes, une référence aux facteurs sociaux s’est révélée – qu’ils le veuillent ou non, cela est indifférent – n’était qu’un meilleur moyen que ne le faisaient les anthropologues pour masquer les véritables racines du crime dans une société capitaliste, les racines qui reposent sur la structure même de cette société, sa base économique.

Bien entendu, la pauvreté des masses, leur faible niveau culturel et le désespoir de la situation jouent un rôle dans l’émergence et le mouvement des crimes.

Cependant, ce n’est qu’avec une attitude superficielle à l’égard de la question qu’il est possible de s’en tenir à cela. C’est le système des rapports sociaux qui engendre la pauvreté et le crime.

Dans le système des rapports sociaux, des circonstances telles que la moralité en décomposition au sommet de la société bourgeoise, l’oppression faite par l’exploitation avec toutes les conséquences qui en résultent, la haine et l’amertume de millions d’opprimés, font vaciller les fondements mêmes d’une société exploiteuse par des attaques contre l’ordre « public » établi par les exploiteurs.

Les crimes commis dans la société des exploiteurs sont basés sur l’exploitation, la propriété privée des moyens de production.

Par conséquent, l’élimination de la criminalité est liée organiquement à l’élimination des classes exploiteuses et de l’ordre social qui répond aux intérêts de la classe sociale dominante.

Seule cette théorie peut prétendre à la signification scientifique, elle seule peut révéler le lien et la dépendance des crimes avec la nature de classe des rapports sociaux, capable de reconnaître les lois des phénomènes étudiés et de déterminer les lois véritables qui régissent leur développement.

La théorie marxiste-léniniste a véritablement expliqué scientifiquement l’émergence et le développement de la société humaine, a révélé les causes principales du changement des formes sociales et du développement de tous les phénomènes sociaux, y compris les crimes, et a fourni une connaissance exhaustive des facteurs réels du crime, fondée sur une généralisation scientifique de l’expérience historique de l’humanité.

Les « facteurs » notoires du crime dans les écoles anthropologiques et sociologiques, ce sont des phénomènes de nature purement superficielle, des phénomènes qui nécessitent leur propre explication et ne peuvent donc rien expliquer.

Le marxisme-léninisme a établi les véritables facteurs du crime, qui résident dans l’organisation des relations publiques elles-mêmes, dans les formes de propriété, dans la nature de l’organisation des méthodes de production et de distribution, dans l’échange des moyens matériels de subsistance de la société (…) .

La prétendue théorie de « l’objectivation scientifique » est sans aucun doute une tentative des juristes bourgeois, en particulier des spécialistes de la médecine légale et des procéduralistes, d’assujettir l’activité judiciaire au contrôle maximum des organes de l’Etat, afin de liquider l’autonomie judiciaire qui est restée dans une certaine mesure dans les pays bourgeois et l’indépendance judiciaire dans une société capitaliste.

À un moment donné, la bourgeoisie était intéressée à développer et à renforcer les principes démocratiques libéraux de la cour. Elle a donc pleinement soutenu et loué la théorie de la condamnation judiciaire libre en tant que fondement d’un procès équitable.

Détruisant ou annulant les derniers vestiges du parlementarisme et de la démocratie bourgeoise, les classes dirigeantes des pays capitalistes tentent de détruire les formes démocratiques d’activité judiciaire : procès devant jury, rendue publique et concurrence, indépendance des juges et liberté de condamnation judiciaire. »

Aucun phénomène ne peut être analysé de manière isolée, car rien n’est isolé. Il n’y a pas d’interprétation « anthropologique » en soi qui soit possible, pas plus qu’une analyse platement sociologique.

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La notion de tribunal de classe en URSS socialiste

Il y a donc le principe de la « preuve formelle », qui s’appuie sur une démarche mécanique des éléments existant dans un procès, et le principe de « l’intime conviction » où le juge évalue prétendument en étant un « homme du commun ».

Le tribunal soviétique dépasse tant le premier principe que le second. En assumant ouvertement la nature de classe de tout procès, le droit soviétique assume la formulation de preuves sur une base objective, et une analyse de celles-ci en profitant d’une compréhension des tendances propres à cette base objective.

Andreï Vychinski expose de la manière suivante cette formulation du principe du tribunal de classe du droit soviétique dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« La science de la preuve, ou la théorie de la preuve de la moralité, est universellement reconnue comme la théorie centrale la plus importante de tout droit judiciaire.

