Discours de Klement Gottwald le 10 mars 1948

Extrait du discours de Klement Gottwald, le 10 mars 1948, devant l’assemblée nationale.

Avant [les accords de Munich], dans la République [de Tchécoslovaquie], c’était une petite clique de messieurs de la haute finance, de la grande industrie et des grands propriétaires terriens, qui gouvernait et décidait.

Cela est maintenant su de chacun, de chaque tchèque et de chaque slovaque. Dans la constitution, il était bien sûr écrit que tout le pouvoir vient du peuple, mais en réalité le peuple sentait à chaque pas qu’il faisait que c’était du sac d’argent que venait tout le pouvoir.

En d’autres termes, sous le masque formel d’une démocratie parlementaire, les grands capitalistes dominaient dans la République avant Munich, puissants par leurs possessions.

La couche des grands et puissants capitalistes justifiaient leur domination en prétendant qu’ils étaient les seuls en mesure de guider notre économie nationale. Les succès de leur domination économique – crises économiques périodiques, chômage permanent, d’un côté la misère et de l’autre une accumulation de richesses – ont prouvé que les messieurs du grand capital n’étaient pas en mesure de guider l’économie dans l’intérêt de tous.

Les grands et puissants dirigeants de la République avant Munich avaient également prétendu que seulement eux avaient vocation à conduire et administrer de manière juste les intérêts nationaux des Tchèques et des Slovaques, tout comme les aspects de la vie de l’État de Tchécoslovaquie, étant donné que seulement avec eux, sous leur direction, que seraient assurés la liberté nationale de nos peuples et leur indépendance.

Depuis, les résultats de cette direction par la grande bourgeoisie ont été justement, dans ces questions vitales pour la nation et pour l’État, les plus tragiques, les plus terribles et les plus misérables.

Afin de préserver sa domination de classe et ses privilèges, la bourgeoisie tchèque et slovaque s’est unie tout d’abord avec les ennemis intérieurs de la République, avec les fascistes allemands et hongrois.

Sur la base des mêmes intérêts égoïstes de classe, le grand capital tchèque et slovaque a capitulé au moment de Munich et refusé l’aide militaire proposé par l’Union soviétique à la Tchécoslovaquie.

Et, de plus, les grands capitalistes tchèques et slovaques ont sacrifié les intérêts nationaux, le 15 mars 1939, au nom de leur sac d’argent, en acceptant le honteux Protectorat et la séparation de la Slovaquie d’avec le territoire tchèque, en se positionnant entièrement et ouvertement au service de Hitler, bien qu’ils aient su que l’Allemagne hitlérienne, en cas de victoire, avait pour projet d’écraser les Tchèques et les Slovaques et de faire disparaître leur nation.

Ainsi, la grande bourgeoisie tchèque et slovaque s’est révélée non pas comme un bon administrateur, mais comme un misérable traître de nos intérêts nationaux et républicains. Au moment des vérifications historiques ont été pesés les dirigeants tchèques et slovaques, et trouvés trop légers.

La reconnaissance de ce fait a pénétré dans la conscience d’une grande partie du peuple tchèque et slovaque depuis l’époque de l’occupation étrangère. Cela s’est produit d’autant plus rapidement que tout le monde a vu que pendant que le peuple se positionnait activement ou passivement contre les occupants, les hommes dirigeants le pays ont collaboré avec eux et ont tiré du profit de la guerre allemande et de la misère du peuple.

De là il apparut toujours plus clairement que, après avoir arraché leur position de pouvoir aux Allemands et à leurs collaborateurs tchèques et slovaques, il serait nécessaire d’attaquer la base de leur pouvoir, c’est-à-dire leurs grandes propriétés, qu’ils avaient obtenu par des années d’exploitation du peuple.

Il apparaissait ainsi comme clair dans la République libérée que le peuple devait avoir le pouvoir de décision, et cela non pas sur le papier, mais dans les faits.

Aussi avons-nous, après la libération de la Tchécoslovaquie par la glorieuse armée soviétique, étatisé les instituts bancaires, la grande industrie et l’industrie lourde ; nous avons expulsé les Allemands et donné les propriétés terriennes, les banques et les usines qu’ils possédaient, non pas aux grands capitalistes tchèques et slovaques, aux paysans, ouvriers et travailleurs salariés tchèques et slovaques, au peuple.

Nous avons mis de côté le système policier et bureaucratique et remis au peuple l’administration publique par la formation d’un comité national. Nous n’avons pas permis la reformation des partis politiques réactionnaires du temps d’avant Munich, étant donné qu’il s’agissait des instruments politiques directs de la grande bourgeoisie tchèque et slovaque.

Nous avons formé le gouvernement du Front National, en tant qu’organe d’application de l’unité des ouvriers, paysans, travailleurs salariés et intellectuels.

La couche sociale qui gouvernait auparavant a ainsi été réellement coupé de son pouvoir politique qui avait échoué et frappé à son point faible, ses propriétés. Et dans la nouvelle république démocratique populaire on a commencé à réaliser le fait que le pouvoir vient du peuple.

Et le peuple a été généreux avec les anciens possesseurs du pouvoir. Il n’a étatisé qu’en partie leurs possessions et a assuré une compensation pour les biens expropriés. Il a laissé beaucoup d’entreprises, notamment industrielles, dans des mains privées, et l’étatisation n’a pas concerné ni le grand commerce ni le commerce d’import-export.

Les capitalistes conservaient ainsi la possibilité de faire des bénéfices, de commercer, d’accumuler du profit. Et les capitalistes ont pleinement utilisé ces possibilités. Ils se sont avant tout lancé dans les secteurs qui du point de vue du profit se montraient les plus profitables et dans cette course éperdue au profit, ils ne se sont préoccupés ni de la loi, ni de la morale, ni de garder leurs mains propres.

Le peuple voit les faits clairement, de la manière suivante : au moment de la réforme monétaire, à la fin de 1945, chacun a formellement commencé avec 500 couronnes. Aujourd’hui, beaucoup de capitalistes possèdent plusieurs millions de couronnes.

Il est évident qu’ils n’ont pas pu se procurer cet argent par un travail correct, mais par l’exploitation sans scrupules, ainsi que par le marché noir. Le résultat de ce « développement » a été que la base financière de la bourgeoisie, qui avait été cintré et affaibli par l’étatisation, commençait de nouveau à s’élargir et à se renforcer.

Mais ce n’était pas la seule conséquence. Nous avons, après la libération, laissé tous les droits civils et politiques aux anciens grands capitalistes et aux dirigeants. Nous avons été témoins de comment les procès contre les traîtres et les collaborateurs ont été transformés en farce, blessant le sens de la justice et le sentiment moral de notre peuple.

Nous avons également été témoins de comment les traîtres et les collaborateurs ont été subitement libérés ou comment ont été stoppées les enquêtes judiciaires menées contre eux, et que seulement un petit nombre a été puni – et avec beaucoup de tiédeur pour la plus grande partie.

Il n’est donc nullement étonnant qu’ils aient en peu de temps retrouvé leur arrogance. Ils ont pleinement utilisé les droits politiques qui leur avaient été généreusement laissés. Ils sont rentrés dans les partis politiques légaux, dans les organisations légales et dans les institutions, ou bien y ont envoyé leurs agents.

Ils ont placé leurs hommes à la direction de ces partis et organisations, voire eux-mêmes, et on mené leur travail à l’arrière-plan, par des groupes clandestins et illégaux. Quand on voit comment se sont comportés certains partis du vieux « Front National » au gouvernement, au parlement, dans le comité national, dans les organisations syndicales et autres, dans la presse, dans les conférences et en général dans la vie publique, on peut constater comment ces partis sont de manière croissante contaminé par le poison réactionnaire et comment ils sont devenus en fin de compte totalement des instruments de la réaction.

Le résultat de ce « développement » est le fait qu’après la révolution de mai 1945 les grands capitalistes, qui ont été tout d’abord mis de côté du pouvoir politique, se sont rassemblés par la suite sur le terrain politique, leur influence allant jusqu’au gouvernement, cette influence ne pouvant être que réactionnaire.

En d’autres mots : en mai 1945, nous avons jeté la réaction dehors par la porte des conseils du gouvernement et en février 1948 il était clair qu’elle était revenue par la fenêtre.

C’est l’arrière-plan économique, politique et de classe de la crise gouvernementale de février. La réaction, qui a employé ses positions économiques pour l’obtention forcée de nouvelles richesses, à qui s’étaient soumis plusieurs partis de l’ancien « Front National » de manière approfondie, à tel point qu’avec leur aide elle a pu pénétrer dans le gouvernement – cette réaction a décidé de mener un coup direct contre le régime démocratique populaire.

Le but immédiat de la réaction était de modifier le rapport de forces dans le gouvernement et dans tout l’État, et ce avant les élections, car elle y craignait une défaite. Le but final de la réaction était de renverser entièrement le régime démocratique populaire, de tout prendre au peuple de ce qui lui avait été donné parla libération et la révolution nationale, de tout rendre aux anciens propriétaires de ce qui avait été étatisé, et d’assurer de nouveau la domination sans bornes des grands et puissants capitalistes.

Sur le terrain de la politique étrangère, la réaction s’évertuait à nous éloigner de l’Union soviétique et des autres alliés, et de rapprocher de nouveau la république de ceux qui ont Munich sur la conscience.

D’une manière ou d’une autre, l’année 1920 devait se répéter, qui a signifié la fin des conquêtes que notre peuple avait réalisées après la première guerre mondiale après la liquidation de la monarchie austro-hongroise.

Que personne ne se laisse tromper par le fait que les réactionnaires à l’origine de la crise gouvernementale ne parlent pas ouvertement de leur but final. Que personne ne se laisse tromper quand ces gens répètent même de temps en temps qu’ils n’auraient, par exemple, pas l’intention d’abolir l’étatisation, ou bien que l’alliance avec l’Union soviétique serait intouchable, etc.

C’est la méthode de toute contre-révolution, Chaque contre-révolution ne parle aucunement ouvertement de ses buts finaux et n’abat ses cartes qu’au fur et à mesure. La contre-révolution veut toujours avant tout le renversement politique en sa faveur, ce qui compte pour elle c’est tout simplement le pouvoir. Posséder le pouvoir, cela signifie pour elle la victoire complète.

C’est par là qu’elle gagne la possibilité de mener jusqu’au bout ses plans contre-révolutionnaires. Cela est vrai également pour le cas tchécoslovaque. D’ailleurs, le prétexte utilisé par les réactionnaires pour provoquer la crise gouvernementale apporte de la lumière sur leurs objectifs de prise de pouvoir.

En apparence, il s’agissait du renvoi de huit policiers du corps de la police d’État à Prague. En réalité, la réaction exerçait une pression contre toute la police d’État. Ces messieurs entendaient de mettre celle-ci dans la main des réactionnaires et de la placer sous une direction réactionnaire, et d’ainsi avoir la possibilité d’utiliser ce corps contre le peuple, tout comme avant Munich.

Cela signifie avoir tout le pouvoir dans ses mains et être en mesure de passer par-dessus le peuple. Bref, par leurs attaques mal organisées contre la police d’État, ces messieurs ont dès le départ révélé une partie de leur plan.

Ce fut d’ailleurs précisément notre peuple qui ne s’est pas laissé tromper par aucune manoeuvre, diversion ou prétexte de la réaction. Le peuple a deviné les objectifs et buts masqués, et cela pas seulement au moment où la réaction a tout misé sur une seule carte et a provoqué la crise gouvernementale. Le peuple en avait déjà assez de tout ce que la réaction faisait depuis des mois.

La crise gouvernementale provoquée par la réaction n’a été que la goutte d’eau qui a fait déborder le vase de la patience populaire. Et cela est vrai non seulement pour nos travailleurs dans les villes, mais aussi ceux dans les campagnes.

Le peuple avait dans sa très grande majorité conscience qu’il ne s’agissait pas d’un simple conflit de coalition passager au sein du gouvernement, qui avait comme but d’obtenir des postes de ministres ou des avantages matériels, comme ce fut le cas de manière caractéristique avant Munich.

Le peuple voyait également de manière claire dans sa grande majorité qu’il s’agissait ici d’une dangereuse tentative de renverser le régime démocratique populaire et de détruite tout ce que la libération lui avait amené.

De là cette expression spontanée de colère et de résistance populaire qui a saisi toute la république du 20 au 25 février 1948, depuis la forêt de Bohème jusqu’aux monts Tatras [c’est-à-dire les parties tchèque comme slovaque] et fit s’effondrer comme un château de cartes les plans de la réaction.

Je n’exagère pas en disant que nos masses travailleuses dans les villes et les villages ont passé un examen de maturité en ces jours critiques, et qu’elles l’ont brillamment réussi. Je considère comme étant de mon devoir, depuis la tribune du parlement, d’exprimer ma grande admiration et mes remerciements à nos travailleurs des villes et des campagnes et à leurs représentants véritables pour leur position déterminée et vraiment politique lors du déroulement de la crise.

Vous, les nombreux millions de simples citoyens dans les villes et les villages, vous avez protégé notre pays d’une nouvelle défaite de Lipany et par conséquent une nouvelle défaite de la Montagne Blanche [allusion à la défaite du mouvement révolutionnaire populaire hussite de Lipany en 1434, suivi en 1620 de l’écrasement de l’aristocratie anti-catholique et anti-allemande, liée au hussitisme].

L’unité des grands capitalistes a été brisée et les continuateurs des partisans de Jan Hus, de Jan Zizka de Trocnov, de Prokop Holy et de Rohac de Duba auront désormais le commandement dans toutes les questions nationales de l’État.

Ainsi, par la position lisible et arrogante de la contre-révolution, par la rapidité et la surveillance de notre peuple, et bien sûr, certainement pas en dernier lieu, par la surveillance et l’intelligence de son grand parti, le Parti Communiste de Tchécoslovaquie, le putsch contre-révolutionnaire de la réaction a été entièrement étouffé.

Au moment où l’on nous a fait part de la démission de membres du gouvernement qui représentaient les partis sus-nommés, nous avons expliqué de manière claire et nette, et pour tous, tout d’abord que le retour des membres du gouvernement ayant démissionné était impossible, et ensuite qu’il est impossible de les remplacer et de réorganiser les ministères en négociant avec les cliques qui s’affirment les grands dirigeants tout puissants de ces partis, qui ont négocié jusqu’à présent en leur nom, trahissant misérablement toute confiance.

Nous avons également expliqué, en troisième lieu, que nous négocierons quant au remplacement et à la nouvelle formation du gouvernement, avec ceux de l’ancien Front National qui sont restés fidèles à l’esprit et au programme de celui-ci.

Et nous avons enfin exigé que le gouvernement intègre désormais les représentants d’une si importante organisation comme le mouvement syndical révolutionnaire.

Sur cette base, le gouvernement a été effectivement rendu complet et nouvellement formé. Le gouvernement rendu complet et nouvellement formé est le gouvernement du Front National renouvelé.

Les représentants de tous les partis politiques renouvelés tout comme ceux de nos plus grandes organisations, du mouvement syndical révolutionnaire, participent directement au gouvernement. En ce sens, le gouvernement du Front National renouvelé est l’organe de la réalisation de l’unité des ouvriers, des paysans, des XXX et des intellectuels.

Et par là on en revient au sens et au contenu d’origine du Front National, de la façon dont il est issu dans le mouvement de résistance, dans le soulèvement slovaque, dans la révolution de Prague et dans les jours de la glorieuse libération.

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Hymnes de la RDA et du SED

Auferstanden aus Ruinen (« Ressuscité des ruines ») fut l’hymne national de la République démocratique allemande à sa fondation en 1949.

Le texte reflétant l’idéologie et la démarche du principe de Démocratie populaire, le régime interdisa son utilisation officielle, l’hymne devenant purement instrumental. On peut écouter l’hymne ici.

Auferstanden aus Ruinen
Und der Zukunft zugewandt,
Lass uns dir zum Guten dienen,
Deutschland, einig Vaterland.
Alte Not gilt es zu zwingen,
Und wir zwingen sie vereint,
Denn es muss uns doch gelingen,
Dass die Sonne schön wie nie
|: Über Deutschland scheint. 😐

Glück und Frieden sei beschieden
Deutschland, unserm Vaterland.
Alle Welt sehnt sich nach Frieden,
Reicht den Völkern eure Hand.
Wenn wir brüderlich uns einen,
Schlagen wir des Volkes Feind!
Lasst das Licht des Friedens scheinen,
Dass nie eine Mutter mehr
|: Ihren Sohn beweint. 😐

Lasst uns pflügen, lasst uns bauen,
Lernt und schafft wie nie zuvor.
Und der eignen Kraft vertrauend,
Steigt ein frei Geschlecht empor.
Deutsche Jugend, bestes Streben
Unsres Volks in dir vereint,
Wirst du Deutschlands neues Leben,
Und die Sonne schön wie nie
|: Über Deutschland scheint. 😐
Ressuscitée des ruines
et tournée vers l’avenir,
laisse-nous te servir pour atteindre le bien,
Allemagne, patrie unie.
Une misère ancienne est à vaincre
et nous la vainquons réunis.
Car il nous faut y arriver
que le soleil bellement comme jamais
brille sur l’Allemagne (bis)

Qu’avec bonheur et avec paix soit bénie
l’Allemagne, notre patrie.
Le monde entier aspire à la paix,
tendez la main aux peuples.
Si nous nous réunissons fraternellement,
nous battrons l’ennemi du peuple.
Faites briller la lumière de la paix,
pour que jamais plus une mère
ne pleure son fils (bis)

Labourons, bâtissons,
apprenez et travaillez comme jamais avant.
Et avec confiance en sa propre force
une génération libre ascendra.
Jeunesse allemande, les meilleures ambitions
de notre peuple en toi réunies,
tu seras la nouvelle vie de l’Allemagne
et le soleil bellement comme jamais
brillera sur l’Allemagne (bis)

Das Lied der Partei (« La chanson du Parti ») fut à partir de 1950 l’hymne du Parti Socialiste Unifié, fondé en 1946 et dirigeant la République Démocratique allemande. La référence à Staline fut remplacée par celle à Lénine à partir de 1956. On peut écouter la chanson ici.


Sie hat uns alles gegeben.
Sonne und Wind und sie geizte nie.
Wo sie war, war das Leben.
Was wir sind, sind wir durch sie.
Sie hat uns niemals verlassen.
Fror auch die Welt, uns war warm.
Uns schützt die Mutter der Massen.
Uns trägt ihr mächtiger Arm.Die Partei, die Partei, die hat immer Recht !
Und, Genossen, es bleibe dabei;
Denn wer kämpft für das Recht,
Der hat immer recht.
Gegen Lüge und Ausbeuterei.
Wer das Leben beleidigt,
Ist dumm oder schlecht.
Wer die Menschheit verteidigt,
Hat immer recht.
So, aus Leninschem Geist,
Wächst, von Stalin geschweißt,
Die Partei – die Partei – die Partei.

Sie hat uns niemals geschmeichelt.
Sank uns im Kampfe auch mal der Mut,
Hat sie uns leis nur gestreichelt,
zagt nicht und gleich war uns gut.
Zählt denn noch Schmerz und Beschwerde,
wenn uns das Gute gelingt.
Wenn man den Ärmsten der Erde,
Freiheit und Frieden erzwingt.Sie hat uns alles gegeben,
Ziegel zum Bau und den großen Plan.
Sie sprach: Meistert das Leben,
Vorwärts Genossen packt an.
Hetzen Hyänen zum Kriege,
Bricht euer Bau ihre Macht,
Zimmert das Haus und die Wiege,
Bauleute seid auf der Wacht. 
[En allemand le terme Parti est au féminin.]Elle nous a tout donné.
Le soleil et le vent et elle n’était jamais avare.
Là où elle se trouvait, se trouvait la vie.
Ce que nous sommes, nous le sommes grâce à elle.
Elle ne nous a jamais abandonnés.
Même quand le monde gelait, nous avions chaud.
La mère des masses nous protège.
Son bras puissant nous porte.Le parti, le parti a toujours raison !
Et, camarades, qu’il en reste ainsi.
Car celui qui se bat pour le droit
Celui-ci a toujours raison.
Contre le mensonge et l’exploitation.
Celui qui offense la vie
Est sot ou mauvais.
Celui qui défend l’humanité
A toujours raison.
Ainsi par l’esprit de Lénine
Soudé par Staline,
Grandit le parti, le parti, le parti.
Elle ne nous a jamais flattés.
Si dans le combat, notre courage a faibli,
Elle ne nous a que légèrement caressés,
« Ne vous découragez pas » et immédiatement nous allions bien.
La douleur et les plaintes comptent-elles encore
Quand le bien est vainqueur,
Quand, pour les plus pauvres de la terre,
On conquiert la liberté et la paix.Elle nous a tout donné
La brique pour construire et le grand plan.
Elle nous a dit ; maîtrisez la vie
En avant, camarades, retroussez vos manches.
Chassez les hyènes qui veulent la guerre,
Que votre édifice brise leur force.
Charpentez la maison et le berceau.
Bâtisseurs, soyez sur vos gardes.

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Kominform: Le devoir essentiel des Partis Communistes (1947)

COMMUNIQUE SUR LA CONFERENCE D’INFORMATION DES REPRESENTANTS DE QUELQUES PARTIS COMMUNISTES

LE DEVOIR ESSENTIEL DES PARTIS COMMUNISTES :
DEFENDRE, CONTRE LES PLANS IMPERIALISTES D’EXPANSION ET D’AGRESSION, L’HONNEUR ET LA SOUVERAINETE DE LEURS PAYS

     A la fin du mois de septembre s’est tenue en Pologne une Conférence d’information avec la participation des partis suivants : le Parti Communiste de Yougoslavie : camarades E. Kardelj et M. Djilas ; le Parti Ouvrier Bulgare (communiste) : camarades V. Tchervenkov et V. Poptomov ; le Parti Communiste de Roumanie : camarades G. Dej et A. Pauker ; le Parti Communiste Hongrois : camarades M. Farkache et I. Reval ; le Parti Ouvrier Polonais : camarades W. Gomulka et H. Minc ; le Parti Communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S. : camarades A. Jdanov et G. Malenkov ; le Parti Communiste Français : camarades J. Duclos et E. Fajon ; le Parti Communiste de Tchécoslovaquie : camarades R. Slanski et S. Bastovanski ; le Parti Communiste d’Italie : camarades L. Longo et E. Reale.

     Les participants à la conférence ont entendu des rapports d’information sur l’activité des Comités Centraux des Partis représentés à la Conférence : pour le Parti Communiste de Yougoslavie, des camarades E. Kardelj et M. Djilas ; pour le Parti Ouvrier Bulgare (communiste), du camarade V. Tchervenkov ; pour le Parti Communiste de Roumanie, du camarade G. Dej ; pour le Parti Communiste Hongrois, du camarade I. Reval ; pour le Parti Ouvrier Polonais, du camarade W. Gomulka ; pour le Parti Communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., du camarade G. Malenkov ; pour le Parti Communiste Français, du camarade J. Duclos ; pour le Parti Communiste de Tchécoslovaquie, du camarade R. Slanski ; et pour le Parti Communiste d’Italie, du camarade L. Longo.

     Ayant procédé à un échange de vues sur lesdits rapports, les participants à la conférence ont décidé d’examiner la situation internationale, ainsi que le problème de l’échange des expériences et de la coordination de l’activité des partis communistes représentés à la conférence.

     Le rapport sur la situation internationale a été présenté par le camarade A. Jdanov. Les participants à la conférence ont échangé leurs opinions sur ledit rapport et constaté leur accord complet dans l’appréciation de la situation internationale actuelle et des tâches qui en découlent, après quoi ils ont adopté à l’unanimité une déclaration sur les problèmes de la situation internationale.

     Le rapport sur l’échange des expériences et la coordination de l’activité des partis communistes a été présenté par le camarade W. Gomulka. En ce qui concerne ce problème, constatant les effets négatifs qui découlent de l’absence de contacts entre les partis représentés à la conférence, et tenant compte de la nécessité de l’échange mutuel de leurs expériences, la conférence a décidé la création d’un Bureau d’Information.

     Le Bureau d’Information sera constitué de représentants des Comités Centraux des partis nommés ci-dessus.

     Les tâches du Bureau d’Information consistent dans l’organisation de l’échange des expériences entre les partis intéressés et, en cas de nécessité, dans la coordination de leur activité sur la base d’un libre consentement.

     Il a été décidé qu’un organe sera édité par le Bureau d’Information.

     Le siège du Bureau d’Information et de la rédaction de son organe a été fixé à Belgrade.

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Kominform: sur l’échange des expériences et la coordination (1947)

RESOLUTION SUR L’ECHANGE DES EXPERIENCES ET LA COORDINATION DE L’ACTIVITE DES PARTIS REPRESENTES A LA CONFERENCE

     La Conférence constate que l’absence de contacts entre les Partis Communistes qui y sont représentés comporte dans la situation de sérieux inconvénients.

     L’expérience a prouvé qu’un tel manque de liaison entre les Partis Communistes est grandement dommageable et ne saurait se justifier. La nécessité de l’échange des expériences et d’une coordination librement consentie de l’action des partis intéressés, revêt en ce moment une acuité particulière dans les conditions compliquées de la situation d’après-guerre où l’absence d’une liaison entre Partis Communistes peut conduire à une situation préjudiciable à la classe ouvrière.

     En conséquence, les participants à la Conférence se sont mis d’accord sur ce qui suit :

     1. Il sera crée un Bureau d’Information des représentants du Parti Communiste de Yougoslavie, du Parti Ouvrier Bulgare (communiste), du Parti Communiste de Roumanie, du Parti Communiste Hongrois, du Parti Ouvrier Polonais, du Parti Communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., du Parti Communiste Français, du Parti Communiste de Tchécoslovaquie, du Parti Communiste d’Italie.

     2. Le Bureau d’Information aura pour tâche d’organiser l’échange des expériences et, en cas de nécessité, la coordination de l’activité des Partis Communistes sur la base d’un libre consentement.

     3. Le Bureau d’Information sera composé de représentants des Comités Centraux à raison de deux pour chacun d’eux. Les délégués des Comités Centraux doivent être nommés et remplacés par les Comités Centraux intéressés.

     4. Le Bureau d’Information éditera un organe bimensuel, et plus tard, hebdomadaire. L’organe sera édité en français et en russe et, dans la mesure des possibilités, en d’autres langues.

     5. Le siège du Bureau d’Information est fixé à Belgrade.

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Kominform: Déclaration sur les problèmes de la situation internationale (1947)

DECLARATION SUR LES PROBLEMES DE LA SITUATION INTERNATIONALE

     Les représentants du Parti Communiste de Yougoslavie, du Parti Ouvrier Bulgare (communiste), du Parti Communiste de Roumanie, du Parti Communiste Hongrois, du Parti Ouvrier Polonais, du Pari Communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., du Parti Communiste Français, du Parti Communiste de Tchécoslovaquie et du Parti Communiste d’Italie, après avoir échangé leurs vues sur les problèmes de la situation internationale, se sont mis d’accord sur la déclaration suivante :

     Dans la situation internationale résultant de la Deuxième Guerre mondiale et de la période d’après-guerre, des changement essentiels sont intervenus.

     Ces changements sont caractérisés par une nouvelle disposition des forces politiques fondamentales agissant sur l’arène internationale, par la modification des rapports entre les Etats vainqueurs dans la Seconde Guerre mondiale, par un nouveau regroupement de ces Etats.

     Pendant la guerre contre l’Allemagne et le Japon, les Etats alliés marchaient ensemble et constituaient un seul camp. Cependant, il existait déjà dans le camp des alliés une différence dans la détermination des buts de la guerre, ainsi que dans la détermination des tâches relatives à l’organisation du monde après la guerre.

Pour l’Union Soviétique et pour les autres pays démocratiques, les buts fondamentaux de la guerre comportaient le rétablissement, l’affermissement des régimes démocratiques en Europe, la liquidation du fascisme, les mesures propres à prévenir la possibilité d’une nouvelle guerre d’agression de la part de l’Allemagne, l’établissement d’une coopération dans tous les domaines et pour une longue période entre les peuples d’Europe.

Les Etats-Unis d’Amérique et en accord avec eux l’Angleterre se fixaient d’autres buts de guerre, notamment l’éviction de leur concurrents sur les marchés (l’Allemagne, le Japon) et l’instauration de leur propre hégémonie. Ce désaccord dans la détermination des buts de la guerre et des tâches relatives à l’organisation du monde après la guerre n’a cessé de s’approfondir depuis la fin des hostilités.

Deux lignes politiques opposées se sont manifestées : à l’un des pôles, la politique de l’U.R.S.S. et des autres pays démocratiques, qui vise à saper l’impérialisme et à renforcer la démocratie ; au pôle opposé, la politique des Etats-Unis et de l’Angleterre, qui vise à renforcer l’impérialisme et à étrangler la démocratie.

Et parce que l’U.R.S.S. et les démocraties nouvelles sont devenues un obstacle à la réalisation des plans impérialistes de lutte pour la domination mondiale et pour l’écrasement des mouvements démocratiques, une croisade est organisée contre elles. Cette croisade s’accompagne de menaces d’une nouvelle guerre de la part des hommes politiques impérialistes les plus acharnés des Etats-Unis et de l’Angleterre.

     Ainsi deux camps se sont formés dans le monde : d’une part, le camp impérialiste et antidémocratique, qui a pour but essentiel l’établissement de la domination mondiale de l’impérialisme américain et l’écrasement de la démocratie et, d’autre part, le camp anti-impérialiste et démocratique, dont le but essentiel consiste à saper l’impérialisme, à renforcer la démocratie, à liquider les restes du fascisme.

     La lutte entre ces deux camps, entre le camp impérialiste et le camp anti-impérialiste, se déroule dans les conditions de l’accentuation continue de la crise générale du capitalisme, de l’affaiblissement des forces du capitalisme et de l’affermissement des forces du socialisme et de la démocratie.

     C’est pour cela que le camp impérialiste et sa force dirigeante, les Etats-Unis, déploient une activité particulièrement agressive. Cette activité se développe à la fois sur tous les plans : sur le plan militaire et stratégique, sur le plan de l’expansion économique et sur le plan de la lutte idéologique. Le plan Truman-Marshall constitue seulement la partie européenne de la politique d’expansion que les Etats-Unis réalisent dans toutes les parties du monde.

Au plan d’asservissement économique et politique de l’Europe par l’impérialisme américain s’ajoutent des plans d’asservissement économique et politique de la Chine, de l’Indonésie, des pays de l’Amérique du Sud. Les Etats-Unis préparent les agresseurs d’hier — les magnats capitalistes de l’Allemagne et du Japon — à jouer un nouveau rôle, le rôle d’instrument de la politique impérialiste des Etats-Unis en Europe et en Asie.

     Le camp impérialiste a recours aux moyens tactiques les plus variés où se conjuguent la menace de l’emploi direct de la force, le chantage et les violences, toutes sortes de mesures de pression politique et économique, la corruption, l’utilisation des contradictions intérieures et des querelles pour renforcer les positions impérialistes. Tout cela est dissimulé sous le masque du libéralisme et du pacifisme en vue de tromper et de prendre au piège les gens sans expérience politique.

     Parmi les moyens tactiques des impérialistes, une place particulière revient à l’utilisation de la politique de trahison des socialistes de droite du type Blum en France, Attlee et Bevin en Angleterre, Schumacher en Allemagne, Renner et Sherf en Autriche, Saragat en Italie, etc. Ils s’efforcent de dissimuler le caractère de brigandage de la politique impérialiste sous le masque de la démocratie et d’une phraséologie socialiste alors qu’ils ne sont en fait que les auxiliaires fidèles des impérialistes en suscitant la désagrégation dans les rangs de la classe ouvrière et en empoisonnant la conscience de cette dernière. Ce n’est pas par hasard que la politique extérieure de l’impérialisme anglais a trouvé en la personne de Bevin, son serviteur le plus conséquent et le plus zélé.

     Dans ces conditions, le camp anti-impérialiste et démocratique se trouve devant la nécessité de s’unir, de se mettre librement d’accord sur un plan d’action commune, d’élaborer sa tactique contre les forces principales du camp impérialiste, contre l’impérialisme américain, contre ses alliés anglais et français, contre les socialistes de droite, avant tout en Angleterre et en France.

     Les efforts de l’ensemble des forces démocratiques anti-impérialistes de l’Europe sont nécessaires pour mettre en échec le plan d’agression impérialiste. Les socialistes de droite se comportent en traîtres.

A l’exception de ceux des pays de démocratie nouvelle, où le bloc des communistes et des socialistes avec les autres partis progressifs et démocratiques constitue la base de la résistance de ces pays aux plans impérialistes, les socialistes dans la plupart des autres pays et, avant tout, les socialistes français, et les labouristes anglais — Ramadier, Blum, Attlee et Bevin — facilitent par leur complaisance la tâche du capital américain, l’incitent aux actes de violence et conduisent leurs propres pays à l’état de vassaux dépendant des Etats-Unis. Dans ces conditions, les partis communistes ont pour devoir essentiel de prendre en main le drapeau de la défense de l’indépendance nationale et de la souveraineté de leur propre pays.

     Si les partis communistes restent fermes sur leurs positions, s’ils ne se laissent pas influencer par l’intimidation et le chantage, s’ils se comportent résolument en sentinelles de la démocratie, de la souveraineté, de la liberté et de l’indépendance de leurs pays, s’ils savent dans leur lutte contre les tentatives d’asservissement économique et politique se mettre à la tête de toutes les forces disposées à défendre la cause de l’honneur national et de l’indépendance nationale, aucun des plans d’asservissement de l’Europe et de l’Asie ne pourra être réalisé.

     Telle est, à l’heure actuelle, une des tâches principales des partis communistes.

     Il importe de considérer qu’il y a très loin entre le désir des impérialistes de déclencher une nouvelle guerre et la possibilité d’organiser une telle guerre. Les peuples du monde entier ne veulent pas la guerre. Les forces attachées à la paix sont si grandes et si puissantes qu’il suffirait qu’elles fassent preuve de ténacité et de fermeté dans la lutte pour la défense de la paix pour que les plans des agresseurs subissent un fiasco total. Il ne faut pas oublier que le bruit fait par les agents impérialistes autour des dangers de guerre tend à intimider les gens sans fermeté ou ceux à nerfs faibles, afin de pouvoir, au moyen du chantage, obtenir des concessions en faveur de l’agresseur.

     Le danger principal pour la classe ouvrière consiste actuellement dans la sous-estimation de ses propres forces et dans la surestimation des forces du camp impérialiste. De même que, dans le passé, la politique munichoise a encouragé l’agression hitlérienne, de même aujourd’hui, les concessions à la nouvelle politique des Etats-Unis, au camp impérialiste, peuvent inciter ses inspirateurs à devenir plus insolents et plus agressifs.

     C’est pourquoi les partis communistes doivent se mettre à la tête de la résistance dans tous les domaines — gouvernemental, politique, économique et idéologique — aux plans impérialistes d’expansion et d’agression. Ils doivent serrer leurs rangs, unir leurs efforts sur la base d’une plate-forme anti-impérialiste et démocratique commune et rallier autour d’eux, toutes les forces démocratiques et patriotiques du peuple.

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PC(b) de l’URSS: Rapport sur la situation internationale (1947)

RAPPORT SUR LA SITUATION INTERNATIONALE (1947)
PC(b) de l’URSS

Rapport présenté par Andreï Jdanov, membre du Bureau Politique du Parti Communiste (bolchévik) de l’U.R.S.S., le 22 septembre 1947, devant la Conférence d’Information des Partis Communistes (réunion constitutive du Kominform), à Szklarska Poreba (Pologne)

Ce rapport a été publié le 1er novembre 1947 dans Pour une paix durable, pour une démocratie populaire, l’organe du Kominform.

Les deux passages entre parenthèses […] proviennent du texte original de Jdanov trouvé dans ses archives et publié en 1993 (édition bilingue anglo-russe) dans l’édition critique universitaire Cominform (cette volumineuse édition reprend l’ensemble des textes des trois Conférences qu’a connu le Kominform en 1947, 1948 et 1949) ; le passage entre parenthèses {…} se trouve dans le même manuscrit original de Jdanov, mais il a été barré par Jdanov.

 I

LA SITUATION INTERNATIONALE APRES LA GUERRE

      La fin de la Seconde Guerre mondiale a apporté des changements essentiels dans l’ensemble de la situation mondiale. La défaite militaire du bloc des Etats fascistes, le caractère antifasciste et de libération de la guerre, le rôle décisif joué par l’Union Soviétique dans la victoire sur les agresseurs fascistes tout cela a conduit à un changement radical dans le rapport des forces entre les deux systèmes — socialiste et capitaliste en faveur du socialisme.

     En quoi consistent ces changements ?

     Le résultat principal de la Seconde Guerre mondiale consiste dans la défaite militaire dc l’Allemagne et du Japon — les deux pays les plus militaristes et les plus agressifs du capitalisme.

Les éléments réactionnaires impérialistes du monde entier, et particulièrement en Angleterre, aux Etats-Unis d’Amérique et en France, avaient fondé des espoirs particuliers sur l’Allemagne et le Japon, et surtout sur l’Allemagne hitlérienne, premièrement, en tant que force la plus capable de porter un coup tel à l’Union Soviétique qu’il aurait pu l’affaiblir et miner son influence sinon l’écraser, et deuxièmement, en tant que force capable d’écraser le mouvement ouvrier révolutionnaire et démocratique en Allemagne même et dans tous les pays qui étaient l’objet de l’agression hitlérienne.

On visait, de cette façon, à consolider la situation générale du capitalisme.

C’est là qu’il faut chercher l’origine et l’une des principales causes de la politique munichoise d’avant-guerre, politique d’ » apaisement  » et d’encouragement à l’agression fasciste, politique menée méthodiquement par les milieux impérialistes dirigeants d’Angleterre, de France et des Etats-Unis d’Amérique.

     Cependant, les espoirs que les impérialistes anglo-franco-américains nourrissaient à l’égard des hitlériens ne se sont pas justifiés. Contrairement à ce que supposaient les munichois, les hitlériens ont prouvé qu’ils étaient plus faibles, tandis que l’Union Soviétique et les peuples épris de liberté ont prouvé qu’ils étaient plus forts.

Ainsi, la Seconde Guerre mondiale a eu pour résultat ceci : les forces principales de la réaction fasciste internationale militante ont été mises en déroute et se sont trouvées pour longtemps hors de combat.

     Par conséquent, le système capitaliste mondial, dans son ensemble, a subi de nouveau un coup sérieux.

Si le résultat le plus important de la Première Guerre mondiale fut la rupture du front uni de l’impérialisme et le détachement de la Russie du système capitaliste mondial ; si, par suite de la victoire du régime socialiste en U.R.S.S., le capitalisme a cessé d’être le système universel unique de l’économie mondiale, le résultat de la Seconde Guerre mondiale, avec la défaite du fascisme, avec l’affaiblissement des positions mondiales du capitalisme et le renforcement du mouvement antifasciste, a été le détachement de toute une série de pays de l’Europe centrale et sud-orientale du système impérialiste.

De nouveaux régimes populaires et démocratiques ont surgi dans ces pays.

Le grand exemple de la guerre patriotique de l’Union Soviétique, le rôle libérateur de l’Armée soviétique se confondaient avec l’élan de la lutte de masse de libération nationale des peuples épris de liberté contre les occupants fascistes et leurs complices.

Au cours de cette lutte ont été démasqués, comme traîtres aux intérêts nationaux, les éléments pro-fascistes qui avaient collaboré avec Hitler : gros capitalistes influents, grands propriétaires fonciers, hauts fonctionnaires, officiers monarchistes.

     Dans les pays danubiens, la libération de l’esclavage germano-fasciste s’est accompagnée, d’une part, de l’élimination du pouvoir de la couche supérieure de la bourgeoisie et des gros propriétaires terriens, compromise par sa collaboration avec le fascisme allemand, et, d’autre part, de l’arrivée au pouvoir de nouvelles forces du peuple qui avaient fait leurs preuves durant la lutte contre les oppresseurs hitlériens.

     Dans ces pays, ce sont les représentants des ouvriers, des paysans, des intellectuels progressifs qui sont arrivés au pouvoir.

Partout, dans ces pays, ce fut la classe ouvrière qui a manifesté le plus grand héroïsme, le plus de conséquence et d’intransigeance dans la lutte antifasciste, et, partant, son autorité et son influence parmi le peuple se sont énormément accrues.

     Le nouveau pouvoir démocratique en Yougoslavie, en Bulgarie, en Roumanie, en Pologne, en Tchécoslovaquie, en Hongrie et en Albanie, s’appuyant sur les masses populaires, a réussi à réaliser, dans le délai le plus court, des transformations démocratiques progressives telles que la bourgeoisie n’est déjà plus capable d’en faire.

La réforme agraire a remis la terre aux paysans et a conduit à la liquidation de la classe des hobereaux.

La nationalisation de la grande industrie et des banques et la confiscation de la propriété des traîtres qui avaient collaboré avec les Allemands ont sapé d’une manière radicale des positions du capital monopoliste dans ces pays et ont affranchi les masses de la servitude impérialiste.

En même temps, ont été établis les fondements de la propriété de l’Etat.

Un nouveau type d’Etat a été créé : la République populaire, où le pouvoir appartient au peuple, où la grande industrie, le transport et les banques appartiennent à l’Etat et où la force dirigeante est constituée par le bloc des classes travailleuses de la population, ayant à sa tête la classe ouvrière.

Les peuples de ces pays se sont non seulement libérés de l’étau impérialiste, mais ils sont en train d’édifier les bases du passage vers le développement socialiste.

     L’importance et l’autorité internationale de l’U.R.S.S. se sont considérablement accrues à la suite de la guerre. L’U.R.S.S. a été la force dirigeante et l’âme de l’écrasement militaire de l’Allemagne et du Japon.

Les forces démocratiques progressives du monde entier se sont rassemblées autour de l’Union Soviétique. L’Etat socialiste, aux prises mortelles avec l’ennemi le plus puissant, est sorti victorieux des terribles épreuves de la guerre.

L’Union Soviétique est sortie de la guerre renforcée. La face du monde capitaliste a changé elle aussi bien sensiblement. Des six puissances appelées  » grandes  » (l’Allemagne, le Japon, l’Angleterre, les Etats-Unis d’Amérique, la France, l’Italie), trois ont été éliminées par suite de la défaite militaire : l’Allemagne, l’Italie, le Japon.

La France aussi a été affaiblie et a perdu son ancienne signification de grande puissance.