Un certain nombre de processualistes attachent tellement d’importance à cette partie de la science procédurale que l’ensemble du processus se réduit à l’art d’utiliser des preuves (…).

Mais la « logique du processus pénal » ne peut être réduite aux règles de la collecte et de l’utilisation des preuves, c’est-à-dire à la technique procédurale.

La logique de la procédure pénale, contraire à l’idée fausse du professeur Vladimirova, est beaucoup plus large que la technique fondée sur des preuves. La logique du processus pénal ne se limite pas à l’aspect juridique formel de la question.

Dans un tribunal de classe, les processus sont déterminés par l’équilibre réel des forces de classe dans le pays. La logique de la lutte des classes trouve ici inévitablement une expression, subordonnant finalement le cours et l’issue de chaque procès à l’action de ses lois.

La perception même des faits qui font l’objet d’un contrôle juridictionnel, la compréhension même et l’application des lois juridiques sont soumises aux lois du développement social, à l’influence des relations sociales prévalant dans le pays et aux opinions, idées et idéologies qui en résultent (…).

La preuve même qui constitue le contenu de la logique de la justice judiciaire n’est pas dépourvue de sa propre logique, causée par les rapports de classe et la lutte de classe, dont l’instrument entre les mains de la classe dirigeante dans une société donnée, c’est le tribunal, le procès et les preuves.

Dans les voix d’un juge foncier, d’un juge bourgeois, d’un juge officiel, les mêmes faits, les mêmes « preuves » n’ont pas le même sens ni la même force probante. Cela est dû à la différence de classe des juges, à leur psychologie, à leur idéologie, à leurs habitudes, à leur nature de classe (…).

Il est clair que la « logique du procès » ne se réduit pas aux règles de collecte et d’utilisation des preuves, supposées indépendantes des intérêts de la classe, remplissant le procès de son contenu concret.

Mais même si la reconnaissance du procès aux règles de collecte et d’évaluation des preuves est reconnue comme correcte, il ne faut pas oublier que ces règles mêmes sont élaborées sous le feu des contradictions de classe et de la lutte des classes et qu’elles ne peuvent donc porter que des traces de leur origine de classe.

Les règles de procédure prescrivant un certain traitement des faits et dirigeant d’une certaine manière la conscience du juge dans l’évaluation de ces faits sont établies de manière à être le plus rentable et le plus approprié aux yeux du législateur, agissant toujours dans l’intérêt de sa classe.

Dans le domaine du droit de la preuve, c’est-à-dire des règles qui régissent le processus de collecte et d’évaluation des preuves judiciaires, le rôle déterminant appartient au critère qui constitue la base de cette évaluation.

Lors de l’évaluation du pouvoir de preuve de l’une ou l’autre des prétendues circonstances d’une affaire, ce critère de classement revêt une extrême importance, qui détermine l’attitude du juge ou de l’enquêteur à l’égard de ces circonstances, qui détermine le point de vue idéologique de l’évaluateur.

Ce point de vue n’est pas séparable de la personnalité de l’évaluateur, tout comme sa personnalité est indissociable de la classe à laquelle il appartient.

C’est pourquoi la science de la preuve ne peut être limitée au côté technique des choses.

Il est faux de penser que le système de preuve, comme tout le droit de la preuve (principes de preuve, méthodes de recherche de preuves, classification des preuves, etc.) dans son ensemble, constitue dans une certaine mesure une catégorie au-delà des classes et apolitique.

Tout le droit de la preuve est aussi saturé d’esprit de classe que n’importe quelle loi.

Comme toute loi, il s’agit d’un instrument pointu et subtil entre les mains des classes qui dominent la société: il sert les intérêts de classe complètement et sans partage dans chaque société.

C’est ici qu’il faut chercher une explication des différences de principes et de théories procédurales à différentes époques de l’histoire, sous la domination de diverses classes sociales.

Donc les principes de la théorie de la preuve formelle s’expliquent non seulement par le niveau général de l’état mental et moral du servage féodal, mais surtout par les exigences des intérêts de classe des seigneurs féodaux.