     Ainsi, il ne reste plus que deux  » grandes  » puissances impérialistes mondiales : les Etats-Unis et l’Angleterre.

Mais les positions de l’un de ces pays, l’Angleterre, se sont trouvées ébranlées.

Durant la guerre, l’impérialisme anglais s’est montré affaibli du point de vue militaire et politique.

En Europe, l’Angleterre s’est montrée impuissante devant l’agression allemande.

En Asie, l’Angleterre — la plus grande puissance impérialiste — n’a pas réussi par ses propres forces à sauvegarder ses propres possessions coloniales.

Ayant temporairement perdu ses liaisons avec les colonies, qui approvisionnaient la métropole en denrées alimentaires et en matières premières et qui absorbaient une partie considérable de sa production industrielle, l’Angleterre s’est trouvée, du point de vue de son économie de guerre et en ce qui concerne ses propres fournitures industrielles et alimentaires, dépendante de l’Amérique.

Depuis la fin de la guerre, la dépendance financière et économique de l’Angleterre à l’égard des Etats-Unis d’Amérique n’a fait que croître.

     Après la guerre, l’Angleterre a recouvré ses colonies : cependant, elle s’y est heurtée à une influence renforcée de l’impérialisme américain qui, pendant la guerre, avait déployé son activité dans toutes les zones considérées jusque-là comme des sphères d’influence du capitalisme monopoliste anglais : l’Orient arabe, l’Asie du Sud-Est.

     L’influence de l’Amérique s’est renforcée dans les dominions de l’Empire britannique et en Amérique du Sud, où le rôle joué par l’Angleterre lui échappe de plus en plus au bénéfice des Etats-Unis d’Amérique.

     La crise du système colonial, accentuée par l’issue de la Seconde Guerre mondiale, se manifeste par le puissant essor du mouvement de libération nationale dans les colonies et les pays dépendants.

Par là même, les arrières du système capitaliste se trouvent menacés.

     Les peuples des colonies ne veulent plus vivre comme par le passé.

Les classes dominantes des métropoles ne peuvent plus gouverner les colonies commue auparavant.

Les tentatives d’écrasement du mouvement de libération nationale par la force militaire se heurtent maintenant à la résistance armée croissante des peuples des colonies et conduisent à des guerres coloniales de longue durée : Hollande en Indonésie, France au Vietnam.

     La guerre, qui a à son origine le développement inégal du capitalisme dans les différents pays, a conduit à une nouvelle aggravation de cette inégalité.

De toutes les puissances capitalistes, une seule — les Etats-Unis d’Amérique — est sortie de la guerre sans être affaiblie, mais considérablement renforcée tant économiquement que militairement.

Les capitalistes américains ont grassement profité de la guerre.

Le peuple américain n’a pas souffert des privations accompagnant la guerre, ni du joug de l’occupation, ni des bombardements aériens, tandis que ses pertes humaines n’ont pas été comparativement nombreuses, puisque les Etats-Unis, en fait, n’ont pris part qu’à la dernière étape de la guerre, alors que le sort de celle-ci était déjà décidé.

Pour les Etats-Unis, la guerre a servi avant tout d’impulsion à un large développement de la production industrielle, au renforcement décisif de l’exportation, principalement vers l’Europe.

     La fin de la guerre a posé devant les Etats-Unis une série de nouveaux problèmes.

Les monopoles capitalistes se sont efforcés de maintenir le niveau élevé de leurs profits de guerre.

Dans ce dessein, ils ont recherché à ce que le volume des commandes du temps de guerre ne soit pas réduit.

Mais pour cela les Etats-Unis devaient conserver tous les marchés extérieurs qui absorbaient la production américaine durant la guerre, et conquérir de nouveaux marchés, puisque s’est produite à la fin de la guerre une forte réduction de la capacité d’achat de la majorité des pays.

     En même temps, la dépendance financière et économique de ces pays à l’égard des Etats-Unis d’Amérique s’est accrue.

Les Etats-Unis ont investi à l’étranger des crédits pour la somme de 19 milliards de dollars, non compris les investissements à la Banque internationale et au Fonds international des changes.

Les principaux concurrents des Etats-Unis — l’Allemagne et le Japon — ont disparu du marché mondial, et cela a ouvert de nouvelles et très grandes possibilités aux Etats-Unis d’Amérique.

     Si, avant la Seconde Guerre mondiale, les cercles réactionnaires les plus influents de l’impérialisme américain s’en tenaient à la politique isolationniste et s’abstenaient d’intervenir activement dans les affaires de l’Europe et de l’Asie, maintenant, dans les nouvelles conditions d’après-guerre, les maîtres de Wall Street font une autre politique.

Ils ont dressé un programme d’utilisation de toute la puissance militaire et économique américaine, non seulement pour conserver et consolider les positions conquises à l’étranger pendant la guerre, mais aussi pour les étendre au maximum en se substituant sur le marché mondial à l’Allemagne, au Japon et à l’Italie.

     L’affaiblissement considérable de la puissance économique des autres Etats capitalistes a fait surgir la possibilité d’utilisation spéculative des difficultés économiques d’après guerre, ce qui favorise la mise de ces Etats sous le contrôle des Etats-Unis.

Cet affaiblissement a permis en particulier l’utilisation des difficultés économiques d’après guerre de la Grande-Bretagne. Les Etats-Unis d’Amérique ont proclamé un nouveau cours ouvertement conquérant et expansionniste.

     Le but que se propose le nouveau cours expansionniste des Etats-Unis est l’établissement de la domination mondiale de l’impérialisme américain.

Ce nouveau cours vise à la consolidation de la situation de monopole des Etats-Unis sur les marchés, monopole qui s’est établi par suite de la disparition de leurs deux concurrents les plus grands — l’Allemagne et le Japon — et par l’affaiblissement des partenaires capitalistes des Etats-Unis : l’Angleterre et la France.

     Ce nouveau cours compte sur un large programme de mesures d’ordre militaire, économique et politique, dont l’application établirait dans tous les pays visés par l’expansionnisme des Etats-Unis la domination politique et économique de ces derniers, réduirait ces pays à l’état de satellites des Etats-Unis, y instaurerait des régimes intérieurs qui élimineraient tout obstacle de la part du mouvement ouvrier et démocratique à l’exploitation de ces pays par le capital américain.

Les Etats-Unis d’Amérique cherchent à étendre actuellement l’application de ce nouveau cours politique non seulement envers les ennemis de la guerre d’hier, ou envers les Etats neutres, mais aussi de façon toujours plus grande, envers les alliés de guerre des Etats-Unis d’Amérique.

     On attache une attention spéciale à l’utilisation des difficultés économiques de l’Angleterre — l’allié et en même temps le rival capitaliste et concurrent de longue date des Etats-Unis.

Le cours expansionniste américain a pour point de départ la considération que, non seulement il faudra ne pas détendre l’étau de la dépendance économique vis-à-vis des Etats-Unis, dans lequel l’Angleterre est tombée durant la guerre, mais, au contraire, renforcer la pression sur l’Angleterre, afin de lui ravir successivement son contrôle sur les colonies, l’évincer de ses sphères d’influence et la réduire à l’état de vassal.

     Ainsi, par leur nouvelle politique, les Etats-Unis tendent à raffermir leur situation de monopole et comptent assujettir et mettre sous leur dépendance leurs propres partenaires capitalistes.

     Mais, sur le chemin de leurs aspirations à la domination mondiale, les Etats-Unis se heurtent à l’U.R.S.S. avec son influence internationale croissante, comme au bastion de la politique anti-impérialiste et antifasciste, aux pays de la nouvelle démocratie qui ont échappé au contrôle de l’impérialisme anglo-américain, aux ouvriers de tous les pays, y compris les ouvriers de l’Amérique même, qui ne veulent pas de nouvelle guerre de domination au profit de leurs propres oppresseurs.

     C’est pourquoi le nouveau cours expansionniste et réactionnaire de la politique des Etats-Unis vise à la lutte contre l’U.R.S.S., contre les pays de la nouvelle démocratie, contre le mouvement ouvrier de tous les pays, contre le mouvement ouvrier aux Etats-Unis, contre les forces anti-impérialistes de libération dans tous les pays.

     Les réactionnaires américains, inquiets des succès du socialisme en U.R.S.S., des succès des pays de la nouvelle démocratie et de la croissance du mouvement ouvrier et démocratique dans tous les pays du monde entier, après la guerre, sont enclins à se fixer comme tâche celle de  » sauver  » le système capitaliste du communisme.

     De sorte que le programme franchement expansionniste des Etats-Unis rappelle extraordinairement le programme aventurier des agresseurs fascistes, qui a misérablement échoué, agresseurs qui, comme on le sait, se considéraient naguère aussi comme des prétendants à la domination mondiale.

     Comme les hitlériens, lorsqu’ils préparaient l’agression de brigandage afin de s’assurer la possibilité d’opprimer et d’asservir tous les peuples et avant tout leur propre peuple, se masquaient de l’anticommunisme, de la même manière, les cercles dirigeants d’aujourd’hui des Etats-Unis dissimulent leur politique d’expansion et même leur offensive contre les intérêts vitaux de leur concurrent impérialiste devenu plus faible — l’Angleterre — par des tâches de pseudo-défense anticommuniste.

     La course fiévreuse aux armements, la construction de nouvelles bases et la création de places d’armes pour les forces armées américaines dans toutes les parties du monde sont justifiées par les arguments pharisiens et faux de la soi-disant  » défense  » contre le danger militaire imaginaire de la part de l’U.R.S.S.

     La diplomatie américaine agissant par les méthodes de menaces, de corruption et de chantage arrache facilement des autres pays capitalistes, et avant tout de l’Angleterre, le consentement à l’affermissement légal des positions avantageuses américaines en Europe et en Asie, dans les zones occidentales de l’Allemagne, en Autriche, en Italie, en Grèce, en Turquie, en Egypte, en Iran, en Afghanistan, en Chine, au Japon, etc.

     Les impérialistes américains, se considérant comme la force principale opposée à l’U.R.S.S., aux pays de la nouvelle démocratie, au mouvement ouvrier et démocratique de tous les pays du monde, se considérant comme le bastion des forces réactionnaires, antidémocratiques du monde entier, ont entrepris littéralement, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, de dresser contre l’U.R.S.S. et la démocratie mondiale un front hostile et d’encourager les forces réactionnaires, anti-populaires, les collaborationnistes et les anciennes créatures capitalistes dans les pays européens qui, libérés du joug hitlérien, ont commencé à organiser leur vie selon leur propre choix.

     Les politiciens impérialistes les plus enragés et déséquilibrés ont commencé, après Churchill, à dresser des plans en vue d’organiser le plus rapidement possible une guerre préventive contre l’U.R.S.S., faisant ouvertement appel à l’utilisation contre les hommes soviétiques du monopole américain temporaire de l’arme atomique.

     Les instigateurs de la nouvelle guerre tentant d’utiliser l’intimidation et le chantage non seulement envers l’U.R.S.S., mais aussi envers les autres pays, et en particulier, envers la Chine et l’Inde, présentent d’une façon calomnieuse l’U.R.S.S. comme agresseur possible, et se présentent eux-mêmes en qualité d’ » amis  » de la Chine et de l’Inde, comme  » sauveurs  » du danger communiste, appelés à  » aider  » les plus faibles. De cette façon, on accomplit la tâche de maintenir dans l’obéissance à l’impérialisme l’Inde et la Chine et de prolonger leur asservissement politique et économique.

II

NOUVELLE DISPOSITION DES FORCES POLITIQUES D’APRES-GUERRE ET FORMATION DES DEUX CAMPS

 Les changements profonds survenus dans la situation internationale et dans la situation des différents pays, à la suite de la guerre, ont modifié tout le tableau politique du monde.


Une nouvelle disposition des forces politiques s’est créée.

Plus nous nous éloignons de la fin de la guerre, et plus nettement apparaissent les deux principales directions de la politique internationale de l’après-guerre, correspondant à la disposition en deux camps principaux des forces politiques qui opèrent sur l’arène mondiale : le camp impérialiste et antidémocratique d’une part, et, d’autre part, le camp anti-impérialiste et démocratique.

Les Etats-Unis sont la principale force dirigeante du camp impérialiste. L’Angleterre et la France sont unies aux Etats-Unis.

L’existence du gouvernement travailliste Atllee-Bevin en Angleterre et celle du gouvernement socialiste Ramadier en France n’empêchent pas l’Angleterre et la France de marcher comme des satellites, en ce qui concerne les questions principales, dans l’ornière de la politique impérialiste des Etats-Unis.

Le camp impérialiste est soutenu aussi par des Etats possesseurs de colonies, tels que la Belgique et la Hollande, et par des pays au régime réactionnaire antidémocratique, tels que la Turquie et la Grèce, ainsi que par des pays dépendant politiquement et économiquement des Etats-Unis, tel que le Proche-Orient, l’Amérique du Sud, la Chine. 

     Le but principal du camp impérialiste consiste à renforcer l’impérialisme, à préparer une nouvelle guerre impérialiste, a lutter contre le socialisme et la démocratie et à soutenir partout les régimes et mouvements pro-fascistes réactionnaires et antidémocratiques.

     Pour réaliser ces tâches, le camp impérialiste est prêt à s’appuyer sur les forces réactionnaires et antidémocratiques dans tous les pays et à soutenir les ennemis de la guerre d’hier contre ses alliés de guerre.

     Les forces anti-impérialistes et antifascistes forment l’autre camp. L’U.R.S.S. et les pays de la nouvelle démocratie en sont le fondement.

Les pays qui ont rompu avec l’impérialisme et qui se sont résolument engagés dans la voie du développement démocratique, tels que la Roumanie, la Hongrie, la Finlande, en font partie. Au camp anti-impérialiste adhèrent l’Indonésie, le Vietnam, l’Inde ; l’Egypte et la Syrie y apportent leurs sympathies. Le camp anti-impérialiste s’appuie dans tous les pays sur le mouvement ouvrier et démocratique, sur les Partis Communistes frères, sur les combattants du mouvement de libération nationale dans les pays coloniaux et dépendants, sur toutes les forces progressives et démocratiques qui existent dans chaque pays.

Le but de ce camp consiste à lutter contre les menaces de nouvelles guerres. et d’expansion impérialiste, pour l’affermissement de la démocratie et pour l’extirpation des restes du fascisme. 

     La fin de la Deuxième Guerre mondiale a placé les peuples épris de liberté devant l’importante tâche d’assurer une paix démocratique durable, consolidant la victoire sur le fascisme.

C’est à l’Union Soviétique et à sa politique extérieure qu’appartient le rôle dirigeant dans la solution de cette tâche principale d’après-guerre.

Cela provient de la nature de l’Etat soviétique socialiste, profondément étranger à tous les mobiles agressifs et exploiteurs, et intéressé à créer les conditions les plus favorables pour réaliser l’édification de la société communiste.

L’une de ces conditions, c’est la paix.

En tant que nouveau système social supérieur, l’Union Soviétique reflète, dans sa politique extérieure, les espoirs de toute l’humanité progressive, qui aspire à une paix durable et ne peut être intéressée à une nouvelle guerre engendrée par le capitalisme.

L’Union Soviétique, fidèle combattant de la liberté et de l’indépendance pour tous les peuples, est l’ennemie de l’oppression nationale et raciale, de l’exploitation coloniale sous toutes ses formes.

Le changement survenu à la suite de la Deuxième Guerre mondiale dans le rapport des forces entre le monde capitaliste et le monde socialiste de l’Etat soviétique a élargi le rayon de son activité politique extérieure.

     C’est autour de la tâche consistant à assurer la paix démocratique juste que s’est opéré le ralliement de toutes les forces du camp anti-impérialiste et antifasciste.

C’est sur cette base qu’a pris naissance et que s’est renforcée la coopération amicale de l’U.R.S.S. avec les pays démocratiques à l’égard de tous les problèmes de politique extérieure.

Ces pays, et tout d’abord les pays de la nouvelle démocratie : la Yougoslavie, la Pologne, la Tchécoslovaquie, l’Albanie, qui ont joué un rôle important dans la guerre libératrice contre le fascisme, ainsi que la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie, partiellement la Finlande, qui ont rejoint le front antifasciste — sont devenus dans l’après-guerre, de fermes combattants pour la paix, pour la démocratie, pour la liberté et l’indépendance contre toutes les tentatives faites par les Etats-Unis et l’Angleterre pour faire retourner leur développement en arrière et les placer de nouveau sous le joug impérialiste.

     Les succès et l’augmentation du prestige international du camp démocratique ne sont pas du goût des impérialistes. Déjà, pendant la Deuxième Guerre mondiale, en Angleterre et aux Etats-Unis, l’activité des forces réactionnaires s’est accrue infailliblement, s’efforçant de briser l’action coordonnée des puissances alliées, de faire traîner la guerre en longueur, de saigner à blanc l’U.R.S.S. et de sauver les agresseurs fascistes de la débâcle complète.

Le sabotage du deuxième front de la part des impérialistes anglo-saxons, Churchill en tête, reflétait nettement cette tendance, qui n’est, au fond, que la continuation de la politique de  » Munich  » dans la nouvelle situation changée.

Mais, tant que la guerre durait, les cercles réactionnaires d’Angleterre et des Etats-Unis n’osaient pas intervenir ouvertement contre l’Union Soviétique et les pays démocratiques, comprenant très bien que, dans tous les pays, la sympathie des masses populaires allait sans réserve à l’U.R.S.S. et aux pays démocratiques.

Mais, dès les derniers mois qui précédèrent la fin de la guerre, la situation commença à se modifier.

Déjà, au cours des pourparlers à la Conférence des Trois Puissances, à Berlin, en juillet 1945, les impérialistes anglo-américains ont montré leur désir de ne pas tenir compte des intérêts légitimes de l’U.R.S.S. et des pays démocratiques.

     Au cours des deux dernières années, la politique extérieure de l’Union Soviétique et des pays démocratiques a été une politique de lutte pour la réalisation conséquente des principes démocratiques d’après-guerre.

Les Etats du camp anti-impérialiste se sont montrés de fidèles et conséquents combattants pour la réalisation de ces principes, sans en dévier d’un seul point.

C’est pourquoi la tâche principale de la politique extérieure des Etats démocratiques d’après-guerre est de lutter pour une paix démocratique, de liquider les restes du fascisme et d’empêcher une nouvelle agression fasciste impérialiste, de lutter pour l’affermissement des principes d’égalité des droits et le respect de la souveraineté des peuples, pour la réduction générale des armements et l’interdiction de tout genre d’armes de grande destruction, destinées à l’extermination en masse de la population paisible.

Dans la mise en application de toutes ces tâches, la diplomatie soviétique et la diplomatie des Etats démocratiques se sont heurtées à la résistance de la diplomatie anglo-américaine qui, après guerre, suit infailliblement et conséquemment une ligne visant à renoncer à tous les principes communs proclamés pendant la guerre par les Alliés pour l’organisation de la paix d’après-guerre, une ligne tendant à remplacer cette politique de paix et d’affermissement de la démocratie par une nouvelle politique ayant pour but de rompre la paix générale, d’assurer la défense des éléments fascistes et de persécuter la démocratie dans tous les pays.

     L’activité commune de la diplomatie de l’U.R.S.S. et de la diplomatie des Etats démocratiques visant à résoudre le problème de la réduction des armements et l’interdiction de l’arme la plus destructrice — la bombe atomique — a une grande signification.

     Sur l’initiative de l’Union Soviétique, il a été fait une proposition à l’Organisation des Nations Unies pour la réduction générale des armements et pour la reconnaissance, comme tâche de premier plan, de l’interdiction de la production et de l’utilisation de l’énergie atomique pour des buts de guerre.

Cette proposition du Gouvernement soviétique se heurta à une résistance acharnée de la part des Etats-Unis et de l’Angleterre.

Tous les efforts des milieux impérialistes ont été dirigés en vue de saboter cette décision.

Cela s’est exprimé par toutes sortes de barrières et d’atermoiements sans fin et stériles dans l’intention d’empêcher toutes mesures pratiques effectives.

L’activité des délégués de l’U.R.S.S. et de ceux des pays démocratiques dans les organes de l’Organisation des Nations Unies porte un caractère de lutte quotidienne, systématique, opiniâtre en faveur des principes démocratiques de coopération internationale et pour dévoiler les intrigues des comploteurs impérialistes contre la paix et la sécurité des peuples.

     Cela se manifeste de façon particulièrement visible, par exemple, dans l’examen de la situation aux frontières septentrionales de la Grèce.

L’Union Soviétique et la Pologne sont intervenues ensemble, énergiquement, contre l’utilisation du Conseil de Sécurité un vue de discréditer la Yougoslavie, la Bulgarie, l’Albanie, faussement accusées par les impérialistes d’actes d’agression contre la Grèce.

     La politique extérieure soviétique a pour point de départ le fait de la coexistence, pour une longue période, des deux systèmes, le capitalisme etle socialisme.

De là découle la possibilité de coopération entre l’U.R.S.S. et les pays possédant un autre système, à condition de respecter le principe de réciprocité et d’exécuter les engagements pris.

On sait que l’U.R.S.S. a toujours été et reste fidèle à ses engagements.

L’Union Soviétique a montré sa volonté et son désir de coopération.

     Ã€ l’Organisation des Nations Unies, l’Angleterre et l’Amérique mènent une politique complètement opposée.

Elles font tout pour renoncer à leurs engagements, pris antérieurement, et pour se délier les mains, afin de mener une nouvelle politique, non pas dans l’esprit de coopération des peuples, mais pour les dresser les uns contre les autres, politique visant à violer les droits et les intérêts des peuples démocratiques et à isoler l’U.R.S.S.

     La politique soviétique suit la ligne d’entretien loyal des rapports de bon voisinage avec tous les Etats qui montrent leur désir de coopérer.

L’Union Soviétique a toujours été, est et sera toujours une amie fidèle et une alliée envers les pays qui sont ses véritables amis et alliés. La politique extérieure soviétique vise à une extension ultérieure de l’aide amicale de la part de l’Union Soviétique à ces pays.

     Défendant la cause de la paix, la politique extérieure de l’U.R.S.S. rejette le principe de vengeance envers les peuples vaincus.

     Comme on le sait, l’U.R.S.S. est pour la formation d’une Allemagne unie, éprise de liberté, démilitarisée, démocratique. Formulant la politique soviétique envers l’Allemagne, le camarade Staline a dit :

      » Bref, la politique de l’Union Soviétique dans le problème allemand se résume à la démilitarisation et à la démocratisation de l’Allemagne…

La démilitarisation et la démocratisation de l’Allemagne sont une des plus importantes conditions pour instaurer une paix durable et solide. « 

     Cependant, cette politique de l’Etat soviétique envers l’Allemagne se heurte à une résistance effrénée des milieux impérialistes des Etats-Unis et d’Angleterre.

     La session du Conseil des ministres des Affaires étrangères, qui s’est tenue à Moscou en mars-avril 1947, a montré que les Etats-Unis, l’Angleterre et la France sont prêts, non seulement à faire échec à la démocratisation et à la démilitarisation de l’Allemagne, mais aussi à liquider l’Allemagne en tant qu’Etat uni, à la démembrer et à résoudre séparément le problème de la paix.

     La réalisation de cette politique s’effectue actuellement dans de nouvelles conditions, alors que l’Amérique a rompu avec l’ancien cours de Roosevelt et passe à une nouvelle politique, à une politique de nouvelles aventures militaires.

 III

LE PLAN AMERICAIN D’ASSERVISSEMENT DE L’EUROPE

      Le passage de l’impérialisme américain au cours agressif et ouvertement expansionniste depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, a trouvé son expression tant dans la politique extérieure des Etats-Unis que dans leur politique intérieure.

Le soutien actif des forces réactionnaires et antidémocratiques dans le monde entier, la mise en échec des décisions de Potsdam visant à la démocratisation et à la démilitarisation de l’Allemagne, la protection des réactionnaires japonais, l’extension des préparatifs militaires, l’accumulation des réserves de bombes atomiques, tout cela s’accompagne d’une offensive contre les droits démocratiques élémentaires des travailleurs a l’intérieur des Etats-Unis.

     Bien que les Etats-Unis aient été relativement peu touchés par la guerre, la majorité écrasante des Américains ne veut pas d’une nouvelle guerre et des sacrifices et restrictions qui en découlent.

Cela incite le capital monopoliste et ses serviteurs parmi les cercles dirigeants des Etats-Unis à chercher des moyens extraordinaires pour briser l’opposition intérieure à ce cours expansionniste et agressif, et ainsi se laisser les mains libres pour continuer à mener cette politique dangereuse.

     Mais la campagne contre le communisme, proclamée par les milieux dirigeants américains, s’appuyant sur les monopoles capitalistes, aboutit, avec une inévitable logique, à la violation des droits et des intérêts vitaux des travailleurs américains, à la fascisation intérieure de la vie politique des Etats-Unis, à la diffusion des  » théories  » et notions misanthropes les plus sauvages.

Nourrissant des rêves de préparation d’une troisième guerre mondiale, les milieux expansionnistes américains sont profondément intéressés à étouffer à l’intérieur du pays toute résistance possible aux aventures extérieures, à empoisonner de chauvinisme et de militarisme les masses politiquement arriérées et peu cultivées des Américains moyens, à abrutir le petit bourgeois américain à l’aide des moyens les plus divers de propagande antisoviétique, anticommuniste, par exemple le cinéma, la radio, l’église, la presse.

     La politique extérieure expansionniste, inspirée et menée par la réaction américaine, prévoit une activité simultanée dans toutes les directions :

     1o Mesures militaires stratégiques ;

     2o Expansion économique ;

     3o Lutte idéologique.

     La réalisation des plans militaires stratégiques de futures agressions est liée aux efforts pour utiliser au maximum l’appareil de production militaire des Etats-Unis, qui s’est accru considérablement vers la fin de la Deuxième Guerre mondiale.

L’impérialisme américain mène une politique conséquente de militarisation du pays.

Aux Etats-Unis, les dépenses pour l’armée et la flotte dépassent 11 milliards de dollars par an. En 1947-48, les Etats-Unis ont assigné pour l’entretien de leurs forces armées 35 % du budget, soit onze fois plus qu’en 1937-38.

     Si, au début de la Deuxième Guerre mondiale, l’armée des Etats-Unis occupait la 17e place de tous les pays capitalistes, actuellement elle occupe la première place.

Parallèlement à l’accumulation des bombes atomiques, les stratèges américains ne se gênent pas pour dire qu’aux Etats-Unis se font des préparatifs pour l’arme bactériologique.

     Le plan militaire stratégique des Etats-Unis prévoit la création, en temps de paix, de nombreuses bases et places d’armes, très éloignées du continent américain et destinées à être utilisées dans des buts d’agression contre l’U.R.S.S. et les pays de la nouvelle démocratie.

Les bases américaines militaires, aériennes et navales, existent ou sont de nouveau en voie de création en Alaska, au Japon, en Italie, au sud de la Corée, en Chine, en Egypte, en Iran, en Turquie, en Grèce, en Autriche et en Allemagne occidentale.

Une mission militaire américaine opère en Afghanistan et même au Népal. Des préparatifs se font fiévreusement pour utiliser l’Arctique en vue d’une agression militaire.

     Bien que la guerre soit déjà finie depuis longtemps, l’alliance militaire entre l’Angleterre et les Etats-Unis subsiste encore, de même que l’état-major anglo-américain unifié des forces armées.

Sous l’enseigne de la convention sur la standardisation des armements, les Etats-Unis ont étendu leur contrôle sur les forces armées et les plans militaires des autres pays, en premier lieu de l’Angleterre et du Canada.

Sous l’enseigne de la défense commune de l’hémisphère occidental, les pays de l’Amérique latine sont en voie d’entrer dans l’orbite des plans d’expansion militaire des Etats-Unis.

Le gouvernement des Etats-Unis a annoncé que sa tâche officielle était d’aider à la modernisation de l’armée turque.

L’armée du Kuomintang réactionnaire fait son instruction avec des officiers américains et reçoit du matériel américain.

La clique militaire devient une force politique active aux Etats-Unis, dont elle fournit, sur une grande échelle, les hommes d’Etat et les diplomates qui suivent une ligne militariste agressive dans toute la politique du pays.

     L’expansion économique des Etats-Unis complète d’une façon importante la réalisation du plan stratégique. L’impérialisme américain s’efforce, comme un usurier, d’exploiter les difficultés d’après-guerre des pays européens, surtout la pénurie de matières premières, de combustibles et de denrées alimentaires dans les pays alliés qui ont le plus souffert de la guerre, pour leur dicter ses conditions asservissantes de secours.

En prévision de la crise économique imminente, les Etats-Unis s’empressent de trouver de nouvelles sphères de monopole pour l’investissement des capitaux et pour l’écoulement des marchandises. Le  » secours  » économique des Etats-Unis a pour but d’asservir l’Europe au capital américain.

Plus la situation économique d’un pays est grave, plus les monopoles américains s’efforcent de lui dicter de dures conditions.

     Mais le contrôle économique entraîne aussi avec lui une dépendance politique de l’impérialisme américain.

Ainsi, l’extension des sphères d’écoulement des marchandises américaines se combine pour les Etats-Unis avec l’acquisition de nouvelles places d’armes propices à la lutte contre les nouvelles forces démocratiques de l’Europe.

En  » sauvant  » un pays de la famine et de la ruine, les monopoles américains ont le dessein de le priver de toute indépendance.

L’ » aide  » américaine entraîne presque automatiquement des modifications de la ligne politique du pays qui reçoit cette  » aide  » : viennent au pouvoir des partis et des personnalités qui, obéissant aux directives de Washington, sont prêts à réaliser, dans leur politique intérieure et extérieure, le programme désiré par les Etats-Unis (France, Italie, etc.)

     Enfin, les aspirations des Etats-Unis à la domination mondiale et leur ligne antidémocratique comportent aussi une lutte idéologique.

La tâche principale de la partie idéologique du plan stratégique américain consiste à user du chantage envers l’opinion publique, à répandre des calomnies sur la prétendue agressivité de l’Union Soviétique et des pays de la nouvelle démocratie, afin de pouvoir ainsi présenter le bloc anglo-saxon dans le rôle d’un bloc de prétendue défense et le décharger de la responsabilité dans la préparation de la nouvelle guerre.

La popularité de l’Union Soviétique à l’étranger s’est considérablement accrue pendant la Deuxième Guerre mondiale. Par sa lutte héroïque, pleine d’abnégation, contre l’impérialisme, l’Union Soviétique a gagné l’amour et le respect des travailleurs de tous les pays.

La puissance militaire et économique de l’Etat socialiste et la force indestructible de l’unité morale et politique de la société soviétique ont été démontrées clairement à la face du monde entier.

Les milieux réactionnaires des Etats-Unis et de l’Angleterre se demandent avec souci comment dissiper l’impression inoubliable que le régime socialiste produit sur les ouvriers et les travailleurs du monde entier.

Les instigateurs de guerre se rendent très bien compte que, pour envoyer les soldats combattre contre l’Union Soviétique, une longue préparation idéologique est nécessaire.

     Dans leur lutte idéologique contre l’U.R.S.S., les impérialistes américains, qui s’orientent mal dans les problèmes politiques et montrent leur ignorance, mettent en avant tout d’abord l’image représentant l’Union Soviétique comme une force soit-disant antidémocratique, totalitaire, tandis que les Etats-Unis, l’Angleterre et tout le monde capitaliste sont présentés comme des démocraties.

     Cette plate-forme de la lutte idéologique — défense de la pseudo-démocratie bourgeoise et attribution au communisme de traits totalitaires — unit tous les ennemis de la classe ouvrière sans exception, depuis les magnats capitalistes jusqu’aux leaders socialistes de droite qui, avec un grand empressement, s’emparent de n’importe quelle calomnie antisoviétique, dictée par leurs maîtres impérialistes.

Le pivot de cette propagande fourbe réside dans l’affirmation que l’existence de plusieurs partis et d’une minorité oppositionnelle organisée serait l’indice d’une démocratie véritable. Sur cette base, les  » travaillistes  » anglais, ne ménageant pas leurs forces pour lutter contre le communisme, auraient voulu déceler qu’il y a, en U.R.S.S., des classes antagonistes et une lutte de partis correspondante.

Ignorants en politique, ils ne peuvent pas arriver à comprendre que, depuis longtemps déjà, il n’y a plus en U.R.S.S. de capitalistes et de propriétaires fonciers, qu’il n’y a plus de classes antagonistes et, partant, qu’il ne pourrait y exister plusieurs partis.

Ils auraient voulu avoir en U.R.S.S. des partis chers à leurs cœurs, des partis bourgeois, y compris des partis pseudo-socialistes, en tant qu’agence impérialiste.

Mais, pour leur malheur, l’histoire a condamné ces partis bourgeois exploiteurs à disparaître.

     Ne ménageant pas les mots pour monter des calomnies contre le régime soviétique, les  » travaillistes  » et autres avocats de la démocratie bourgeoise trouvent en même temps tout à fait normale la dictature sanglante de la minorité fasciste sur le peuple en Grèce et en Turquie ; ils ferment les yeux sur les nombreuses infractions révoltantes aux normes mêmes de la démocratie formelle dans les pays bourgeois ; ils passent sous silence le joug national et racial, la corruption, l’usurpation sans cérémonie des droits démocratiques aux Etats-Unis.

     L’une des lignes de la  » campagne  » idéologique qui accompagne les plans d’asservissement de l’Europe est l’attaque contre les principes de souveraineté nationale, l’appel à renoncer aux droits souverains des peuples, auxquels on oppose l’idée d’un  » gouvernement mondial « .

Le sens de cette campagne consiste à embellir l’expansion effrénée de l’impérialisme américain qui, sans cérémonie, porte atteinte aux droits souverains des peuples, et à présenter les Etats-Unis dans le rôle de champion des lois humaines, tandis que ceux qui résistent à la pénétration américaine sont présentés en partisans d’un nationalisme  » égoïste  » périmé. L’idée d’un  » gouvernement mondial « , reprise par les intellectuels bourgeois rêveurs et pacifistes, est utilisée non seulement comme moyen de pression en vue de désarmer moralement les peuples qui défendent leur indépendance contre les attentats de l’impérialisme américain, mais aussi comme mot d’ordre spécialement opposé à l’Union Soviétique, qui défend infatigablement et conséquemment le principe d’une réelle égalité des droits et de la protection des droits souverains de tous les peuples grands et petits.

Dans les conditions actuelles, les pays impérialistes tels que les Etats-Unis, l’Angleterre et les Etats qui leur sont proches, deviennent des ennemis dangereux de l’indépendance nationale et de l’autodétermination des peuples, tandis que l’Union Soviétique et les pays à nouvelle démocratie constituent le rempart sûr dans la défense de l’égalité des droits et de l’autodétermination nationale des peuples.

     Il est tout à fait caractéristique que les éclaireurs militaires et politiques américains, du genre Bullitt, les leaders syndicaux jaunes du genre Green, les socialistes français avec Blum, l’apologiste fieffé du capitalisme en tête, le social-démocrate allemand Schumacher, et les leaders travaillistes du type Bevin, collaborent étroitement à la réalisation du plan idéologique établi par l’impérialisme américain.

     La  » doctrine Truman  » et le  » plan Marshall  » sont, dans les conditions actuelles aux Etats-Unis, l’expression concrète des efforts expansionnistes.

Au fond, ces deux documents sont l’expression d’une même politique, bien qu’ils se distinguent par la forme sous laquelle y est présentée une même et seule prétention américaine d’asservir l’Europe.

     En ce qui concerne l’Europe, les principales lignes de la  » doctrine Truman  » sont les suivantes :

     1o Création de bases américaines dans la partie orientale du bassin méditerranéen, afin d’affermir la domination américaine dans cette zone ;

     2o Soutien démonstratif des régimes réactionnaires en Grèce et en Turquie, en tant que bastions de l’impérialisme américain contre la nouvelle démocratie dans les Balkans (aide militaire et technique à la Grèce et à la Turquie, octroi d’emprunts) ;

     3o Pression ininterrompue sur les Etats à nouvelle démocratie, ce qui s’exprime par de fausses accusations de totalitarisme et d’aspirations expansionnistes, par les attaques contre les fondements du nouveau régime démocratique, par l’immixtion continuelle dans les affaires intérieures de ces Etats, par le soutien de tous les éléments antidémocratiques à l’intérieur de ces pays — éléments qui luttent contre l’Etat par la cessation démonstrative des rapports économiques avec ces pays en vue de créer à ces derniers des difficultés économiques, de freiner leur développement économique, de faire échec à leur industrialisation, etc.

     La  » doctrine Truman  » qui prévoit l’offre de l’aide américaine à tous les régimes réactionnaires, qui agissent de façon active contre les peuples démocratiques, porte un caractère ouvertement agressif.

Sa publication a provoqué une certaine gêne même dans les milieux des capitalistes américains habitués à n’importe quoi.

Aux Etats-Unis et dans d’autres pays, les éléments progressistes ont protesté énergiquement contre le caractère provoquant, ouvertement impérialiste, de l’intervention Truman.

     L’accueil défavorable qui a été fait à la  » doctrine Truman  » a rendu nécessaire le  » plan Marshall « , qui est une tentative plus voilée de mener cette même politique d’expansion.

     Le fond des formules voilées, embrouillées intentionnellement du  » plan Marshall  » consiste à former un bloc d’Etats liés aux Etats-Unis par des engagements et à offrir aux Etats européens des crédits américains, en paiement de la renonciation à leur indépendance économique et ensuite à leur indépendance politique. L’essentiel du  » plan Marshall  » est donc de reconstruire les régions industrielles de l’Allemagne occidentale, contrôlées par les monopoles américains.

     Il ressort des délibérations qui se sont succédé et des interventions des hommes d’Etat américains que l’objet du  » plan Marshall  » n’est pas une offre de secours, tout d’abord aux pays vainqueurs appauvris, alliés de l’Amérique dans la lutte contre l’Allemagne, mais une offre de secours aux capitalistes allemands, afin que ceux-ci, tenant en main les sources principales de charbon et de métal nécessaires à l’Europe et à l’Allemagne, les Etats qui ont besoin de charbon et de métal soient placés sous la dépendance de la puissance économique de l’Allemagne en voie de restauration.

     Malgré le fait que le  » plan Marshall  » prévoit l’abaissement de l’Angleterre, ainsi que celui de la France, à l’état de puissances de second ordre, le gouvernement travailliste d’Attlee en Angleterre et le gouvernement socialiste de Ramadier en France, se sont accrochés au  » plan Marshall  » comme à une planche de salut.

On sait que l’Angleterre a déjà presque dépensé l’emprunt américain de 3.750 millions de dollars qui lui fut octroyé en 1946.

On sait aussi que l’Angleterre a eu les pieds et les mains liés par les conditions asservissantes de cet emprunt. Le gouvernement travailliste de l’Angleterre, serré comme dans un nœud coulant par sa dépendance financière envers les Etats-Unis ne voit d’autre issue, pour en sortir, que l’obtention de nouveaux emprunts.

C’est pourquoi il a accueilli le  » plan Marshall  » comme une issue à l’impasse économique, comme une chance d’obtenir de nouveaux crédits.

En outre, les hommes politiques anglais avaient compté sur la création du bloc des pays de l’Europe occidentale — pays débiteurs des Etats-Unis — afin d’essayer de jouer à l’intérieur de ce bloc le rôle d’un gérant en chef américain qui pourrait, à la rigueur, un tirer profit au détriment des pays faibles.

La bourgeoisie anglaise avait caressé le rêve qu’en utilisant le  » plan Marshall « , en rendant des services aux monopoles américains et en se soumettant à leur contrôle, elle recouvrerait ses positions perdues dans certains pays et, en particulier, rétablirait ses positions dans les régions balkano-danubiennes.

     Afin de donner extérieurement une plus grande apparence  » d’objectivité  » aux propositions américaines, il avait été décidé d’inclure, au nombre des initiateurs devant préparer la réalisation du  » plan Marshall « , la France, qui avait déjà sacrifié à moitié sa souveraineté nationale en faveur des Etats-Unis, puisque l’octroi du crédit à la France, en mai 1947, de la part des Etats-Unis, avait été conditionné par l’éloignement des communistes du gouvernement. 

     Suite à la directive de Washington, les gouvernements d’Angleterre et de France avaient proposé à l’Union Soviétique de participer à l’examen des propositions Marshall. Une telle démarche devait masquer le caractère hostile à l’U.R.S.S. de ces propositions. Sachant bien d’avance que l’U.R.S.S. se refuserait à discuter les propositions d’aide américaine selon les conditions formulées par Marshall, on avait fait le calcul d’en profiter pour essayer de mettre à la charge de l’U.R.S.S. la responsabilité du  » refus de contribuer à la reconstruction économique de l’Europe « , et de cette façon dresser contre l’U.R.S.S. les pays européens qui ont besoin d’un secours réel.

Si, par contre, l’U.R.S.S. acceptait de participer aux pourparlers, il serait facile de faire tomber dans le piège de  » la reconstruction économique de l’Europe avec l’aide de l’Amérique  » les pays de l’Est et du Sud-Est de l’Europe. Pendant que le  » plan Truman  » misait sur l’intimidation terroriste de ces pays, le  » plan Marshall  » avait comme objectif de sonder la fermeté de leur situation économique, de tenter de les séduire et de les lier ensuite par le  » secours  » du dollar.

     Le  » plan Marshall  » était appelé, dans ce cas donné, à contribuer à la réalisation de l’une des tâches les plus importantes du programme américain général : restaurer le pouvoir de l’impérialisme dans les pays de la nouvelle démocratie, obliger ces pays à renoncer à leur coopération économique et politique étroite avec l’Union Soviétique.

     Les représentants de l’U.R.S.S., ayant consenti à examiner à Paris, avec les gouvernements de l’Angleterre et de la France, les propositions de Marshall, ont démasqué, à la Conférence de Paris, le manque de fondement de la tâche visant à l’élaboration d’un programme économique pour toute l’Europe.

Ils ont dévoilé, dans la tentative de créer une nouvelle organisation européenne sous l’égide de la France et de l’Angleterre, une menace d’immixtion dans les affaires intérieures des pays européens et de violation de leur souveraineté.

Ils ont démontré que le  » plan Marshall  » est en contradiction avec les principes normaux de coopération internationale, qu’il porte dans son sein la scission de l’Europe, la menace d’assujettissement d’un certain nombre de pays européens aux intérêts du capitalisme américain et qu’il est basé sur l’octroi préférentiel, par rapport aux Alliés, de secours aux consortiums et monopoles allemands à la reconstitution desquels le  » plan Marshall  » réserve avec évidence un rôle particulier en Europe.