Au contraire, la théorie de la prétendue intime conviction judiciaire libre, dans son interprétation par les avocats bourgeois, exprime les principes de l’ère du capitalisme, exigeant « liberté » et « égalité » (au sens bourgeois de ces concepts) des parties dans le processus d’initiative personnelle contradictoire, expression restreinte de volonté personnelle, semblable à la manière dont elle se déroule dans le domaine de la propriété et des relations économiques, construite sous le signe du principe « laissez faire, laissez passer ».

Tout tribunal a une base de classe, que ce soit dans la reconnaissance de la preuve, son interprétation, son utilisation. Le droit soviétique a pour cette raison une approche socialiste.

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Le rejet de l’application subjectiviste-réductrice de «l’intime conviction» par le droit de l’URSS socialiste

La remise en cause du principe de la preuve formelle par la bourgeoisie aboutit à la thèse toujours plus subjectiviste de « l’intime conviction » du juge, qui adopte un point de vue censé être celui de l’homme du commun.

Voici sa critique par Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« Lorsqu’on analyse le processus d’élaboration d’un droit fondé sur des preuves, marqué par le passage d’un système de preuves formelles à un système dit de libre évaluation des preuves, ou à un système de condamnation judiciaire interne, il ne faut pas perdre de vue les particularités des relations sociopolitiques dans les pays capitalistes de l’époque (…).

Ce que le juge établit (reconnaît ou affirme) doit être vrai. Mais pour cela, il est nécessaire que le juge lui-même soit convaincu de la réalité des circonstances de l’affaire.

Le juge, tenant compte des circonstances de l’affaire, formule un avis sur le degré de probabilité ou de fiabilité de l’événement; dans ce cas, le juge peut reconnaître que les circonstances sont valides (le juge est convaincu de sa validité) ou invalides (le juge est convaincu de son invalidité), ou aucune des deux (le juge doute) (…).

On ne peut que constater l’influence déterminante sur la base de la théorie bourgeoise de l’intime conviction de la philosophie idéaliste, fondée sur les enseignements de Hume, Berkeley, Kant.

L’influence de cette philosophie, qui nie la possibilité de connaître les « choses en soi », aboutissant à la reconnaissance de la relativité et à l’affirmation de l’impossibilité de connaître le monde extérieur, affecte le champ de la preuve – la fiabilité de la preuve et le contenu de la vérité matérielle.

Infestés par le subjectivisme philosophique, les tenants de ce processus, à la fin du 19e siècle et surtout au début du 20e siècle, réduisent toute la tâche d’une décision de justice à la confiance subjective d’un juge dans l’exactitude de sa décision.

Parlant de vérité objective ou matérielle, ils sont loin de reconnaître la possibilité d’établir une vérité absolue et incontestable dans le procès. Ils sont prêts à se contenter d’une affaire plus simple et plus facile : obtenir des impressions imputables, involontaires, intimes, etc.

Conformément à cet agnosticisme philosophique, des prêtres ou des demi-prêtres légaux bourgeois soutiennent que, dans le domaine de la recherche judiciaire, « il ne peut y avoir aucun doute » qu’un « juge soit obligé, par manque de moyens de la justice humaine, de satisfaire plus ou moins si nécessaire un degré moindre de probabilité », « qu’il n’y a pas de certitude inconditionnelle et qu’elle ne peut pas appartenir à la justice », et que, pour cette raison, une décision de justice ne constitue toujours qu’une approximation de la vérité, car une décision qui épuise complètement l’attitude procédurale – l’idéal de justice – est pratiquement inaccessible.

À la lumière de telles allégations, la disposition même sur l’établissement de la vérité objective en tant que but du procès semble être très conditionnelle. Cette vérité, avec toute son « objectivité », s’avère très relative, relativement fiable.

D’où l’affirmation non seulement sur la relativité et les limites de la recherche judiciaire, qui repose avant tout sur une « conviction instinctive » (Vladimirov), sur un minimum de doutes, etc., mais également sur l’affirmation concernant la décision subconsciente ou intuitive de la cour (…).

La doctrine de la valeur relative d’un élément de preuve pour la justice bourgeoise joue le rôle d’un écran bien connu contre les accusations d’impartialité des peines prononcées et les décisions rendues par les tribunaux bourgeois. En même temps, cet enseignement joue un certain rôle en déguisant l’essence de classe du système de preuves bourgeois et de toute la justice bourgeoise.

En faisant de « l’intime conviction » un critère de la recherche judiciaire, cet enseignement est formulé en termes de « justice », « moralité », « certitude morale », «morale» (…).

L’appel à cette « personne moyenne » du droit civil, ainsi qu’à la « personne prudente » du droit de la procédure pénale, a pour objectif de masquer le contenu de classe des lois et de couvrir leur visage de classe avec le masque des intérêts du peuple (…).

Un « homme prudent » qui, selon sa « conviction » ou sa « conscience », envoie les chômeurs à la guillotine ou aux travaux forcés est le même « bourgeois prudent » que Marx a décrit dans Le 18 Brumaire de Louis Bonaparte : « Le bourgeois, et avant tout le bourgeois gonflé à la dignité d’homme d’État, complète sa bassesse pratique d’une redondance théorique. »

La théorie de « l’intime conviction » dans les mains de la bourgeoisie joue exactement ce rôle de « grandiloquence théorique », qui vise à dissimuler la « bassesse pratique » de la bourgeoisie et sa politique judiciaire oppressive.

En parlant de justice bourgeoise et de juges bourgeois, il ne faut bien sûr pas tomber dans la simplification, présenter le cas de manière à ce que la théorie de « l’intime conviction »soit perçue consciemment par chaque juge bourgeois comme un moyen hypocrite de protéger les intérêts de la bourgeoisie.

Ce n’est pas le cas. On peut imaginer des juges bourgeois individuels, semblables au héros de Molière qui ne savait pas qu’il faisait de la prose [Monsieur Jourdain dans Le bourgeois gentilhomme], n’avouant même pas que leur « conviction » et leur « justice » sont nourries par le fruit du sol de classe de la société capitaliste.

Certains d’entre eux pensent consciencieusement qu’ils exercent réellement une fonction socialement utile dans leur activité, qu’ils agissent au nom de « personnes » et des « intérêts du peuple » ; certains – probablement beaucoup – agissent en étant vraiment convaincus (…).

La théorie de « l’intime conviction » est en harmonie avec l’ensemble du système des rapports sociaux de la société bourgeoise, qui vient alors d’être affirmé et libéré des liens du féodalisme.

Elle correspondait pleinement aux intérêts de la bourgeoisie qui, au moment de son accession au pouvoir, proclamait largement et à haute voix le principe du « laissez-faire, laissez-passer » comme norme principale de son comportement social et économique, ce qui signifiait la liberté la plus complète possible de l’autodétermination bourgeoise, la liberté illimitée du propriétaire privé (…).

Cependant, il ne faut pas exagérer l’importance de ce nouveau système de preuves, ni des principes qui le sous-tendent. Les avocats bourgeois essaient de décrire ce système comme le couronnement de la perfection procédurale.

Ils le décrivent de telle manière qu’il garantirait prétendument l’exercice d’une justice véritable, que le tribunal d’une société capitaliste, utilisant ce système de preuves, ne servirait prétendument pas les intérêts de classe des capitalistes, mais les intérêts de la société tout entière, protégeant la prospérité universelle et non sociale.

En réalité, la conviction « intime » des juges bourgeois, sur laquelle les érudits bourgeois parlent avec zèle, n’est en rien la conviction d’une personne « prudente » ou « moyenne »; c’est la conviction du bourgeois moyen, exprime les vues, les habitudes, les intérêts du bourgeois en tant que représentant de sa classe.

Il est formé en dépendance directe des conceptions juridiques dominantes dans la société bourgeoise, qui résultent directement de la nature bourgeoise de la production et des relations économiques. »

Le droit soviétique ne reconnaît donc pas le principe de l’intime conviction, qui non seulement est un subjectivisme propre à l’approche bourgeoise, mais qui en plus se fonde sur les valeurs d’un « homme du commun » qui est entièrement fictif.

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de l’État de l’URSS socialiste

La lecture historique du droit bourgeois par le droit soviétique

La théorie de la « preuve formelle » a été l’apanage de l’unification monarchiste à l’encontre de la dispersion féodale. La bourgeoisie l’a remplacée par une approche conforme à sa propre vision du monde. Voici comment la remise en cause s’est présentée historiquement, décrit ici par Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« Vers la première moitié du 19e siècle, la théorie de la preuve formelle a finalement été discréditée et rejetée à la fois par la science du droit et par la jurisprudence.