     Cette position claire de l’Union Soviétique a enlevé le masque au plan des impérialistes américains et de leurs commis anglo-français.

     La Conférence européenne a subi un échec scandaleux.

Huit Etats européens ont refusé d’y participer.

Mais il y a eu aussi, parmi les Etats qui avaient accepté de participer à l’examen du  » plan Marshall  » et à l’élaboration de mesures concrètes pour sa réalisation, un certain nombre de pays qui n’ont pas fait un accueil particulièrement enthousiaste à ce  » plan « , d’autant plus qu’on s’est bientôt aperçu que les suppositions de l’U.R.S.S. étaient entièrement justes, c’est-à-dire que ce plan est loin de comporter une aide effective et réelle.

Il se trouve que le gouvernement des Etats-Unis ne se presse pas du tout de réaliser les promesses de Marshall.

Des personnalités politiques américaines du Congrès ont reconnu que ce dernier ne discuterait pas avant 1948 les nouvelles sommes allouées pour les crédits promis à quelques pays européens.

     Ainsi, il est devenu évident que l’Angleterre, la France et d’autres Etats de l’Europe occidentale, qui ont accepté le  » schéma parisien de réalisation  » du  » plan Marshall « , sont tombés eux-mêmes victimes du chantage américain.

     Cependant, les tentatives de former un bloc occidental sous l’égide de l’Amérique continuent.

     Il faut noter que la variante américaine du bloc occidental ne peut pas ne pas rencontrer de sérieuses oppositions, même dans les pays qui dépendent déjà des Etats-Unis, tels que l’Angleterre et la France.

La perspective de restaurer l’impérialisme allemand en tant que force réelle capable de s’opposer à la démocratie et au communisme en Europe ne peut séduire ni l’Angleterre ni la France.

Nous nous trouvons là en présence d’une des principales contradictions intérieures du bloc Angleterre-Etats-Unis-France. Visiblement, les monopoles américains, comme toute la réaction internationale, n’estiment pas que Franco ou encore les fascistes grecs soient un rempart un tant soit peu sûr des Etats-Unis contre l’U.R.S.S. et les nouvelles démocraties en Europe.

C’est pourquoi ils nourrissent des espoirs particuliers sur la restauration de l’Allemagne capitaliste, considérant qu’elle constituerait la plus importante garantie pour le succès de la lutte contre les forces démocratiques en Europe. Ils n’ont confiance ni dans les  » travaillistes  » en Angleterre, ni dans les socialistes en France, estimant que, malgré toute leur complaisance, ils sont des  » semi-communistes  » n’ayant pas suffisamment mérité la confiance.

     C’est pourquoi la question allemande, et en particulier celle du bassin de la Ruhr, base du potentiel militaire et industriel du bloc hostile à l’U.R.S.S., est la plus importante de la politique internationale et fournit un sujet de litige entre les Etats-Unis, l’Angleterre et la France.

     Les appétits des impérialistes américains ne peuvent pas ne pas provoquer de sérieuses inquiétudes en Angleterre et en France.

Les Etats-Unis ont fait comprendre d’une manière non équivoque qu’ils veulent prendre la Ruhr aux Anglais.

Les impérialistes américains exigent aussi la fusion des trois zones d’occupation et veulent établir ouvertement l’isolement politique de l’Allemagne occidentale sous le contrôle américain.

Les Etats-Unis insistent pour que le niveau de production de l’acier soit élevé dans le bassin de la Ruhr sur la base du maintien des entreprises capitalistes sous l’égide des Etats-Unis.

Les crédits promis par Marshall pour la reconstruction de l’Europe sont compris à Washington de préférence comme aide aux impérialistes allemands.

     Ainsi apparaît le  » bloc occidental  » qu’est en train de forger l’Amérique, non d’après le modèle du plan Churchill des Etats-Unis d’Europe, qui fut conçu comme instrument de la politique anglaise, mais comme protectorat américain dans lequel les Etats souverains d’Europe, y compris l’Angleterre elle-même, auront à jouer un rôle qui n’est pas si éloigné du rôle du fameux  » 49e Etat d’Amérique « .

L’impérialisme américain traite l’Angleterre et la France de plus en plus insolemment et cyniquement. Les délibérations à deux et à trois sur les problèmes concernant la fixation du niveau de production industrielle de l’Allemagne occidentale (Angleterre-Etats-Unis, Etats-Unis-France), qui enfreignent arbitrairement les décisions de Potsdam, prouvent en même temps que les Etats-Unis ne tiennent nullement compte des intérêts vitaux de leurs partenaires en pourparlers. L’Angleterre, et surtout la France sont obligées d’entendre le diktat américain et de l’accepter avec résignation.

La conduite de la diplomatie américaine à Londres et à Paris, sous maints aspects, rappelle celle que l’on observe en Grèce, où les représentants américains n’estiment plus du tout nécessaire de respecter les convenances, nomment et déplacent comme bon leur semble les ministres grecs et se conduisent en conquérants.

Ainsi, le nouveau plan de  » dawisation  » de l’Europe est, au fond, dirigé contre les intérêts fondamentaux des peuples d’Europe ; c’est un plan d’asservissement et d’assujettissement de l’Europe aux Etats-Unis.

     Le  » plan Marshall  » est dirigé contre l’industrialisation des pays démocratiques de l’Europe et, par conséquent, contre les fondements de leur indépendance.

En son temps, le plan de  » dawisation  » de l’Europe fut mis en échec, alors que les forces de la résistance au plan Dawes étaient bien inférieures à celles d’aujourd’hui. Maintenant, dans l’Europe d’après-guerre, il existe un nombre parfaitement suffisant de forces, sans parler de l’Union Soviétique, qui, si elles manifestent leur volonté et leur décision, peuvent faire échec à ce plan d’asservissement.

Il n’est question pour les peuples d’Europe que de faire preuve de volonté de résistance, d’être prêts à la résistance.

En ce qui concerne l’U.R.S.S., elle mettra toutes ses forces à empêcher la réalisation de ce plan.

     L’appréciation que les pays du camp anti-impérialiste ont donnée du  » plan Marshall  » a été entièrement confirmée par la marche des événements.

Le camp des pays démocratiques s’est montré vis-à-vis du  » plan Marshall  » comme une force puissante qui veille à la sauvegarde de l’indépendance et de la souveraineté de tous les peuples européens, une force qui ne se laisse pas influencer par le chantage et l’intimidation, et qui, de même, ne se laisse pas tromper par les fausses manœuvres de la diplomatie du dollar.

     Le gouvernement soviétique n’a jamais fait d’objection à l’utilisation de crédits étrangers, en particulier américains, en tant que moyen capable d’accélérer le processus de la reconstruction économique. Cependant, l’Union Soviétique s’en tient toujours à ce principe que les conditions de crédit ne portent pas un caractère d’asservissement, ne conduisent pas à l’asservissement économique et politique de l’Etat débiteur par l’Etat créditeur.

Ayant comme point de départ cette orientation politique, l’Union Soviétique a toujours défendu la position suivant laquelle les crédits étrangers ne doivent pas être l’instrument principal de la reconstitution de l’économie du pays.

La condition fondamentale et décisive de la reconstruction économique doit consister dans l’utilisation des ressources intérieures de chaque pays et dans la création de sa propre industrie.

Sur une telle base seulement peut être assurée l’indépendance du pays contre les atteintes de la part du capital étranger qui manifeste constamment sa tendance à utiliser le crédit comme instrument d’asservissement politique et économique.

Tel est précisément le  » plan Marshall « , dirigé contre l’industrialisation des pays européens et visant, par conséquent, à saper leur indépendance.

 IV

LES TÂCHES DES PARTIS COMMUNISTES POUR LE RASSEMBLEMENT DE TOUS LES ÉLÉMENTS DÉMOCRATIQUES, ANTIFASCISTES ET AMIS DE LA PAIX, DANS LA LUTTE CONTRE LES NOUVEAUX PLANS DE GUERRE ET D’AGRESSION

 L’Union Soviétique défend inlassablement la thèse que les rapports politiques et économiques réciproques entre les différents Etats doivent s’édifier exclusivement sur les principes d’égalité des droits de chaque Etat et le respect réciproque de leur souveraineté.


La politique extérieure soviétique, et en particulier les rapports économiques soviétiques avec les Etats étrangers sont basés sur le principe d’égalité des droits, assurant dans les accords conclus des avantages bilatéraux. Les traités avec l’U.R.S.S. constituent des accords réciproquement avantageux pour les parties contractantes.

Ils ne contiennent jamais rien qui pourrait porter atteinte à l’indépendance de l’Etat, à la souveraineté nationale des parties contractantes. Cette distinction fondamentale des accords de l’U.R.S.S. avec les autres Etats saute nettement aux yeux, surtout maintenant à la lumière des accords injustes, basés sur l’inégalité des droits, que les Etats-Unis concluent et préparent.

     La politique commerciale extérieure de l’Union Soviétique ne connaît pas d’accords fondés sur l’inégalité des droits.

Bien plus, le développement des rapports économiques de l’U.R.S.S. avec tous les Etats intéressés montre sur quelle base doivent s’établir des rapports normaux entre les Etats.

Il suffit de rappeler les traités que l’U.R.S.S. a conduis récemment avec la Pologne, la Yougoslavie, la Tchécoslovaquie, la Hongrie, la Bulgarie et la Finlande.

     L’U.R.S.S. montre ainsi clairement les voies dans lesquelles l’Europe peut trouver une issue à sa situation économique difficile. L’Angleterre pourrait bénéficier d’un tel traité si le gouvernement travailliste, subissant la pression du dehors, n’avait pas laissé tomber l’accord en préparation avec l’U.R.S.S.

     C’est un mérite indiscutable de la politique extérieure de l’U.R.S.S. et des pays de la nouvelle démocratie d’avoir démasqué le plan américain d’asservissement économique des pays européens.

     Il faut, en outre, tenir compte de la circonstance suivante : l’Amérique elle-même se trouve devant la menace d’une crise économique.

La générosité officielle de Marshall a ses propres causes sérieuses. Si les pays européens ne reçoivent pas de crédits américains, la demande de marchandises américaines de la part de ces pays va diminuer, ce qui contribuera de son côté à accélérer et à renforcer la crise économique qui s’approche aux Etats-Unis.

     C’est pourquoi, si les pays européens font preuve de la maîtrise nécessaire et de la volonté de résister aux conditions asservissantes de crédit, l’Amérique pourra se voir obligée de reculer.

     La dissolution du Komintern, répondant aux exigences du développement du mouvement ouvrier dans les conditions de la nouvelle situation historique, a joué son rôle positif.

Par la dissolution du Komintern, il a été mis fin pour toujours à la calomnie répandue par les adversaires du communisme et du mouvement ouvrier, à savoir que Moscou s’immisce dans la vie intérieure des autres Etats et que, soi-disant, les Partis Communistes des différents pays n’agissent pas dans l’intérêt de leur peuple, mais d’après les ordres du dehors.

     Le Komintern avait été créé après la Première Guerre mondiale, quand les Partis Communistes étaient encore faibles, quand la liaison entre la classe ouvrière des différents pays était presque inexistante et quand les Partis Communistes n’avaient pas encore de dirigeants du mouvement ouvrier généralement reconnus.

Le Komintern eut le mérite de rétablir et de raffermir les relations entre les travailleurs des différents pays, d’élaborer les positions théoriques du mouvement ouvrier dans les nouvelles conditions du développement d’après-guerre, d’établir les règles communes d’agitation et de propagande des idées du communisme et de faciliter la formation des dirigeants du mouvement ouvrier.

Ainsi ont été créées les conditions de la transformation des jeunes Partis Communistes en partis ouvriers de masse.

     Cependant, à partir du moment où les partis communistes se transformèrent en partis ouvriers de masse, leur direction provenant d’un centre devenait impossible et non conforme au but.

On est arrivé à ceci que le Komintern, de facteur aidant au développement des Partis Communistes, avait commencé à se transformer en facteur freinant ce développement.

La nouvelle phase de développement des Partis Communistes exigeait de nouvelles formes de liaison entre les Partis. Ce sont ces circonstances qui ont déterminé la nécessité de la dissolution du Komintern et de l’organisation de nouvelles formes de liaison entre les Partis.

     Pendant les quatre années qui se sont écoulées depuis la dissolution du Komintern, on enregistre un renforcement considérable des Partis Communistes, une extension de leur influence dans presque tous les pays de l’Europe et de l’Asie. L’influence des Partis Communistes s’est accrue non seulement dans les pays de l’Europe orientale, mais également dans presque tous les pays de l’Europe qui avaient connu la domination fasciste, ainsi que dans les pays comme la France, la Belgique, les Pays-Bas, la Norvège, le Danemark, la Finlande, etc., qui avaient connu l’occupation fasciste allemande. L’influence des communistes s’est renforcée tout particulièrement dans les pays de la nouvelle démocratie, où les Partis Communistes sont devenus les partis les plus influents de ces Etats.

     Pourtant, dans la situation actuelle des Partis Communistes, il y a aussi des faiblesses propres.

Certains camarades avaient considéré la dissolution du Komintern comme signifiant la liquidation de toutes les liaisons, de tout contact entre les Partis Communistes frères.

Or, comme l’expérience l’a démontré, une pareille séparation des Partis Communistes n’est pas juste, mais nuisible et foncièrement contre nature.

Le mouvement communiste se développe dans les cadres nationaux, mais, en même temps, il est placé devant des tâches et des intérêts communs aux Partis Communistes des différents pays.

     En fait, on se trouve devant un tableau bien étrange : les socialistes, qui se démènent farouchement pour prouver que le Komintern avait soi-disant dicté des directives de Moscou aux communistes de tous les pays, ont reconstitué leur Internationale, tandis que les communistes s’abstiennent de se rencontrer, et encore plus, de se consulter sur les questions qui les intéressent mutuellement, et tout cela par crainte de la calomnie des ennemis au sujet de la  » main de Moscou « .

     Les représentants des différentes branches d’activité — les savants, les coopérateurs, les militants syndicaux, les jeunes, les étudiants — estiment qu’il est possible d’entretenir entre eux un contact international, de faire des échanges de leurs expériences et de se consulter sur les questions concernant leurs travaux, d’organiser des conférences et des délibérations internationales, tandis que les communistes, même ceux des pays qui ont des relations d’alliés, se sentent gênés d’établir entre eux des relations d’amitié.

Il n’y a pas de doute que pareille situation, si elle se prolonge, ne soit grosse de conséquences très nuisibles au développement du travail des Partis frères.

Ce besoin de consultation et de coordination libre des activités des différents Partis est devenu particulièrement pressant, surtout maintenant, alors que la continuation de l’éparpillement pourrait conduire à l’affaiblissement de la compréhension réciproque et parfois même à des erreurs sérieuses. 

     [L’absence de liens entre nous, qui résulte dans un isolement mutuel, affaiblit indubitablement nos forces. En particulier, si on parle d’erreurs, il nous faut faire référence aux erreurs commises par les dirigeants des Partis Communistes de France et d’Italie envers la nouvelle campagne de l’impérialisme américain contre la classe ouvrière.

La direction du Parti Communiste français n’a pas démasqué et ne démasque pas de façon adéquate pour le peuple de son pays le plan Truman-Marshall, le plan américain d’esclavage de l’Europe, et de la France en particulier.

Le départ des communistes du Gouvernement Ramadier a été traité par le Parti Communiste comme un événement domestique, alors que la véritable raison de l’expulsion des communistes du Gouvernement était que celle-ci avait été exigée par l’Amérique.

Il est à présent devenu assez évident que l’expulsion des communistes du Gouvernement était la condition préalable pour que la France reçoive des crédits américains.

Un crédit américain de 250 millions de dollars était le prix modeste payé par la France pour renoncer à sa souveraineté nationale.

Comment le Parti Communiste français a-t-il réagi face à cet acte honteux des cercles dirigeants de France qui ont vendu la souveraineté nationale du pays ?

Au lieu de dénoncer comme honteuse, comme une trahison de la défense de l’honneur et de l’indépendance de la patrie, la conduite des autres partis, socialistes inclus, le Parti Communiste français a réduit la question à un problème de violation des pratiques démocratiques, qui s’exprimait par un empiétement sur les droits du parti le plus nombreux au Parlement français, alors que la violation de la tradition parlementaire était, dans ce cas, simplement le prétexte et non la cause.

Cet étouffement des raisons réelles pour lesquelles les communistes ont été exclus du Gouvernement constitue sans aucun doute une erreur sérieuse de la part de la direction du Parti Communiste français, et soit était dû à une mauvaise compréhension de la situation, et il est difficile de supposer que ça ait été le cas, soit les communistes français se sont laissés intimider par des arguments sur les intérêts  » nationaux  » de la France. Apparemment, les communistes craignaient qu’ils puissent être accusés de constituer un obstacle à l’octroi par l’Amérique d’un crédit à la France, et ainsi, de soi-disant nuire aux intérêts de leur pays.

De cette manière, les communistes ont cédé à un chantage qui leur reprochait de ne pas être suffisamment patriotique alors que la seule force patriotique en France aurait été le Parti Communiste, s’il avait démasqué la signification réelle du crédit américain, qui avait été conditionné à une modification de la composition du Gouvernement par l’exclusion des communistes, ce qui, partant, affaiblissait la souveraineté même de la France.

A€ cette occasion, le Parti Communiste français a cédé à la pression de la réaction, même s’il savait que cette pression était dictée par des forces impérialistes hostiles au peuple français.

Les communistes français auraient dû se présenter fièrement devant le peuple, dévoilant le rôle de l’impérialisme américain qui avait ordonné à la France d’expulser les communistes du Gouvernement national et expliquer au peuple qu’il ne s’agissait pas simplement d’une autre  » crise gouvernementale « , pas d’une simple violation des traditions parlementaires (bien que cela soit aussi significatif en tant que caractéristique de la crise de la démocratie bourgeoise), mais d’un cas d’ingérence étrangère dans les affaires françaises, une abrogation de l’indépendance politique de la France, une vente de la souveraineté de la nation par les socialistes français.

Il est déplorable que les dirigeants responsables des communistes français aient échoué jusqu’ici à expliquer au peuple français et à l’opinion publique mondiale dans son ensemble la cause sous-jacente de ces événements qui ont eu lieu en France, et le rôle honteux joué dans cette question par les socialistes français.

Les communistes français ont accusé les socialistes de  » glissement vers la droite « . Mais quel glissement vers la droite peut-il y avoir eu ? Blum a-t-il jamais été de gauche ? Nous savons que Blum n’a jamais été de droite ni de gauche mais a toujours été, est et restera un serviteur loyal de la bourgeoisie, une courroie de transmission de l’influence de celle-ci dans le mouvement ouvrier.

En conséquence, il ne saurait glisser nulle part, et les camarades français ont évidemment échoué à discerner suffisamment clairement les manœuvres des dirigeants socialistes.

La triste expérience de la France a servi de signal pour une  » crise gouvernementale  » en Italie.

Exactement comme en France, la source principale de cette  » crise gouvernementale « , créée artificiellement, était la question d’un crédit américain et la présentation par les cercles impérialistes américains, comme un préliminaire à celui-ci, d’une exigence d’expulsion des communistes du Gouvernement.

 La presse italienne de droite a dévoilé ce secret sans vraiment de honte.  » Si nous voulons vivre, écrivait le journal de droite italien Buon Senso, nous devons obtenir un prêt des U.S.A.  » De cela, le journal tirait la conclusion :  » La crise doit être résolue de façon à nous permettre de recevoir le crédit dont nous avons besoin.

Les arguments contraires sont sans fondement. Nous devons comprendre ce qui s’est passé en France, où les socialistes ont rompu avec les communistes et où ces derniers se sont laissés expulser des postes ministériels sans faire de scandale. « 

     L’annonce de la décision de De Gasperi d’expulser les représentants du Parti Communiste italien du Gouvernement a provoqué les masses et a causé de multiples protestations. Mais malheureusement, on n’a pas soutenu ni dirigé suffisamment cette initiative des masses.

     La conclusion qu’il faut tirer est que, en Italie comme en France, en surestimant les forces de la réaction, les communistes ont été les victimes de l’intimidation et du chantage impérialiste.

Ils ont sous-estimé leurs propres forces, les forces de la démocratie, la volonté des masses de défendre les droits nationaux et intérêts fondamentaux de leurs pays.

C’est d’autant plus décevant que tant les Partis Communistes français qu’italien ont démontré, dans des conditions difficiles, leur capacité à rallier autour de la bannière communiste les larges masses de la classe ouvrière, les paysans pauvres et l’intelligentsia.]

Puisque la plus grande partie des dirigeants des partis socialistes (surtout les travaillistes anglais et les socialistes français) se comporte comme agents de cercles impérialistes des Etats-Unis d’Amérique, c’est aux Partis Communistes qu’incombe le rôle historique particulier de se mettre à la tête de la résistance au plan américain d’asservissement de l’Europe et de démasquer résolument tous les auxiliaires intérieurs de l’impérialisme américain.

En même temps, les communistes doivent soutenir tous les éléments vraiment patriotiques qui n’acceptent pas de laisser porter atteinte à leur patrie, qui veulent lutter contre l’asservissement de leur patrie au capital étranger et pour la sauvegarde de la souveraineté nationale de leur pays.