La principale raison de cela tenait à la contradiction totale entre la théorie de la preuve formelle et les nouveaux besoins du système capitaliste, les nouvelles idées, les nouveaux points de vue et les nouvelles institutions politiques de l’ère de l’établissement du capitalisme.

Les changements dans les conditions matérielles de la société, les nouveaux rapports de production qui se sont développés sur la base de la propriété capitaliste des moyens de production ont fondamentalement changé toute la structure de la vie, y compris la structure de la vie spirituelle de la société.

Le marxisme-léninisme enseigne que « il faut chercher la source de la vie spirituelle de la société, l’origine des idées sociales, des théories sociales, des opinions politiques, des institutions politiques, non pas dans les idées, théories, opinions et institutions politiques elles-mêmes, mais dans les conditions de la vie matérielle de la société, dans l’être social dont ces idées, théories, opinions, etc., sont le reflet » (Staline, Le matérialisme dialectique et historique) (…).

L’affirmation du système capitaliste et la victoire de la bourgeoisie dans les années 40 du 19e siècle, qui ont provoqué une révolution dans tous les domaines de la science de l’époque, ont également influencé l’idéologie juridique, en particulier le droit de la preuve judiciaire.

Le développement de l’économie capitaliste et des rapports sociaux, qui ont conduit au développement, dès le début et surtout dans la seconde moitié du XIXe siècle, des sciences historiques, des sciences sociales et philosophiques, avaient enlevé le sol aux alchimistes en quête de la « pierre philosophale », aux charlatans et aux guérisseurs.

L’état de la pensée juridique et, en particulier, du droit pénal et du droit de la procédure pénale, a jeté à bas le processus de recherche inquisitoriale et sa théorie de la preuve formelle, et ouvert un nouveau chapitre du développement de la société bourgeoise (…).

Tous ces discours [de Christian Thomasius, Montesquieu, Voltaire, Jacques Pierre Brissot, Gaetano Filangieri] ont préparé l’effondrement final de cette « théorie » [de la preuve formelle], en montrant toutes ses incohérences internes et absurdités au moyen les exigences de la « raison » et de la « conscience » humaines, c’est-à-dire les exigences de la société capitaliste.

Ces discours en matière de droit pénal et de procédure pénale ont joué le même rôle que les idées des grands éducateurs du XVIIIe siècle, qui ont préparé les esprits et les vues des peuples aux victoires de la Révolution française de 1789.

Sous l’influence de l’évolution des conditions matérielles de la vie de la société d’alors, la théorie de la preuve formelle est tombée. Le coup de grâce à cette théorie a été porté par la Révolution française de 1789, qui a remplacé le système de preuve juridique par un système de preuve jugé par la conviction profonde du juge.

Le processus pénal, fondé sur la théorie de la preuve formelle, ne répondait pas aux exigences de la bourgeoisie qui, dans sa lutte contre le féodalisme et l’État policier, s’appuyait sur les nouveaux principes de la démocratie, proclamant l’égalité de tous devant la loi, défendant « les droits de l’homme et du citoyen », construisant ses institutions étatiques sur la base de l’humanisme bourgeois (…).

Les intérêts de classe de la bourgeoisie capitaliste, les intérêts du basculement économique réclamaient un tribunal plus qualifié que le tribunal d’instruction et des règles plus rationnelles de son activité, du point de vue de la bourgeoisie, que la théorie de la preuve formelle, liée de manière organique à des méthodes de « preuve » comme la torture dans les formes les plus diverses et les plus sadiques.

Ni le processus d’enquête, ni le système de preuves formelles ne protégeaient et ne défendaient de manière adéquate les intérêts de la bourgeoisie industrielle qui s’était emparée du pouvoir, qui avait renversé le système féodal et avait ainsi détruit le tribunal féodal et l’ordre de procédure féodal.

L’assemblée constituante de 1790 a rejeté la théorie de la preuve formelle (…).

S’exprimant au nom de l’ensemble de la société, la bourgeoisie a attaché à ses institutions étatiques le caractère de l’impartialité politique, de l’objectivité et de la neutralité qui lui avait servi avec tant de succès et continue de servir dans nombre de pays capitalistes, même à l’heure actuelle. »

Le droit soviétique considère donc le droit bourgeois non pas comme la forme la plus développée, la plus aboutie, à quoi doit succéder immédiatement le droit communiste, mais comme une forme propre au mode de production capitaliste. Il est donc relatif et remplaçable, car il a des limites historiques.

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de l’État de l’URSS socialiste

L’URSS socialiste et le rejet du principe mécanique de la «preuve formelle»

L’URSS socialiste a formulé un droit où le tribunal n’est qu’application de la loi. Cela ne signifie aucunement un formalisme, bien au contraire. Une approche formelle serait le rejet de la dignité du réel et par conséquent étranger au matérialisme dialectique.

Contrairement à l’accusation faite par de nombreux théoriciens bourgeois (qui s’orientent notamment par l’interprétation fantasmatique d’ Alexandre Soljénitsyne d’un droit de nouveau médiéval), le droit soviétique rejetait le principe de la « preuve formelle » comme étant par définition mécanique-abstraite.

Voici la critique formulée à cette conception par Andreï Vychinski, dans La théorie de la preuve judiciaire en droit soviétique, en 1941.

« Sous le nom de théorie de la preuve formelle, une théorie est entrée dans l’histoire des procédures pénales, selon laquelle la force de la preuve judiciaire est déterminée à l’avance par la loi.

Selon cette théorie, chaque preuve avait un poids, une valeur, prédéterminée par la loi. Le tribunal et l’enquête chargée d’apprécier les éléments de preuve auraient dû répondre aux exigences de la loi.

Ni le tribunal ni l’enquête n’avaient le droit d’évaluer eux-mêmes des preuves ; leur tâche consistait à appliquer mécaniquement la mesure établie par la loi à chaque fait traité comme preuve et à tirer la conclusion prescrite par la loi.

Cette théorie considérait les propriétés et qualités des preuves comme une sorte de propriétés et qualités figées et immuables de choses ou de phénomènes qui ne changent jamais.

Le système de preuves construit conformément à cette théorie était une simple affiliation du processus d’inquisition, qui agissait à l’aide d’une force mécanique brutale, qui ne laissait pas de place à la réflexion et à l’analyse des circonstances.

Dans le processus d’inquisition, le juge et l’enquêteur n’ont pas étudié les affaires, ils n’ont pas raisonné, n’ont pas analysé les faits en fonction de leur signification interne.

Le système de preuves formelles a également levé cette obligation. En vertu de la règle de cette théorie, un juge ou un enquêteur avait pour seule tâche de calculer le pourcentage de certitude attribué préalablement à la loi à chaque type de preuve.

Le processus de l’Inquisition a joué un rôle majeur dans la lutte de l’absolutisme contre le féodalisme (…). La monarchie absolutiste ne pouvait permettre les activités incontrôlées des tribunaux locaux, indépendantes du pouvoir royal.

Elle ne pouvait pas permettre l’indépendance de la procédure de ces tribunaux, guidés par leur propre discrétion et les seigneurs féodaux.

La monarchie absolutiste a déclaré une campagne contre « l’arbitraire » des juges féodaux, contre la justice féodale, cherchant à centraliser les procès et à contrôler l’activité judiciaire.

D’où l’effet énergique sur les juges à l’aide de diverses instructions et règles, revêtues d’une forme juridique, conçues pour réglementer les activités des tribunaux et des juges de manière à ne pas laisser de place à leur discrétion personnelle.

Le processus de l’inquisition était un moyen très pratique d’atteindre ces objectifs. Le processus de l’Inquisition a engendré un système de soi-disant preuves formelles. Ce système était une série de règles préétablies par le législateur, contraignantes pour les tribunaux et les enquêtes dans les enquêtes et l’examen des affaires pénales.

La théorie de la preuve formelle a atteint son état le plus développé aux XVIe et XVIIIe siècles, soumettant tous les codes de procédure pénale des pays européens à son influence et conservant cette influence, comme nous l’avons dit, jusqu’à presque la moitié du XIXe siècle.

Cette théorie, dans sa forme développée, part de l’hypothèse qu’il est possible d’établir des signes objectifs, des indicateurs objectifs pour évaluer des éléments de preuve, prédéterminant la valeur différente de chaque élément de preuve à l’avance (…).

La théorie de la preuve formelle, à un certain stade de l’histoire du droit procédural, était un pas en avant, car elle limitait l’arbitraire illimité et le pouvoir illimité de certains groupes et individus puissants qui existaient auparavant, bien que cette restriction soit exercée dans l’intérêt de l’autocratie.