Les communistes doivent être la force dirigeante qui entraîne tous les éléments antifascistes épris de liberté à la lutte contre les nouveaux plans expansionnistes américains d’asservissement de l’Europe.

Il importe de considérer qu’il y a très loin du désir des impérialistes de déclencher une nouvelle guerre à la possibilité d’organiser une telle guerre.

Les peuples du monde entier ne veulent pas la guerre.

Les forces attachées à la paix sont si grandes et si puissantes qu’il suffirait qu’elles fassent preuve de ténacité et de fermeté dans la lutte pour le défense de la paix pour que les plans des agresseurs subissent un fiasco total.

Il ne faut pas oublier que le bruit fait par les agents impérialistes autour des dangers de guerre tend à intimider les gens sans fermeté ou ceux à nerfs faibles, afin de pouvoir, au moyen du chantage, obtenir des concessions en faveur de l’agresseur.

Actuellement, le danger principal pour la classe ouvrière consiste en la sous-estimation de ses propres forces et en la surestimation des forces de l’adversaire.

De même que, dans le passé, la politique munichoise a encouragé l’agression hitlérienne, de même aujourd’hui, les concessions à la nouvelle orientation des Etats-Unis d’Amérique et du camp impérialiste, peuvent inciter ses inspirateurs à devenir plus insolents et plus agressifs.

C’est pourquoi les Partis Communistes doivent se mettre à la tête de la résistance dans tous les domaines — gouvernemental, économique et idéologique — aux plans impérialistes d’expansion et d’agression.

Ils doivent serrer leurs rangs, unir leurs efforts sur la base d’une plate-forme anti-impérialiste et démocratique commune, et rallier autour d’eux toutes les forces démocratiques et patriotiques du peuple.

 Une tâche particulière incombe aux Partis Communistes frères de France, d’Italie, d’Angleterre et des autres pays. Ils doivent prendre en main le drapeau de la défense de l’indépendance nationale et de la souveraineté de leurs propres pays. Si les Partis Communistes frères restent fermes sur leurs positions, s’ils ne se laissent pas influencer par l’intimidation et le chantage, s’ils se comportent résolument en sentinelles de la paix durable et de la démocratie populaire, de la souveraineté nationale, de la liberté et de l’indépendance de leur pays, s’ils savent, dans leur lutte contre les tentatives d’asservissement économique et politique de leur pays, se mettre à la tête de toutes les forces disposées à défendre la cause de l’honneur et de l’indépendance nationale, aucun des plans d’asservissement de l’Europe ne pourra être réalisé.

[Parce que l’Union Soviétique se tient à la tête de la résistance aux nouvelles tentatives d’expansion impérialiste, les Partis Communistes frères doivent partir de la considération suivante : tout en renforçant leur situation politique dans leurs propres pays, c’est en même temps dans leur intérêt de renforcer la puissance de l’Union Soviétique, comme bastion principal de la démocratie et du socialisme.

Cette politique de soutien à l’Union Soviétique, en tant que force dirigeante dans la lutte pour une paix ferme et durable, dans la lutte pour la démocratie, doit être poursuivie par les Partis Communistes de façon honnête et franche.

Il faut souligner aussi fermement que possible que les efforts des Partis Communistes frères pour renforcer l’U.R.S.S. coïncident avec les intérêts vitaux de leurs propres pays.

Il est impossible d’accepter comme correcte l’insistance constante de certaines figures dirigeantes des Partis Communistes frères sur leur indépendance vis-à-vis de Moscou.

Il ne s’agit pas d’une question d’indépendance, car Moscou n’a mis et ne souhaite mettre personne dans une situation de dépendance.

L’insistance délibérée sur cette  » indépendance  » de Moscou, ce  » renoncement  » de Moscou, revient essentiellement à de la servilité, à de l’opportunisme envers ceux pour qui Moscou est l’ennemi.

Les Partis Communistes ne doivent pas avoir peur de proclamer bruyamment qu’ils soutiennent la politique pacifiste et démocratique de Moscou, ils ne doivent pas avoir peur de déclarer que la politique de l’Union Soviétique coïncide avec les intérêts des autres peuples épris de paix.]

[Il faut aussi faire mention des erreurs  » de gauche « , si on peut utiliser ce terme, liées à la critique de l’aide soi-disant insuffisante offerte par l’Union Soviétique aux pays amis, et à l’affirmation d’exigences non fondées concernant l’étendue de cette aide.

Des erreurs de ce type ont été commises, en particulier dans les pays de nouvelle démocratie comme la Yougoslavie, et se manifestent par des déclarations selon lesquelles l’U.R.S.S., soi-disant sur base de considérations de haute politique, non désireuse d’endommager ses relations avec les grandes puissances, ne lutte pas avec suffisamment d’énergie pour soutenir les demandes des petits pays, en particulier la Yougoslavie.

Une critique comme celle-là naît de la sous-estimation de la grande importance et du grand rôle de l’Union Soviétique, qui ne peut pas et ne doit pas disperser des forces qui sont nécessaires pour des conflits plus importants.

Les exigences envers l’Union Soviétique selon lesquelles elle devrait, partout et dans tous les cas, soutenir n’importe quelle demande, même au prix d’amoindrir ses propres positions, sont sans fondement.]

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Parti Communiste d’Allemagne : La tâche actuelle en Allemagne (1946)

Extrait du rapport lu par Walter Ulbricht, à Berlin le 19 avril 1946, lors du XVe congrès du Parti Communiste d’Allemagne.

La question essentielle qui se pose présentement en Allemagne est de se débarrasser des bases matérielles de l’impérialisme et du militarisme allemands, et la lutte contre les idéologies impérialistes et militaristes.

Il ne doit pas être de nouveau permis aux forces impérialistes réactionnaires, aux messieurs des monopoles et de la banque et aux grands propriétaires terriens d’utiliser la démocratie dans leur combat contre l’ordre démocratique et pour la reconstruction de leurs organisations réactionnaires.

Le malheur national de notre peuple a tenu justement en cela que les forces réactionnaires aient réussi, à tous les tournants décisifs dans l’histoire allemande, à avoir le dessus sur les forces progressistes.

La tâche nationale fondamentale est pour cette raison présentement d’arracher le pouvoir aux porteurs de cette politique réactionnaire, pillarde, ennemi du peuple. (Tout à fait juste) Ce sont les messieurs des monopoles et de la banque et les autres intéressés à la guerre, les grands propriétaires terriens et la bureaucratie fasciste.

Le peuple allemand doit savoir que si l’influence des forces réactionnaires se maintient dans l’État et l’économie, alors cela signifie des crises périodiques et des conflits permanents avec les autres peuples. Si doit, à l’inverse, être assuré en Allemagne le travail pacifique et la reconstruction de l’Allemagne, alors le peuple doit prendre dans ses propres mains la destinée du pays.

En connaissance de la grande tâche historique, de participer à aider notre patrie à sortir de la catastrophe précipitée par le fascisme, le premier pas de notre Comité Central à être réalisé après la chute de Hitler fut de proposer à toutes les forces antifascistes/démocratiques le Front de l’unité contre le fascisme et la réaction, pour assurer la paix, pour réussir la reconstruction démocratique de l’Allemagne.

La précondition pour assurer réellement la paix est la reconnaissance des causes profondes de la guerre et des racines de l’idéologie nazie.

Certaines personnes se rendent ici la vie très facile, dans la mesure où ils présentent les accusés de Nuremberg comme les seuls responsables.

Ils veulent faire oublier que sans l’appareil d’État allemand, sans l’armée allemande et sans les organes économiques allemands tout comme sans l’appareil fasciste terroriste, Hitler n’aurait pas pu mener la guerre jusque fin avril.

Dans le programme d’action du Parti Communiste du 11 juin 1945, il est pour cette raison affirmé qu’à côté des Hitler et Goering, Keitel et Jodl, sont les responsables et portent la responsabilité pour la guerre les donneurs d’ordre du parti nazi, les messieurs des grandes banques et des monopoles, les Krupp et Roechling, Poensgen et Siemens.

L’idéologie nazie n’est pareillement pas que le produit de la folie guerrière de Hitler, mais la continuation conséquente de l’idéologie des junkers prussiens et des messieurs des monopoles allemands, tout comme des regroupements pour la guerre et les colonies. (Approbation)

Le vieux « principe du guide » du Führer du syndicat du charbon, Kirdorf, de Krupp, d’Oldenburg-Januschau, de Donnersmarck et consorts a été fait principe d’État par le fascisme. (Très vrai)

Cette responsabilité des fonctionnaires de l’appareil économique et d’État et des officiers de l’Armée exige pour cette raison l’écrasement du vieil appareil d’État et économique hitlérien. De là le fait que dans la zone soviétique on ne s’est pas posé la question de qui devait être licencié de l’appareil, il a été au contraire tiré un trait sur le passé et décidé qui des anciens fonctionnaires pouvait être engagé dans le nouvel appareil administratif démocratique. (Tout à fait juste)

Par décision de l’administration militaire soviétique sur la fermeture des banques, la trait a également été tiré sur la banqueroute financière de Hitler, et l’ordre numéro 124 du maréchal Joukov sur la confiscation des entreprises des intéressés par la guerre et nazis actifs a donné la possibilité de confisquer les entreprises de ceux-ci et, si elles n’avaient pas été exigé par les forces d’occupation, de les placer sous la direction des organes démocratiques de gestion.

Ce qu’il y a de fondamentalement nouveau là-dedans est que dans la zone d’occupation soviétique, sur la base des accords de Potsdam des alliés, les forces antifascistes/démocratiques ont eu la possibilité complète de purger l’appareil économique et administratif, et les forces réactionnaires n’ont pas eu la possibilité légale de s’organiser de nouveau.

Après 12 ans et demi d’esclavage fasciste, après la grave dépression qui a dominé dans de larges secteurs des masses après 1945, il y a tout de même eu les moyens de progressivement réussir à amener les forces du peuple à prendre l’initiative en propre.

Ont été appelés à des fonctions dirigeantes dans les organes de gestion du pays les femmes et les hommes qui se sont particulièrement révélés capables dans la reformation du trafic [routier et ferroviaire], dans l’organisation de l’approvisionnement alimentaire, dans l’organisation de la réparation des habitations, dans la relance des entreprises.

Si présentement, une année après la fin de la guerre hitlérienne, le trafic a déjà tellement repris et une grande partie de l’industrie travaille, nous le devons aux ouvriers, aux ingénieurs, aux employés, qui se sont lancés dans cela de par leur propre initiative. (Applaudissements)

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Le renversement révisionniste des démocraties populaires

En URSS, la nouvelle situation d’après-1945 avait produit des courants opportunistes, avec notamment l’économiste Eugen Varga. L’URSS devrait selon ces conceptions s’insérer dans des rapports « constructifs » avec les pays capitalistes désormais « organisés ». Cela affaiblit de manière immense les forces communistes soviétiques.

Dans les démocraties populaires, il y eut une même tendance consécutive à la fusion des socialistes et des communistes se réalisant dans chaque pays, l’un après l’autre. L’idée était que le parti ouvrier unifié suffirait en soi à gérer le développement des forces productives, qu’il n’était besoin de rien d’autre et d’autant moins de la primauté de l’idéologie.

Aussi, la victoire du révisionnisme en Union Soviétique, avec Nikita Khrouchtchev comme dirigeant, impliquait nécessairement un renversement dans les démocraties populaires, à moins d’un soulèvement anti-révisionniste.

Il se produisit de fait uniquement à l’initiative des communistes grecs exilés en URSS, à Tachkent en Ouzbékistan, qui furent écrasés dans le sang. Pour le reste, le processus fut par étapes mais réussit finalement sans coup férir.

L’une de ces étapes fut la dissolution du Kominform, le 17 avril 1956. Un tel acte était une grande offensive contre l’essence même des démocraties populaires, qui se définirent d’ailleurs par la suite la plupart comme « socialistes » (la Tchécoslovaquie en 1960, la Roumanie en 1965, la République Démocratique Allemande en 1968) ou en tout cas changèrent d’emblème.

Drapeau de la République populaire de Roumanie (1948–1952)
Drapeau de la République populaire de Roumanie (1952–1965)
Drapeau de la République socialiste de Roumanie (1965-1989)

Le personnel fut évidemment modifié. En Bulgarie, Valko Tchervenkov fut éjecté du poste de secrétaire général la veille du premier anniversaire de la mort de Staline.

En Roumanie, Gheorghe Gheorghiu-Dej devint un renégat et assuma une ligne très forte de nationalisme bourgeois, marqué par l’ouverture importante aux pays impérialistes, une ligne ardemment poursuivie par Nicolae Ceaușescu à partir de 1965.

Le même processus se déroula en République Démocratique Allemande, Walter Ulbricht devenant un renégat, alors qu’un soulèvement réactionnaire avait eu lieu en juin 1953 à Berlin-Est, dans la foulée de la mort de Staline.

Drapeau de la République Démocratique Allemande de 1949 à 1959, aux couleurs nationales allemandes
Drapeau de la République Démocratique Allemande de 1959 à la chute du mur de Berlin, alors que l’Etat se veut séparer nationalement de l’Allemagne de l’Ouest

En Tchécoslovaquie, le dirigeant communiste historique, Klement Gottwald, était mort en 1953, en revenant de l’enterrement de Staline, avec des rumeurs d’empoisonnement. Mais il faudra attendre l’initiative d’ Antonín Novotný de réaliser un exposé intitulé « Le XXe congrès du PCUS et les conséquences qui en découlent pour le travail de notre Parti  » dans le cadre les 29 et 30 mars 1956 d’une réunion extraordinaire du Comité Central.

Antonín Novotný attaqua, dans le prolongement de Nikita Khrouchtchev, le « culte de la personnalité » et son représentant en Tchécoslovaquie, Klement Gottwald. Son point de vue fut même publié dans le journal du Parti, le Rudé Pravo.

Il réitéra avec une nouvelle réunion extraordinaire, les 19 et 20 avril 1956, puis commença à diffuser sa propagande à la base même du Parti ; chaque cellule fut ainsi confronté à un « résumé des accusations » contre Staline. Les représentants révisionnistes du Comité Central furent envoyés avec des brochures numérotées, avec comme tâche de les lire puis de les rapporter, sans jamais débattre.

La vague révisionniste eut un grand effet dans les universités, où les activités anti-communistes se développèrent fortement ; en 1952 fut détruit au moyen de 800 kilos d’explosifs le monument à Staline à Prague, construit de 1949 à 1955.

Il avait été le fruit d’une collaboration incluant le sculpteur Otakar Svec (1892-1955), le peintre Adolf Zabransky (1909-1981), les architectes Jiri Stursa (1910-1995) et Vlasta Stursa ; le monument, dédié par « le peuple tchèque à ses libérateurs », faisait 22 mètres de long, pour 15,5 de hauteur et 12 de largeur, en étant placé sur une structure de béton armé afin de supporter ses 17 000 tonnes.

Le monument en l’honneur de Staline sur la colline de Letna, surplombant le centre de la ville de Prague ; à droite de Staline, à l’ouest, on trouve une allégorie du peuple tchécoslovaque, tandis qu’à gauche de Staline, à l’est, on trouve une allégorie du peuple soviétique.

En Pologne, le dirigeant Bolesław Bierut était mort en 1956 le jour du discours « secret » de Nikita Khrouchtchev au XXe congrès du Parti soviétique, sans doute empoisonné.

Le haut responsable communiste (et juif) Jakub Berman fut éliminé de toute fonction, avec l’appui de « Radio Free Europe », la radio américaine anti-communiste diffusant en Europe de l’est et menant une propagande contre lui en s’appuyant en l’occurrence sur un renégat ayant rejoint l’ouest.

Communiste depuis 1928, Jakub Berman était devenu par la suite membre du bureau politique du Parti Ouvrier Unifié Polonais, et responsable des services de sécurité, à partir de 1944. Il est purgé par la nouvelle direction en 1956, et même exclu du Parti en 1957 en raison de ses « erreurs » lors de « l’époque stalinienne ».

Hilary Minc, responsable de la planification, fut également purgé. Le nouveau dirigeant du Parti, Edward Ochab, fut naturellement sur la ligne de Khrouchtchev. Une amnistie prononcée le 25 avril 1956 libéra 30 000 personnes, alors qu’inversement furent purgés les ministres de la Sécurité et de la Justice, ainsi que des hauts fonctionnaires de la Sécurité.

C’est dans cette perspective que le Parti Communiste de Pologne, dissous en 1938, fut officiellement réhabilité le 9 février 1956.

Toutes les années 1955-1956 furent marquées par une intense propagande anti-communiste depuis les instances culturelles, notamment avec le périodique Nowa kultura.

L’Église catholique, bien sûr, joua un grand rôle politique. Ce n’est qu’en 1952 que la laïcité avait été instaurée en tant que tel. Lors de l’annonce du contrôle gouvernementale des nominations des religieux – ce qui revenait à appliquer une mesure prise dans les pays protestants 400 années auparavant – l’Église catholique put organiser en février 1953 une grande procession à Cracovie, culminant dans l’affrontement avec la police.

En 1955, un million de personnes manifestèrent en présence du cardinal Wyszynski, à Czestochowa ; le processus continuera par la suite. Il y avait 7250 églises en Pologne en 1937, il y en aura 14 000 dans les années 1980, avec 18 000 prêtres, des financements venant du monde entier. L’hebdomadaire catholique Tygodnik Powszchny tirera à 150 000 exemplaires, tout comme le journal jésuite « Le messager du cœur de Jésus », le journal franciscain « Le chevalier de l’Immaculée » tirant à 75 000 exemplaires.

Et enfin en juin 1956, les émeutes dans la ville de Poznań amènent le retour de Władysław Gomułka. Ce dernier avait en fait déjà été libéré en décembre 1954 – mais l’information n’avait été rendue publique qu’en avril 1956. De la même manière, dès octobre 1954, 2 000 titres critiquant le titisme furent retirés des bibliothèques et des librairies.

Drapeau de la République populaire de Hongrie du 20 août 1949 au 23 octobre 1956
Drapeau de la République populaire de Hongrie à partir du 1er octobre 1957, acceptant de fait le symbole de l’insurrection de Budapest (le drapeau national avec le symbole socialiste découpé en son centre)

En Hongrie, la base révisionniste était pareillement si forte qu’en fait, dès juillet 1953, ce fut Imre Nagy qui fut nommé premier ministre, organisant immédiatement l’arrêt de la collectivisation, la fermeture des camps de prisonniers, le rétablissement d’un large artisanat privé et la fin de l’orientation vers l’industrie lourde.

Le secrétaire général était toujours Mátyás Rákosi, qui se fit cependant débarquer en 1956, après avoir tenté en 1955 de briser la fraction d’Imre Nagy. Il fut déporté en URSS, au Kirghizstan, et refusa en 1970 l’autorisation de retourner en Hongrie s’il acceptait de ne plus faire de politique.

László Rajk fut réhabilité en mars 1956, 10 jours après la réunion du « Cercle Petöfi », rassemblant des forces révisionnistes célébrant le XXe congrès, exigeant la « liberté de la presse », au grand dam de Mátyás Rakosi considérant que c’était un « mini-Poznan ».

Si l’auteur du discours, Tibor Déry, fut exclu du Parti, Imre Nagy fut quant à lui réintégré officiellement, alors que Mátyás Rakosi fut donc éliminé, et que László Rajk eut des funérailles nationales.

Cela culmina dans l’insurrection anti-communiste de Budapest, du 23 octobre au 10 novembre 1956, avec des pendaisons par la foule de communistes et de policiers.

Et en dehors des démocraties populaires, en France et en Italie, Maurice Thorez et Palmiro Togliatti s’alignèrent d’autant plus qu’ils étaient déjà lancés dans le révisionnisme.

Le basculement était ainsi complet, tout comme en URSS révisionniste devenant social-impérialiste et dont les pays de l’Est européen devinrent des satellites, à part la Yougoslavie inféodée aux États-Unis et à la Grande-Bretagne et l’Albanie cherchant à maintenir son indépendance et se tournant vers la Chine.

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Démocraties populaires : la trahison yougoslave

En Yougoslavie, le Parti Communiste s’est dissous, littéralement, dans le Front ; le Parti Communiste de Yougoslavie devient une sorte de société secrète, il n’existe plus du tout de manière publique.

Dans la foulée, des bons rapports furent établis avec les pays impérialistes, avec un soutien américain matériel qui fut très significatif, alors que la perspective de la collectivisation des terres fut rejetée. La socialisation de l’industrie céda également la place aux conceptions « autogestionnaires ».

La répression s’abattit sur les opposants à ce déviationnisme, 250 000 personnes étant visées. Un camp fut mis en place pour 13 000 prisonniers sur deux îles désertes, Goli Otok et Sveti Grgur. Une figure de l’opposition communiste fut Vlado Dapčević, emprisonné, s’enfuyant en Albanie puis en URSS, fuyant l’URSS révisionniste pour aller en Europe occidentale et y affrontant la répression, finalement enlevé par les services secrets roumains et yougoslaves, faisant 13 ans de prison, continuant à chaque fois la lutte.

Le régime titiste mit en avant le thème des « non alignés », du troisième camp, rejetant le camp socialiste et aussi, prétendument, le camp impérialiste.

Comme le constate un article de Pour une paix durable, pour une démocratie populaire, en octobre 1949 :

« Le but principal de ces affirmations – c’est-à-dire des thèses titistes – est de « prouver » qu’il est possible de faire la révolution dans les différents pays et de libérer les peuples coloniaux du joug impérialiste, non pas sur la base du rassemblement des forces de la classe ouvrière internationale, de toutes les masses exploitées et des peuples coloniaux, mais dans une lutte isolée des peuples des différents pays et des colonies sans aucune liaison avec la lutte générale du prolétariat mondial contre l’impérialisme. »

Enfin, le régime titiste trahissait ce faisant également le Parti Communiste de Grèce, en pleine guerre de libération contre le régime anglo-américain ; la Yougoslavie ferma ses frontières aux forces partisanes, mais pas aux troupes réactionnaires qui purent ainsi les prendre à revers.

Le processus de critique puis de dénonciation de la ligne yougoslave passa, en mars et en mai 1948, par deux lettres envoyées au nom du Comité Central du Parti Communiste (bolchévik) de l’URSS au Comité Central du Parti Communiste de Yougoslavie.

Enfin, face à la position yougoslave toujours plus agressive, le Kominform réalisa en juin 1948 une résolution qui affirme que

« la direction du Parti Communiste de Yougoslavie suit, ces derniers temps, dans les questions principales de la politique extérieure et intérieure, une ligne fausse représentant l’abandon de la doctrine marxiste-léniniste. »

Selon le Kominform,

« les dirigeants du Parti Communiste de Yougoslavie glissent de la voie marxiste-léniniste dans la voie du parti des koulaks [paysans riches] et des populistes sur la question du rôle dirigeant de la classe ouvrière, en affirmant que les paysans constituaient ‘la base la plus solide de l’État yougoslave’ ».

Le régime titiste affirmait en effet déjà être sur la voie du socialisme, et avoir donc dépassé les antagonismes de classe, alors qu’en fait la lutte des classes s’intensifiait dans les campagnes où régnait de fait la propriété privée, la petite production engendrant systématiquement le capitalisme.

Par conséquent,

« le Bureau d’Information est unanime à conclure que les dirigeants du Parti Communiste de Yougoslavie, par leurs vues anti-soviétiques et anti-Parti, incompatibles avec le marxisme-léninisme, par toute leur conduite et leur refus de participer à la session du Bureau d’Information, se sont mis dans l’opposition envers les Partis Communistes affiliés au Bureau d’Information, qu’ils se sont engagés dans la voie de la division du front unique socialiste contre l’impérialisme, dans la voie de la trahison de la cause de la solidarité internationale des travailleurs et du passage aux positions du nationalisme. »

Le régime titiste accentua toujours davantage son positionnement anti-communiste, aussi le Kominform formula une résolution totalement nette, en novembre 1949. Intitulée « Le Parti Communiste de Yougoslavie aux mains des assassins et des espions », on y lit entre autres :

« Si, dans sa conférence de juin 1948, le Bureau d’Information des Partis Communistes a constaté le passage de la clique Tito-Rankovitch de la démocratie et du socialisme au nationalisme bourgeois, la période écoulée depuis cette conférence du Bureau d’Information a vu s’achever le passage de cette clique du nationalisme bourgeois au fascisme et à la trahison directe des intérêts nationaux de la Yougoslavie.

Les événements des derniers temps ont montré que le gouvernement yougoslave se trouve dans l’entière dépendance des cercles impérialistes étrangers et s’est transformé en un instrument de leur politique agressive, ce qui a abouti à la liquidation de l’indépendance et de la souveraineté de la République yougoslave.

Les Comité Central du Parti Communiste et le gouvernement de Yougoslavie se sont liés complètement aux cercles impérialistes contre l’ensemble du camp du socialisme et de la démocratie, contre les Partis Communistes du monde entier, contre les pays de démocratie populaire et l’URSS.

La clique des espions et des assassins à gages de Belgrade s’est ouvertement acoquinée avec la réaction impérialiste et s’est mise à son service, ainsi que l’a révélé en toute clarté le procès de Rajk et de Brankov à Budapest. Ce procès a montré que les gouvernants yougoslaves actuels sont passés du camp de la démocratie et du socialisme à celui du capitalisme et de la réaction, sont devenus les complices directs des fauteurs d’une nouvelle guerre et s’efforcent, par leurs actes de trahison, de mériter les louanges et de gagner les faveurs des impérialistes.

Le passage de la clique Tito au fascisme n’est pas l’effet du hasard ; il s’est effectué sur l’ordre des maîtres de cette clique, les impérialistes anglo-américains, à la solde desquels elle est depuis longtemps, ainsi que cela vient d’être révélé.

C’est pour exécuter la volonté des impérialistes que les traîtres yougoslaves se sont assigné le but de créer, dans les pays de démocratie populaire, des bandes politiques composées d’éléments réactionnaires, nationalistes, cléricaux et fascistes, afin de faire, avec leur appui, des coups d’Etat contre-révolutionnaires dans ces pays, de détacher ces pays de l’Union soviétique et de tout le camp socialiste et de les soumettre aux forces de l’impérialisme.

La clique Tito a fait de Belgrade un centre américain d’espionnage et de propagande anti-communiste. »

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La systématisation inégale des démocraties populaires

Les succès bulgare et tchécoslovaque renforcèrent bien entendu les Fronts des autres pays, indiquant la tendance à suivre. Les communistes et les socialistes fusionnent ainsi en février 1948 en Roumanie, pays devenant une démocratie populaire en avril de la même année.

La Hongrie devient une démocratie populaire en août 1949, l’Allemagne orientale en octobre 1949 (sous la forme d’une « république démocratique » en réponse à la « République Fédérale Allemande fondée en avril).

Les communistes et les socialistes fusionnent en décembre 1948 en Pologne, mais le pays devint une démocratie populaire en juillet 1952 seulement, ce qui reflète les difficultés rencontrées.

Car cette systématisation apparaît d’un côté comme inévitable, de par le prestige de l’URSS, la mise en place d’un Front, l’hégémonie de l’armée rouge bloquant la réaction, la fusion des socialistes et des communistes.

Affiche du Parti Communiste de Tchécoslovaquie

C’est ce qu’exprime la mise en place de la conférence communiste à Szklarska Poręba en septembre 1947, avec le Parti Communiste (bolchévik) de l’URSS, les Partis Communistes des pays de l’Est européen (sauf l’Allemagne orientale, l’Albanie et la Grèce, ainsi que les Partis Communistes de France et d’Italie).

Elle marqua la fondation du Bureau d’information des Partis Communistes et Ouvriers, souvent désigné par l’acronyme Kominform.

L’amitié polono-soviétique c’est la paix, l’indépendance, le bon lendemain de notre patrie (en fond le Palais de la culture et de la science de Varsovie offert par l’URSS à la Pologne)

Un journal est publié : « Pour une paix durable, pour une démocratie populaire » ; y seront publiés des articles des différents Partis, ainsi que les résolutions. Il sera notamment interdit en janvier 1951 par le gouvernement français, le forçant à reparaître sous un autre nom, « Paix et démocratie ».

De l’autre côté, l’affirmation des démocraties populaires fait face à la « guerre froide » de la part des impérialistes, alors que par ailleurs le dirigeant communiste italien Palmiro Togliatti est victime d’un sabotage de sa voiture et que le dirigeant communiste belge Julien Lahaut est assassiné devant chez lui.

C’est à travers la question allemande que cela se jouera principalement. L’Allemagne, occupée par l’URSS, les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, est en effet le verrou. Son basculement dans un camp ou l’autre sera d’une grande conséquence.

Notre amitié avec l’Union soviétique force à la paix

Aussi, le Parti Communiste d’Allemagne œuvre-t-il dès le départ pour l’unification avec les sociaux-démocrates. Malheureusement, cela ne fonctionne que dans la partie orientale du pays, avec le Parti socialiste unifié d’Allemagne (SED), avec comme dirigeants le communiste Willhelm Pieck et le social-démocrate Otto Grotewohl.

Staline c’est la paix

Ce dernier a perdu la bataille dans son parti face à Kurt Schumacher, non pas en raison d’un réel soutien de la base qui était tout à fait favorable à l’unité, voire l’unification, mais par le rôle américain qui transforme la social-démocratie en institution du nouveau régime ouest-allemand, ce que décriront longuement Ulrike Meinhof et la Fraction Armée Rouge par la suite au début des années 1970.

Pour donner le ton, lors d’un discours à Berlin, le 1er mars 1951, Kurt Schumacher expliqua que :

« Ce pays [l’Allemagne] a toujours été, dans les rêves de la révolution mondiale communiste, la pièce centrale de la conquête mondiale communiste.

Il était clair pour nous que cette attaque devait être parée par le réveil de toutes les forces des qualités humaines et sociales, nationales et personnelles.

Pour nous, il était clair : la liberté en Europe n’était pas peu une affaire de l’auto-affirmation démocratique du peuple allemand (…).

Dans la zone d’occupation soviétique, les travailleurs n’ont que le droit de se laisser exploiter, d’obéir et de passer d’êtres humains au rang de matériel.

Mais qu’on ose se dresser contre le droit à la coparticipation [comme en Allemagne de l’Ouest avec l’intégration de la social-démocratie dans l’appareil de gestion capitaliste], qui a une valeur politique pour les travailleurs dans l’économie, comme cela fut le cas avec le droit de vote universel en politique, c’est une honte pour un parti avec des membres prolétaires.

C’est une tâche nationale et morale de faire passer les ouvriers communistes de la dictature soviétique à la liberté allemande. »

Mais des tendances capitulardes apparurent également dans les autres pays, obligeant à mettre de côté des figures parfois dirigeantes qui étaient oscillantes en raison du poids de l’impérialisme américain et du camp occidental.

En Pologne, il y avait ainsi Władysław Gomułka, qui fut mis à l’écart en 1948-1949 ; en Roumanie, il y avait Lucretiu Patrascanu, qui fut exécuté en 1948, avant la répression du groupe déviationniste de droite Pauker – Luca – Georgescu en 1952.

En Hongrie, il y eut László Rajk, exécuté en 1952 ; en Albanie, il y eut Kotchi Dzoze (Koçi Xoxe en albanais), qui entendait même rattacher le pays à la Yougoslavie ; il fut exécuté en 1949, tout comme Traycho Kostov en Bulgarie.

Il y eut aussi, en Tchécoslovaquie, le groupe autour de Milada Horáková et Záviš Kalandra, tous deux exécutés en 1950, et surtout le groupe autour de Rudolf Slánský. Haut dirigeant du Parti Communiste, et responsable de la sécurité, ce dernier fut démis de ses fonctions en 1951 et accusé de complot, puis exécuté en 1952.

En Bulgarie, le groupe s’était organisé autour de Traicho Kostov, qui fut exécuté en 1949.

Tous ces groupes d’opposition avaient comme dénominateur commun une ligne convergeant avec l’impérialisme américain et les forces occidentales, considérées comme « incontournables ». Ils s’orientaient également vers une soumission à l’esprit capitaliste paysan. Ils passaient surtout par une approche nationaliste exigeant que leur pays ait un statut « intermédiaire » entre l’URSS et les États-Unis, ce qui revient à se soumettre à ce dernier.

Un pays va concrétiser cette démarche : la Yougoslavie.

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La démocratie populaire à l’instar du succès tchécoslovaque

De toutes les pays, c’est la Tchécoslovaquie qui voit le Parti Communiste le plus triompher. Il progresse tellement qu’il est rejoint par 2,5 millions de personnes, soit pratiquement 23 % de la population totale, ou encore un adulte sur trois, et pratiquement 50 % de la population active.

Le Front est opérationnel. C’est un socialiste de gauche, Zdeněk Fierlinger, qui fut le premier chef du gouvernement du nouveau régime.

Et lorsque, en novembre 1947, c’est la droite qui l’emporta dans le Parti Socialiste, avec Zdeněk Fierlinger remplacé à la direction par Bohumil Lausman lors du congrès de Brno, la réponse fut de dimension populaire.

En février 1948, le Parti Communiste quitta le gouvernement, pour mieux revenir cependant avec un nouveau gouvernement qui comprenait une majorité progressiste (12 communistes et 3 sociaux-démocrates pour 24 ministres en tout), avec l’appui d’une immense mobilisation de masse.

Prague en février 1948

C’est que la presse bourgeoise internationale appela le « coup de Prague », étant en fait en panique générale devant un succès communiste, qui s’était fait surtout sans aucun appui de l’armée rouge.

Et, par la suite, à l’été 1948 le parti social-démocrate fusionna avec le Parti Communiste, qui lança des mouvements populaires, capables de briser la tentative conservatrice de bloquer la progression.

Klement Gottwald, dirigeant du Parti Communiste de Tchécoslovaquie

La Tchécoslovaquie devint alors une république populaire en juin 1948, à l’instar de la Bulgarie qui avait pu la précéder en décembre 1947 grâce à l’armée rouge et le prestige de Georgi Dimitrov.

Ce dernier, dans son rapport politique au Comité central du Parti ouvrier (communiste) bulgare en décembre 1948, souligna ainsi les traits de l’État populaire-démocratique :

« Le caractère de l’État démocratique-populaire est déterminé par ces quatre traits fondamentaux :

a) L’État démocratique-populaire représente le pouvoir des travailleurs, de la grande majorité du peuple, sous le rôle dirigeant de la classe ouvrière.

Ce fait signifie premièrement, que le pouvoir des capitalistes et des gros propriétaires est renversé et que celui des travailleurs des villes et des campagnes est établi, sous la direction de la classe ouvrière ; cette classe, la plus progressiste de la société contemporaine, joue dans l’État et dans la vie sociale, un rôle dirigeant.

Deuxièmement, que l’État sert d’instrument aux travailleurs dans leur lutte contre les éléments exploiteurs, contre toutes tentatives et tendances, en vue de rétablir le régime capitaliste et la domination de la bourgeoisie.

b) L’État démocratique-populaire apparaît comme un état de la période transitoire, appelé à assurer le développement du pays, dans la voie du socialisme.

Ceci signifie : bien que le pouvoir des capitalistes et dés grands propriétaires fonciers soit renversé et que la fortune de cette classe soit devenue la propriété du peuple, les racines économiques du capitalisme ne sont pas encore extirpées : certains éléments subsistent encore et se développent, s’efforçant de rétablir l’esclavage.

C’est pour cela que l’évolution vers l’avant, vers le socialisme, n’est possible qu’en menant une lutte de classe intransigeante contre eux, pour leur liquidation complète.

Ce n’est qu’en marchant sans détours vers le socialisme que l’État démocratique-populaire pourra se fortifier et accomplir sa mission historique. Si la démocratie populaire cesse de lutter contre les classes d’exploiteurs, si elle cesse d’étouffer et de refouler les éléments capitalistes, ceux-ci l’emporteraient inévitablement, et non seulement saperaient les bases de la démocratie populaire, mais amèneraient sa perte.

c) L’État démocratique-populaire s’édifie dans la collaboration et l’amitié avec l’Union soviétique.

De même que l’affranchissement de notre pays des chaînes de l’impérialisme et la création de l’État démocratique-populaire ne devinrent possibles que grâce à l’appui et à la mission libératrice de l’U.R.S.S. dans la lutte contre l’Allemagne fasciste et ses alliés, le développement ultérieur de notre démocratie populaire suppose la conservation et le renforcement des relations étroites de collaboration sincère, d’assistance mutuelle et d’amitié, entre nos pays et le grand Etat soviétique.

Toute tendance à affaiblir la collaboration avec l’U.R.S.S. est dirigée contre l’existence même de la démocratie populaire dans notre pays.

d) L’Etat démocratique-populaire appartient au camp démocratique anti-impérialiste (…).

Incarnant la domination des travailleurs sous la direction de la classe ouvrière, le régime de démocratie populaire peut et doit, ainsi que l’expérience l’a déjà prouvé, exercer avec succès les fonctions de la dictature du prolétariat, pour la liquidation du capitalisme et l’organisation de l’économie socialiste.

Il peut briser la résistance des capitalistes et des propriétaires fonciers, étouffer et liquider leurs tentatives, en vue de restaurer le pouvoir du Capital.

Il peut organiser la construction d’une industrie sur la base de la propriété publique et de l’économie planifiée.

Le régime de démocratie populaire sera également en état de surmonter l’instabilité de la petite bourgeoisie des villes et de la paysannerie moyenne, de maîtriser les éléments capitalistes dans les campagnes et d’unir les masses fondamentales des travailleurs autour de la classe ouvrière, dans la lutte décisive pour le passage au socialisme. »

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Vers la démocratie populaire : les déviations française, albanaise, yougoslave

De par la réalité des différences de situation, les Fronts nationaux-démocratiques mis en place par les Partis Communistes vont avoir des résultats nullement uniformes et, de fait, dans trois cas, la situation va être très grave.

La faillite totale est ainsi du côté français. Le Parti Communiste Français va appliquer entièrement la ligne du Front national démocratique, mais sans l’existence d’un tel Front. De plus, il se précipite dans une participation gouvernementale avec les forces politiques autour du général de Gaulle.

Charles Tillon est initialement ministre de l’Air, François Billoux ministre de la Santé publique, puis après un remaniement le dirigeant du PCF Maurice Thorez est ministre d’État (où il met en place l’Ecole Nationale d’Administration), Ambroise Croizat ministre du Travail, Marcel Paul ministre de la Production industrielle, François Billoux ministre de l’Économie nationale, Charles Tillon ministre de l’Armement.

C’est une intégration dans l’État bourgeois, théorisé d’ailleurs par Maurice Thorez dans une interview accordée au journal anglais The Times en novembre 1946 :

« Nous avons préconisé un programme démocratique et de reconstruction nationale, acceptable pour tous les républicains, comportant les nationalisations, mais aussi le soutien des moyennes et petites entreprises industrielles et artisanales et la défense de la propriété paysanne contre les trusts.

A l’étape actuelle du développement de la société, nous avons la conviction que les nationalisations – le retour à la nation des grands moyens de production monopolisés – constituent un progrès dans la voie du socialisme.

Les nationalisations portent atteinte à la toute-puissance des oligarchies financières, elles limitent les possibilités légales de l’exploitation de l’homme par l’homme, elles placent entre les mains d’un gouvernement démocratique des moyens appréciables pour l’œuvre de redressement économique et social du pays.

Il est évident que le Parti communiste, dans son activité gouvernementale, et dans le cadre du système parlementaire qu’il a contribué à rétablir, s’en tiendra strictement au programme démocratique qui lui a valu la confiance des masses populaires.

Les progrès de la démocratie à travers le monde, en dépit de rares exceptions qui confirment la règle, permettent d’envisager pour la marche au socialisme d’autres chemins que celui suivi par les communistes russes.

De toute façon, le chemin est nécessairement différent pour chaque pays. Nous avons toujours pensé et déclaré que le peuple de France, riche d’une glorieuse tradition, trouverait lui-même sa voie vers plus de démocratie, de progrès et de justice sociale.

Cependant, l’histoire montre qu’il n’y a pas de progrès sans lutte. Il n’y a pas de route toute tracée sur laquelle les hommes puissent avancer sans effort. Il leur a toujours fallu surmonter bien des obstacles. C’est le sens même de la vie.

L’union des forces ouvrières et républicaines est le sûr fondement de la démocratie. Le Parti ouvrier français que nous proposons de constituer par la fusion des partis communiste et socialiste, serait le guide de notre démocratie nouvelle et populaire. »

C’était une interprétation totalement opportuniste de la ligne national-démocratique, niant de fait le Front, puisque après les premières affirmations il n’y a rien de fait pour établir un large front au-delà du Parti alors le premier parti politique numériquement en France. Le Parti s’est imaginé autosuffisant historiquement.

De plus, il n’y a aucune reconnaissance de la nécessité de la mise en place d’un nouveau régime. Le Parti Communiste Français a littéralement agi comme si le pays était dans la même situation que la Hongrie ou la Bulgarie, avec l’armée rouge en appui.

L’erreur inverse des Français exista en Albanie et en Yougoslavie. Dans ces pays, la résistance armée avait été très puissante, parvenant littéralement à libérer le pays. Le prestige d’Enver Hoxha en Albanie et de Tito en Yougoslavie, les deux dirigeants communistes, étaient immenses.

Tito en mai 1944

En Yougoslavie, les partisans avaient atteint le nombre de 650 000 à la fin de 1944 ; le Front populaire obtint 90,4 % des voix en novembre 1945, avec un taux de participation de 88 %.

En Albanie, les partisans étaient au nombre de 70 000, ayant contrôlé dès 1943 des territoires rassemblant un million de personnes. En mai 1944 le Congrès Antifasciste de Libération Nationale formait un conseil national, dirigé par Enver Hoxha, et le Front populaire obtint 93,2 % des voix en décembre 1945.

Cependant, les communistes yougoslaves avaient mis en place une démarche reprise en Albanie, consistant à maintenir le Parti Communiste dans la clandestinité, à maintenir la cooptation en interne et à ne pas apparaître publiquement.

Le Front national-démocratique était conçu comme une façade à employer mécaniquement. Cela aboutit à une absence de vie démocratique à la base du Parti Communiste, à une bureaucratisation de son appareil, à une dépolitisation systématique des communistes.

Au cours de ce processus, l’Albanie passa littéralement sous la coupe yougoslave, alors qu’un dirigeant albanais, Sejfulla Malëshova, prôna de tenir le pays à mi-chemin de la Grande-Bretagne et de l’URSS, et qu’un autre, Koçi Xoxe, était directement un agent de la Yougoslavie.