Les intérêts de l’absolutisme, à un certain stade de l’histoire, dans certaines limites, coïncidaient avec les intérêts publics, exigeant un ordre et une légitimité plus grands que sous le féodalisme.

Malgré la cruauté et parfois le non-sens de certaines règles procédurales de cette prétendue théorie juridique de la preuve, sa caractéristique positive est qu’elle impose certaines limites à l’arbitraire du juge ; elle a placé le juge dans une position où, comme tout fonctionnaire, il ne pouvait être guidé par une simple discrétion.

La théorie de la preuve formelle était – nous parlons spécifiquement de la théorie, c’est-à-dire d’un système d’opinions scientifiques – une tentative de justifier une décision de justice non pas à la discrétion personnelle et arbitraire d’un juge, mais pour des motifs objectifs (…).

La théorie de la preuve formelle présentait des avantages significatifs principalement pour le nouveau gouvernement absolutiste.

Cette théorie correspondait pleinement aux aspirations du pouvoir d’assujettir la justice féodale déchirée et dispersée dans tout l’État, de transformer par les juges de « sa majesté royale » qui exerçaient « la justice » dans leur intérêt royal les princes féodaux (…).

L’objectif principal de la création, par exemple, au XVe siècle en France, d’une magistrature royale indépendante des parlements locaux et subordonnée exclusivement au pouvoir du roi, était de créer « une solide forteresse pour la victoire finale sur le féodalisme » en la personne de cet appareil judiciaire.

L’une des conséquences les plus importantes de cette tâche a été de fixer une limite ou, comme le dit l’historien de l’ancienne loi judiciaire russe Dmitriev, de mettre « le premier obstacle à la liberté judiciaire totale dans la décision » (…).

Dans les mains de la monarchie absolutiste, de la cour, le processus d’enquête criminelle et la théorie de la preuve formelle, organiquement liés par ce processus, ont joué le rôle politique le plus important dans la lutte contre le féodalisme, dans la lutte pour nettoyer le terrain pour le développement et le renforcement de la propriété capitaliste, qui a remplacé la propriété féodale.

C’est dans ces circonstances qu’il est nécessaire de rechercher une explication à la fois de l’aspect même et de la capacité de survie significative de la théorie de la preuve formelle, qui a existé jusqu’au milieu du XIXe siècle (…).

Le système de preuve formelle se croyait en fait une certaine limite à « l’arbitraire judiciaire », réglementant strictement les activités du juge pour évaluer les preuves avant l’application des règles établies par la loi.

Mais la nature même de ce règlement, qui réduisait le rôle du juge au rôle d’automate à actionnement mécanique, transformait le processus de preuve – la partie la plus importante de tout processus, l’âme du processus – en une procédure très éloignée de la tâche d’établir la vérité matérielle, qui était le processus de recherche dans son ensemble.

Pénétrée par les tendances de la police et cherchant à renforcer et à protéger les intérêts de l’État exploiteur, opposés à ceux de l’individu, à ceux de l’Homme et du citoyen, la procédure de recherche tenait compte de l’accusé comme un simple matériel d’enquête, un simple objet d’expérimentation.

Cela a été exprimé de manière très nette dans le prétendu processus de torture, où la torture était la méthode principale et dominante de « preuve ».

Pour le processus de torture, il était important de définir uniquement les conditions dans lesquelles il était possible et autorisé de recourir à la torture, dont l’issue a été décidée. Le rôle de ces conditions a été joué par les éléments de preuve déterminant l’admissibilité ou l’irrecevabilité de la torture.

Est-il possible de rompre le lien organique entre le « processus de torture » et la théorie de la preuve formelle, qui reposait sur le principe de l’importance prédominante de la propre reconnaissance de l’accusé ? C’est bien sûr impossible, tout aussi impossible que de parler de la contradiction supposée exister entre l’inquisition, le processus de recherche et la théorie juridique [de la preuve formelle].

La critique est dévastatrice et ce qui est extrêmement intéressant, c’est qu’incapable de comprendre le droit socialiste, les théoriciens bourgeois l’ont justement accusé… de revenir à la théorie de la « preuve formelle » !

La bourgeoisie, avec sa conception de la « conviction interne », ne pouvait interpréter le droit socialiste que comme une sorte de retour à la monarchie absolue.

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