Enver Hoxha en 1944

C’est Enver Hoxha qui mena la lutte contre cette tendance. En novembre 1948, dans son rapport sur l’activité du Comité Central et sur les devoirs nouveaux du Parti au Congrès du Parti Communiste d’Albanie, il raconte à ce sujet que :

« Parmi les importantes questions que soulèvent les lettres historiques adressées par le Parti bolchévik au Comité central du Parti communiste yougoslave [en 1948], figure la question du Front, en corrélation avec la question du Parti lui-même dans lequel le groupe trotskiste [à la tête de la Yougoslavie avec Tito] s’est éloigné de la voie des enseignements du marxisme.

Dans cette question de principe, d’une importance énorme, notre Parti ne peut pas dire qu’il n’a pas subi l’influence néfaste du Parti communiste yougoslave.

Qu’il ait adopté un grand nombre des principes qui régissent l’organisation du Front en Yougoslavie, ainsi que de nombreuses formules erronées des Yougoslaves, cela est vrai.

Notre Parti a reconnu ces erreurs et y a remédié. Il est redevable de ce redressement au Parti bolchévik et au Bureau d’information qui, en mettant à notre disposition l’expérience des huit partis communistes et ouvriers frères, apporte une aide précieuse à notre Parti.

Le Front, créé dans notre pays, dans les circonstances que j’ai déjà signalées, a été d’emblée une large organisation de masses que dirigeait le Parti (…). On doit avouer que l’importance du rôle et la solidité de l’organisation du Front avaient été négligées, et notamment que l’organisation était devenue assez large.

Notre Front différait de ceux qui existaient dans les autres démocraties populaires en ceci que, dans le nôtre, le seul parti qu’on y trouvait était notre Parti (…). Il y avait donc dans notre Front différents éléments individuels qui, nous pouvons le dire, n’échappaient pas à un certain contrôle ; mais nous pouvons dire aussi que, dans ce sens, nous avons été un peu sectaires (…).

Mais, à la veille de la libération de l’Albanie, sous l’influence du délégué du C. C. du Parti communiste de Yougoslavie à Bérat, notre Front a ouvert toutes grandes ses portes et, dans ses rangs, ont pénétré des ennemis qui méritaient le gibet.

Mais ce ne fut pas tout : les opinions opportunistes du Comité central du Parti communiste yougoslave au sujet de l’élargissement du Front, et celles de Seïfoulla Maleuchova en vue de desserrer la bride à la réaction et à la bourgeoisie, firent commettre des relâchements à notre Comité central jusqu’au point de laisser parvenir même à l’Assemblée populaire des éléments camouflés, insinués dans le Front (…).

Ces éléments réactionnaires camouflés étaient la réserve et le dernier enjeu de la réaction ; ils avaient pu résister à la pression de la guerre et, après la libération, ils sont entrés en action. Et justement après la libération de l’Albanie, sous l’influence du Comité central du Parti communiste yougoslave, notre Parti a commis l’erreur de se tenir dans une demi-clandestinité (…).

Comment envisagions-nous, après la libération, les relations réciproques du Front et du Parti ? Nous craignions de mettre en lumière le rôle joué dans le Front par le Parti, de peur d’intimider les éléments réactionnaires et hésitants qui s’y étaient camouflés.

Non seulement nous dissimulions le grand honneur qui s’attachait à notre qualité de membres du Parti, mais nous trouvions encore opportun et juste que certains ministres, membres du Parti, mais inconnus comme tels des larges masses du Front, continuassent de garder le secret sur leur qualité de membres du Parti.

On avait peur de laisser croire que notre gouvernement, ou notre Assemblée populaire, étaient un gouvernement communiste ou une Assemblée populaire où prédominaient les communistes.

On se proposait, ce faisant, de laisser entendre aux éléments hostiles, camouflés dans le Front, qu’il était inutile de s’organiser, soit légalement, soit clandestinement, étant donné que participaient aussi au gouvernement et à d’autres organes des hommes qui n’étaient pas communistes (…).

Les bureaux du Parti se déguisaient en bureaux du Front ; le Parti ne publiait plus ses décisions sous sa signature, mais les diffusait par l’intermédiaire du Front. Les larges masses du peuple travailleur n’apercevaient plus le visage du Parti, ce visage qu’elles aimaient tant (…).

L’absence de démocratie intérieure, d’élections, de centralisme démocratique, de critique et d’autocritique, ainsi que la pratique de la cooptation au sein du Comité central, ont été autant d’erreurs.

Le parti communiste yougoslave en a sa part de responsabilité.

Il faut ajouter à ces erreurs cette autre grave erreur d’organisation, anticommuniste-léniniste-bolchévique, le cumul des fonctions de secrétaire du Parti aux cadres et de ministre de l’intérieur, ce qui a entraîné la soumission du Parti au contrôle de la Sûreté.

D’autres erreurs d’organisation en ce qui concerne la politique des cadres, ont causé au Parti un grave préjudice et ont entravé sa marche. »

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Les difficiles démarrages hongrois, roumain, polonais et allemand vers la démocratie populaire

Contrairement à la Bulgarie et la Tchécoslovaquie, trois pays partaient de relativement loin dans la nouvelle situation : la Hongrie, la Roumanie et la Pologne. Dans ces pays, en effet, les communistes disposaient de moins d’ancrage et de traditions.

La Hongrie avait été un État fasciste puissamment agressif durant la seconde guerre mondiale, alors que les communistes ne s’étaient jamais remis de l’écrasement de la révolution hongroise de 1919.

Le Parti Communiste était en Pologne littéralement un désastre lors de toute son histoire, au point que l’Internationale Communiste procéda même à dissolution en avril 1938. Il se reconstitua avec peine à partir de 1942, dans un pays écrasé sans pitié par l’Allemagne nazie.

La Roumanie présentait une situation relativement meilleure, mais relativement seulement, puisque le pays était passé dans l’orbite nazie et hébergeait de puissants mouvements fascistes. La monarchie tenta également de sauver son existence au dernier moment en renversant le gouvernement pro-allemand alors que l’armée intervenait.

Les Fronts nationaux-démocratiques furent donc des entreprises malaisées, traversant d’importantes vicissitudes.

Le Front fut formé en Hongrie en mars 1944, mais son poids était faible, comme en témoignent les élections de novembre 1945, alors que les communistes n’obtiennent que 17 % des voix, autant que le reste de la gauche, alors que le parti des petits propriétaires et bourgeois indépendants obtient 59 % des voix.

Les communistes avaient cependant, de par le prestige de la victoire, su faire en sorte que 150 000 personnes rejoignent le rang.

Pour la paix, pour l’avenir de nos enfants ! Votez pour le front populaire !

Aux élections d’août 1947, les résultats furent de 22 % pour les communistes, contre 15 % aux sociaux-démocrates, 15 % au parti des petits propriétaires, 9 % au parti national paysan, alors que font une quinzaine de pourcents le parti de l’indépendance, ainsi que la démocratie chrétienne.

La droite du Parti Socialiste mobilisa au même moment dans la rue contre le régime, cependant cela amena l’aile gauche à la rupture, et en juin 1948 eut lieu la fusion avec les communistes. C’était un cap essentiel, qui s’ajoutait aux mesures prises dans le cadre du gouvernement du nouveau régime.

Avait ainsi eu lieu la nationalisation des grandes banques en décembre 1947, puis de la production de charbon, des centrales électriques, des mines de bauxite et de la production d’aluminium en février 1948.

Le 28 avril 1948, toutes les entreprises de plus de 100 personnes furent nationalisées, ainsi que toutes les entreprises complémentaires au secteur étatisé.

En Pologne, le Front était par contre paralysé par la constitution d’un gouvernement d’union nationale des communistes et des conservateurs, ces derniers ayant formé un gouvernement à Londres.

Néanmoins, les grandes industries et les entreprises de plus de cinquante salariés sont nationalisées en juin 1946, avec une réforme agraire distribuant pratiquement six millions d’hectares de terres aux paysans.

Gloire à Staline le meilleur ami de notre peuple

En Roumanie le Front patriotique restait faible, malgré une insurrection armée le 23 août 1944, alors que se constituait un Front national démocratique des forces libérales, conservatrices et communistes.

Aux élections de novembre 1945, le parti national paysan d’opposition obtint 878 000 voix, contre 4,7 millions de voix au bloc gouvernemental (les communistes obtenant 68 sièges, les socialistes 81, et le front des laboureurs 70).

Cependant, la grande majorité du secteur industriel était étatisé en juin 1948.

Pour l’unité la paix la liberté
Votez pour les communistes !

La situation était totalement différente en Allemagne. Les communistes avaient une très grande expérience, ils avaient connu le fascisme très tôt dans les années 1930 et avaient eu le temps de se préparer à la ligne national-démocratique.

Le 6 février 1944, une commission de travail avait été organisée par le bureau politique du Parti Communiste d’Allemagne, avec comme tâche d’avoir une vue générale de l’histoire allemande, en prévision de l’après-guerre.

Or, à part plusieurs écrits de Friedrich Engels et certains de Franz Mehring qui avait effectué un véritable effort de saisie de l’évolution de la culture allemande, il y avait somme toute peu de matière. Il est évident que le contraste était d’autant plus saisissant avec l’arrière-plan de l’écrasement du mouvement ouvrier par le nazisme.

C’était toute la question allemande qui explosait à la figure des communistes alors, avec une ampleur terrible de par le soutien massif du peuple allemand à Hitler.

L’unité de la masse laborieuse dans un Parti
Le front de l’unité des partis antifascistes
L’unité de l’Allemagne !

Une initiative parallèle fut menée par le NKFD, le Comité National Allemagne Libre, qui disposait de locaux consistant en un centre de repos du syndicat des cheminots, à Lunjowo, à un peu plus de trente kilomètres de Moscou.

Il visait à rassembler tous les oppositionnels au national-socialisme, y compris les conservateurs, les nationalistes ; bien entendu, les soldats étant passés dans le camp de l’armée rouge pendant la guerre y jouèrent un rôle essentiel en tant que cadres.

Le journal du NKDF, Freies Deutschland, avait même en bas et en haut des bandes noire, rouge et blanche, c’est-à-dire les couleurs impériales, visant clairement à ébranler les officiers de la Wehrmacht, ce qui fonctionna en partie, intégrant des gens éduqués et diplômés dans le camp démocratique, voire même parfois dans le camp communiste.

C’était une politique du pas à pas, rendu nécessaire par une vérité vite comprise : la population voyait la défaite de l’Allemagne nazie comme sa propre défaite. La situation était idéologiquement catastrophique.

Patriotes allemands! Combattez de manière encore plus déterminée pour l’unité, l’indépendance nationale et la paix!
Faites comme nous !
Formez des coopératives de maisons et de blocs de logements du Front National de l’Allemagne Démocratique

Il y avait toutefois un autre facteur essentiel. Le pays était occupé, divisé en quatre zones, la seule réellement détruite étant la partie orientale sous contrôle soviétique.

Le démarrage concret du Front va avoir ainsi deux aspects. Le premier, c’est qu’en raison de la défaite allemande, l’administration soviétique a les mains entièrement libres et soutient les exigences démocratiques.

Les expropriations des grands propriétaires terriens et des propriétaires nazis se firent sous l’égide de 10 000 commissions de réforme agraire à l’échelle communale (avec des membres à 56,8 % de sans parti, 23,9 % du KPD, 17,5 % du SPD, 1,8 % des libéraux du LPD et de la démocratie-chrétienne du CDU).

Les machines, les outillages, etc. furent intégrés dans des stations de prêts, alors que l’ensemble des terres fut alors géré par un fonds agraire, qui remit à l’État 0,61 millions d’hectares de forêts et 0,498 millions d’hectares de surfaces agricoles, à des particuliers 0,433 millions d’hectares de forêt et 1,757 million d’hectares de surfaces agricoles.

210 000 propriétés agricoles furent de ce fait créés (surtout au profit de réfugiés ou de paysans sans terre), alors que 122 000 déjà existantes voyaient leur surface s’agrandir. La distribution de terres de 1946 se divise comme suit : 41,3 % pour les paysans sans terre et les journaliers, 22 % pour les paysans pauvres, 31,6 % pour les déplacés, 2,3 % pour les petits métayers.

A cela s’ajoute que 460 000 paysans âgés reçurent un apport de forêt et plus de 183 000 un jardin.

1er Mai
Côte à côte pour l’unité des travailleurs!

Cet élan transformateur favorisait le front, qui était composé des communistes, des sociaux-démocrates, des démocrates-chrétiens du CDU, des libéraux du LDPD, puis du parti paysan démocratique et du parti national-démocrate.

Surtout, l’unité communiste et socialiste fonctionnait réellement.

Or, cela ne pouvait évidemment pas être du goût des impérialistes américains, britanniques et français. Ceux-ci exercèrent une pression gigantesque sur les sociaux-démocrates alors que se formait une lutte de lignes entre Kurt Schumacher et Otto Grotewohl.

La question de la victoire de l’un ou de l’autre déciderait de la suite.

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Le démarrage fulgurant bulgare et tchécoslovaque vers la démocratie populaire

La Bulgarie et la Tchécoslovaquie furent les deux pays modèles pour l’établissement du Front national-démocratique. Il y a plusieurs raisons très expressives pour cela. La première, c’est que ces deux pays sont historiquement proches de la Russie, pays considéré comme un grand frère slave capable de venir à la rescousse.

La seconde, c’est l’importance massive des Partis Communistes, celui de Bulgarie étant d’ailleurs dirigé par Georgi Dimitrov, le théoricien du Front populaire, du Front national démocratique et du principe de Démocratie populaire.

Un aspect essentiel était qui plus est que la Tchécoslovaquie était le seul pays de l’Est européen à être authentiquement capitaliste avant 1938, du moins dans sa partie tchèque (la Bohême-Moravie-Silésie) qui avait été marqué au XVe siècle par la tempête révolutionnaire protestante hussite, avec toute sa tradition démocratique.

Le Parti Communiste de Tchécoslovaquie avait mené la résistance pendant l’Occupation allemande du « protectorat de Bohême-Moravie » et le compte-rendu de son dirigeant Julius Fucik sur son emprisonnement deviendra le livre de langue tchèque le plus publié dans le monde.

Meeting en l’honneur de Julius Fucik

La partie slovaque, agraire et arriéré, avait quant à elle connu une grande résistance au nazisme, alors qu’un État fasciste slovaque fantoche avait été mis en place, sous la forme du « soulèvement national slovaque » commencé au milieu de l’année 1944.

Cette vague démocratique et populaire tchécoslovaque fit que les troupes soviétiques quittèrent le pays dès novembre 1945, alors que se forma un gouvernement de Front National.

Panneau du Front populaire avec les symboles des partis membres

Aux élections de 1946, le Parti Communiste de Tchécoslovaquie obtint un score de 38 %. Si on lui additionne le score du parti social-démocrate, le chiffre montre à 55,75 % ; si on y ajoute le score du parti socialiste national, plus au centre, on a alors un résultat de 79,41 % pour l’ensemble de la gauche et du Front national-démocratique.

Le dirigeant du Parti Communiste, Klement Gottwald, est premier ministre, le communiste Václav Nosek ministre de l’Intérieur, Ludvík Svoboda celui de la Défense.

Un événement significatif fut dans ce cadre l’établissement d’un décret par le chef du président de la République réinstaurée, le démocrate bourgeois Edvard Beneš, de l’expulsion des Allemands des Sudètes et des Hongrois de Slovaquie à moins de preuves d’actes antifascistes (aboutissant à l’expulsion de respectivement 2,6 millions et 400 000 personnes).

Affiche du Parti Communiste de Tchécoslovaquie

On notera par ailleurs que, en tant que pays membre des pays alliés, la Tchécoslovaquie, fait partie des vainqueurs officiels de la seconde guerre mondiale. Tel n’est pas le cas de la Bulgarie, pays allié des nazis avant que le Front patriotique ne renverse le régime le 9 septembre 1944 avec 30 000 partisans appuyés par un réseau par 200 000 personnes.

Le renversement fait directement suite à la déclaration de guerre de l’URSS à la Bulgarie. Le républicain bourgeois Kimon Georgiev devint alors président du Conseil et déclara l’armistice avec l’URSS.

L’ensemble de l’appareil d’État fut alors organisé par le Front patriotique ; l’épuration lors des six premiers mois de 1945 amena l’exécution de 2050 personnes et 6208 condamnations à de longues peines.

Georgi Dimitrov en 1945

Les élections de novembre 1945 marquèrent la victoire du Front avec 88 % et en juillet 1946 un référendum marqua l’abolition de la monarchie et l’instauration de la République. Cependant l’opposition s’était majoritairement abstenue et de nouvelles élections eurent lieu en octobre 1946, le Front obtenant 78 % des voix, la monarchie étant abolie lors d’un référendum en septembre 1947 (par 4 500 000 voix contre 175 000).

Georgi Dimitrov devint président du conseil, alors que Kimon Georgiev devint vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, puis ministre du Développement et des Travaux publics et enfin ministre du Développement.

En décembre 1947, toutes les entreprises non artisanales étaient nationalisées ; en août 1948, les communistes et les socialistes fusionnèrent en une seule organisation. Entre 1950 et 1953, la partie collectivisée des terres passe de 12 % à 61 %.

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Les tâches national-démocratiques menant aux démocraties populaires

L’objectif des Fronts nationaux-démocratiques a une double nature : national et démocratique. On peut considérer les tâches principales comme les suivantes :

– expropriation de la haute bourgeoisie ;

– nationalisation des principales entreprises du pays et du secteur bancaire ;

– condamnation des dirigeants et responsables militaires ;

– réforme agraire ;

– mise en place d’un nouvel appareil d’État ;

– génération de structures démocratiques populaires à tous les niveaux ;

– unifier les socialistes et les communistes en un seul Parti, unifier toutes les organisations ouvrières en général.

Ce dernier point est essentiel. Il est considéré comme l’élément déclencheur permettant tout le reste. Cela se reflète dans la position du Parti Communiste Français lors de son Xe congrès au milieu de l’année 1945 :

« Le Xe Congrès, au nom des 900 000 MEMBRES DU PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS, appelle solennellement les camarades socialistes à réaliser, avec les communistes, leur UNITÉ au sein d’un GRAND PARTI OUVRIER FRANÇAIS ; cette UNITÉ donnera à la classe ouvrière de notre pays une force, un rayonnement, une capacité d’action et de rassemblement incomparable.

Et l’UNITÉ politique de la classe ouvrière, loin d’être un obstacle à la réalisation d’une large UNITÉ NATIONALE, en sera, au contraire, le plus sûr garant, car un GRAND PARTI OUVRIER FRANÇAIS, réalisant en son sein l’UNITÉ politique de la classe ouvrière, pourra jouer un rôle décisif dans le rassemblement de toutes les forces progressives démocratiques du pays.

EN AVANT, donc, sous le drapeau de l’UNITÉ de la classe ouvrière et de l’Union de la Nation française !

EN AVANT, avec courage, audace et confiance pour la RENAISSANCE DE L’ÉCONOMIE et de la DÉMOCRATIE dans notre PAYS, pour une FRANCE LIBRE, GRANDE, FORTE ET DÉMOCRATIQUE.

EN AVANT POUR LA RÉALISATION DU GRAND PARTI OUVRIER FRANÇAIS !

VIVE LE PARTI COMMUNISTE FRANÇAIS, auquel par milliers et par milliers, hommes et femmes de FRANCE, vous donnerez votre adhésion pour travailler à la grandeur de la France et à la puissance de la République.

VIVE LA FRANCE !

VIVE LA RÉPUBLIQUE ! »

Si le positionnement français correspondait toutefois en apparence à celui de tous les autres Partis Communistes dans leur ligne national-démocratique, le cadre politique réel avait sa particularité.

Il y a en effet quatre cas de figures concernant la situation, modifiant de fait la réalisation possible des tâches.

Dans la majeure partie de l’Europe de l’Est, l’armée rouge avait été l’élément central pour vaincre le régime et ses troupes étaient sur place. C’était le cas pour la Bulgarie, la Hongrie, la Pologne, la Roumanie, la Tchécoslovaquie, la partie orientale de l’Allemagne.

La milice populaire en Pologne

Dans deux pays, le mouvement armé de résistance dirigé par le Parti Communiste avait joué le rôle principal et l’armée rouge n’était pas présente : l’Albanie et la Yougoslavie.

Dans un pays, la guerre anti-nazie s’était transformé en guerre contre un régime passé sous la coupe de l’impérialisme britannique, puis de l’impérialisme américain. C’est la Grèce où la guerre civile va durer plusieurs années.

Enfin, dans deux pays, en France et en Italie, la Résistance dirigée par les Communistes a intégré le Front mis en place par la bourgeoisie réinstaurant un appareil d’État à son service.

Les tâches national-démocratiques sont ainsi :

– réalisables dans la majeure partie de l’Europe de l’Est en raison de l’hégémonie militaire de l’armée rouge, à condition d’avoir un Front suffisamment puissant pour donner un élan ;

– réalisables en Albanie et en Yougoslavie de par l’hégémonie de la Résistance dirigée par les communistes :

– non réalisables en Grèce en raison de la guerre civile en cours ;

– non réalisables en France et en Italie en raison de l’existence d’un État dirigé par la bourgeoisie.

Ces différences de situation sont essentielles et vont décider de tout le développement à suivre.

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